la Résistance
Ensemble des actions menées, durant la Seconde Guerre mondiale, contre les occupants et leurs auxiliaires ; ensemble de ceux qui ont participé à ces actions.
Introduction
De 1940 à 1944, l'Allemagne hitlérienne domine le continent européen. L'ambition de Hitler est de modeler autour du grand Reich germanique (Grossdeutschland) une Europe inféodée, contrainte de mettre ses richesses humaines et économiques à sa disposition. Mais la nazification de l'Europe se heurte dans tous les pays à des actes de résistance, qui vont aller en s'amplifiant au fur et à mesure du durcissement des conditions d'occupation et de l'amélioration de l'organisation des réseaux de résistants.
Les objectifs de la Résistance sont militaires et visent à aider l'effort de guerre par le sabotage, le renseignement, le rapatriement des combattants (aviateurs par exemple) puis la formation de maquis. Ils sont également civils et cherchent à protéger les proscrits (communistes, Juifs, réfractaires) tout en formant l'opinion publique par la presse clandestine ou la diffusion de tracts… Ils sont enfin politiques, prévoyant, la victoire acquise, de prendre le pouvoir et de procéder à de profondes réformes.
Perçue comme une force occasionnelle, la Résistance n'est pas incluse dans une stratégie élaborée par les Alliés. Cependant la Grande-Bretagne, où se retrouvent les gouvernements exilés, devient la plaque tournante de tous les réseaux d'action et de renseignements vers l'Europe occupée. Les États-Unis fourniront progressivement en armes les mouvements de résistance, alors que l'URSS se préoccupera essentiellement des partisans soviétiques opérant sur les arrières allemands. Il existera de sérieuses divergences tactiques entre les Alliés : pour les Soviétiques, en effet, il importe d'intensifier les actions de guérilla, les attentats et les sabotages, alors que les Britanniques préfèrent, en accord avec les gouvernements en exil, limiter ces actions afin d'éviter des représailles meurtrières contre les populations civiles. Les difficultés ne cesseront pas entre les tuteurs occidentaux de la Résistance – SOE (Special Operations Executive) britannique, créé dès juillet 1940, auquel s'ajoute en 1942 un organisme américain, l'OSS (Office of Strategic Services) – et l'URSS, la Pologne étant la principale victime de ces divisions.
1. Naissance des mouvements de Résistance
1.1. Des débuts très précoces…
Les mouvements et réseaux de Résistance obligent les occupants à rester en alerte et incitent les occupés à secouer leur léthargie – interprétée dans un premier temps comme une adhésion à l'ordre nouveau. Le premier souci des vaincus est en effet de survivre ; c'est l'époque des disettes et du marché noir, du rationnement des vivres et des restrictions de toutes sortes. Aussi n'est-il pas étonnant que tant d'occupés se contentent d'attendre l'issue des hostilités en tentant de passer au travers des difficultés quotidiennes.
Cependant, la résistance s'affirme très tôt à travers l'Europe, que ce soit en Pologne, où, dès octobre 1939, on commence à collecter des renseignements sur l'armée allemande et à cacher des armes, que ce soit en France, où, en juin 1940 – le jour même où le maréchal Pétain demande l'armistice –, Edmond Michelet distribue des tracts reproduisant la phrase célèbre de Péguy, « Celui qui ne se rend pas a raison contre celui qui se rend », que ce soit en Grèce, où deux jeunes patriotes audacieux réussissent, dans la nuit du 30 au 31 mai 1941, à décrocher l'immense drapeau à croix gammée qui flottait sur l'Acropole d'Athènes.
1.2. … et très humbles
Comme tous ces résistants partent de rien, il leur faut partout innover, sauf en Pologne, où les traditions de lutte nationale sont anciennes, et dans une certaine mesure en Belgique et dans le nord de la France, qui ont déjà eu l'expérience d'une occupation étrangère en 1914-1918. Aussi les débuts sont-ils souvent très humbles : refus muet, comme le décrit le Silence de la mer, de Vercors, publié clandestinement en 1942 ; gestes modestes et spontanés ou rassemblements populaires, par exemple à Marseille, le 27 mars 1941, devant la plaque commémorative de l'assassinat du roi de Yougoslavie (→ Alexandre Ier Karadjordjevic), laquelle vient de déclarer la guerre au Reich ; exécution de consignes lancées de bouche à oreille ou propagation du « V » de la victoire tracé sur les murs… Bientôt les petits noyaux du début s'étoffent : c'est le stade de l'organisation et de la structuration, qui se traduit par la mise sur pied de réseaux de renseignements militaires, de publications clandestines, de filières d'évasion.
