Versailles (78000)
Chef-lieu des Yvelines, à 15 km à l'O.-S.-O. de Paris.
- Population : 87 253 hab. (recensement de 2018)
- Nom des habitants : Versaillais
GÉOGRAPHIE
Versailles est l'une des plus grandes villes des environs de Paris et la seule agglomération de la région parisienne qui, grâce à son passé, ne soit pas seulement un satellite de la capitale. Résidence royale et siège de la Cour sous Louis XIV, la ville ne compte encore que 25 000 habitants au début du xviiie s. ; mais, en 1789, sa population atteint 70 000 habitants ; tous les environs du château se sont couverts de résidences et d'hôtels particuliers, qui bordent des rues tracées sur un plan géométrique et les trois grandes avenues qui partent en éventail du château. La Révolution et l'Empire s'accompagnent d'un déclin de la cité royale, et ses habitants ne sont pas 30 000 en 1831. Au cours du xixe s., Versailles connaît un nouvel essor : le château et le parc attirent de plus en plus de visiteurs ; rentiers et retraités se retirent dans cette ville tranquille, qui retrouve peu à peu son ancien chiffre de population et qui étend des faubourgs élégants vers le N. et le N.-O. Facilité par la qualité des relations (surtout ferroviaires) vers Paris, la fonction résidentielle domine, mais des industries sont toutefois présentes (informatique, armement, constructions électriques). Aujourd'hui, Versailles est avant tout l'un des plus grands centres touristiques de la France. L'ancienne résidence royale est également une ville administrative, un centre judiciaire (cour d'appel), religieux (évêché), le siège d'une académie, alors que demeure la fonction militaire : l'armée occupe le camp de Satory, les anciennes écuries royales, construites par Mansart, et certains communs (hôpital, École supérieure du génie militaire).
L'HISTOIRE DE LA VILLE DE VERSAILLES
1. La ville des rois
1.1. Le hameau du Moyen Âge
La plus ancienne mention de la localité remonte au xie siècle : un certain Hugues de Versailles figure alors comme témoin dans une donation d'Eudes, comte de Chartres, en faveur de l'abbaye de Saint-Père. Dès cette époque, un hameau semble s'être constitué autour du château des sires de Versailles, vassaux du roi de France. Le village souffre très probablement des ravages de la guerre de Cent Ans et de la peste, sa population n'excédant guère une centaine d'âmes au xvie siècle.
1.2. Sous Louis XIII
Le château est reconstruit en style Renaissance, vraisemblablement pour le compte de Martial de Loménie de Brienne, sous-secrétaire d'État aux finances de Charles IX. Lorsqu'à sa mort la seigneurie passe à la famille de Gondi, le hameau du Moyen Âge est devenu un bourg de près de 500 habitants où les voyageurs qui se rendent de Paris en Normandie s'arrêtent volontiers. Quant au nouveau château, il héberge des hôtes illustres, à commencer par Henri IV. Cependant, l'intérêt des rois de France pour le domaine de Versailles date non pas du « Vert-Galant », mais de son fils et successeur : le caractère boisé et giboyeux de la région plaît en effet au grand chasseur qu'est Louis XIII. Celui-ci passe souvent la nuit au manoir, à proximité duquel il se constitue une « garenne » de plusieurs centaines d'hectares ; en 1632, le souverain achète la seigneurie à Jean-François de Gondi. Enfin, il fait exécuter des travaux d'agrandissement par l'architecte Philibert Le Roy. Néanmoins, mis à part la substitution de la juridiction royale à la justice seigneuriale, la vie du village ne subit pas de bouleversement majeur.
1.3. Un immense chantier
Tout change à partir de 1662 : Louis XIV, enthousiasmé par le site, entame alors l'édification de l'actuel palais. Désireux d'être entouré en permanence de ses nobles, le Roi-Soleil attire ces perpétuels endettés en décrétant l'insaisissabilité des immeubles construits à Versailles, en contrepartie de l'observation de strictes règles d'urbanisme. Des facilités de cession de terrain achèvent de favoriser la construction aux alentours. L'immense chantier, où affluent par milliers ouvriers, terrassiers, manœuvres, maçons, décorateurs, bourdonne pendant vingt ans ; le grand nombre d'accidents de travail commandera d'ailleurs la création de la maison de la Charité, devenue ultérieurement l'hôpital de Versailles.
