Pascale Chelin
Politique économique
M. Balladur, ministre de l'Économie, des Finances et de la Privatisation, rompt avec le passé et instaure le libéralisme économique. Il s'agit, par le désengagement de l'État, de revenir à l'économie de marché. L'objectif prioritaire est la réduction du chômage, qui passe par la reprise des investissements et donc de la croissance, sans dérapage inflationniste. Pour investir, les entreprises doivent retrouver leur liberté d'action, qui renforcera à terme leur compétitivité, indispensable à l'amélioration du commerce extérieur. Le « redressement économique et social » sera obtenu en combinant liberté et rigueur. À cette fin, outre une dévaluation du franc le 6 avril 1986, trois moyens sont essentiellement utilisés.
– La privatisation de 65 entreprises nationalisées dans l'industrie, la banque et l'assurance sera réalisée. Par une OPV, l'État a ramené sa part à 51 p. 100 du capital d'Elf Aquitaine et a dénationalisé Saint-Gobain.
– La déréglementation est immédiatement amorcée : d'abord par la levée du contrôle des changes et la libération des prix, qui sera totale après la mise en place d'un nouveau droit de la concurrence ; ensuite par la suppression de l'autorisation administrative de licenciement et la mise en œuvre de la flexibilité ; enfin, la dérégulation doit s'étendre dans de nombreux secteurs.
– L'assainissement budgétaire sera réalisé progressivement. Dès 1986, un collectif budgétaire comprend une série d'économies en dépit du coût d'un plan emploi-jeunes. Dans le budget 1987, les dépenses publiques augmenteront moins vite que les prix. Il sera ainsi possible d'obtenir à la fois un allégement des impôts des entreprises comme des ménages, compensé par la hausse des cotisations sociales, et un déficit légèrement réduit.
Dominique Colson
Vie sociale
Le changement de gouvernement n'a pas provoqué de déréglementation « sauvage ». La nomination au ministère des Affaires sociales de Philippe Séguin, un libéral modéré, soucieux de préserver le climat social, a rassuré les syndicats. Apaisés par le maintien de prérogatives et dispositifs essentiels (comme la représentativité des syndicats nationaux, les 39 heures et la retraite à 60 ans), les syndicats réformistes ont accepté l'idée d'une réadaptation négociée des acquis sociaux, la CGT s'isolant dans son refus. Opposés à la suppression de l'autorisation administrative de licenciement, principale demande patronale inscrite dans le programme de l'UDF et du RPR, mais mis devant le fait accompli, ils ont accepté d'en négocier les mesures d'accompagnement. C'est le 21 octobre que le CNPF, la CFDT, la CFTC et FO sont parvenus à un accord prévoyant notamment l'adoption et l'extension aux PME des congés de conversion et la consultation du comité d'entreprise, contre la réduction des délais de licenciement. Si cet accord a été transformé en loi au mois de décembre, c'est par une procédure détournée que les mesures d'aménagement du temps de travail ont pu être adoptées, perturbant ainsi le compromis fragile entre le gouvernement et les syndicats. Cette année s'est enfin terminée par la grève des cheminots, la plus dure depuis 1968. Largement dépassés par la base qui s'est donné ses propres modes d'expression, les syndicats ont suivi ce mouvement social de nouvelle nature sans pouvoir le contrôler. L'élection d'un homme nouveau, François Périzot, à la tête du CNPF, a mis un terme au conflit interne entre Yvon Gattaz et Yvon Chotard, qui démissionna en mars des postes qu'il occupait pour poser sa candidature à la présidence. Au-delà des rivalités personnelles, deux conceptions du CNPF se sont affrontées : le « parti de l'entreprise » cher à Yvon Gattaz ne pouvait suffire aux yeux d'Yvon Chotard pour faire du patronat un authentique acteur politique.
Simon Parlier
Politique étrangère
La politique étrangère de la France s'est adaptée sans difficulté apparente à la cohabitation.
Rapports Est-Ouest : le dialogue avec les deux grands s'est poursuivi avec les visites de F. Mitterrand aux États-Unis et en URSS. La France a ainsi exprimé son attachement au respect des traités existants (SALT II et AMB), ainsi que sa volonté de parvenir à une entente sur la limitation des armes conventionnelles. Excluant tout accord séparé avec l'URSS, F. Mitterrand a cependant rappelé l'exclusion de l'arsenal nucléaire français des négociations en cours entre les deux super puissances.