1.3. Un but unique, des méthodes différentes
Si la Résistance s'étend ainsi à travers toute l'Europe, c'est que l'on trouve à la base le même but : la défaite de l'Axe. D'où la similitude des méthodes utilisées par les résistants dans la lutte clandestine, similitude qui s'étend à leurs formes d'organisation, à leurs échecs et à leurs succès.
Toutefois, l'importance de la Résistance varie notablement suivant les pays. Et les résultats sont très différents selon le degré d'union des différents mouvements, la désunion pouvant conduire jusqu'à la guerre civile, comme en Yougoslavie, où s'affrontent dès l'été 1941 les Tchetniks et les Partisans de Tito.
Par ailleurs, chaque résistance nationale présente des caractéristiques propres, compte tenu de la situation et des traditions historiques du pays, du comportement des troupes d'occupation, des données géographiques, de la proximité de pays neutres, aux frontières plus ou moins accueillantes – telle la Suisse pour les Français et les Italiens, ou la Suède pour les Norvégiens et les Danois – et, enfin, de l'aide inégale fournie par les Alliés aux divers groupes de résistance.
2. Les différentes formes de résistance
Les moyens de cette guerre souterraine sont multiples. Néanmoins, on peut esquisser trois modes d'action principaux : la résistance civile, improprement qualifiée parfois de passive ; la lutte armée ou résistance militaire ; la résistance humanitaire ou caritative.
2.1. La résistance civile
Graffiti, journaux clandestins
Elle traduit le refus de la domination du vainqueur et consiste, en premier lieu, en une contre-propagande hostile à l'occupant, qui va des graffiti sur les murs et de la lacération des affiches ennemies à la fabrication et à la diffusion de publications clandestines en tout genre – tracts, journaux, caricatures, opuscules. Cette presse clandestine s'impose dès les débuts de l'Occupation dans tous les pays vaincus, afin d'y maintenir et d'y relever le moral.
Par exemple, aux Pays-Bas, où les opérations militaires n'ont duré que quatre jours – du 10 au 14 mai 1940 –, le Geuzenactie, modeste feuille ronéotypée, paraît dès le 15 mai ; en France, Jean Texcier publie ses Conseils à l'occupé dès le 14 juillet 1940. En l'espace de cinq ans, des millions de journaux sortent des imprimeries clandestines, poursuivant partout les mêmes objectifs : révéler les horreurs du nazisme, stimuler les tièdes, encourager les sympathisants, soutenir les combattants, développer chez les occupés, une hostilité systématique envers les nazis.
D'ailleurs, plusieurs des mouvements importants de résistance sont nés, particulièrement en France, autour de journaux clandestins : Franc-Tireur tirera à 165 000 exemplaires en utilisant douze imprimeurs successifs ; Combat consomme chaque mois trois tonnes de papier ; Jean Paulhan fonde avec Jacques Decour, qui sera fusillé par les nazis, les Lettres françaises ; Marc Bloch met sa plume au service de l'antinazisme.
Grèves, désobéissance, infiltration
Autres manifestations de résistance civile : les grèves, menées en dépit de la violence de la répression (l'une des plus marquantes est la grève des 22 et 23 février 1941, à Amsterdam, en signe de protestation contre les mesures antisémites et les arrestations de juifs) ; la non-exécution des ordres et des circulaires dans les administrations au niveau national ou local ; l'infiltration de résistants dans les postes de responsabilité des différents services publics. En France est instauré le NAP, ou Noyautage des administrations publiques, et le « super NAP » qui infiltre les ministères du régime de Vichy.
2.2. La résistance militaire
La lutte armée – celle des partisans et des saboteurs – frappe l'imagination et suscite l'admiration. Ne considérant pas la victoire finale comme acquise aux Allemands, les résistants commencent par cacher des armes et entrer en contact avec les services britanniques en attendant le jour où ils pourront constituer une armée secrète, se livrer à la guérilla sur les arrières de l'ennemi et participer par les armes à la Libération.
