C'est véritablement une page de la révolution guinéenne qui se tourne avec ce second événement. Ismaël Touré, considéré comme le second personnage de l'État, avait une réputation d'accusateur public no 1. Instigateur de nombreux procès politiques, à l'instruction desquels il contribua personnellement, exerçant une influence incontestable sur le président qu'il poussa toujours à l'intransigeance, Ismaël Touré a eu, dit-on, une action directe dans la mort lente de l'ancien ministre de l'Intérieur Keita Fodeba et sans doute dans celle de Diallo Telli, ancien secrétaire général de l'OUA.
Brutal, décidé à frapper très fort les tièdes, il est à l'origine de beaucoup de parodies de justice, réglées en public par ses soins pour terroriser les opposants potentiels, méthode qui lui permit d'écarter beaucoup de responsables politiques qu'il considérait comme des concurrents éventuels. Doctrinaire du parti unique dont il était le principal maître à penser, il organisa le colloque idéologique international qui, en septembre 1978, précéda le onzième congrès du parti. C'est lui également qui encouragea le président guinéen à partir en guerre contre les Peuhls, ethnie du centre du pays, qui eurent beaucoup à souffrir de la répression gouvernementale.
En mai, le come back d'Ismaël Touré sur la scène politique guinéenne met en évidence l'attachement du président Sékou Touré à celui qui reste l'un des derniers compagnons de route de la révolution amorcée dès 1958.
Réconciliation
Préparé par la visite d'Edgar Faure à Conakry en novembre 1978, la visite officielle de Giscard d'Estaing est un succès de prestige pour l'hôte et pour le visiteur. En dépit de tous les obstacles, le chef de l'État français a tout fait pour que ce voyage, plusieurs fois reporté, ne soit pas annulé. Il voulait, après vingt ans de brouille franco-guinéenne, effacer le souvenir de l'affrontement de Gaulle-Sékou Touré de l'automne 1958, et frayer le chemin aux entreprises françaises dans un pays qui recèle les plus importantes réserves mondiales connues de bauxite.
Il ne semble pourtant pas que le voyage du président Giscard d'Estaing ait eu des conséquences immédiates, ni dans le domaine des affaires, ni dans celui du respect des droits de l'homme. Le camp Boiro demeure un des hauts lieux de l'univers concentrationnaire en Afrique, comme l'a clairement indiqué Amnesty International. Les droits de l'homme sont toujours bafoués ouvertement à Conakry, où, fin juin 1979, Mgr Tchidimbo, archevêque de la ville, ressortissant français, reste emprisonné, en dépit de toutes les promesses de remise en liberté.
Cependant, en mars 1979, EDF a repris ses activités en Guinée et va réexaminer le projet de barrage hydroélectrique de Souapiti. Celui-ci doit permettre d'utiliser les eaux du fleuve Konkouré pour produire l'énergie nécessaire à la fabrication de l'alumine, au lieu d'exporter la bauxite vers le Cameroun ou l'Europe. En revanche, nul contrat important n'a suivi la visite officielle du président français.
Voyages
En Afrique et au Proche-Orient, Sékou Touré mène une politique très active. Il participe au sommet de l'OUA, à Khartoum (18-22 juillet 1978), se rendant personnellement à ces assises panafricaines pour la première fois depuis treize ans. Il se rend en visite officielle en Gambie (27-29 juillet), puis dans l'archipel du Cap-Vert. Il reçoit Richard Moose, sous-secrétaire d'État américain, du 2 au 5 août. Il se déplace pour rencontrer le roi du Maroc à Marrakech du 14 au 18 janvier 1979 et le président ivoirien Houphouët-Boigny du 26 février au 1er mars dans son village natal de Yamoussoukro.
C'est le rapprochement guinéo-ivoirien et le rapprochement sénégalo-guinéen qui expliquent la mise en veilleuse de l'opposition guinéenne. Très nombreux en Côte-d'Ivoire et au Sénégal, les exilés politiques guinéens sont en effet conviés par les dirigeants de ces pays à cesser leurs activités. En rentrant au sein de la famille ouest-africaine francophone, le président Sékou Touré (pour son propre compte) a marqué un point important.
