Une junte militaire, qui est commandée par le jeune lieutenant-colonel Seyni Kountche, suspend la Constitution, dissout l'Assemblée, met hors la loi les partis politiques.

Arrestations

Une trentaine de personnes trouvent la mort au cours de ces événements. Parmi les personnalités arrêtées figure notamment Boubou Hama, président de l'Assemblée, réputé homme fort de l'ancien régime. Aucun civil n'appartient au premier gouvernement provisoire, au sein duquel le lieutenant Seyni Kountche, qui porte le titre de président du Conseil militaire suprême, détient le portefeuille du Développement.

Les troupes françaises stationnées à Niamey, en vertu des accords de défense franco-nigériens, ne sont pas intervenues. Comme souvent, en pareilles circonstances, l'absence de réactions internationales a été à peu près totale, mais, en revanche, beaucoup d'observateurs s'interrogent sur les causes de l'éviction d'un chef d'État réputé honnête, qui, sans être réellement populaire, semblait admis par ses concitoyens.

Parmi les thèmes de mécontentement, il faut réserver une place importante aux malversations exercées par certains membres de l'entourage présidentiel, et notamment par Mme Diori Hamani, accusée par ses détracteurs d'avoir accumulé une fortune immobilière. C'est, en tout cas, parce qu'ils voulaient éviter le gaspillage des deniers publics que les militaires sont, disent-ils, intervenus.

Les lycéens et les étudiants de la capitale, qui avaient déjà exprimé leur opposition au régime lors de la visite officielle du président Georges Pompidou au Niger, avaient déclenché en octobre 1973 une grève qui se poursuivit jusqu'en janvier 1974. À plusieurs reprises, des professeurs et des élèves avaient été arrêtés, jugés et condamnés sévèrement pour « subversion non armée et tentative de création de parti politique ». En effet, l'ancien régime ne reconnaissait le droit d'expression que dans le seul cadre du parti progressiste nigérien (PPN), mouvement gouvernemental. C'est ainsi que toutes les autres formations politiques, dont la Sawaba de l'ancien président Djibo Bakary, restaient proscrites.

Les ravages persistants de la sécheresse ont également porté gravement préjudice au régime. Bien que le gouvernement de Diori Hamani se soit appliqué à répartir aussi rapidement et aussi justement que possible les secours qui affluaient à Niamey, une fraction de la population avait, abusivement, tendance à rendre responsable le chef de l'État des conséquences du fléau qui éprouvait les populations nigériennes.

Isolement

Sur le plan extérieur, le président Diori Hamani était relativement isolé. Autrefois très lié au président de la Côte-d'Ivoire, Félix Houphouët-Boigny, auquel l'unissaient des rapports d'amitié, il avait progressivement pris ses distances avec son ancien compagnon d'armes, sans doute pour faire de plus larges concessions aux nationalistes nigériens.

Au sein du Conseil de l'Entente, qui regroupe la Côte-d'Ivoire, le Dahomey, le Togo, la Haute-Volta et le Niger, ce dernier n'occupait plus la place prédominante qui fut la sienne pendant plus de douze années.

Avec la France, les relations étaient tendues depuis que le chef de l'État nigérien exigeait que des conditions moins léonines fussent faites à son pays pour l'exploitation et la vente de son minerai d'uranium. Les prix d'achat consentis par la France lésaient les intérêts nigériens, et Diori Hamani ne l'avait pas caché à ses partenaires. Or, la seule ressource économique importante du Niger est l'uranium. L'étendue du désaccord était si grande entre Français et Nigériens que l'on a pu croire que la France, sans être à l'origine de la chute de Diori Hamani, n'en avait pas été fâchée.

En réalité, ici comme en beaucoup d'autres capitales africaines, point n'était besoin d'intervention ou, même, d'ingérence étrangère pour changer l'ordre établi, les facteurs de décomposition étaient suffisamment nombreux pour que le régime tombe sous les premiers coups d'État militaires.

L'hypothèse selon laquelle le putsch n'a pu réussir que grâce à la connivence de certains services spéciaux français est démentie par le fait que, une semaine après la prise du pouvoir par le lieutenant-colonel Seyni Kountche, celui-ci expulse du Niger le chef de la mission militaire française, le commandant Langlois d'Estaintot.