Espionnage et réseaux de renseignements
De fait, depuis Londres, les Britanniques et les gouvernements en exil envoient dans les pays occupés des agents et des techniciens radio pour recruter des volontaires qui, malgré les multiples arrestations, transmettront jusqu'à la fin de la guerre des informations capitales pour les Alliés. La plupart de ces réseaux de renseignements, premiers éléments en date de la résistance militaire, sont d'une remarquable efficacité. Les Polonais, en particulier, montrent une grande maîtrise, soit en Allemagne, où plus d'un million d'entre eux ont été requis pour travailler, soit en Pologne même, d'où ils font parvenir à Londres les premières informations sur l'arme secrète des Allemands, la fusée V1.
Réseaux d'évasion
Si les activités d'espionnage, qui débouchent sur la collecte et la transmission de renseignements concernant l'ennemi, sont essentielles, il faut parallèlement organiser des réseaux d'évasion, en particulier pour les aviateurs tombés en territoire occupé. D'où la mise sur pied de filières, telles que Comète, dirigée de Belgique par une femme, Andrée De Jongh – l'une des très rares femmes chefs de réseaux de la Résistance (avec la française Marie-Madeleine Fourcade, qui dirige le réseau de renseignement Alliance) –, ou Pat O'Leary (pseudonyme du médecin belge Albert Guérisse), qui se chargent de fournir des vêtements civils, des faux papiers, des cartes à ces rescapés (en général totalement ignorants de la langue du pays) et qui les convoient jusqu'à la frontière espagnole.
Attentats et sabotages
Dans le même temps, attentats et sabotages se multiplient dans toute l'Europe, obligeant les Allemands à vivre en état d'alerte permanente. Cependant, comme les occupants ripostent, sur l'ordre de Hitler, par des représailles sauvages et massives, la politique des attentats est l'objet de vives controverses, tant parmi les résistants qu'à Londres. En URSS, on multiplie les attaques systématiques contre les militaires allemands, malgré la répression meurtrière dont les populations civiles font les frais, car les Soviétiques estiment que ces vengeances de l'ennemi, qui sont disproportionnées, augmentent la haine contre les envahisseurs et renforcent les rangs des partisans.
En France, les attentats se multiplient à partir de 1943 : le maréchal von Rundstedt échappe de peu à la mort en août ; de juillet à octobre, le groupe de Missak Manouchian met en œuvre près de 70 attentats. Le rôle militaire de la Résistance va s'accroître (→ Francs-tireurs et Partisans français, FFI). Les premiers parachutages d'armes ont lieu dans le Cantal à la fin de 1943. Des maquis s'organisent, notamment en montagne. Celui du Vercors est anéanti du 21 au 27 juillet 1944 (→ bataille du Vercors). Ceux d'Alsace ont pour but essentiel de faire passer en Suisse des réfractaires à l'enrôlement dans la Wehrmacht ou la SS.
Face à ces actions militaires, Jodl, adjoint de Keitel, commandant suprême des armées d'occupation, indique que« des mesures collectives contre les habitants de villages entiers, y compris l'incendie […] doivent être ordonnées exclusivement par les commandants de division ou les chefs des SS et de la police » (6 mai 1944). Quelques semaines plus tard, la répression s'aggrave encore : « Il est à remarquer qu'on n'agit jamais assez durement. Il ne faut pas avoir peur de fusillades, pendaisons et incendies de maisons » (ordre du 27 août 1944).
Les attentats n'épargnent pas les collaborateurs : certains sont condamnés à mort depuis Londres par la cour martiale de la Résistance ; Philippe Henriot est abattu par des officiers de la Résistance en mission le 28 juin 1944 ; des membres du parti populaire français (PPF) de Doriot sont exécutés.
Partisans et maquisards dans les Balkans et en Europe orientale
Bien qu'elle fleurisse en France et en Italie à partir de 1943, la tactique de la guérilla – celle des partisans et des maquisards – se développe surtout dans les Balkans et en Europe orientale, où les méthodes d'occupation sont infiniment plus brutales qu'à l'Ouest. En Pologne se constitue, sous le nom d'Armée de l'intérieur, et en liaison avec le gouvernement en exil à Londres, une armée secrète.
