SDN
sigle de Société des Nations
Organisation internationale créée par le traité de Versailles (1919) et qui a siégé à Genève de 1920 à 1946.
1. Origines
La Société des Nations est la première tentative pour faire fonctionner une organisation universelle des États, principalement créée pour régler les problèmes de sécurité collective. Il s'agissait en quelque sorte de prolonger le gouvernement de fait des Alliés durant la Première Guerre mondiale dans une organisation permanente. À l'origine de la SDN, il y a les conditions de la paix telles qu'exposées par le président Woodrow Wilson le 8 janvier 1918 dans son discours des « Quatorze Points ». Le quatorzième point précisait qu'une « association générale des nations devra être formée sur la base de pactes spécifiques afin d'assurer les garanties mutuelles d'indépendance politique et d'intégrité territoriale, aussi bien aux petits États qu'aux grands ».
Le 25 janvier 1919, la session plénière de la conférence de la paix réunissant à Paris l’ensemble des puissances victorieuses adopte une résolution prévoyant que le « pacte de la SDN » ferait partie intégrante des traités de paix. Ce pacte est inclus dans le texte du traité de Versailles, le 28 juin 1919, ainsi que dans ceux de Saint-Germain, de Trianon et de Neuilly ; il en forme en fait les 26 premiers articles.
La SDN entre en application le 10 janvier 1920 après la ratification du traité de Versailles par l'Allemagne et trois des principaux associés. C'est à Paris qu'a lieu, le 16 janvier 1920, sur convocation du président Wilson, la première réunion du Conseil de la Société des Nations.
2. Principes
Les principes de base de la SDN sont l'interdiction de la guerre, la justice, le respect du droit international. Les membres s'engagent à respecter et à maintenir l'intégrité territoriale et l'indépendance politique de tous les États membres contre toute agression extérieure. Il ne s'agit donc pas d'un simple pacte de non-agression, mais bien d'un engagement sur une action positive de secours au profit du pays agressé. L'article 16 précise même qu'un gouvernement ayant eu recours à la guerre, en contradiction des principes de la charte, est considéré comme ayant commis un acte de guerre contre tous les membres de la SDN. Certaines sanctions non militaires sont alors automatiques et des sanctions militaires peuvent être recommandées par le Conseil. Dès le début, on observe néanmoins une vive répugnance des différents pays à utiliser les mécanismes des sanctions.
3. Organisation
Les membres de la SDN sont d'abord les États vainqueurs de la Première Guerre mondiale et les États neutres. Ses organes sont l'Assemblée, réunissant tous les États membres qui disposent chacun d’une voix, le Conseil, véritable exécutif, formé de 5 membres permanents (France, Grande-Bretagne, Italie, Japon, puis Chine à la place des États-Unis) et de 4 membres non permanents élus (chiffre porté ensuite à 6, 9 et 11), le secrétariat permanent, divers bureaux ou comités spécialisés, en particulier le Bureau international du travail (BIT) et la Cour de justice internationale (en fait, la Cour de La Haye, créée en 1899, est intégrée dans la SDN). À l'Assemblée comme au Conseil, pour les questions de fond, le vote se fait à l'unanimité. Ne font partie de la SDN ni l'Allemagne vaincue (admise finalement en 1926 avec un siège permanent au Conseil) ni la Russie, en pleine révolution, ni les États-Unis, dont le Sénat a refusé de ratifier le traité de Versailles (20 novembre 1919).
4. Heurs et malheurs de la SDN
Une fois la paix revenue, les tendances isolationnistes ont en effet repris le dessus aux États-Unis et nombreux sont ceux qui craignent que les engagements contenus dans le pacte n'entraînent le gouvernement américain dans des litiges liés au statu quo territorial en Europe. De plus, certains jugent que les « prérogatives » des États-Unis en Occident (conformément à la doctrine Monroe) ne sont pas entièrement sauvegardées par le pacte de la SDN, trop égalitaire à leurs yeux. Le retrait des Américains va jouer un rôle capital dans l'histoire de la SDN, la crédibilité du mécanisme des sanctions s'en trouvant en effet, d'entrée de jeu, très affaiblie.
La question des territoires sous mandat est, dès l'origine, un ferment de discorde. La SDN part du principe que certains peuples ne sont pas capables de se diriger eux-mêmes dans les conditions de l'époque, et elle attribue ainsi des territoires aux principales puissances : Togo, Cameroun oriental, Syrie et Liban pour la France ; Cameroun occidental, Sud-Ouest et Sud-Est africains – anciennes colonies allemandes –, Iraq et Palestine pour la Grande-Bretagne ; Rwanda et Urundi pour la Belgique ; ex-possessions allemandes du Pacifique pour le Japon, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.
Pourtant, jusqu'en 1931, le bilan ne s'avère pas complètement négatif. La SDN joue notamment un rôle dans les affaires des îles Åland (→ Ahvenanmaa), que se disputent la Finlande et la Suède, de la haute Silésie, qui oppose l'Allemagne à la Pologne, de Corfou à propos de la délimitation de la frontière albanaise, de Mossoul, province contestée entre les Irakiens et les Turcs. Elle permet en outre de résoudre une grave crise gréco-bulgare en 1925. En revanche, le règlement du conflit gréco-turc lui échappe, et elle est impuissante, du fait du veto français, lors de la réoccupation de la Ruhr par les Alliés.
5. L'échec de la SDN
Le déclin de la SDN s’amorce avec le début des années 1930. La conférence mondiale du désarmement à Genève (1932-1934) échoue. En 1933, le Japon, qui avait impunément envahi la Mandchourie (1931), puis l'Allemagne, devenue nazie, quittent la SDN. L'admission de l'URSS (1934) ne compense pas ces départs. En avril 1935, la conférence de Stresa constitue la dernière tentative internationale de faire reconnaître le traité de Versailles, mais si les démocraties ont un temps l'impression d'avoir ramené dans leur camp l'Italie de Mussolini, elles savent désormais que l'Allemagne de Hitler ne tient plus aucun compte de la SDN ; de plus, la France, la Grande-Bretagne et l'Italie affirment qu'elles s'opposeront par tous les moyens au danger représenté, selon elles, par l'Union soviétique, ce qui constitue un revirement diplomatique incohérent de la France et de la Grande-Bretagne. Enfin, la France laisse entendre à l'Italie qu'elle n'interviendra pas contre elle en Éthiopie. Ainsi, la conférence de Stresa non seulement échoue à freiner les ambitions du Duce en Éthiopie mais l'encourage plutôt à l'action.
À cet égard, la guerre italo-éthiopienne (1935-1936), opposant deux États membres, marque la faillite de la sécurité collective : contre l'agression italienne, la SDN prend des sanctions inefficaces, et l'Italie se retire à son tour. Pire, elle se rapproche de l'Allemagne, qui seule l’a soutenue dans son entreprise coloniale.
Dès lors, la SDN assiste sans réagir aux crises qui se multiplient jusqu'au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, de la guerre civile d’Espagne à l’invasion de la Pologne par l’Allemagne. Sa dernière initiative est d'expulser l'URSS après son invasion de la Finlande, le 30 novembre 1939.
En avril 1946, la SDN disparaît officiellement au profit de l'Organisation des Nations unies (ONU). La Cour permanente de justice internationale, créée dans le cadre de la SDN, a survécu jusqu'à nos jours, sous le nom de Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye.
Pour en savoir plus, voir l'article désarmement.