Guinée-Bissau
Madina do Boe. 540 000. 15. *1,5 %.
Économie. PIB (70) : 261. Énerg. (76) : 58. CE (70) : 3 %.
Information. (75) : 1 quotidien ; tirage global : 6 000. (75) : 10 000. (72) : 3 000 fauteuils ; fréquentation : 0,3 M. (73) : 3 000.
Éducation. (75). Prim. : 68 216. Sec. et techn. : 2 139.
Institutions. Indépendance proclamée le 24 septembre 1973 par l'Assemblée nationale populaire (ancien territoire portugais). Constitution de 1973. Chef de l'État : Luis de Almeida Cabral, réélu le 13 mars 1977.
Guinée équatoriale
Malabo. 320 000. 12. *1,7 %.
Économie. PIB (70) : 267. Énerg. (76) : 94.
Information. (75) : *7 800.
Santé. (75) : 5.
Éducation. Prim. (73) : 35 977. Sec. et techn. (72) : *5 500.
Institutions. République indépendante le 12 octobre 1968. Nouvelle Constitution de 1973. Président : Francisco Macias Nguema, élu le 29 septembre 1968, nommé à vie le 14 juillet 1972. Vice-président : Edmundo Bosio Dioco.
Haute-Volta
Ouagadougou. 6 320 000. 23. *2,3 %.
Économie. PIB (74) : 77. Production (74) : A 42 + I 17 + S 41. Énerg. (76) : 18. CE (74) : 8 %.
Transports. (75) : 9 500 + 10 100.
Information. (75) : 1 quotidien ; tirage global : 2 000. (75) : 100 000. (70) : 5 500. (75) : 6 000.
Santé. (76) : 108.
Éducation. (75). Prim. : 141 177. Sec. et techn. : 16 227. Sup. : 1 067.
Armée. : 8 070.
Institutions. Indépendance le 5 août 1960. République (11 décembre 1958). Nouvelle Constitution approuvée par référendum le 27 novembre 1977. Président de la République : général Sangoulé Lamizana, élu le 28 mai 1978 pour un mandat de cinq ans. Premier ministre : Joseph Conombo.
Kenya
Nairobi. 14 340 000. 25. *3,3 %.
Économie. PIB (76) : 246. Production (76) : A 31 + I 18 + S 51. Énerg. (76) : 152. CE (76) : 19 %.
Transports. (76) : 3 653 Mt/km. (75) : 98 300 + 69 200.
Information. (75) : 3 quotidiens ; tirage global : 134 000. (75) : 511 000. (75) : *38 000. (75) : 24 000 fauteuils ; fréquentation : 5,7 M. (76) : 132 000.
Santé. (73) : 766. Mté inf. (73) : 51,4.
Éducation. (76). Prim. : 2 894 617. Sec. et techn. : 289 056. Sup. (74) : 11 351.
Armée. : 9 100.
Institutions. État indépendant le 12 décembre 1963. République proclamée le 12 décembre 1964. Constitution de 1963, révisée en 1964. Président de la République et chef de l'exécutif : Daniel Arap Moï, nommé le 10 octobre 1978 ; succède à Jomo Kenyatta, décédé. Vice-président : Mwai Kibaki.
Arap Moï succède à Kenyatta
Échéance redoutée, la disparition, le 22 août 1978, de Jomo Kenyatta, champion de l'indépendance de son pays, figure de proue du mouvement panafricain en Afrique orientale, devait, dans l'esprit de beaucoup d'observateurs, ouvrir une ère d'incertitude, voire même d'instabilité. En réalité, la succession se déroule sans heurts et échoit à Daniel Arap Moï, vice-président et fidèle compagnon de route du défunt.
Continuité
Après avoir constitutionnellement assuré l'intérim de la présidence, Daniel Arap Moï a d'abord été élu à l'unanimité président de la Kenya African National Union (KANU), parti unique, puis désigné comme candidat unique à la magistrature suprême, à laquelle il est nommé le 10 octobre 1978 sans recours à aucun scrutin populaire.