En Yougoslavie, de véritables batailles rangées opposent les partisans de Tito aux divisions allemandes.
En Grèce, des guérillas communistes rivalisent avec les guérillas royalistes soutenues par les Britanniques du SOE ; il leur arrive cependant de collaborer, comme dans l'opération célèbre contre le viaduc enjambant le Gorgopotamos, non loin des Thermopyles, sur lequel passe l'unique voie ferrée reliant Salonique au Pirée (d'où est embarqué le matériel destiné à l'Afrikakorps du maréchal Rommel) : la coopération des deux principaux chefs de la Résistance grecque – le colonel Zervas de l'Armée secrète et le communiste Veloukhiotis – et d'un commando britannique parachuté d'Égypte permet, le 26 novembre 1942, de faire sauter le viaduc, interrompant le trafic du chemin de fer pendant trente-neuf jours.
En URSS, dès juillet 1941, Staline lance un appel à la radio qui donne l'ordre d'organiser des unités de partisans dans les territoires envahis, de faire sauter ponts et nœuds de communications, de couper les lignes téléphoniques, de mettre le feu aux entrepôts ; en vérité, ces actions ne prennent de la consistance qu'après 1942. Les partisans soviétiques restent étroitement liés à l'Armée rouge et intégrés à sa stratégie.
2.3. La résistance caritative
Cette forme de résistance se donne pour mission de venir en aide aux persécutés et d'apporter secours et protection aux diverses catégories de victimes : en premier lieu les Juifs, mais aussi les familles de résistants arrêtés et déportés. Elle leur fournit de l'argent, des hébergements, des « planques », des vêtements, des cartes d'alimentation. De véritables laboratoires de faux papiers sont organisés ; des prêtres délivrent de faux certificats de baptême ; des homes d'enfants arrachent à la mort des milliers de victimes potentielles. On met également sur pied des filières de médecins exerçant clandestinement au profit de Juifs camouflés, de résistants blessés ou malades, tel le groupe Medisch Contact aux Pays-Bas.
L'aide de l'Église
L'aide aux Juifs mobilise beaucoup de personnes, en particulier les Églises chrétiennes, qui participent largement à cet effort de sauvetage et élèvent parfois des protestations publiques contre les persécutions : on peut citer les lettres pastorales du Synode général de l'Église réformée de Hollande, en septembre 1941 ; celles d'évêques catholiques français au cours de l'été 1942 ; et les proclamations de résistance spirituelle de l'Église luthérienne de Norvège.
2.4. La radio, arme essentielle de la Résistance
La radio a été une arme à part entière du combat contre l'Axe. En effet, le moral des peuples occupés, livrés à l'oppressante propagande de l'ennemi, avait besoin d'être constamment soutenu, et leur volonté de lutte aiguillonnée. Aussi la TSF devint-elle dès le début un outil capital de la guerre psychologique. La BBC fut la plus écoutée des stations alliées, Radio-Moscou (qui possédait l'émetteur le plus puissant du monde et qui avait la plus longue expérience de propagande par les ondes) n'étant captée que dans les pays de l'Est et écoutée que par les communistes.
Les programmes diffusés par la Suisse, pays neutre, étaient assez recherchés en raison de leur réputation d'objectivité. Malgré les efforts acharnés des occupants pour brouiller les émissions de Londres, la BBC, qui diffusait dans toutes les langues et s'adressait à chacun des pays européens y compris l'Allemagne et l'Italie, a joué un rôle déterminant : elle a pu transmettre des consignes d'action à la masse de ses auditeurs et envoyer aux mouvements et réseaux de résistance des instructions sous forme d'innombrables messages codés. La BBC a beaucoup servi la Résistance gaulliste, le général de Gaulle – et avec lui la France libre – n'ayant eu pendant longtemps, pour la plupart des Français, d'autre existence que radiophonique.
