Les avantages de ces rosiers sont tels que le groupe multinational Moët et Chandon, averti de leurs performances, a pris à la fois une participation dans la société Delbard et le contrôle de Armstrong Nurseries — le plus grand rosiériste américain —, afin de marier ces deux fleuristes pour transférer au second la technologie du premier. Premier résultat de ce mariage : les jeux Olympiques de Los Angeles ont été fleuris avec ces nouvelles roses in vitro à la française. Vu l'importance financière du contrat, ce record olympique valait largement une médaille d'or...
Grain d'eau
Autre exemple d'une merveilleuse histoire arrivée en 1984 chez un producteur de roses : le fantastique succès du grain d'eau, mis au point par les pépinières Léon Beck (un petit rosiériste alsacien qui emploie 55 personnes). Il s'agit d'une substance synthétique — des grains de plastique à l'aspect de gros sel — qui jouissent d'une propriété stupéfiante : ces grains sont capables d'absorber jusqu'à 700 fois leur poids d'eau — une eau qui est ensuite restituée peu à peu, en fonction des besoins des racines avec lesquelles ils sont en contact dans le sol. Dès 1984, les pépinières Léon Beck auront réalisé un chiffre d'affaires de 3,5 millions de F grâce à ces grains miraculeux. Inventés par hasard, déjà commercialisés en Allemagne, Suisse, Belgique, États-Unis et Canada, ils constituent la solution idéale pour l'entretien des plantes d'appartement durant les vacances, et ils intéressent beaucoup les riches (et désertiques) États pétroliers, soucieux de fertiliser leur sol.
Dans un tout autre domaine — mais toujours dans le secteur des hautes technologies appliquées au secteur agricole —, il faut signaler l'inauguration en juillet, par le secrétaire d'État au Budget Henri Emmanuelli, de la future usine de Soustons (dans les Landes), qui produira bientôt de l'acétone-butanol par fermentation de la paille, des tiges de maïs et des déchets forestiers. Cet acétone-butanol, dit tiers solvant, permet de mélanger de l'alcool à l'essence sans modification des moteurs d'automobiles. La France n'a toujours pas de pétrole mais elle a des idées, et les résidus agricoles vont lui permettre d'alléger sa facture pétrolière.
Laser et informatique
Nous paierons (peut-être) notre essence moins cher, et notre champagne aussi : grâce au laser, les Établissements Collard CMV, à Bouzy, viennent, avec l'aide du groupe Mumm, de mettre au point une machine — déjà exportée dans les vignobles californiens — qui permet de planter un hectare de vigne en 56 heures de travail (au lieu de 1 000 heures par les méthodes habituelles). De plus, cette planteuse, guidée par un rayon laser, assure un alignement absolu des ceps. D'où une vigne aux rangs parfaitement parallèles, adaptée aux mécanisations futures type machine à vendanger. Forts du succès de leur planteuse au laser MPV2, les Établissements Collard CMV réfléchissent actuellement à la mise au point d'un tracteur radioguidé qui permettra bientôt de supprimer toute main-d'œuvre humaine dans les sillons : muni d'une radiocommande, l'agriculteur commandera son tracteur depuis sa terrasse ou depuis le bout de son champ. La modernisation de l'appareil productif risque hélas de créer du chômage.
Après le laser, l'informatique — déjà omniprésente d'ailleurs en agriculture, grâce au Minitel qui diffusera de plus en plus à domicile et en temps réel les informations nécessaires aux professionnels, et permet par exemple depuis cette année aux éleveurs de connaître à chaque instant les cours de la viande. Mais l'INRA, l'Institut national de la recherche agronomique, a songé (à titre expérimental) aux producteurs de tomates et créé la banque de données TOM, première application agricole du système expert. Il s'agit d'améliorer le diagnostic des maladies des cultures, afin de lutter contre elles. Grâce à TOM, le producteur n'a qu'à décrire les symptômes de la maladie d'une tomate : le système expert établit son diagnostic en indiquant les causes possibles avec leur degré de probabilité. Il suggère les méthodes de lutte les plus adéquates et donne des conseils pour les prochaines cultures.
Connaissances disponibles
Inauguré en 1984, TOM sera progressivement étendu à d'autres cultures, mettant pour la première fois en temps réel, à la disposition de tout agriculteur équipé d'un Minitel, une masse de connaissances et de compétences auparavant éparpillées en de multiples endroits inaccessibles.