Gaule
en latin Gallia
Nom donné dans l'Antiquité aux régions comprises entre le Rhin, les Alpes, la Méditerranée, les Pyrénées et l'Atlantique.
HISTOIRE
1. Introduction : l'identité de la Gaule
1.1. Gaule : les usages d’un mot
La Gaule correspond essentiellement à la France, mais, en ayant le Rhin pour limite, elle comprend aussi les actuels Luxembourg et Belgique, ainsi qu’une partie des Pays-Bas, de l’Allemagne et de la Suisse. Elle paraît avoir été habitée principalement par des Celtes, à une certaine époque ; le nom de Gaulois passait dans l'Antiquité pour synonyme de « Celte » (première mention chez Hérodote, vers 450 avant J.-C.), mais il prit de plus en plus le sens d'« habitant de la Gaule », et l'usage moderne est d'appeler surtout Gaulois les Celtes de Gaule.
Si la Gaule fut le pays des Gaulois, et la France celui des Francs, le nom de France (ou Francia) ne s'est répandu que longtemps après l’installation des Francs au ve siècle : le nom de Gaule est resté en usage parallèlement à celui de la langue latine (Gaule mérovingienne, carolingienne, du ve au ixe siècle). Ce nom s'est même étendu plus tard (xe siècle) à l'Allemagne ; pour les Italiens, Gaule désignait alors tout ce qui était transalpin.
1.2. Les subdivisions de la Gaule
Mais il exista aussi, dans l'Antiquité, une Gaule Cisalpine (« de ce côté » des Alpes, du point de vue romain), qui correspondait à l'Italie non péninsulaire, jusqu’au fleuve Arno, et qui fut aussi appelée parfois Italie Circumpadane ou encore Gallia togata (« en toge »), divisée en Cispadane et Transpadane, de part et d’autre du Pô, jusqu’à son rattachement à l’Italie en 42 avant J.-C.
De même, la Gaule proprement dite, parfois appelée par contraste Transalpine (ou Lyonnaise, ou Ultérieure), s'est également divisée dans la géographie des Romains : à la Gaule Narbonnaise, dans le Sud-Est, province romaine dès 121 avant J.-C., antérieurement dite Gallia bracata (« où l'on portait des braies »), s'opposa la Gallia comata (« aux longs cheveux »), qui restait à conquérir et que César appelait les Trois Gaules, en la divisant en Gaule Belgique (entre Rhin et Seine), Gaule Celtique (entre Seine et Garonne) et Aquitaine (entre Garonne et Pyrénées).
Les divisions administratives romaines devaient ajouter d'autres noms jusqu’au ive siècle après J.-C., produit de la subdivision de ces quatre sous-ensembles : c’est ainsi que la Narbonnaise fut divisée en Narbonnaise Première, Narbonnaise Seconde et Viennoise.
2. La Gaule avant la conquête romaine (jusqu’en 121-51 avant J.-C.)
2.1. L’arrivée des Celtes
Après avoir dit parfois que les Celtes n'étaient pas venus en Gaule, mais étaient des autochtones (Ferdinand Lot), ou situé leur venue à une date très tardive (Camille Jullian), les historiens avancent aujourd'hui l'hypothèse d'infiltrations lentes ou de vagues successives d'envahisseurs.
La civilisation des Champs d’urnes
La civilisation dite « des Champs d'urnes » commence vers 1100-1000 avant J.-C. dans l'est de la Gaule et se caractérise par des progrès dans la technique agricole, par une métallurgie améliorée du bronze et par des tombes à incinération, dans de grands cimetières, des champs d'urnes. Elle n'est pas propre à la Gaule, mais s'étend au sud de l’Allemagne, à l’est de la Suisse, à l’Autriche et à la Bohême, dans l’actuelle République tchèque. On hésite à parler de Celtes à son propos, et les populations sont parfois désignées du qualificatif de préceltique.
