Pour le CSA, il s'agissait d'étudier la compatibilité de cette opération avec la législation sur la concentration multimédia (loi de 1986) et d'évaluer l'aptitude d'Hachette à respecter les contraintes qui pèsent sur la chaîne (cahier des charges), tout en proposant des orientations nouvelles. Un débat s'est alors ouvert sur l'opportunité de redéfinir le paysage audiovisuel français. Des hypothèses très variées, allant de l'association de M6 avec La Cinq jusqu'à la disparition pure et simple de cette dernière suivie du transfert de son réseau à La Sept, ont été alors envisagées. À cette occasion, on a également mis en lumière les difficultés financières des télévisions commerciales, sans oublier de rappeler la précarité de l'équilibre comptable de TF1.

Le 23 octobre, la décision du CSA en faveur de Hachette a provisoirement refermé le dossier. Le capital de La Cinq est désormais réparti de la façon suivante : Hachette possède 25 % des parts (au lieu de 22 %), Reteitalia, 25 % (inchangé), TVES (groupe Hersant), 10 % (au lieu de 25 %), Clinvest-Crédit Lyonnais, 10 % (au lieu de 2 %), Expar, 5 % (au lieu de 3,1 %), le groupe Vernes, 4,1 % (au lieu de 22 %), la Société de mobilisation, 0,9 % (inchangé), le CCF, 8 %, Kleinwort Benson, 7 %, et la Société générale, 5 %. Compte tenu des performances médiocres de la chaîne et de sa mauvaise image parmi les professionnels, Jean-Luc Lagardère a ensuite éprouvé quelques difficultés à constituer une équipe autour d'Yves Sabouret (nouveau P-DG de la chaîne), mais Pascal Josèphe a finalement accepté la direction de l'antenne.

Le câble à la traîne

Le programme satellite (TDF1/TDF2) reste pour l'instant un échec commercial, accentué par les problèmes techniques. Seules La Sept et Euromusique sont effectivement diffusées, mais ne peuvent encore atteindre que les foyers câblés ou ceux, plus rares, qui sont équipés d'une antenne parabolique (10 000 unités installées). Cette situation pose à nouveau le problème de la politique française du câble qui, en 1990, reste très en retard sur celle des pays voisins, l'Allemagne en particulier. L'accord franco-allemand sur la chaîne culturelle, dont La Sept est la préfiguration française, a été finalement signé en octobre et doit être appliqué au cours de l'année 1991.

Enfin, le Canal 35 et son réseau multiville (22 agglomérations) ont été ouverts aux candidatures : le CSA a choisi Canal Enfants. Cette chaîne thématique créée pour la jeunesse pourra ainsi faire jouer la complémentarité entre le réseau hertzien terrestre et le réseau câble-satellite.

Christine Leteinturier

Gastronomie

S'inscrivant désormais dans la longue durée chère à Fernand Braudel, deux centenaires vénérables ont reçu des hommages justifiés par leur notoriété : le canard au sang, dont l'exemplaire portant le numéro 749 038 a été découpé le 18 décembre à la Tour d'Argent, et, immuable dans son décor Belle époque, Maxim's, évoqué par le livre Maxim's ou Cent Ans de vie parisienne, publié par Robert Laffont.

Les créations du passé se sont perpétuées, mais les artistes, eux, disparaissent : Raymond Oliver, qui, selon Christian Millau, « a fait passer d'un siècle à l'autre la cuisine et les cuisiniers », et Alain Chapel, le maître inspiré et perfectionniste de Mionnay, enraciné dans la Bresse, aux antipodes de la vie itinérante que mena Raymond Oliver.

Au-delà de la génération d'Alain Chapel, qui est encore largement représentée au plus haut niveau, la relève est assurée : Alain Ducasse, chef de l'hôtel de Paris, à Monte-Carlo, a été honoré par Michelin d'une troisième étoile : dans le luxe somptueusement baroque du Louis XV, Ducasse initie des hôtes nantis aux plaisirs dispensés par des plats de pêcheurs ou de forts des halles, intelligemment renouvelés, comme le sauté de poulpes, de palourdes et de crustacés accompagné de pâtes ou la côte de bœuf au jus de moelle et d'échalote. Dans l'ambiance rustique d'un village perché du Lot-et-Garonne, Puymirol, Michel Trama atteint le sommet de l'échelle pour Gault et Millau ; à l'Aubergade, il anoblit des recettes de terroir remodelées par la recherche et l'inspiration : la daube de cèpes sur une galette de maïs au foie gras chaud ou le mille-feuille de morue à la ventrèche et aux poireaux.

Une culture vivante

Comme l'avait montré Raymond Oliver, la gastronomie est aussi une culture. Dans cette perspective, un événement rare a marqué l'année : la bibliothèque d'un amateur éclairé a été dispersée à Drouot les 17 et 18 mars. La vente avait été préparée par le libraire Gérard Oberlé, qui a présenté les Fastes de Bacchus et de Cornus sous la double forme d'un catalogue de vente et d'une énorme « Description bibliographique, anecdotique et historique de plus d'un million de livres imprimés du XV^e au XX^e siècle ».