guerre franco-allemande (1870-1871)
Conflit qui, dans le cadre de la lutte menée par Bismarck pour établir l'unité allemande, groupa sous direction prussienne la totalité des États allemands contre la France.
1. Les forces en présence
Réorganisée par Roon et Moltke, l'armée prussienne est un instrument de guerre redoutable. L'armement est moderne : fusil Dreyse à aiguille, canon rayé Krupp pour l'artillerie, entraînée à agir par rapides concentrations de feux. Le grand état-major est pénétré des enseignements de Clausewitz et des doctrines napoléoniennes. Il jettera en première ligne plus de 400 000 hommes en trois armées et en mobilisera près de 1 200 000, selon des plans précis, auxquels le chemin de fer apportera la souplesse de ses moyens.
Quant à l'armée française, elle est peu préparée au combat moderne : l'infanterie est dotée de l'excellent fusil Chassepot, mais la cavalerie n'est pas orientée vers la recherche du renseignement, et l'artillerie a des matériels de qualité inférieure. Surtout, le haut commandement est de valeur médiocre : il attend tout de l'improvisation et de la valeur du soldat. La mobilisation des troupes « effectuée dans le désordre général » ne peut présenter au combat que 270 000 hommes, répartis en 7 corps d'armée, mal approvisionnés et peu capables de s'engager victorieusement dans la guerre que leur réserve l'adversaire.
2. Les opérations
Le plan allemand fixe l'objectif : Paris, et le moyen de l'atteindre : l'offensive à outrance, pour détruire les armées françaises. Deux armées (→ Steinmetz et Frédéric-Charles) feront irruption en Lorraine sur Sarrebruck et Metz, tandis qu'une troisième (prince royal de Prusse) conquerra l'Alsace et agira en flanc-garde de la masse principale. La concentration qui en découle rassemble les troupes entre Trèves et Landau.
3. Le plan français
Après une velléité de prendre l'offensive vers Würzburg, pour isoler de la Prusse les États du Sud, la conception stratégique se réduit à une attitude purement défensive des corps d'armée étalés en cordon de Thionville à Belfort. Seuls le 6e corps de Canrobert et la garde sont en réserve à Châlons et à Nancy.
4. La campagne
4.1. Les batailles des frontières (4-12 août)
La IIIe armée allemande prend l'offensive la première, franchit la Lauter le 4 août, et surprend à Wissembourg l'avant-garde de Mac-Mahon. Le 6 août, elle prend contact à Wœrth avec le 1er corps tout entier, et sa victoire de Frœschwiller, qui contraint Mac-Mahon à la retraite, lui livre l'Alsace. Le même jour, la Iere armée allemande, débouchant de Sarrebruck, bat Frossard à Spicheren, le rejette vers Metz, pénètre en Lorraine ; Nancy est occupé le 14 août. Deux jours plus tôt, l'empereur avait remis le commandement suprême à Bazaine, après avoir donné l'ordre de retraite générale sur Châlons, en vue de couvrir Paris.
Pour en savoir plus, voir l'article Alsace.
4.2. L'anéantissement de l'armée impériale (13 août-2 septembre)
Tandis que Mac-Mahon se replie sur Châlons et que Bazaine réunit sous Metz les corps de Lorraine, les Allemands vont agir pour empêcher leur jonction. Leur premier objectif est de fixer et de détruire l'armée de Lorraine. Pour cela, la Iere armée retardera sa retraite pendant que la IIe glissera rapidement au sud de Metz pour la déborder par l'ouest et lui couper les routes de Verdun. De cette manœuvre découlent les grandes batailles sous Metz : Borny (14 août), Rezonville (16 août) et Saint-Privat (18 août), à la suite desquelles Bazaine s'enferme dans Metz, où il capitulera le 27 octobre (→ opérations et siège de Metz).