3. La Résistance à l'ouest de l'Europe
3.1. Traits généraux
Elle associe résistance civile et propagande à une résistance plus militaire, tournée vers le renseignement puis la formation de maquis. On compte alors une dizaine de pays occupés : Pologne, Norvège, Danemark, Pays-Bas, Belgique, France, Yougoslavie, Grèce, territoires envahis de l'Union soviétique. Les régimes d'occupation varient néanmoins beaucoup, depuis l'occupation « douce » du Danemark jusqu'à la férule cruelle tenue sur la Pologne dépecée et réduite au « Gouvernement général » ou sur l'Ostland (Biélorussie et pays Baltes) et l'Ukraine, régions administrées par des Reichskommissare.
3.2. Pays-Bas
Aucun armistice n'a été signé ; la reine Wilhelmine est partie en Grande-Bretagne. La résistance sera surtout intellectuelle et morale (protestations contre les mesures antisémites). À partir de 1944 toutes les actions seront coordonnées, sur le plan militaire, par le prince Bernard, et sur le plan politique par le Grand Conseil de la Résistance.
3.3. Belgique
Si le gouvernement Pierlot a rejoint Londres, le roi Léopold III est resté en Belgique. La Résistance s'exerce d'une façon très efficace par les réseaux d'évasion et de renseignements. Tous les groupements armés s'unifient en juin 1944 (Forces belges de l'intérieur).
3.4. Norvège
Le roi Haakon VII et son gouvernement rallient l'Angleterre. L'exploit le plus spectaculaire de la Résistance sera la destruction de l'usine d'eau lourde (février 1943).
3.5. Danemark
Resté sur place, le gouvernement décide, devant les exigences allemandes, sa propre dissolution en août 1943. Des mouvements de grève générale se développeront à partir de l'été 1944.
3.6. La Résistance française
Une situation particulière
La Résistance française est une synthèse ; la France occupe une position particulière en raison : d'une part, de l'existence, d'une zone occupée par les Allemands et d'une zone « libre » (qui sera occupée à son tour en novembre 1942), d'autre part, de la présence, à Vichy, d'un gouvernement dirigé par le maréchal Pétain. En conséquence, la Résistance française revêt un double aspect : lutte contre l'occupant allemand, mais aussi lutte contre le régime de Vichy, sa « révolution nationale » et sa politique de collaboration.
Seuls quelques isolés réagissent au désastre et à l'armistice de juin 1940 (manifestation patriotique des étudiants parisiens le 11 novembre 1940, distribution des premiers tracts et des premières feuilles clandestines). La radio anglaise joue un rôle essentiel en faisant connaître de Gaulle et la France libre.
En zone occupée
En zone occupée naissent de nombreux mouvements de résistance (→ Musée de l'Homme, Valmy, Libération-Nord, Résistance, Organisation civile et militaire [OCM], Ceux de la Résistance) auxquels se joindront, après l'entrée de la Wehrmacht en URSS, les organisations du parti communiste (→ Front national et Francs-Tireurs et Partisans français).
En zone libre
En zone libre, la Résistance s'affirme de manière plus politique. Les activités s'organisent autour de trois grands mouvements : Combat, Libération et Franc-Tireur. Combat résulte de l'union du réseau Liberté, de François de Menthon, avec le Mouvement de libération nationale, organisation fondée par Henri Frenay ; Combat se ralliera à de Gaulle en 1942. Claude Bourdet ou Georges Bidault en sont membres. Libération-Sud est créé en 1941 par Emmanuel d'Astier de la Vigerie. En 1940 naît Franc-Tireur, qui organise le premier maquis près de Grenoble en janvier 1942.
Le BCRA
Dans les deux zones, des réseaux liés au Bureau central de renseignements et d'action (BCRA) ou aux services anglais, renseignent, sabotent ou aident à rapatrier les aviateurs alliés. À partir de 1943 se créent des maquis, structures d'accueil pour les réfractaires et futures bases opérationnelles destinées à aider les Alliés à la libération.
L'unification de la Résistance
Quant à de Gaulle, pour affirmer la légitimité de son action vis-à-vis des Alliés, il a besoin de se faire reconnaître comme le chef d'une résistance unifiée. Tâche dont s'acquitteront, chacun à leur manière, Jean Moulin, Pierre Brossolette et le colonel Passy.