La civilisation de Hallstatt
L'époque de la civilisation de Hallstatt, qui suit (vers 900 [ou vers 725 selon J.-J. Hatt] - vers 450 avant J.-C.) et qui tient son nom d'une station du Salzkammergut, en Autriche, se situe au début de l'âge du fer. Alors se constitue une civilisation guerrière qui se reconnaît à ses sépultures : les chefs se font inhumer avec des épées de fer, sur la caisse d'un char dont les quatre roues sont rangées le long de la paroi de la chambre funéraire, sous un tumulus.
Issue de la Bohême, cette civilisation s'est étendue sur une région qui se situe à cheval sur le Rhin. Elle était en contact avec les Étrusques et les Grecs, dont elle savait se procurer les œuvres d'art (amphores du Camp du Château, dans le Jura ; trésor de Vix, à l'extrême fin de la période). On est fondé à qualifier de Celtes les tenants de cette civilisation, et ceux-ci sont apparus en tant que nation dans les mêmes cadres chronologiques et géographiques. Ils se sont alors répandus parfois très loin en Gaule (Massif armoricain et littoral méditerranéen en partie exceptés) et l'ont même traversée pour gagner la péninsule Ibérique et le sud-est de l’Angleterre.
La civilisation de La Tène
La civilisation de La Tène (ve-ier siècle avant J.-C., fer récent, du nom d'un site en Suisse) est, elle, la civilisation celtique par excellence. C'est la période où le monde celte prend conscience de lui-même, et aussi l'époque de la pénétration la moins discutée des Celtes les plus authentiques, cela sous la poussée des Germains ou, selon une théorie plus récente, sous l'effet d'un changement climatique refroidissant l'atmosphère et inondant les vallées. Son aire de diffusion recouvre celle de Hallstatt, ainsi que le reste des îles Britanniques, de la péninsule Ibérique, le nord de l’Italie, une partie des Balkans, voire de l’actuelle Turquie.
Cette période est marquée par des épisodes guerriers spectaculaires, comme le raid de Brennus sur Rome vers 390 avant J.-C. ou le sac de Delphes en 278 avant J.-C. par un autre Brennus (nom en fait dérivé du mot celtique brenn, « chef »).
Cette civilisation possède une puissante originalité. Les sépultures contiennent des chars à deux roues, du matériel d'importation (casques), mais aussi des interprétations artistiques originales, exprimant le goût des formes contournées et de la stylisation des animaux (vases de bronze, bracelets, colliers), à partir d'apports extérieurs (étrusques, grecs, scythes).
2.2. La celtisation de la Gaule
La Gaule Celtique
Au ive siècle, la population paraît dans le centre de la Gaule densément celtique : c'est d'ailleurs la région dite « Gaule Celtique », et qui aurait été en un temps (fin du vie siècle avant J.-C.) soumise à la domination d'Ambigat, roi biturige, sorte de Charlemagne celtique. Mais l'importance de ce personnage n'est nullement avérée.
La Gaule méditerranéenne
Sur la côte méditerranéenne, les Celtes s'infiltrent parmi les populations antérieures et leur apportent certains éléments culturels, que ce soit en pays ligure (→ plateau d'Entremont, Roquepertuse) ou non (→ montagne d'Ensérune, en Languedoc, où la civilisation des « indigènes » est remplacée à partir de 425 avant J.-C. par une autre, d'allure celto-grecque). Les Grecs de Marseille (fondée vers 600 avant J.-C.) sont attaqués à plusieurs reprises.
L’Aquitaine
L'Aquitaine était peuplée d'hommes plus proches des Ibères que des Celtes : ils étaient réputés experts en ruses de guerre, et les données toponymiques prêtent à débat (origine ibérique, ou d'une autre langue, voisine ?). Il est certain que les Aquitains ont eu leurs dialectes propres, et aussi qu'ils ont été mêlés de Celtes (présents dans les Pyrénées dès la fin de la période de Hallstatt), puis plus tardivement d'Ibères.
