Quelques semaines avant ce nouveau coup de force, le président Lamizana avait pourtant publiquement réaffirmé son intention de se retirer, tout en proclamant son désir de mener à son terme une lente évolution amorcée avec l'adoption d'une Constitution en juin 1970. Une série d'étapes était prévue pour remettre progressivement l'intégralité du pouvoir aux civils, et l'organisation d'élections générales était même envisagée pour le courant de l'année 1974.

C'est l'incapacité des civils à trouver un terrain d'entente entre eux qui a remis en cause, le 8 février, les plans dressés par les militaires eux-mêmes. En effet, contrairement à beaucoup d'autres États d'Afrique noire (singulièrement d'Afrique occidentale francophone), la Haute-Volta dispose d'une élite politique pléthorique, particulièrement rompue aux subtilités du jeu parlementaire de type européen. C'est ainsi que, quarante-huit heures avant le coup de force, il était question que la majorité censure le gouvernement, initiative devenue tout à fait inconcevable, depuis plus de dix ans, dans toute autre capitale africaine.

Rivalités

Gérard Kango Ouedraogo, Premier ministre, ayant été mis en minorité devant les instances de son propre parti, l'Union démocratique voltaïque (UDV), après avoir été vivement critiqué par certains de ses amis politiques, dont Joseph Ouedraogo, président de l'Assemblée nationale et important leader syndicaliste, deux ministres appartenant à la majorité démissionnent. Joseph Conombo, ancien parlementaire et ancien ministre de la IVe République française, et Ali Barraud, respectivement ministres des Affaires étrangères et de la Santé publique, contraignent ainsi le Premier ministre à faire expédier les affaires courantes par deux intérimaires.

Ainsi éclatait au grand jour l'affrontement existant non seulement entre une demi-douzaine de partis politiques concurrents, mais également entre plusieurs tendances antagonistes rivalisant au sein du parti gouvernemental. D'autre part, la rentrée politique de l'ancien président Maurice Yameogo, libéré le 4 août 1970, joue un rôle essentiel dans le déclenchement de la crise. En effet, curieusement, l'ancien président de la République disposait, depuis plusieurs mois, d'alliés dans les rangs des syndicalistes qui avaient contribué à son élimination en janvier 1966. Et, paradoxalement, Gérard Kango Ouedraogo, qui appartient au même parti que lui, restait opposé à son retour au premier plan de la scène politique, tandis qu'en revanche Joseph Ouedraogo, son adversaire de 1966, n'y était pas fondamentalement hostile. Au demeurant, dès décembre, dans une lettre adressée au procureur général près la cour d'appel d'Ouagadougou, Maurice Yameogo avait explicitement demandé la restitution de ses droits civiques, dont il était privé depuis sa condamnation par un tribunal spécial.

Militaires

Après les décisions du général Lamizana, c'est non seulement un régime militaire supplémentaire qui s'instaure sur un continent qui en compte déjà tant, mais la singularité politique de la Haute-Volta qui disparaît ; elle prenait pourtant d'autant plus de relief que les tendances autocratiques ne cessaient de s'accuser dans la plupart des États voisins. C'est non seulement, dans un premier temps, le parlementarisme qui est aboli, mais aussi l'amorce de la suppression du pluripartisme. Dans un message à la nation prononcé le 30 mai, le général Lamizana annonce la suppression de tous les partis politiques existants et la création d'un Mouvement pour le renouveau, seul parti désormais autorisé.

Déçu par les tergiversations et les querelles politiques des civils, les militaires ont le sentiment d'avoir été bernés après avoir vainement tenté de leur faire confiance ; ils ont de plus en plus tendance à supprimer la quasi-totalité des responsabilités afférentes à la conduite des Affaires publiques. Le nouveau gouvernement, mis en place le 11 février, comprend quatre ministres civils qui siègent à côté de leurs dix collègues militaires. Mais, dans le courant du mois de mai, en même temps qu'il annonce la création d'une commission de sûreté de l'État, le général Lamizana fait savoir à ses compatriotes que le territoire voltaïque sera prochainement découpé en dix départements qui seront tous confiés à l'administration de préfets militaires.

Kenya

Nairobi. 12 070 000. 21. 3,1 %.
Économie. PNB (71) 151. Production : G (70) 147 + I (68) 143. Énerg. (*71) : 171. C.E. (71) : 12 %.
Transports. (*71) : 104 500 + 19 100. (*71) : 239 M pass./km.
Information. (70) : 4 quotidiens ; tirage global : 155 000. (70) : *500 000. (70) : *16 000. (71) : 85 000.
Santé. (70) : 1 437. Mté inf. (69) : 55.
Éducation. Prim. : (70) 1 427 589. Sec. et techn. : (70) 137 008. Sup. : (69) 4 463.
Institutions. État indépendant le 12 décembre 1963. République proclamée le 12 décembre 1964. Constitution de 1963, révisée en 1964. Président de la République et Premier ministre : Jomo Kenyatta, réélu pour la seconde fois le 22 novembre 1969.

Lesotho

Maseru. 970 000. 32. 2,2 %.
Économie. PNB (69) 92.
Transports. (*71) : 1 900 + 1 600.
Information. (70) : 5 000. (71) : 3 000.
Santé. (71) : 30.
Éducation. Prim. : (68) 179 386. Sec. et techn. : (68) *5 200. Sup. : (69) 384.
Institutions. Indépendant le 4 octobre 1966. Monarchie. Constitution de 1965 suspendue. Souverain : Moshoeshoe II. Premier ministre : Leabua Jonathan, qui exerce tous les pouvoirs.

Répression

Le chef Leabua Jonathan, Premier ministre, annonce, le 7 janvier 1974, la découverte d'un complot dirigé contre sa personne. De fait, l'homme qui, quatre années plus tôt, constatant que son parti allait perdre les élections, avait arbitrairement suspendu la Constitution, gouvernait depuis lors par décrets et, bien qu'il ait levé l'état d'urgence le 24 juillet 1973, continuait à exercer sur ses concitoyens un pouvoir dictatorial de plus en plus contesté.