C’est plus particulièrement au préfet Jean Moulin, délégué personnel du général de Gaulle, que l’on doit l’unification de la résistance intérieure. Le 27 mai 1943, sous sa présidence, a lieu, à Paris, 48 rue du Four, la première réunion du Conseil national de la Résistance (CNR) qu'il a mis sur pied. Cependant, Jean Moulin, vraisemblablement trahi, est arrêté le 21 juin 1943. Georges Bidault lui succède à la tête du CNR.
Après le débarquement allié en Afrique du Nord (8-11 novembre 1942), cette marche vers l'unification est concrétisée par la fusion des trois mouvements de la zone sud dans les Mouvements unis de Résistance (MUR), puis par l'intégration des principaux mouvements, des partis résistants et des centrales syndicales clandestines dans le CNR. À Alger, de Gaulle constitue le Comité français de libération nationale (CFLN) dont, il devient le seul président après avoir écarté Henri Giraud.
Vers la libération de la France
En juin 1944, le CFLN est transformé en Gouvernement provisoire de la République française (GPRF). Les Forces françaises de l'Intérieur (FFI) sont progressivement formées à partir du printemps 1944 et compteront sans doute quelque 500 000 hommes à l'été (chiffre à rapprocher des 270 000 « combattants volontaires » reconnus par les pouvoirs publics). Les FFI participent aux combats de la Libération sous les ordres du général Kœnig, notamment en harcelant les convois allemands qui montent vers le front lors des débarquements alliés. Enfin, une partie des FFI est intégrée à la Iere division blindée du général de Lattre de Tassigny.
La Libération
Après quatre ans de luttes, la Résistance s'est imposée. Sans exagérer son rôle militaire, elle a contribué à hâter la libération du pays. Elle est parvenue à éliminer les autorités vichystes et à accéder au pouvoir sans déclencher une guerre civile ; elle a obligé les Alliés à reconnaître le général de Gaulle comme chef légitime du gouvernement français. Deux forces politiques émergent de ses rangs ; de Gaulle (qui refuse de créer un parti à la Libération) et le Mouvement républicain populaire (MRP), qui regroupe les partisans de la démocratie-chrétienne (novembre 1944). Auréolé par sa participation à la lutte clandestine et le prestige de l'Union soviétique, le parti communiste bénéficie d'une grande influence et participera au gouvernement jusqu'en mai 1947.
5. La Résistance en Europe orientale
5.1. Traits généraux
Elle s'affirma davantage dans les maquis et dans la guérilla que dans la guerre psychologique ; plus qu'ailleurs elle a revêtu un caractère populaire.
5.2. Tchécoslovaquie
Aussitôt après les accords de Munich (1938), le président Beneš est parti à Londres. S'il y a peu de groupes armés en Bohême, les maquis sont nombreux en Slovaquie où ils opèrent en liaison avec l'Armée rouge.
Pour en savoir plus, voir l'article Tchécoslovaquie.
5.3. Les résistances polonaises
Après l'écrasement militaire et le partage du pays entre Allemands et Soviétiques, les Polonais endurent pendant cinq ans la plus effroyable des occupations. Réduits à l'état d'esclaves travaillant pour le peuple allemand, chassés et dépossédés de leurs terres et de leurs biens, soumis à une brutale politique de germanisation, ils réagissent en bloc à la volonté nazie de destruction physique des élites nationales.
L'Armée de l'intérieur
De 1941 à 1945, la Résistance polonaise se trouve néanmoins dans une situation très particulière par rapport aux autres pays européens : elle se compose de deux organisations rivales, d'importance inégale par ailleurs. Toute la Résistance reconnaît dans un premier temps l'autorité du gouvernement réfugié à Londres et gouverné par le général Sikorski. C'est cette Armée de l'intérieur (Armia Krajowa) qui déclenche la dramatique bataille de Varsovie le 1er août 1944, férocement réprimée par les Allemands. Alors qu'il semblait que l'Armée rouge pouvait libérer la ville, les troupes soviétiques marquèrent une pause dans leur progression, ce qui sera interprété après la guerre comme une volonté délibérée de laisser massacrer les résistants polonais non communistes.
