Les « ripoux » de l'année, quant à eux, sont lyonnais. Ils sont cinq policiers « insoupçonnables » dirigés par le brigadier-chef Michel Lemercier. Avec eux, neuf complices qui, parfois, appartiennent au monde de la délinquance, parfois ne sont que de simples employés de banque ou des pompes funèbres. Une bande hétéroclite mais parfaitement opérationnelle dont le bilan quinquennal comporte 65 hold-up, des prises d'otages, deux meurtres, et même l'assassinat d'un témoin, André Néel, qui risquait de reconnaître l'un des membres du gang. Un record criminel à mettre... au passif des policiers.

Pierre Bois

Presse

Deux tendances et un feuilleton ont marqué la presse française en 1990.

La première tendance a naturellement suivi l'évolution en cours en Europe de l'Est. Pour les professionnels de l'information, les anciens pays communistes représentent, sinon un Eldorado à découvrir, du moins un vaste marché à investir. Au printemps, Robert Hersant a donc lancé un magazine en URSS : Business in URSS, mensuel économique en deux versions, l'une en russe, l'autre en anglais, dont les objectifs sont d'apporter aux décideurs locaux une information qui leur fait encore défaut et de sensibiliser les investisseurs étrangers aux problèmes d'une économie en plein bouleversement. Au-delà de la simple motivation commerciale, on retrouve dans cette initiative le souci de participer au grand mouvement de rapprochement Est-Ouest « entre deux systèmes aussi éloignés l'un de l'autre », selon l'expression du patron du Figaro.

À l'automne, Paris-Match, en association avec les Nouvelles de Moscou, publiait à son tour un premier numéro en russe (où les heurs et les malheurs de la famille princière monégasque ne laissaient pas d'être rapportés). Puis l'Express et la maison polonaise Spotkania lançaient le premier magazine d'information de Varsovie. Le projet, indépendant politiquement, mais situé dans l'orbite de Solidarité, prévoyait une diffusion de l'ordre de 20 000 exemplaires. Pour Willy Stricker, le patron de l'Express, la tentative, qui a l'avantage de ne pas coûter plus d'un million de francs, est aussi une façon de « participer à la liberté des idées » et à « la défense de l'économie de marché ». Une démarche que l'on pourrait qualifier de militante.

La deuxième tendance concerne les difficultés de la presse économique. Dopée pendant quelques années par le nouvel engouement des Français pour la Bourse, cette presse spécialisée a subi un coup d'arrêt brutal, marqué par la cessation de plusieurs titres − le Temps de la finance, Fortune France (échec d'une collaboration franco-américaine entre le groupe Time et Hachette-Filipacchi) − et par les difficultés du groupe Expansion. La baisse des recettes publicitaires (− 10 % en un an) constitue le premier élément d'explication. Touchant l'ensemble de la presse, cette tendance a affecté en priorité les journaux économiques qui vivent en grande partie de la publicité financière, c'est-à-dire des annonces d'augmentation de capital ou d'introductions en Bourse, toutes sortes d'activités ralenties par le tassement de la conjoncture mondiale et par la crise du Golfe.

La palme des turbulences revient au Monde, qui s'est offert successivement une nouvelle imprimerie, une nouvelle présentation (en plusieurs cahiers, à la mode anglo-saxonne), de nouveaux locaux (adieu la « rue des Italiens » !) et, en principe, un nouveau directeur. Mais, après plusieurs mois de tractations, le successeur d'André Fontaine n'a toujours pas pu être désigné. En octobre, les rédacteurs avaient difficilement élu Daniel Vernet, mais, en décembre, l'association des porteurs de parts de la SARL a rejeté ce choix. L'élection d'une personnalité extérieure au journal, l'économiste Paul Lesourne, est désormais envisagée.

Jules Chancel

Audiovisuel

En France, le parc de la télévision s'est stabilisé. Avec quelque 93,5 % de foyers équipés, dont 86,2 % d'un poste couleurs et 30 % d'un magnétoscope, le marché des récepteurs est désormais lié au développement du multiéquipement ou aux modifications techniques qui accompagneront la mise en service de la télévision haute définition. Quant au marché, il semble vraiment saturé. L'audience globale moyenne (80 % des foyers équipés) est disputée par six « grandes » chaînes, qui se la répartissent ainsi : TF1 s'adjuge 40 %, A2, 23,4 %, FR3, 12,5 %, La Cinq, 11,4 %, et M6, 7,3 %, Canal + , 3,8 %. Les autres canaux se partagent le restant (1,6 %). Ces chaînes drainent actuellement 26 % des investissements publicitaires effectués dans l'ensemble des médias.

La nouvelle « donne »

Dans ce contexte de relative stagnation, la question d'une éventuelle redistribution de l'audiovisuel française a été posée. En effet, l'actionnariat de La Cinq, chaîne contrôlée par MM. Robert Hersant et Silvio Berlusconi, a connu deux modifications fondamentales. En mai 1990, trois actionnaires (Chargeurs, Les Échos et TéléMétropole) ont décidé de vendre 20 % de leurs parts au groupe Hachette (qui s'introduit par ce biais dans le secteur de la télédiffusion), et le reste au groupe Ventes. Le 21 septembre, Robert Hersant a soumis au CSA un nouveau projet de modification de la structure du capital. Il souhaitait en effet se désengager et transférer une partie de ses participations au groupe Hachette qui le remplacerait comme opérateur aux côtés de Silvio Berlusconi.