Spécialisé essentiellement dans les non-ferreux et dans la sidérurgie fine, le nouveau groupe se donne un délai pour réexaminer sa vocation chimique. Cette dernière restera pour lui de toute façon assez secondaire.

Textiles

Marché intérieur maussade

La bataille remportée par la maxi sur la mini aura laissé sur le terrain une victime de taille : l'industrie textile. Malgré une hausse de 3 % du pouvoir d'achat en 1969, l'euphorie des achats d'après Grenelle et d'avant la dévaluation du franc ne s'est pas poursuivie, et une fois de plus, comme en 1967, le cycle du textile s'est retourné.

Principaux sous-secteurs touchés : les tissus de coton, le jute, la soie. Parmi les rescapés, on trouve le peignage de la laine (cette dernière a été la principale bénéficiaire du boom sur la maxi), la production de fibres synthétiques, et la filature du lin, de plus en plus utilisé dans l'ameublement. Au total, l'indice moyen de production aura été le même en 1970 qu'en 1969.

Année maussade donc, alors que les professionnels guettaient une reprise à partir du mois de juillet : l'augmentation forte et continue des salaires devait logiquement se répercuter au niveau de la consommation. Pourtant, ce n'est que dans le courant du quatrième trimestre (septembre et octobre surtout) que le ciel s'est éclairci, pour s'obscurcir de nouveau en novembre jusqu'en février. Seul vrai sujet de satisfaction pour 1970, le commerce extérieur : avec des exportations en progression de 19 % et des importations en recul de 1 %, la balance commerciale (7,3 contre 6,7 milliards) est largement excédentaire, en particulier avec la CEE, grâce à une augmentation de 37 % de nos exportations vers l'Italie.

Fragile relance

Le printemps de 1971 semble devoir marquer le début d'une relance et le retour des beaux jours, bien que deux phénomènes rendent sceptique quant à l'avenir d'un certain nombre de branches : l'évolution du commerce extérieur et la modification des méthodes d'achat des détaillants.

L'évolution du commerce extérieur touche surtout l'industrie cotonnière. De 1958 à 1969, la part des produits importés dans la consommation d'articles en coton est passée de 3 à 35 %. En même temps que la France perdait ses débouchés coloniaux, elle était envahie par les produits européens et depuis quelques années par les tissus très bon marché en provenance de Yougoslavie, du Pakistan et de l'Inde, voire des pays d'Extrême-Orient (Formose, Corée, Chine populaire). Malgré une baisse de 10 % des importations totales, les pays en voie de développement ont représenté en 1970 environ 40 % des importations françaises de produits cotonniers. Il y a dix ans, leur part était négligeable.

Production stagnante

Or, du fait de ce raz de marée qui a suivi la signature du traité de Rome, l'accroissement de la consommation intérieure (3 % par an) a été intégralement réalisé au profit des importations. Depuis dix ans la production est quasi stagnante, voire en recul (dans les écrus, par exemple). La production française de produits cotonniers a été la même en 1970 qu'en 1955.

Les industriels du Nord et de l'Est tremblent dans leurs fauteuils de PDG. Car plus d'un fabricant de popeline ou de mouchoirs sera obligé de fermer ses portes. Au mois de novembre dernier, les établissements Bonbon, du groupe Lévy (Timwear), ont cessé leur fabrication de pull-overs fully fashioned et licencié 412 ouvriers à Épinal. Explication : la concurrence des shetland en provenance de... Macao.

Modification des méthodes d'achat des détaillants : traditionnellement, les détaillants effectuaient leurs achats deux fois par an, à l'occasion des collections. Or, devant le goût de plus en plus prononcé du public pour les vêtements de fantaisie (l'habillement représente 50 % des débouchés du textile), ils ont été amenés à revoir leur stratégie. Résultat : on achète par petites séries et au coup par coup. Et l'on se réassortit quatre, six, voire dix fois par an, mais avec des modèles nouveaux.

Le confectionneur n'étant pas disposé à assumer les risques, c'est le tisseur qui paie les pots cassés. Et, paradoxalement, ce sont ceux qui ont fait le plus gros effort de rationalisation qui ont le plus grand mal à s'adapter.

« L'année Dollfus-Mieg »

Sur le plan structurel, l'année 1970 aura d'ailleurs été une année de consolidation des groupes existants, à l'inverse des années précédentes (1966 à 1968 surtout), qui avalent vu se constituer Prouvost-Masurel, Agache-Willot et Dollfus-Mieg (DMC). Les bons résultats de 1969 ont permis à un certain nombre d'entreprises de faire de la trésorerie.