la Loire
Le plus long (1 020 km) et le seul grand fleuve entièrement français par son bassin (115 120 km2).
GÉOGRAPHIE
La Loire arrose Roanne, Nevers, Orléans, Blois, Tours, Saumur, Angers (Les Ponts-de-Cé), Nantes et se jette dans l'océan Atlantique à Saint-Nazaire.
Le cours
Née à 1 408 m d'altitude au mont Gerbier-de-Jonc, un pointement volcanique en Ardèche, aux confins du massif granitique du Vivarais et du Velay, à moins de 150 km de la Méditerranée, la Loire est aussitôt sollicitée par les cassures méridiennes et tertiaires du Massif central et prend la direction du N.. Fleuve de montagne aux prises avec un relief tourmenté, elle s'écoule rapidement entre les massifs granitiques de la bordure orientale du Massif central : monts du Velay cristallin (franchit par les défilés d'Issarlès, d'Arlempdes, de Peyredeyre, de Chamalières, d'Aurec, de Pinay) et chaîne des Boutières, monts du Forez et monts du Lyonnais, monts de la Madeleine et monts du Beaujolais. Entre les défilés, elle traverse les bassins d'effondrement d'Emblavès, du Puy, du Forez, puis franchit le seuil de Neulise.
Grossie de l'Ance, du Lignon du Velay, du Lignon du Forez et du Furons, elle entre en plaine, en Sologne bourbonnaise, à Roanne (268 m), après un parcours de 285 km. Modeste cours d'eau encore, elle s'attarde en méandres dans le fossé bourbonnais, où elle reçoit l'Arroux, la Bourbince et la Nièvre. Elle reçoit l'Allier, son principal affluent (rive gauche), en entrant dans le Bassin parisien, à Decize, dans la Nièvre, en aval de Nevers, entre Nivernais et Berry. La Loire n'est plus alors qu'à 172 m d'altitude.
Emportée vers l'O. en Orléanais par la subsidence cénozoïque de tout le sud du Bassin parisien (mer des faluns), elle amorce une ample inflexion dans des terrains sédimentaires. Pendant cette traversée, elle ne reçoit pratiquement aucun affluent. Sa vallée longe la Sologne, s'élargissant dans l'Orléanais (une dizaine de kilomètres de largeur au niveau d'Orléans), perdant ses eaux dans des sols détritiques (résurgence du Loiret). Son lit, encombré de bancs de sable, s'étale alors dans une large gouttière est-ouest, bordée de levées et de digues. Sa vallée, bombée en son centre entre deux dépressions latérales, s'individualise : c'est le Val (Varennes en Touraine, Vallée en Anjou).
En aval de Tours, elle traverse d'abord les varennes de Touraine, vocable qui désigne le ruban de cultures riches allant jusqu'à Ingrandes-de-Touraine. C'est un ruban de villages, densément peuplé, pays d'élevage profitant des prairies humides et dont les fermes sont souvent établies sur des tertres en raison des dangers d'inondation. Souvent encaissée, la vallée est bordée par des coteaux abrupts composés de tuffeau et percés de multiples caves et d'habitations troglodytiques. À partir d'Ingrandes-de-Touraine, les varennes font place à la vallée d'Anjou. Du fleuve au coteau septentrional se développe une large plaine tapissée d'alluvions. Les terrasses, sableuses ou graveleuses, sont couvertes de vignes (saint-nicolas-de-bourgueil, bourgueil).
En dehors du Beuvron, venu de la Sologne et qui conflue au sud-ouest de Blois, les principaux affluents qu'elle reçoit alors se jettent sur une étroite section, entre Tours et Angers : la Loire est renforcée en Touraine par le drainage berrichon et limousin, à gauche, par trois affluents venus du Massif central (le Cher, 320 km ; l'Indre, 265 km ; la Vienne, 372 km, grossie de la Creuse, 255 km), en Anjou par le faisceau de la Maine, à droite, qui concentre trois rivières venues de la Beauce et du Massif armoricain (la Mayenne, 200 km ; la Sarthe, 285 km ; le Loir, 311 km).
Du bec de la Maine à l'Atlantique, la Loire inférieure, grossie du Layon, de l'Esvre, de la Sèvre Nantaise (rive gauche) et de l'Erdre (rive droite), devenue désormais navigable, entame les roches cristallines du Massif armoricain, qu'elle traverse en se frayant difficilement un passage entre de hauts versants de schistes. La Loire débouche, 16 km après Nantes, sur l'Atlantique à Saint-Nazaire en un large estuaire, long de 35 km et remonté par la marée jusqu'à Nantes. Sur sa rive droite s'étendent les marais de la Grande Brière, dans une zone tectoniquement déprimée, et, sur sa rive gauche, la dépression du lac de Grand-Lieu et le pays de Retz. Un canal maritime longe l'estuaire, au delta immergé.
La Loire a créé, dans les élargissements de la vallée de son cours moyen, d'originales individualités (Val orléanais, Varennes tourangelles, Vallée d'Anjou). On désigne par Val les 520 km de cours qui, de Decize à Nantes, sont endigués (levées).