Le mouvement communiste
Il est certain que cette attitude profita à l'autre mouvement de résistance, soutenu par l'URSS, qui avait un soutien moindre dans le pays. Ce mouvement, formé de communistes et dirigé par le gouvernement provisoire établi à Lublin dès 1944, finira par éliminer les représentants du gouvernement polonais en exil à Londres.
La résistance juive
En Pologne se développe également une résistance juive, la plus puissante d'Europe, avec de petits groupes de partisans qui opèrent dans les forêts, aux confins de la Biélorussie et des pays baltes. Mais la grande épopée de cette résistance est l'insurrection du ghetto de Varsovie, où survivent, en avril 1943, environ 70 000 Juifs : le 19, un millier de combattants décidés à « mourir dans l'honneur » se dressent contre les troupes allemandes ; ils combattront pendant vingt-six jours avec acharnement, tandis que le ghetto sera incendié et démoli maison par maison.
5.4. Yougoslavie
Dans les Balkans, la lutte contre l'occupant prend la forme d'actions de guérilla conduites par des francs-tireurs que les Allemands dénoncent comme des « terroristes » et contre lesquels ils exercent une répression féroce. La Yougoslavie offre l'exemple d'une guérilla victorieuse – favorisée, il est vrai, par la topographie : relief montagneux et tourmenté, régions cloisonnées, vastes étendues boisées – et d'une nation occupée libérée en large partie par ses propres forces, mais au prix de pertes terribles et d'une mémoire divisée et sanglante.
En effet, dès les débuts de l'Occupation, deux groupes distincts de résistants se constituent. D'un côté, le colonel Mihailović, patriote serbe anti-allemand et anticommuniste, rassemble d'anciens soldats et des paysans volontaires, recrutés essentiellement parmi les Serbes, et les organise en unités de Tchetniks.
De l'autre, de petites unités de partisans mobiles et pugnaces dirigés par Josip Broz, dit Tito, secrétaire général du parti communiste yougoslave, opèrent en Bosnie, en Dalmatie et en Croatie. Bientôt, ces dernières unités, qui résistent avec succès aux offensives de l'armée allemande, tandis que les troupes de Mihailovic se montrent passives et entretiennent des relations douteuses avec l'adversaire, apparaissent comme le noyau le plus actif et le plus efficace de la résistance.
La rupture éclate dès la fin de 1941, allant jusqu'à la lutte ouverte. Tito, qui préconise la formation d'une Yougoslavie fédérée après la guerre, obtient l'appui britannique. Son « armée de libération nationale » libérera seule le sol national, ne recevant l'aide soviétique qu'au cours des ultimes combats pour Belgrade.
Pour en savoir plus, voir l'article Yougoslavie
5.5. Grèce
Deux mouvements se disputent le pays : l'EDES, royaliste, et l'ELAS, communiste. Ce dernier l'aurait sans doute emporté à la fin de 1944 sans l'intervention des forces britanniques à Athènes.
5.6. Union soviétique
L'originalité de la Résistance russe est d'avoir opéré en liaison avec une armée régulière et sous les ordres d'un gouvernement demeuré dans le pays. La tactique de la « terre brûlée » fut particulièrement spectaculaire dans les territoires occupés par la Wehrmacht.
6. La Résistance dans les pays de l'Axe
6.1. Italie
D'abord émigrée, la Résistance au fascisme constitue, en décembre 1942, un front national d'action en Italie du Nord. Après septembre 1943, la Résistance se développe dans les territoires demeurés sous contrôle allemand et dans la république de Salo, près du lac de Garde. La Résistance est dirigée par le Comité de libération nationale, qui rassemble six partis (notamment les démocrates-chrétiens, les communistes, les socialistes et les libéraux), sous l'autorité de Ferruccio Parri, du communiste Luigi Longo et du général Cadorna.
6.2. Allemagne
Bien que l'opposition politique ait été muselée avec l'arrivée de Hitler au pouvoir, certaines voix s'étaient élevées dans les milieux religieux pour condamner la doctrine nazie. La tentative la plus marquante reste celle de militaires, conservateurs qui, convaincus de la défaite inéluctable, tentèrent d'assassiner Hitler.
