Reste qu'en dépit de cet accord la vente clandestine du Sérocytol, produit très coûteux et apparemment inefficace, est organisée sur une large échelle en France. Reste aussi que se pose la question de son homologue français. Si la thérapeutique inventée par le docteur Thomas n'est qu'illusion, comment se fait-il que ce produit a obtenu son visa en France ? Derrière le scandale soulevé par l'affaire du Sérocytol pourraient se profiler des problèmes plus généraux concernant l'industrie pharmaceutique.
Solomidès
Autre cas litigieux de traitement anticancéreux : celui des physiotrons synthétiques inventés il y a une quinzaine d'années par le docteur J. Solomidès. Cette gamme de produits est également utilisée contre l'eczéma, l'arthrose, la sclérose en plaques. Le docteur Solomidès — à qui le conseil de l'ordre a systématiquement refusé son inscription — a été condamné pour exercice illégal de la médecine. Menant une active campagne, il a réussi à faire signer, en mars 1979, par de nombreuses personnalités un appel demandant une « expérimentation officielle » de ses produits. Il se trouve que deux médecins hospitaliers qui avaient mis en route il y a quelques années une expérimentation sur ces médicaments l'ont interrompue après avoir constaté que ces produits n'avaient pas d'action sur le cancer. Ce cas, comme celui du Sérocytol, pose le problème de l'hypothétique efficacité de médicaments hautement lucratifs, ne présentant pas de toxicité mais susceptibles de détourner les malades des thérapeutiques anticancéreuses reconnues. Le décès du Dr Solomidès semble mettre fin à cette affaire.
Éthique
L'OMS, l'UNESCO et le Conseil des organisations internationales des sciences médicales ont organisé, du 30 novembre au 2 décembre 1978, un colloque consacré à l'expérimentation sur l'être humain des nouveaux médicaments. La production d'un médicament passe par trois étapes : la mise au point pharmacologique, les essais sur l'animal pour vérifier l'absence de toxicité, les essais sur l'homme pour vérifier l'efficacité thérapeutique. La troisième étape est indispensable pour certaines maladies (par exemple, l'allergie, les troubles psychiatriques).
Sur les malades, une des techniques les plus couramment utilisées pour l'expérimentation est la méthode en double aveugle : afin d'éliminer les effets psychologiques secondaires, ni les médecins traitants ni les malades ne savent qui est traité par le nouveau produit. De nombreux pays disposent d'experts agréés par le ministère de la Santé pour procéder à ces expérimentations. Sur l'homme sain, en l'absence d'un code précisant les conditions de telles expériences, les essais sont le plus souvent clandestins. Le colloque de Lisbonne a recommandé la création — ou la généralisation selon les cas — de comités d'éthique devant lesquels les experts devraient justifier leurs expériences.
Éthologie
Les singes qui parlent pourraient éclaircir l'origine du langage humain
Un film de Barbet Schrœder, Koko, le gorille qui parle, et un livre du journaliste américain Eugen Linden, traduit en français sous le titre Ces singes qui parlent, réveillent l'intérêt pour les expériences d'apprentissage par les grands singes de systèmes de langage humain. La percée est due à un couple de psychologues, Allen et Béatrice Gardner, qui ont enseigné l'ameslan, langage gestuel des sourds-muets américains, au chimpanzé femelle Washoe, puis à d'autres chimpanzés (Journal de l'année 1976-77). Washoe vit maintenant en compagnie d'un groupe sélectionné de ses congénères, dans une île spécialement aménagée à l'Institut pour l'étude des primates, en Oklahoma.
Ces singes recourent de plus en plus souvent à l'ameslan pour communiquer entre eux. Quelques guenons ont eu des petits. On attend de savoir si elles franchiront l'étape décisive en leur transmettant elles-mêmes l'usage de l'ameslan.
Notion du temps
Les performances des chimpanzés semblent surpassées par celles du gorille femelle Koko, à qui son éducatrice, Francine Patterson, qui travaille à la Stanford University, a appris 645 termes d'ameslan, sur lesquels 375 sont entrés dans un vocabulaire dont la guenon use tous les jours spontanément. Il lui arrive de mentir pour dissimuler un méfait, et elle a le sens du déroulement du temps, utilisant correctement les mots avant et après. Elle comprend certaines phrases du langage vocal humain et peut les traduire en ameslan.