De son côté, Mac-Mahon, arrivé à Châlons le 14 août, reforme une armée de 120 000 hommes et se prépare à venir couvrir Paris. Mais le nouveau ministre de la Guerre, Cousin-Montauban, préfère lui faire prendre l'offensive pour tenter de rejoindre Bazaine par le nord. Pris en tenaille par la IIIe armée allemande, acharnée à sa poursuite, et par une IVe armée détachée des forces qui assiègent Metz, l'armée de Châlons est rejetée sur Sedan, où elle doit capituler le 2 septembre, l'empereur en tête, après avoir vainement tenté de forcer les lignes ennemies : l'armée impériale est désormais hors de combat (→ bataille de Sedan).
4.3. L'organisation de la défense nationale (4 septembre-4 décembre)
La nouvelle du désastre de Sedan provoque à Paris la déchéance de l'empereur, et, le 4 septembre, la proclamation de la république. Le gouvernement de la Défense nationale, aussitôt formé sous la présidence du général Trochu, décide de poursuivre la guerre. Tandis que les généraux Trochu et Vinoy organisent la défense de la capitale et tentent à Châtillon (19 septembre), puis au Bourget (28-30 octobre), de briser l'investissement adverse, la délégation de Tours, que Gambetta, parti de Paris en ballon, rejoint le 9 octobre, met sur pied les armées nationales.
Partant de ressources minimes (80 000 hommes dans les dépôts), elle met sur pied des services, achète des armes à l'étranger, et mobilise environ 600 000 hommes de vingt à quarante ans. Secondé par Freycinet, délégué à la Guerre, Gambetta forme 12 corps d'armée, équipés de 1 400 canons. La Iere armée de la Loire, sous d'Aurelle de Paladines, reçoit mission de débloquer Paris en liaison avec une sortie de la garnison. Victorieuse à Coulmiers (9 novembre), elle est bientôt battue par les forces ennemies que la capitulation de Metz a rendues disponibles (→ les armées de la Loire).
4.4. La résistance en province et la chute de Paris (2 décembre 1870-28 janvier 1871)
Après la perte d'Orléans (5 décembre), les efforts concertés pour sauver Paris doivent être abandonnés, et l'action se localise en province. Dans le Nord, Faidherbe harcèle l'ennemi, qui a occupé Rouen et Amiens, et le bat à Pont-Noyelles (23 décembre) et à Bapaume (3 janvier). S'il succombe à son tour à Saint-Quentin (18-19 janvier), sa résistance vaudra, du moins, aux départements du Nord et du Pas-de-Calais d'échapper à l'occupation ennemie de 1871-1873.
Dans l'Ouest, la IIe armée de la Loire (→ Chanzy) doit battre en retraite sur la Mayenne, après la défaite du Mans (11-12 janvier). Dans l'Est, enfin, Bourbaki attaque les communications ennemies, et se porte sur Belfort, que la défense héroïque de Denfert-Rochereau conservera à la France. Il remporte un succès d'avant-garde à Villersexel (9 janvier), mais ne peut vaincre à Héricourt (15-17 janvier). Pris à partie par l'armée de Manteuffel, il est contraint de passer en Suisse. À Paris, après une tentative de sortie à Buzenval (19 janvier), le gouvernement doit signer l'armistice le 28 janvier 1871 (→ siège de Paris).
5. Les conséquences
Dès le 18 janvier 1871, après que Bismarck, pendant le siège de Paris, eut difficilement obtenu l'accord de la Bavière (traité de novembre 1870), la guerre vaut à la Prusse le couronnement de son souverain à Versailles comme empereur allemand. Par les préliminaires de Versailles (26 février), confirmés par le traité de Francfort (10 mai), la France perd l'Alsace et Metz, et doit payer une indemnité de guerre cautionnée par une large occupation du territoire national. Mais le refus opposé par la capitale à la politique du gouvernement provoque la Commune.
Pour en savoir plus, voir les articles Napoléon III, second Empire.