L'Église luthérienne
Une partie de l'Église luthérienne s'oppose au projet des nazis de soumission au Reich. L'Église du Reich, qui reçoit l'aval du pouvoir hitlérien, est dominée par les Chrétiens allemands, une organisation satellite du parti nazi. Face à elle se dresse, à partir de 1934, l'Église confessante (Bekennende Kirche), animée par les pasteurs Dietrich Bonhoeffer et Martin Niemöller, qui critique ouvertement l'idéologie antisémite propagée par les nazis et la réinterprétation de la Bible par l'Église du Reich. Bonhoeffer est arrêté par la Gestapo et pendu le 9 avril 1945 ; Niemöller est arrêté en 1936, et malgré une campagne internationale en sa faveur, il est placé en camp de concentration comme « prisonnier perpétuel ».
Le Concordat signé le 20 juillet 1933 entre l'Église catholique et le Reich interdit à la hiérarchie catholique de s'immiscer dans la politique de l'État. Pourtant, certains évêques protestent contre la politique nazie ; ainsi, l'évêque de Münster, Clemens von Galen, dénonce l'extermination des malades mentaux, et de nombreux prêtres stigmatisent les exactions dont sont victimes les Juifs, tel le prieur de la cathédrale de Berlin, Bernhard Lichtenberg, au lendemain de la Nuit de cristal.
L'Orchestre rouge
Divers autres groupes ou individus mènent des actions de résistance. Au début des années 1930, le conseiller scientifique du gouvernement Arvid Harnack et le lieutenant Harro Schulze-Boysen forment l'organisation Harnack-Schulze-Boysen, plus connue sous le nom que lui attribua la Gestapo d'« Orchestre rouge ». L'activité de l'organisation s'oriente à la fois vers la dénonciation du caractère criminel du régime nazi et l'opposition à la guerre ; le groupe se livre également à des activités de renseignements, informant l'Union soviétique de l'imminence de l'attaque de 1941, puis coopérant avec les Soviétiques en leur transmettant des secrets militaires. À la fin de 1942, l'organisation est démantelée, 119 personnes sont arrêtées et 50 sont exécutées. En 1942, l'organisation Harnack-Schulze-Boysen était entrée en contact avec la Rose blanche, organisation fondée à l'université de Munich par quelques étudiants et un professeur de philosophie ; le réseau de ce dernier groupe s'étend jusqu'à Hambourg et d'autres villes d'Allemagne, jusqu'à l'arrestation et l'exécution de ses membres, en 1943.
Femmes résistantes
Les femmes jouent un rôle important dans la Résistance allemande : le programme des nazis les excluent de fait de toute responsabilité, ne leur laissant que le choix d'être de bonnes mères allemandes vouées à la trilogie « Kinder, Küche, Kirche », soit « enfant, cuisine, église ». De nombreuses femmes paient leur résistance de leur vie ; citons Liselotte Hermann, communiste, arrêtée en 1935 et exécutée en 1938 ; Libertas Schulze-Boysen et Mildred Harnack-Fish, les épouses des fondateurs de l'organisation Harnack-Schulze-Boysen, qui travaillèrent pour cette organisation ; Maria Terwel, qui aida les Juifs en leur obtenant des passeports et qui fut exécutée le 5 août 1943. Grâce aux importantes manifestations qu'elles organisent fin février 1943, à Berlin, des femmes « aryennes » – selon la définition des lois raciales de 1935, dites lois de Nuremberg – mariées à des Juifs sur le point d'être envoyés vers les camps d'extermination réussissent à obtenir la libération de leurs maris, soit quelque 1 700 personnes.
Généraux allemands
Dans la haute hiérarchie militaire du IIIe Reich, un certain nombre d'officiers allemands s'opposent à la guerre voulue par Hitler. La principale conspiration militaire débouche sur l'attentat du colonel Claus Graf von Stauffenberg contre Hitler, le 20 juillet 1944, attentat qui échoue mais tue cependant une vingtaine de personnes. Parmi les principaux officiers impliqués, le général Ludwig Beck et le maréchal Von Kluge se suicident une fois connu leur échec. Enfin, notons que Hitler échappa à plusieurs attentats, dès l'année de sa prise du pouvoir.
Consulter aussi le site du Centre d'histoire de la Résistance et de la déportation http://www.chrd.lyon.fr/chrd/