Il ne faut pas oublier enfin que, si les nodules polymétalliques existent, leur exploitation sous 4 500 ou 5 500 m d'eau sera très difficile et horriblement coûteuse, si bien que nul ne peut dire actuellement si les nodules seront exploités un jour...

Yvonne Rebeyrol

Physique

La fusion et ses mystères

Depuis plus de trente ans, des chercheurs tentent de contrôler la fusion thermonucléaire, source potentielle d'une énergie pratiquement infinie. Ces efforts n'ont toujours pas permis de prouver qu'une production d'énergie soit techniquement possible, et aucun espoir sérieux n'existe de lui voir jouer un rôle économique avant 2020. Pourtant, les recherches continuent, avec des moyens importants qui ont exigé, pour les pays d'Europe, une mise en commun de leurs ressources.

Des progrès marquants ont été récemment obtenus, qui tiennent surtout à la mise en service de deux appareils nouveaux ; en 1982, le Tokamak Fusion Test Reactor (TFTR) à Princeton (New Jersey), aux États-Unis ; puis, en 1983, le Joint European Torus (JET) à Culham (Oxfordshire), en Grande-Bretagne. Inauguré officiellement en avril 1984, le JET, conçu et construit sous l'égide de la CEE, est actuellement le plus puissant outil d'étude de la fusion, et donne aux Européens une primauté qui chagrine quelques esprits outre-Atlantique. Aussi les Américains préparent-ils activement la génération suivante : leur Tokamak Fusion Confinement Experiment (TFCX) pourrait voir sa construction commencer dès 1986, tandis que celle de la future machine européenne, le Next European Torus (NET), ne débutera pas avant 1990.

L'équivalence d'Einstein

La fusion — qui fournit l'énergie des étoiles et des bombes H — est l'exact opposé de la fission, mise en œuvre dans les bombes A et dans les centrales nucléaires. Dans la fission, un gros noyau atomique — en pratique un noyau d'uranium ou de plutonium — se casse en deux fragments. La somme des masses des noyaux fils est inférieure à celle de leur parent. En vertu de l'équivalence einsteinienne entre masse et énergie, la différence est transformée en énergie. Dans les bombes atomiques, cette énergie est brutalement libérée ; dans les centrales, elle vaporise de l'eau, qui actionne une turbine pour produire de l'électricité.

À l'inverse, la fusion met en œuvre deux noyaux légers, en pratique deux isotopes de l'hydrogène. Si ces deux noyaux viennent au contact l'un de l'autre, malgré la force répulsive qui s'exerce entre eux, ils se fondent en un noyau unique qui, cette fois-ci, est moins lourd que les deux noyaux de départ. Comme précédemment, le surcroît de masse apparaît sous forme d'énergie. L'utilisation destructrice n'a pas soulevé de trop grandes difficultés techniques, mais une production contrôlée d'énergie est plus ardue. C'est elle, ou plus exactement les conditions physiques de son contrôle, qui est cherchée dans les machines dont il a été question ci-dessus. Tous ces appareils sont des tokamaks, de grandes chambres annulaires dans lesquelles un gaz porté à des températures qui s'expriment en millions de degrés (plasma) est comprimé par de très forts champs magnétiques pour qu'il n'ait aucun contact avec les parois, ce qui le refroidirait instantanément. D'autres champs magnétiques induisent dans l'anneau de plasma un courant électrique de plusieurs milliers d'ampères, qui contribue à son échauffement : malheureusement, il n'y suffit pas, et des moyens supplémentaires de chauffage doivent être mis en place. Car le problème majeur de la fusion thermonucléaire est là : pour que les noyaux à fusionner viennent en contact les uns avec les autres, la matière fusible doit être portée à des températures incompatibles avec l'existence de tout récipient matériel.

Pesanteur

Pour le Soleil et les étoiles, leur énorme pesanteur compense la non moins énorme pression de dilatation que les millions de degrés du centre de l'astre engendrent dans les couches superficielles. Cette pesanteur empêche l'astre d'exploser. Sur terre il fallait trouver autre chose. Ce sont des champs magnétiques qu'on charge de s'opposer à la dilatation. Plusieurs configurations de champs magnétiques ont été et sont encore étudiées, mais la plus prometteuse est le tokamak, invention soviétique — dans laquelle Andrei Sakharov a joué un rôle important. Une seconde voie d'approche, sans champ magnétique, est aussi étudiée : le confinement inertiel, où l'on tente de comprimer et de chauffer de microscopiques billes de matière avec de puissants lasers ou des faisceaux de particules, d'une manière si rapide que les températures nécessaires à la fusion sont atteintes avant que la bille n'ait eu le temps de se dilater. En d'autres termes, on réalise de microscopiques bombes H.