L’Armorique
L'Armorique n'a été pleinement celtisée qu'à la fin de l'Antiquité, au ive-ve siècle après J.-C., à la faveur d'une migration venant de la Bretagne insulaire, actuelle Angleterre. À l'époque gauloise, elle était peuplée de marins audacieux et ne s'est laissé pénétrer par les influences continentales qu'à l'époque de La Tène. La tradition des mégalithes y a survécu, atténuée dans l'édification des lechs, qui les rappellent tout en surmontant des sépultures de type celtique.
La Gaule Belgique
Le dernier flot d'invasion des Celtes continentaux est celui des Belges, arrivés à partir de 300 et peut-être jusqu'à 150 avant J.-C. Ils sont bien celtes, encore que César les ait crus germains. Il est vrai que la distinction entre Celtes et Germains s'est faite à une époque tardive et que l'Antiquité classique appelait simplement Germains ceux qui traversèrent le Rhin après la prise de contact de Rome avec la Gaule, c'est-à-dire après le flot des Belges. Les Belges, venus d'outre-Rhin – comme leurs prédécesseurs, ainsi dits « Celtes », et leurs successeurs, qualifiés de Germains –, se sont répandus de l'Argonne à la Manche, où ils n'ont fait que se superposer aux premiers arrivés. Leur civilisation correspond à La Tène II. César fait état de leurs mœurs, de leurs institutions originales et de leur parler, un peu différent de celui des autres Gaulois ; on leur attribue des tombes plates à incinération. La plus ancienne et la plus grande effigie « gauloise » qu'on ait découverte, en région parisienne, date de 180 avant J.-C.
2.3. L'évolution politique de la Gaule avant la conquête romaine
La stabilisation des populations
Après la mise en place des peuples celtes, désormais gaulois, la Gaule entre dans une période nouvelle : les tentatives d'invasion continuent, mais elles sont désormais vouées à l'échec. Les Cimbres et les Teutons, peuples germains partis du Danemark, déferlent de 113 à 101 avant J.-C. sur la Gaule, qui s'en trouve appauvrie (décadence de La Tène III), mais ils sont battus par les soldats de Caius Marius. Il apparaît ainsi que, dès ses débuts, la présence romaine contribue efficacement à la stabilisation des populations.
L’absence d’unité politique
L'histoire intérieure de la Gaule avant l'intervention romaine est à peu près complètement inconnue. Elle fut agitée de querelles entre peuples divers, et la possibilité d'une unité politique de quelque étendue reste hypothétique : après l'Empire biturige plus ou moins légendaire d'Ambigat, les Arvernes (au iie siècle avant J.-C.), puis les Éduens (au Ier siècle avant J.-C.) ont acquis momentanément une relative hégémonie en Gaule. Mais l'état politique ne s'y prêtait pas.
Peuples et tribus
On a pu comparer le compartimentage entre peuples à celui des cités grecques. Chaque peuple (civitas pour les Romains, au nombre de 60 environ) pouvait d'autant mieux s'isoler que son terroir s'y prêtait. Ces terroirs correspondaient souvent à des régions géographiques naturelles, au paysage original et aux confins marqués par une barrière forestière. Leur existence aurait d'ailleurs résulté de la fusion d'unités plus petites, les tribus (ou pagi pour les Romains, au nombre de 300 environ), à la fois unités militaires, groupes humains, puis zones territoriales.
Institutions politiques
Les Gaulois avaient eu des rois, dont quelques-uns subsistaient au temps de César. Ils avaient été généralement renversés au profit d'un régime aristocratique : un chef désigné annuellement, qui portait, au moins chez les Éduens, le titre de vergobret. Juge suprême, il avait le droit de vie et de mort sur tous. Il était assisté d'un conseil de chefs ou de chevaliers. C'est par ce dernier titre que les historiens anciens désignaient ces nobles gaulois, représentants de grandes familles qui se partageaient et, plus souvent, se disputaient le pouvoir, et tenaient leur importance à la fois de leurs propriétés foncières et de leur clientèle : humbles de la ville ou de la campagne soumis à eux, leurs tributaires, mais aussi leur soutien.
