peste
Maladie infectieuse contagieuse, endémique et épidémique, due au bacille de Yersin (Yersinia pestis) et transmise du rat à l'homme par les piqûres de puces. (On distingue la peste bubonique, directement transmise par les puces, et la peste pulmonaire, transmise d'homme à homme par inhalation.)
MÉDECINE
La peste fut par le passé responsable d'épidémies meurtrières (voir HISTOIRE). Seules les mesures sanitaires, principalement la lutte contre les rats et les puces, leur destruction dans les bateaux et les ports ainsi que les mesures d'éviction des malades (quarantaine), vinrent à bout de ce fléau en coupant son circuit de transmission jusqu'à l'homme. Des cas isolés ou en petit nombre sont encore observés en Afrique, en ex-Union soviétique, en Amériques du Nord et du Sud et en Asie. Des cas survenant dans les laboratoires ne sont pas exceptionnels.
La peste est une zoonose (maladie touchant l'homme et l'animal). Le réservoir du bacille est le rat, ou, en Asie centrale, le mérion (rongeur sauvage). La maladie se transmet entre animaux et de l'animal à l'homme par l'intermédiaire des puces. L'homme peut en outre contracter la maladie par manipulation de rongeurs infectés ou, dans une forme particulièrement contagieuse (peste pulmonaire), par inhalation de gouttelettes de salive d'un sujet infecté.
Symptômes et signes
Les manifestations cliniques de la peste sont de trois types.
La peste bubonique se contracte par piqûre de puce. Elle se traduit par une fièvre élevée, des frissons et des douleurs diffuses, suivis par un important gonflement des ganglions lymphatiques, en particulier ceux de l'aine, et par leur suppuration (bubon pesteux). La peste bubonique peut évoluer vers une septicémie ou provoquer des hémorragies sous-cutanées se traduisant par des ecchymoses sombres (peste noire).
La peste pulmonaire se transmet d'homme à homme par voie aérienne et est très contagieuse. Elle engendre une fièvre élevée et une pneumopathie aiguë asphyxiante, avec des expectorations abondantes et sanguinolentes, très septiques.
La forme septicémique pure survient directement après la contamination ou après l'apparition de bubons pesteux. Elle se traduit par une fièvre élevée, des frissons, un délire et une prostration ; l'évolution est rapidement fatale en l'absence de traitement.
Traitement
Les antibiotiques traitent très efficacement la peste. Les risques d'extension épidémique sont quasi nuls si la surveillance sanitaire et les mesures officielles sont respectées, ce qui, aujourd'hui, est presque partout le cas.
Prévention
La peste est une maladie à déclaration obligatoire. Un isolement est requis par les autorités (règlement sanitaire international). Il existe un vaccin recommandé aux professions exposées (techniciens de laboratoire manipulant les bacilles, ouvriers agricoles).
HISTOIRE
Le nom de « peste » a été donné très tôt, semble-t-il, à de nombreuses maladies épidémiques provoquant une forte mortalité et engendrant la panique collective. On distingue trois grandes périodes pesteuses depuis le début de l'ère chrétienne.
La poussée pesteuse des vie et viie s.
La première pandémie indiscutable de peste (dite « peste de Justinien ») se développe en 542 dans le bassin méditerranéen et fait peut-être plusieurs millions de victimes. Elle est suivie d’une douzaine de crises, étalées sur un siècle, qui touchent essentiellement le Bassin méditerranéen, avec des extensions vers la vallée du Rhin et les rivages de la mer d'Irlande.
La grande peste ou peste noire (1346-1353)
La deuxième pandémie de peste (une peste bubonique, dite « grande peste » ou « peste noire ») ravage l'Occident entre 1346 et 1353. Elle culmine en 1348. Venue sans doute de Crimée, elle gagne les pays méditerranéens, la France (par le port de Marseille, en novembre 1347), puis l’Allemagne, l'Europe centrale et les îles Britanniques. Des rivages méditerranéens, la peste noire s'étend également à la Suède et à la Prusse en automne 1349 et, pendant l'année 1350, à tout l'espace hanséatique.
Touchant une population sous-alimentée, la peste noire fait des ravages énormes au point qu'on a pu parler, à son propos, d'une « cassure tragique dans notre histoire ». Au total, le chiffre des morts n’a pas été inférieur au tiers de la population dans toute l'Europe occidentale. Les conséquences de la peste noire sont amplifiées par la multiplication des épidémies au siècle suivant.
Une épidémie endémique jusqu’au début du xviiie s.
Après la grande peste, la maladie ne quitte plus l'Europe, y causant périodiquement des ravages jusqu'en 1720. Bien que devenue endémique, elle réapparaît avec une certaine régularité : 1363, 1374, 1389, 1410. Les résurgences les plus importantes de la maladie se situent en 1466, quand Constantinople perd 600 habitants par jour ; en 1478, à Venise ; en 1628, à Lyon ; en 1635, à Nimègue ; en 1665, à Londres ; en 1720, à Marseille.
Les dernières grandes épidémies
Par la suite, la peste a tendance à se localiser en Égypte, en Arabie, en Syrie. Au xixe s. elle réduit progressivement son aire, le bassin oriental et méridional de la Méditerranée restant particulièrement vulnérable. Puis, à partir de 1894, l'Asie devient un grand foyer de peste, avec des épidémies meurtrières en Inde (1896) et en Chine (1910) ; la côte pacifique des États-Unis est elle-même touchée.
La découverte du bacille responsable de la peste par Alexandre Yersin (1894) et celle du rôle de la puce dans sa transmission par Paul Louis Simond (1898) permettent la mise en place de mesures prophylactiques efficaces.