À leur projet, l'Italienne Gae Aulenti, 56 ans, l'un des maîtres du design contemporain, ajoute deux tours en fond de nef, pour caler l'ensemble. C'est elle aussi qui conçoit tous les aménagements intérieurs.

L'Institut du monde arabe

D'abord prévu sous Giscard, quai de Grenelle, par l'architecte Henry Bernard, l'Institut change, aux lendemains des élections présidentielles, et de site et d'architecte. Le voici dorénavant en chantier, quai Saint-Bernard, près de la faculté de Jussieu.

À 38 ans, Jean Nouvel, l'emporte. Créateur du syndicat (dissident) de l'architecture, voici ce contestataire de l'Ordre, titulaire d'une très officielle commande. Pour cette nouvelle Sorbonne du monde arabe — 25 000 mètres carrés —, il joue à fond « l'expression de la modernité la plus récente » tout en prenant en compte la physionomie du quartier, mais en évitant les références trop explicites à l'art islamique.

Dessiné en collaboration avec Martin Robain, l'Institut épouse la courbe du quai. Face à Notre-Dame, le chevet du bâtiment (séparé en deux ailes par une profonde faille de marbre blanc, sorte de patio revu et corrigé), laissera voir en transparence une tour de Babel-bibliothèque. Vis-à-vis de la faculté, au sud, subtile innovation technique : une façade cinétique fera jouer, en fonction de la lumière, une trame de dessins géométriques d'inspiration arabe. Avec l'Institut, qui sera achevé au printemps 1986, naît le premier monument de cette nouvelle architecture française, jusque-là cantonnée au logement social.

Le parc de La Villette

Un concours international, finalement à deux degrés, désigne, à l'automne 1982, Bernard Tschumi, 39 ans, comme maître d'œuvre de l'aménagement des 30 hectares d'un futur parc « urbain, populaire et animé ».

Plutôt qu'un parti prédéterminé de jardin rétro-bucolique ou celui d'un parc d'attractions futuriste, il préfère adopter pour La Villette une trame mathématique, rigoureuse mais abstraite, qui permette par la suite toutes les « manipulations » possibles. Pour distribuer un vaste programme de terrains de sports, salles de jeux, gymnases, thermes, ateliers, restaurants, etc., il trace trois systèmes formels qui se superposent.

Le visage concret du parc reste à inventer. Sur le terrain.

La Tête-Défense

Après un quart de siècle fertile en rebondissements, voici le dernier épisode d'un feuilleton où s'illustrent quatre présidents de la République. Il s'agit de savoir quel geste architectural est digne de ponctuer, à l'ouest de la capitale, la perspective triomphale qui va du Carrousel à la colline de Chantecoq, en passant par la Concorde et l'Étoile. De Gaulle opte pour la solution proposée par l'architecte sino-américain I. M. Pei. Pompidou défend, lui, les immeubles-miroirs d'Émile Aillaud. Quant à Giscard, il prône les immeubles en éventail de Jean Willerval.

Mitterrand préfère, pour sa part, lancer un concours international. Il ratifie le choix du jury qui retient au printemps 1983 la proposition du Danois Otto von Spreckelsen, 54 ans. Son projet est classiquement moderne : « une évidence », salue la critique, pour une fois unanime. C'est un portique cubique de 105 mètres de côté « ouvert comme une fenêtre sur l'avenir » (deux fois plus haut que l'Arc de triomphe) mais posé légèrement décalé sur l'axe « comme l'église de la place d'Espagne, à Rome ». Autre subtilité, les arches de l'arc taillées en biseau, comme le cadre d'un tableau, affinent la silhouette de l'édifice. Le tout est exécuté en marbre blanc de Carrare et vitres transparentes, pour éviter les effets brutaux.

Le ministère de l'Économie et des Finances

Première des innovations présidentielles lancée à l'orée du septennat, la construction d'un nouveau ministère des Finances va s'effectuer à l'est de Paris, à côté de la gare de Lyon. À l'issue d'un concours national (137 participants), le jury à l'automne 1982 retient quatre projets. Le président de la République entérine les préférences du jury, qui vont au projet de Bordja Hvidobro et Paul Chemetov, 55 ans, grand prix national d'architecture (en 1980), qui a surtout construit, jusque-là, des logements sociaux. Cette fois, il s'agit d'abriter 5 300 fonctionnaires — et leurs ordinateurs —, sur quelque 150 000 mètres carrés. Ils proposent, sur un terrain perpendiculaire à la Seine, un long bâtiment aqueduc qui vient s'ancrer au bord de l'eau, enjambant le quai de la Rapée, d'une arche de 70 mètres de portée.

Le Grand Louvre

Avec le déménagement du ministère des Finances, le musée du Louvre gagne 55 000 mètres carrés supplémentaires. C'est là l'occasion de réaménager totalement le palais pour que « le Louvre devienne le premier musée du monde », ainsi que le réclame lui-même le président de la République. Il s'agit de pouvoir exposer les réserves qui dorment, créer des infrastructures fonctionnelles de travail et d'accueil et, pourquoi pas ? des ateliers d'artistes comme au xviiie siècle et des galeries marchandes d'art.