Ils partageaient l'influence et la puissance politique avec les seuls druides, dont le rôle dépassait les limites de la religion pour s’étendre aussi à la justice et à l’enseignement.
2.4. Une religion mystérieuse
Connue surtout à travers sa forme évoluée de l'époque romaine, cette religion apparaît pleine d'énigmes : « On a l'impression de poursuivre un objet qui recule sans cesse et se dérobe à toute prise » (Joseph Vendryès).
Un panthéon éclaté
Il s'y trouve en effet des éléments d'origines diverses : la terre mère primitive, déesse protectrice des morts ; des dieux animaux, ou ayant des animaux pour attributs (grue, corbeau) ; des dieux de sources, guérisseurs, qui sont aussi dieux solaires (→ Borvo, Grannus) et dont les sanctuaires s'enrichissent d'ex-voto ; des dieux du peuple ou de la tribu, et souvent des triades divines, comme celle constituée par Taranis, dieu du ciel, Teutatès, dieu de la tribu, et Ésus, dieu de la terre et des morts. Les caractères et les attributions flottent de l'un à l'autre. Iconographiquement apparaissent quelques types singuliers : le cavalier à l'anguipède, les tricéphales, le dieu au maillet, les dieux cornus.
La relation aux dieux
Le culte a quelques traits particuliers : la récolte du gui, plante de salut ; l'usage des sacrifices sanglants, en forte régression à l'époque historique ; la présence des druides, au rôle intellectuel et politique autant que religieux, en fait difficile à cerner.
Les druides ont certainement contribué à la consolidation du sentiment national gaulois, grâce à leur assemblée annuelle dans la forêt des Carnutes, seule institution commune à toute la Gaule (du moins Belgique et Celtique). Ils ont aussi fait évoluer les croyances en élaborant une mythologie autour des dieux existants. Faute d'écrits anciens, cette mythologie mystérieuse semble se découvrir peu à peu, grâce à des recherches récentes : exploration des récits irlandais et gallois (Jean Markale), découverte de la survivance des fêtes gauloises dans le cycle annuel de la mythologie française (Jean-Jacques Hatt).
2.5. Le paysage gaulois
L’importance de la forêt
Les légions romaines furent frappées de l'étendue peu pénétrable des forêts gauloises. Le boisement était surtout le fait du nord du pays, moins densément peuplé et où la légendaire et redoutée forêt Charbonnière courait de l'Artois au Hainaut. Les techniques en usage étaient très dépendantes de l'exploitation forestière : sculpture sur bois, tonnellerie, construction navale, tout contrastait avec l'usage méditerranéen de s'adresser de préférence à la pierre et à la terre cuite. Les remparts eux-mêmes étaient armés de bois, quand ils n'étaient pas intégralement en bois.
Les voies de communication
La semi-virginité de la forêt gauloise apparaît mieux encore si l'on songe que les transports à grande distance se faisaient surtout par les rivières, à l'aide de radeaux montés sur des outres gonflées. Les routes n'étaient pas rares, toutefois, et plus d'une voie romaine, au lieu d'être une création, ne fut que la consolidation d'un chemin gaulois. La via Mansuerisca, dans les Hautes Fagnes (Ardenne belge), était faite d'un revêtement de roches tassées sur un épais substratum de bois.
Le village gaulois
La campagne était parsemée de vici, villages où se trouvait la plus grande partie de la population. Les maisons, de bois et d'argile et de plan circulaire, étaient montées sur un soubassement de pierres sèches, ou enfoncées à demi dans le sol. Dans ce cas, l'excavation a parfois subsisté, formant un étang : ce sont les mardelles, comme on en rencontre aujourd'hui dans les forêts. Les vestiges de maisons de pierres sèches du Midi ont mieux survécu et, sur un terrain favorable, on peut distinguer les traces de plusieurs constructions voisines et se faire une idée du plan d'une grosse ferme ou d'un village. Le mobilier était réduit : chenets, crémaillères et chaudrons témoignent de la place éminente du foyer.