Le régime
Alimentée sur les neuf dixièmes de son cours par des apports du Massif central, la Loire est profondément marquée, dans son régime, par ses origines. Le fleuve, alimenté en automne et en hiver par des averses méditerranéennes et des précipitations océaniques, au printemps par des pluies océaniques et la fonte des neiges (type pluvio-nival), accuse en été de graves indigences. Ses sols imperméables successivement cristallins, argileux et schisteux, à l'exception des calcaires orléanais (résurgence karstique du Loiret) enregistrent sur-le-champ les à-coups du climat. Ses pentes raides, l'absence de glaciers et de lacs naturels exacerbent les écarts. Autour de débits moyens annuels peu significatifs, de 68 m3s à Villerest (Loire), 164 m3s à Nevers, 345 à Gien, 607 à Saumur, les débits tombent, à Villerest, de 106 m3s en mars à 15 en août. Le rapport reste partout, entre mois extrêmes (janvier-mars et août), voisin de 6. La Maine elle-même, tard venue avec un module de 140 m3s seulement, corrige mal sur le fleuve armoricain l'indigence estivale (1 644 m3s en février et 255 en août à Montjean pour un module de 871).
Capricieux dans ses variations annuelles, le régime l'est plus encore dans ses variations interannuelles. Les écarts interannuels, liés aux irrégularités climatiques, peuvent être énormes. Des étés très chauds et très secs creusent ses minimums à des valeurs dérisoires, avec quelques filets d'eau qui serpentent entre les bancs de sable : 12 m3s à Gien et 48 à Montjean en août 1949, 5 à Orléans en juillet 1870. C'est ce régime d'été qui donne à la Loire son originalité. Des perturbations climatiques élèvent ses maximums à des valeurs catastrophiques : trombes méditerranéennes d'automne sur le cours supérieur liées à des pluies atlantiques (octobre 1846, septembre 1866), averses océaniques prolongées d'automne et d'hiver sur le cours inférieur (novembre-décembre 1910, janvier 1936), pluies de printemps persistantes mêlées à une fonte des neiges subite (mai-juin 1856). Aucune saison, hormis juillet-août, n'échappe à ses excès. La Loire roulait à Montjean, en 1910, plus de 6 000 m3s d'eau ; au bec d'Allier. en 1846, 1856 et 1866, plus de 9 000 m3s (quatre fois le débit de la Seine à Paris au plus fort de la crue de janvier 1910). Aucun siècle ne passe sans qu'elle ne sème la désolation dans sa vallée. Avec un rapport de débits extrêmes de 800, elle est de loin le plus irrégulier des fleuves français. Son lit, tapissé de sables et de graviers qu'elle évacue mal, est fait d'une alternance de grèves souvent émergentes et de fosses, ou mouilles, profondes, entre lesquelles sinue son chenal d'étiage.
L'aménagement de la Loire
C'est cette nature instable qui a fait porter aussi à la Loire plus d'une sollicitude. Par la disposition orthogonale de son tracé ouvrant, de Paris, la province de la Bretagne au Rhône, par son utilisation par une batellerie active 2 000 ans durant, par le développement de la vie urbaine liée à son franchissement et à son exploitation, par les ressources qu'offrait sa vallée à l'agriculture, la Loire a suscité dans l'histoire de grands travaux et soutenu une longue prospérité. L'édification de ses levées, du ixe s. à nos jours, pour les besoins de la navigation et des villes d'abord, pour la protection des campagnes ensuite, reste comme un exemple magistral de tentative de maîtrise d'un fleuve. Ses villes principales ont compté parmi les premières de France. Aujourd'hui, évacuant en crue une eau de plus en plus vitale, en manquant l'été, souillée par la pollution, elle est le moins équipé des fleuves français. Ses levées, sableuses et rapprochées, sont impuissantes à contenir les grands flots (catastrophes de 1856 et 1866). De tous les barrages préconisés depuis le xixe s. sur le haut bassin pour écrêter les crues et soutenir les étiages, deux seulement, Villerest (à la sortie des gorges) et Naussac (bassin du haut Allier), ont été entrepris, mais ils servent surtout à refroidir les réacteurs nucléaires de Belleville-sur-Loire, Dampierre-en-Burly, Saint-Laurent-des-Eaux et Avoine, près de Chinon : la Loire est devenue, comme le Rhône, un grand support de production énergétique.
La Loire est reliée par de nombreux canaux à la Seine (canal de Briare, canal du Nivernais), à la Saône (canal du Centre) et au Cher (canal du Berry). Le canal latéral à la Loire (196 km) va de Briare à Digoin, puis à Roanne. Il est rattaché aux canaux du Nivernais, du Berry et du Centre. Ces canaux sont aujourd'hui désuets, voire déclassés. L'abus des dragages en Loire mine les ouvrages d'art (effondrement du pont de Tours en 1978). Le fleuve n'est plus (sauf en aval de Nantes) utilisé pour la navigation.
La Loire offre des possibilités immenses de mises en valeur agricole, hydroélectrique, touristique, avec le plan d'eau de Blois et les châteaux de la Loire, dont les principaux sont ceux de Langeais, Azay-le-Rideau, Amboise, Chenonceaux, Chaumont-sur-Loire, Blois, Chambord et Valençay. Le Val de Loire, entre Sully-sur-Loire et Chalonnes, a été inscrit sur la liste du patrimoine mondial par l'Unesco en 2000. Le Plan Loire Grandeur Nature, lancé en 1994, vise à aménager le fleuve. La gestion des inondations est un objectif majeur, aux côtés de la préservation de l’eau, des milieux et des espèces, la valorisation du patrimoine, la restauration de l’estuaire et le développement de la recherche.