traités d'Utrecht (1713-1715)
Traités conclus entre la France et l'Espagne, d'une part, et les puissances de la troisième coalition européenne (moins l'Empire), d'autre part, et qui mettent fin à la guerre de la Succession d'Espagne.
1. La fin de la guerre
À l'issue du congrès de la paix qui s'ouvre à Utrecht le 29 janvier 1712, Louis XIV signe des traités séparés avec l'Angleterre, les Provinces-Unies, la Savoie, le Portugal et la Prusse le 11 avril 1713. À son tour, Philippe V d'Espagne traite avec l'Angleterre et le duc de Savoie (13 juillet 1713), les Provinces-Unies (26 juin 1714) et le Portugal (6 février 1715).
2. Les clauses des traités
2.1. Sauvegarde des conquêtes de la France
Par ces traités, Louis XIV obtient d'une part que Philippe V soit reconnu comme roi d'Espagne et qu'il conserve l'Amérique espagnole, et d'autre part que les frontières de la France demeurent ce qu'elles étaient en 1700, à la veille des hostilités. Mais les puissances signataires lui imposent la renonciation de Philippe V à tous ses droits à la couronne de France, faisant ainsi obstacle à la réunion de la France et de l'Espagne, et obtiennent de lui d'importantes concessions territoriales et commerciales.
2.2. Les prémices de l'ascension anglaise
L'Angleterre est la plus grande bénéficiaire de ces traités : en échange de la reconnaissance de Philippe V, elle obtient la reconnaissance de la reine Anne et celle de la succession protestante ainsi que l'abandon du soutien de la France aux Stuarts ; en Amérique, Louis XIV lui cède l'île de Saint-Christophe, les territoires de la baie d'Hudson, l'Acadie et Terre-Neuve (sous réserve du droit de pêche maintenu aux marins français qui pourront en outre débarquer sur la côte nord-est et nord-ouest [dites dès lors French Shore] pour sécher le poisson) ; en Europe, elle obtient la démolition des fortifications de Dunkerque et se fait reconnaître par Philippe V la possession de Gibraltar et de Minorque.
Enfin et surtout, elle se fait concéder des avantages commerciaux de premier ordre : la France lui accorde le rétablissement des tarifs douaniers de 1664 et le droit de jouir des conditions de la nation la plus favorisée, tandis que l'Espagne lui confirme la concession faite dès mars 1713 du double privilège du vaisseau de permission et de l'asiento (pour trente ans) dans l'Amérique espagnole.
2.3. Les autres clauses
Les Provinces-Unies conservent le droit de tenir garnison dans les places de la Barrière (→ traités de la Barrière), dont le nombre est fixé par les traités d'Utrecht (30 janvier 1713) et d'Anvers (15 novembre 1715) ; Louis XIV leur restitue Tournai, Menin, Ypres et Furnes en échange de Lille, Aire, Béthune et Saint-Venant ; enfin les Pays-Bas espagnols sont cédés aux Provinces-Unies à titre transitoire, car elles devront les remettre à l'empereur Charles VI lorsque ce dernier traitera à Rastatt (6 mars 1714).
L'Électeur de Bavière reçoit la promesse d'être rétabli dans ses États et dignités et de recevoir la Sardaigne lorsque l'empereur traitera (cette dernière clause ne sera pas respectée à Rastatt).
Le duc de Savoie, Victor-Amédée II, recouvre Nice et la Savoie perdus pendant la guerre et cède à Louis XIV la vallée de Barcelonnette, en échange de la partie du Dauphiné située à l'est des Alpes ; il reçoit en outre, de Philippe V, la Sicile avec le titre de roi.
L'Électeur de Brandebourg, Frédéric-Guillaume Ier, se voit reconnaître le titre de roi de Prusse et la souveraineté sur la principauté de Neuchâtel et Valengin, en échange de la principauté d'Orange, cédée à la France, et acquiert la Gueldre espagnole.
Enfin, le roi de Portugal obtient un territoire constitué aux limites du Brésil et aux dépens de la Guyane française.
2.4. Un nouvel équilibre européen
Ces traités établissent la prépondérance maritime de l'Angleterre et sanctionnent le recul des Provinces-Unies. Avec le traité de Rastatt, ils marquent une date importante dans l'histoire de l'Europe, car ils instaurent un nouvel équilibre européen entre des États dont aucun, pas même l'un des trois plus puissants (à savoir l'Angleterre, la France et l'Autriche), ne peut prétendre imposer son hégémonie sur le continent.
Pour en savoir plus, voir l'article guerre de la Succession d'Espagne.