Slaves

Groupe ethnique de l'Europe centrale et orientale et de l'Asie septentrionale (Sibérie) parlant les langues slaves.

1. Origines et premier habitat

Les Slaves ne représentent pas un type anthropologique et, a fortiori, une nation unique. On peut retenir, des controverses sans fin au sujet de leur « patrie d'origine », qu'une partie constitutive des Slaves d'aujourd'hui se rattache à la civilisation « lusacienne », qui fleurit près de Gniezno (territoire de l'actuelle Pologne) quelques siècles avant l'ère chrétienne (→ Lusace).

Dès le ier siècle apr. J.-C., Pline l'Ancien et Tacite parlent de Veneti (→ Vénètes), voisins orientaux des Germains.

Au iie siècle, Claude Ptolémée, tirant des informations des voisins méridionaux des Slaves, fait mention de Suovenoî, première apparition de la racine du mot « slave ». Le premier habitat des peuples slaves se situerait donc au nord des Carpates, entre le cours moyen de la Vistule et du Dniepr au nord et au sud de Kiev.

Les Protoslaves, peuples du Nord, devaient être dolichocéphales, type minoritaire chez les Slaves d'aujourd'hui ; séparés de la mer par les Baltes et les Finnois, ils n'étaient pas nomades. À l'écart des grandes routes commerciales, vivant dans un pays froid, boisé, marécageux (certains auteurs font dériver le terme de « slave » de la racine indo-européenne signifiant « marais »), les anciens Slaves étaient éleveurs, chasseurs, pêcheurs, et, bien que s'adonnant à la cueillette, n'étaient pas pour autant de vrais agriculteurs; leur système juridique se réduisait à la loi du talion, leur culte était animiste.

2. La grande migration avant le morcellement

Devant la menace des Huns et des Avars, les groupes slaves entament au ive siècle et surtout au vie siècle leur grande migration qui les conduira jusqu'à Trieste et au Péloponnèse. Ils ne seront repoussés ou assimilés qu'au-delà de l'Elbe et en Grèce. Leur expansion vers l'est ne sera pas arrêtée et gagnera la mer Noire. Leur union provisoire de tribus autour d'un prince, soumise à trop de dissensions internes, les laissera sans défense devant les invasions.

Selon les mots d'un écrivain grec du Moyen Âge, les Slaves étaient une nation anarchique. De fait, ils ont rarement réussi à s'organiser sur le type des grands empires médiévaux. Rassemblés successivement par Samo (VIIe siècle) et par les princes de Grande-Moravie (seconde moitié du IXe siècle), ils retournent à un morcellement, fatal à ceux qui n'occupent pas le sol de façon bien dense. Ainsi les croisades officielles allemandes détruisent ou assimilent (Xe siècle) les Slaves du Nord-Ouest ; la poussée germanique gagne bientôt les domaines tchèque, polonais et slovène.

L'arrivée des Magyars (Xe et XIe siècle), qui enfoncent un coin entre Slaves de l'Ouest et de l'Est et Slaves du Sud en Pannonie, détruit et assimile les tribus qui occupaient cette région avant eux ; ils imposent leur domination aux Slovaques (XIe siècle) et à la Croatie (XIIe siècle). La romanisation des Slaves de Roumanie par les Daces consolide les arrières de cette percée des non-Slaves jusqu'à la mer Noire.

3. L'évangélisation des Slaves : orthodoxes et catholiques

C'est à l'aube de ces invasions en Moravie qu'à la demande de Rotislav les apôtres grecs Cyrille et Méthode christianisent le pays et donnent aux Slaves leur premier alphabet (glagolitique, matrice du cyrillique) et une langue liturgique, le slavon ; à la même époque, Bulgares et Serbes se convertissent également à l'orthodoxie.

Au xe siècle, c'est le tour des Croates et des Polonais, qui adoptent, quant à eux, le rite romain. En faisant reculer les Bulgares, Tomislav de Croatie porte un coup à l'orthodoxie ; de la même façon, Boleslas le Vaillant, roi de Pologne, en s'appropriant la Moravie, catholicise ce pays, aidé en cela par l'action des clercs allemands (1003). Cependant l'expansion polonaise en Ukraine ne parvient pas à y supplanter le rite orthodoxe, établi par Vladimir Ier vers 988.

C'est de cette période que date la grande coupure entre Slaves orthodoxes d'écriture cyrillique et Slaves catholiques d'écriture latine. Ainsi, l'orthodoxie ne touche que les Slaves orientaux et les Slaves du Sud d'au-delà de la Save (Serbes, Bulgares, Monténégrins, Macédoniens, qui s'ajoutent aux Russes, Ukrainiens et Biélorusses). Les autres rejoindront Rome et seront imprégnés de cette culture occidentale.

Pour en savoir plus, voir l'article orthodoxie.

4. xiiie-xve siècles : sous le joug tatar ou ottoman

Du xiiie au xve siècle, la domination des Russes par les Tatars va ralentir leur évolution. La Russie ne s'en libérera que pour voir leurs frères balkaniques tomber sous le joug turc (→ défaite de Kosovo en 1389).

5. Du xvie au xviiie siècle

La période qui va de la Renaissance jusqu'au troisième partage de la Pologne (1795) voit s'affronter les deux derniers peuples slaves indépendants, Polonais et Russes. À cela vient se greffer un troisième modèle culturel, la Réforme, auquel s'identifient les Tchèques et une partie des Slovaques. Enfin, il convient de mentionner le cloisonnement socio-économique de l'Europe slave, qui aboutira aux xviie et xviiie siècles à un renforcement du servage direct et indirect, tout à fait anachronique par rapport à l'évolution de l'Occident.

6. xixe-xxe siècles : libération des nations slaves, panslavisme et soviétisation

Au xixe siècle, devant la pression des régimes ottoman et autrichien, se dessine un vaste mouvement des nationalités des groupes slaves. Parallèlement, se développe le panslavisme. La libération des nations slaves aboutit à la résurrection de la Bulgarie (1885), de la Pologne (1918) et à la création d'une Tchécoslovaquie et d'une Yougoslavie (1918).

L'URSS, après avoir ranimé la solidarité slave au cours de la Seconde Guerre mondiale, fait entrer les différents États slaves dans la zone d'influence soviétique.