Peu à peu, une vraie ville sort de terre autour du palais royal et de ses dépendances (Orangerie, Grandes et Petites Écuries). Les portails des hôtels aristocratiques (Lauzun, Noailles, Condé, Turenne, Villeroi, Gramont, Gesvres), que prolongent d'immenses jardins, s'ouvrent le long de larges rues pavées, éclairées et ombragées d'arbres. Non loin, des maisons de bois abritent les petites gens : ouvriers, domestiques, commerçants et artisans attirés par l'importance et la qualité de la clientèle, sans parler d'une masse plus ou moins trouble (des rixes éclatent presque toutes les nuits). Bref, toute une population mène une vie trépidante, en quête de fortune rapide : on spécule beaucoup dans l'immobilier. En 1715, Versailles avoisine les 20 000 âmes, chiffre considérable pour l'époque, mais cet essor se trouve brutalement stoppé, au lendemain de la mort de Louis XIV. Car le Régent et la Cour quittent Versailles, suivis, en quelques semaines, de la moitié des habitants.
1.4. Sous Louis XV
En 1722, le retour de Louis XV rend la vie et la prospérité à la cité, mettant ainsi fin à la période de léthargie, qui aura duré pendant toute la Régence. Au cours du règne de Louis XV, d'importants travaux d'urbanisme sont réalisés, notamment dans les nouveaux quartiers de Saint-Louis et du Parc-aux-Cerfs : construction du Poids-le-Roi (halle aux farines), de l'église Saint-Louis, des carrés Saint-Louis (marché), des écuries de la reine, des hôtels de Mme de Pompadour, de la Guerre, de la Marine et des Affaires étrangères ; agrandissement de l'hôpital ; création du collège d'Orléans ; sans parler des modifications considérables apportées à l'agencement intérieur du château. L'extension de l'agglomération, facilitée par le comblement de l'étang de Clagny, se poursuit sous Louis XVI en direction du nord.
1.5. Berceau de la Révolution
À la fin de l'Ancien Régime, Versailles, capitale du royaume, est devenue un grand centre administratif où vivent 50 000 personnes (courtisans, « officiers », magistrats, artisans, bourgeois) et dont les innombrables auberges et hostelleries accueillent des visiteurs venus de toute la France. La vie y est animée par les nombreuses distractions dues à la présence du roi : certaines, traditionnelles, tels les feux d'artifice, réceptions, défilés militaires, processions, représentations théâtrales (la salle Montansier date de 1777) ; d'autres, plus inattendues (envol du ballon de Montgolfier en 1783).
Pourtant, les jours de Versailles, ville royale, sont comptés. Certes, la réunion des États généraux et le serment du Jeu de paume s'y déroulent au tout début de la Révolution, mais son importance décline rapidement après le départ de Louis XVI, ramené de force à Paris (6 octobre 1789).
2. Depuis 1789
2.1. Ville de garnison
La cité a beau devenir le siège d'un évêché et le chef-lieu du département de Seine-et-Oise (1791), le chiffre de sa population n'en tombe pas moins à 25 000 en 1793. Au cours des années suivantes, Versailles, désormais éclipsée par Paris, acquiert la physionomie de ville de garnison qu'elle a conservée depuis : la création d'une manufacture d'armes (1795) est suivie, cinq ans plus tard, de l'installation de l'École d'instruction des troupes à cheval et des trompettes (future École de cavalerie de Saumur).
Les Versaillais accueillent la venue au pouvoir de Bonaparte avec faveur (1799), témoignant ainsi de leur goût pour l'ordre et la stabilité politique ; c'est d'ailleurs dans l'ex-capitale royale que nombre d'anciens émigrés se fixent à leur retour d'exil.
