SPD

sigle de Sozialdemokratische Partei Deutschlands, parti social-démocrate allemand

Du travail pour les pères ! Du pain pour les enfants !
Du travail pour les pères ! Du pain pour les enfants !

Parti politique né de la fusion en mai 1875 à Gotha de l'Association générale allemande des travailleurs (fondée en 1863 par Ferdinand Lassalle) et du parti ouvrier social-démocrate (fondé en 1869 par August Bebel et Wilhelm Liebknecht).

1. Avant la république

Quoique d'obédience marxiste, le parti ouvrier social-démocrate d'Allemagne est très influencé par les idées réformistes de Ferdinand Lassalle. Le congrès d'Erfurt (1891) adopte le programme théorique de Karl Kautsky, qui s'appuie encore sur le marxisme. Mais dans la pratique, le parti, qui a pris son nom actuel (Sozialdemokratische Partei Deutschlands), observe une ligne de plus en plus modérée, définie par les thèses révisionnistes d'Eduard Bernstein. En 1912, le SPD forme la fraction la plus forte du Reichstag avec 110 députés. Mais ceux-ci votent les crédits de guerre en 1914, ce qui accentue la division, au sein du parti, entre les modérés, partisans de l'union sacrée, et la gauche qui entreprend une propagande clandestine contre la guerre (Lettres de Spartakus) sous la direction de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht. En avril 1917, une fraction minoritaire des députés crée l'USPD (parti social-démocrate indépendant d'Allemagne), qui, joint aux spartakistes, organise de puissantes grèves pacifistes. Au moment de la défaite militaire allemande, le SPD est à l'initiative de la proclamation de la république (9 novembre 1918) et organise l'écrasement dans le sang de la révolution spartakiste (janvier 1919).

2. L'abandon du marxisme

Associé aux partis conservateurs, il dirige le gouvernement à deux reprises sous la République de Weimar (1918-1920 et 1928-1930). Mis hors la loi par Hitler en juillet 1933, il se reconstitue dès la fin de 1945 dans toutes les zones d'occupation, sous la direction de Kurt Schumacher. Sous l'impulsion des Soviétiques à l'Est, il fusionne avec les communistes pour former le SED (parti socialiste unifié d'Allemagne) en avril 1946 (→ parti communiste allemand). Mais, violemment anticommuniste à l'Ouest, le SPD élimine progressivement toute référence au marxisme (congrès de Bad Godesberg, 1959).

3. Partenaire de coalitions

Présidé par Willy Brandt (1964-1987), le parti participe au pouvoir, tout d'abord au sein d'une grande coalition avec les chrétiens-démocrates de la CDU (→ Christlich-Demokratische Union) de 1966 à 1969 puis à la tête d'une coalition avec les libéraux du FDP (→ Freie Demokratische Partei de 1969 à 1982 (gouvernements des chanceliers Brandt [1969-1974] et Schmidt [1974-1982]).

Après avoir échoué à plusieurs reprises à ébranler la suprématie de la CDU revenue au pouvoir en 1982, le SPD, dirigé successivement par Hans Jochen Vogel (1987-1991), Björn Engholm (1991-1993), Rudolf Scharping (1993-1995) puis Oskar Lafontaine, l'emporte lors des élections de 1998.

Gerhard Schröder devient alors chancelier et forme un gouvernement de coalition avec les Verts. Il succède à O. Lafontaine après la démission de ce dernier à la présidence du parti en 1999.

En 1990, le parti social-démocrate est-allemand, reconstitué à l'automne 1989 avec quelques dizaines de milliers d'adhérents, fusionne avec le SPD ouest-allemand. Plusieurs sociaux-démocrates dirigent alors des Länder de l'Est : Manfred Stolpe (1990-2002) et Matthias Platzeck (depuis 2002) dans le Brandebourg, Reinhard Höppner (1994-2002) en Saxe-Anhalt, Harald Ringstorff depuis 1998 en Mecklembourg-Poméranie occidentale.

Bien que sorti affaibli des élections législatives de septembre 2002 (38,5 % des suffrages, − 2,4 points), le SPD devance de 8 000 voix la CDU-CSU et peut reconduire la coalition sortante à Berlin. Il réélit à sa présidence G. Schröder en 2003, mais reste profondément divisé sur les réformes du système de protection sociale (Agenda 2010) mises en œuvre par le gouvernement SPD-Verts, jugeant celles-ci sans doute inévitables mais socialement inéquitables.

4. Un parti en crise

De 2002 à 2005, le SPD accumule les revers aux élections régionales, en particulier en mai 2005 en Rhénanie du Nord-Westphalie où la CDU le devance de 7,7 points de pourcentage. G. Schröder, qui a démissionné en 2004 de la présidence du parti au profit de Franz Müntefering, provoque alors des élections anticipées, qui en, septembre 2005 consacrent la défaite du parti (34,2 % des suffrages). Toutefois le score également mitigé de la CDU-CSU (35,2 %) permet au SPD de se maintenir au pouvoir au sein d'une grande coalition dirigée par la CDU-CSU, la deuxième du genre depuis 1966. Présidé par Matthias Platzeck (novembre 2005-avril 2006) puis par Kurt Beck, le SPD, fort de près d'un million d'adhérents à l'Ouest dans les années 1970, n'en compte plus qu'environ 600 000 dans l'ensemble de l'Allemagne en 2006.

