Provinces-Unies
Nom porté par la partie septentrionale des Pays-Bas de 1579 à 1795 (→ histoire des Pays-Bas). Les Provinces-Unies réunissent les sept provinces calvinistes du Nord (→ Zélande, Hollande, Utrecht, Overijssel, Frise, Groningue [1594] et Gueldre), qui concluent le 23 janvier 1579 l'Union d'Utrecht consacrant leur sécession par rapport à la couronne espagnole ; elles ne se constituent vraiment en État qu'en 1581, lorsqu'elles votent la déchéance de Philippe II. L'Espagne reconnaît l'indépendance des Provinces-Unies par le traité de Münster (mai 1648).
1. Une économie florissante
L'économie néerlandaise fait des progrès considérables au temps de la guerre de l'Indépendance. Après la chute d'Anvers, les marchands émigrés des Pays-Bas méridionaux s'installent à Middelburg, Leyde ou Amsterdam. Ils apportent capitaux, techniques, compétence et entregent international.
Ils trouvent en Hollande et en Zélande une batellerie exercée et des équipages habiles. Les navires sont nombreux (on en lance jusqu'à 1 000 par an) et d'un tonnage important. Du fait des disettes de l'Europe méridionale, les Hollandais écoulent, entre 1580 et 1650, en Espagne, en France et en Italie, les grains de la Baltique, ainsi que le fer et le bois de Suède. Ils importent en retour du vin, des fruits et des métaux précieux. Leur horizon commercial s'élargit jusqu'à Arkhangelsk (Russie), mais aussi jusqu'en Guinée, aux îles de la Sonde, à l'Amérique du Nord et au Brésil.
La Compagnie hollandaise des Indes orientales, fondée à l'instigation d'Oldenbarnevelt (1602), dotée d'une puissante flotte de guerre, et celle des Indes occidentales, créée par W. Usselincx en 1621, sont les instruments de cette expansion, qui entraîne la constitution d'un Empire colonial néerlandais (fondation de Batavia [→ Jakarta] en 1619, capitale des Indes néerlandaises).
Pour favoriser cette expansion, des banques se créent à Amsterdam, à Delft, à Rotterdam (1609). L'abondance de l'argent en circulation irrigue l'économie nationale. Des investissements permettent l'assèchement des polders au N.-O. d'Amsterdam et de nouvelles cultures sur les terres gagnées sur la mer. Parallèlement, les industries dérivées du commerce se développent (sucreries d'Amsterdam, draperies de Leyde).
2. La vie politique
Si la prospérité économique des Provinces-Unies est déjà un sujet d'étonnement, leur régime républicain l'est encore plus à l'époque des monarchies absolues.
Depuis sa sécession, le nouvel État s'est organisé. Chaque province possède ses états (organes délibératifs), un pensionnaire (équivalent d'un Premier ministre), qui assure le secrétariat des états, et un stathouder (gouverneur), qui commande l'armée, souvent au niveau fédéral.
Le grand pensionnaire (qui est en même temps le pensionnaire de Hollande), élu pour cinq ans et rééligible, est le principal personnage de l'État, chargé d'exécuter les décisions prises par les états généraux (40 députés des états provinciaux), tandis qu'un Conseil d'État (12 députés) contrôle l'armée et les finances.
Cependant, la bonne marche de ces institutions reste longtemps compromise par le conflit que se livrent, dès les premières années du xviie siècle, le parti orangiste (provinces orientales) et le parti républicain (Hollande et Zélande). Les nécessités de la guerre permettent aux princes d'Orange d'occuper la charge de stathouder dans la plupart des provinces et, par ce biais, d'acquérir un fort pouvoir personnel.
La paix venue, Guillaume II (stathouder de 1647 à 1650) songe à la royauté et n'hésite pas à allumer la guerre civile. À sa mort, les sept provinces décident de ne plus nommer de stathouder, et l'oligarchie commerçante arrive au pouvoir avec Jean de Witt, grand pensionnaire de 1653 à 1672.
L'essor rapide de l'Empire néerlandais et les interventions multiples des Provinces-Unies contre le Danemark (1646), la Suède (1655-1660) et l'Angleterre (1652-1654 et 1665-1667) assurent au pays la maîtrise des mers. Pourtant, en 1672, l'invasion française (→ guerre de Hollande) provoque la chute de Jean de Witt et la restauration de Guillaume III d'Orange.
Le stathoudérat est proclamé héréditaire dans sa famille ; mais, devenu roi d'Angleterre (1689), Guillaume III sacrifie les intérêts de la République à sa politique anglaise. À sa mort (1702), les Provinces-Unies se passent de stathouder jusqu'à la guerre de la Succession d'Autriche (1740-1747) et à l'occupation française, qui provoquent la restauration de la maison d'Orange (1747).
L'échec des réformes proposées par le stathouder, l'essor des idées démocratiques (mouvement des patriotes) et l'issue désastreuse de la quatrième guerre anglo-néerlandaise (1780-1784) aboutissent aux troubles révolutionnaires de 1786. Obligé de s'enfuir, Guillaume V est restauré grâce à l'aide étrangère. En 1795, l'invasion française (dans le cadre des guerres post-révolutionnaires), bien accueillie par les démocrates, provoque la chute d'un régime dont le caractère monarchique n'a fait que s'accentuer depuis 1747. Les Provinces-Unies deviennent la République batave.