2.2. Ville de province et quartier général des Prussiens
Aussi la ville coule-t-elle des jours paisibles sous l'Empire, à peine troublés par le bref séjour du pape Pie VII en route pour le sacre de Napoléon (1804) et par des combats d'arrière-garde opposant les troupes françaises aux Alliés (1815). Peu après, Versailles reçoit dans l'enthousiasme la visite de Louis XVIII. Pourtant, son rôle de capitale est bien fini : aucun des frères de Louis XVI ne s'y installera.
Déchue, ravalée au rang de ville de province, Versailles somnole pendant presque tout le xixe siècle, atteignant péniblement 50 000 âmes à la fin du second Empire. Seul facteur positif de cette époque : la liaison ferroviaire avec Paris, qui est assurée à partir de 1839.
L'agglomération revient au premier plan de l'actualité en 1870 : les Prussiens l'ayant choisie comme siège de leur quartier général, Bismarck et Guillaume Ier y logent ; ce dernier choisit d'ailleurs de s'y faire proclamer empereur d'Allemagne dans la célèbre galerie des Glaces. C'est encore à Versailles qu'est conclu l'armistice du 28 janvier 1871.
Pour en savoir plus, voir l'article guerre franco-allemande.
2.3. Capitale politique et refuge du gouvernement
Sous la Commune, l'ancienne cité royale abrite le gouvernement et l'Assemblée nationale, revenue de Bordeaux, recouvrant ainsi sa fonction de capitale ; Thiers dirige la lutte contre l'insurrection parisienne de la préfecture, et concentre ses troupes dans les environs. La Commune vaincue, le Parlement, en majorité royaliste, n'en décide pas moins de rester à Versailles, jugée plus sûre, et il faudra attendre l'arrivée au pouvoir des républicains (1879) pour que le gouvernement et les deux chambres regagnent Paris. La ville retombe alors dans une torpeur interrompue seulement par la conférence de la paix (→ traité de Versailles, 1919).
VERSAILLES, VILLE D'ART
Les splendeurs du domaine royal ne doivent pas faire oublier que Versailles est une ville d'art, où l'urbanisme et l'architecture classiques sont à l'honneur. C'est le château qui en a suscité l'essor et commandé le plan. De la place d'Armes rayonnent en effet trois larges avenues, entre lesquelles trouvent place, avec leurs majestueuses cours en trapèze, les deux bâtiments des Grandes Écuries (pour les chevaux de selle de la maison du roi) et des Petites Écuries (pour les chevaux de trait). J. Hardouin-Mansart les éleva de 1682 à 1684. On doit au même architecte le Grand Commun (hôpital militaire jusqu'en 1995), dont l'imposant quadrilatère fait face à l'aile du Midi et dans l'alignement duquel Jean-Baptiste Berthier (1721-1804) édifia vers 1760 les deux beaux hôtels de la Guerre et des Affaires étrangères (aujourd'hui Bibliothèque municipale). Mansart avait aussi construit en 1674 pour Mme de Montespan, à l'est et assez loin du domaine royal, le grand château de Clagny, qui disparut en 1769.
De part et d'autre de la patte d'oie qui forme l'armature principale du tracé urbain, un quadrillage de rues et de places s'étend autour de deux églises : au nord, Notre-Dame, commencée en 1684 par Mansart ; au sud, Saint-Louis (cathédrale depuis 1802), bâtie de 1743 à 1754 par Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne (1703 ou 1709-1776).
Outre les édifices publics, la ville ancienne offre de nombreux hôtels, principalement du xviiie s. : ainsi celui de Mme de Pompadour, rue des Réservoirs ; l'hôtel Lambinet, aujourd'hui musée municipal ; celui qu'habita Mme du Barry et qu'occupe aujourd'hui la chambre de commerce. Édifiées par Nicolas Ledoux en 1770, les écuries (aujourd'hui caserne de Noailles) de ce dernier hôtel marquent l'avènement du style néoclassique, comme le couvent des Augustines (aujourd'hui lycée Hoche), de Mique, avec son élégante chapelle à coupole et portique, ou le pavillon de musique de la comtesse de Provence, de Jean Chalgrin (1784), avec sa décoration intérieure en trompe-l'œil.
Pour en savoir plus, voir l'article château de Versailles.