Il se dote, en 2007, d'un nouveau programme, mettant en avant la référence au « socialisme démocratique », en réaction au reproche de « froideur sociale » que lui a valu en son temps l'Agenda 2010 du chancelier Schröder. Il s'agit également pour les sociaux-démocrates de réagir au bouleversement induit à l'arrivée sur sa gauche du nouveau parti de la gauche radicale, Die Linke, dont nombre d'adhérents et de sympathisants se recrutent parmi les déçus du SPD. Le parti est en effet déchiré entre une aile droite qui revendique l'Agenda 2010 et la poursuite de sa mise en œuvre, et une aile gauche (emmenée par K. Beck) qui souhaite renforcer le profil social du SPD et qui considère qu'un rapprochement avec Die Linke est inéluctable.

Après des mois de luttes intestines, c'est l'aile droite qui l'emporte lorsque K. Beck se retire de la présidence du parti au profit de F. Müntefering (septembre 2008), tandis que Franz-Walter Steinmeier, vice-chancelier depuis octobre 2007, est adoubé candidat à la chancellerie pour les élections fédérales de 2009. Le nouveau tandem, composé de deux défenseurs de l'héritage de G. Schröder, préconise le repositionnement du SPD au centre et son démarquage par rapport à Die Linke pour mieux la combattre. Talonné par cette dernière et pénalisé par les chrétiens-démocrates eux-mêmes recentrés, en rupture de ban avec une partie de son électorat et les syndicats, le SPD, plongé dans une crise idéologique profonde, enregistre son plus mauvais score (20,8 % des voix) aux élections européennes de juin 2009 ainsi qu'une défaite historique (23 % des voix) aux élections législatives de septembre qui le renvoie dans l'opposition. F. Müntefering est remplacé par Sigmar Gabriel, ministre sortant de l'Environnement, à la tête du parti (avec Andrea Nahles, représentante de l’aile gauche, comme secrétaire générale), tandis que F.-W. Steinmeier prend la présidence du groupe SPD au Bundestag.

Si le parti connaît une embellie lors des sept scrutins régionaux organisés en 2011 en maintenant ses positions ou en remportant l’élection (notamment à Hambourg, reconquise en février avec plus de 48 % des voix et à Berlin, conservée en septembre) l’affaiblissement de la coalition au pouvoir profite surtout aux Verts, dont le succès s’explique en partie par l’effet de la catastrophe nucléaire de Fukushima dans l’opinion. Devant aussi tenir compte de la bonne tenue de Die Linke dans les Länder où ce parti était déjà bien implanté (Mecklembourg-Poméranie occidentale, Saxe-Anhalt, Berlin), le SPD doit ainsi, s’il veut se présenter comme une véritable alternative et renoncer à une nouvelle « grande coalition », reposer la question des alliances dans le cadre d’une refondation de la gauche allemande.

Les élections de 2013 ne lui en donnent pas la possibilité : bien qu’ayant axé sa campagne électorale sur la justice sociale, son candidat à la chancellerie, Peer Steinbrück, ne réussit pas à contrecarrer Angela Merkel, donnée largement gagnante. Outre certaines de ses déclarations qui ont pu le desservir, cet ancien ministre des Finances (2005-2009) ne parvient pas à lever les ambiguïtés inhérentes au positionnement majoritairement social-libéral du SPD qui non seulement reste associé à la politique de rigueur menée depuis 2004 mais a également soutenu la politique européenne de la chancelière. Si avec près de 26 % des suffrages, le parti parvient à légèrement améliorer son résultat par rapport à 2009, il reste largement distancé par la CDU-CSU, tandis que son chef de file obtient un résultat médiocre dans sa circonscription.

À la suite de l’élimination du parti libéral, la reconstitution d’une « grande coalition » sous la direction de A. Merkel s’avère inévitable : à l’issue de négociations serrées, le SPD et la CDU parviennent à un accord prévoyant notamment l’introduction d’un salaire minimum universel et la revalorisation des petites retraites, un programme approuvé par plus de 75 % des militants du parti. Six ministres sociaux-démocrates (sur 15) entrent au gouvernement parmi lesquels S. Gabriel à la tête d’un grand ministère de l’Économie et de l’Énergie et F.-W. Steinmeier aux Affaires étrangères.

Cette participation est cependant sanctionnée aux élections de septembre 2017. En porte-à-faux, le candidat du parti, Martin Schultz, ne parvient pas à incarner une alternative face à la chancelière sortante (elle-même affaiblie). Le parti essuie une nouvelle défaite en ne remportant que 20,5 % des suffrages. Après avoir écarté dans un premier temps la reconduction de la « grande coalition », il revient sur cette position pour éviter des élections anticipées après l’échec des discussions entre les conservateurs, les libéraux et les Verts. À l’issue de négociations serrées avec la CDU-CSU, il participe de nouveau à un gouvernement de « grande coalition » formé en mars 2018. Si cette décision est approuvée par 66 % de ses militants, le parti reste affaibli et entre ainsi dans une phase critique de son histoire.

Pour en savoir plus, voir les articles histoire de l'Allemagne, Allemagne : vie politique depuis 1949.

Du travail pour les pères ! Du pain pour les enfants !
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  • 1875 Fondation du parti social-démocrate allemand.