Une faible urbanisation
Face à ces campagnes, la ville n'avait qu'une importance très limitée. La forteresse, ou oppidum, en tenait vaguement lieu, refuge en temps de guerre, marché et petit centre d'artisanat, parfois, le reste du temps. Mais les villageois se rencontraient aussi dans des marchés isolés ou dans des sanctuaires établis en des endroits écartés, sur un sommet ou près d'une source.
Un fort peuplement
Malgré cette absence de villes et l'étendue de la forêt, le pays apparaissait aux Anciens comme très peuplé. On hésite cependant à accepter les estimations les plus fortes des historiens modernes. Ces estimations se sont échelonnées de 5 à 20 millions d'habitants ! Une estimation de 7 à 10 millions semble raisonnable, mais reste hypothétique.
2.6. L'activité économique
Une agriculture avancée
La population menait une existence ordinairement pacifique et pratiquait une agriculture singulièrement évoluée. Le cheval était mieux utilisé que dans les pays méditerranéens : on a pu dire qu'ici le cheval travaillait, alors qu'en Italie c'était l'esclave. Les labours se faisaient avec la carruca, charrue pourvue de roues et d'un coutre, autrement plus élaborée que l'araire méditerranéen. On moissonnait avec des faux perfectionnées. On amendait les terres par marnage et par chaulage. Toutes ces pratiques culturales étaient inconnues du monde gréco-romain, dont les agronomes manifestèrent leur étonnement.
L’artisanat
Favorisés par d'importants gisements miniers (fer, or), les Gaulois étaient d'habiles métallurgistes. Ils avaient perfectionné le travail du bronze, savaient ajuster, étamer, émailler. Les Romains leur empruntèrent la plupart des noms de véhicules à traction animale, ce qui les fait supposer spécialistes en charronnerie et carrosserie. En témoigne, d'ailleurs, l'importance de leurs routes et de leur commerce.
Les échanges
La vigne était quasiment absente, et les Gaulois, amateurs d'ivresse et connus pour boire le vin pur, le faisaient venir de loin, pour le plus grand bénéfice des marchands italiens qui trafiquaient avec la Gaule au ier siècle avant J.-C., et parfois y résidaient. En contrepartie, ils vendaient des salaisons, dont les troupeaux de porcs mi-sauvages assuraient une production réputée.
Outre les échanges avec les Grecs et les Romains par le Rhône, les Alpes et le Danube, les Gaulois ont pratiqué, à titre d'intermédiaires, le transport de l'étain de Bretagne insulaire, de la côte atlantique à Narbonne ou à Marseille, ou encore de Boulogne aux Alpes.
La monnaie
Le commerce devait entraîner avec lui l'usage de la monnaie. Aux ve et ive siècles avant J.-C., la monnaie grecque pénètre timidement. Au iiie siècle avant J.-C. commence la frappe des monnaies gauloises, qui succèdent à l'emploi vraisemblable de haches de bronze ou de barres de fer comme instruments d'échange.
Les peuples de la vallée du Rhône copient, en bronze coulé, des monnaies de Marseille ; les Volsques Tectosages (Languedoc) imitent des monnaies de Rhodê (Rosas en Espagne). Mais la Gaule du Centre et du Nord ignore ces modèles voisins et copie les statères macédoniens, adoptant ainsi l'étalon-or (les modèles macédoniens eux-mêmes sont très rares en Gaule).
Techniquement, les Gaulois passent très vite de la copie à l'interprétation, plus ou moins stylisée, déformée, différenciée, et la masse des différentes monnaies a donné lieu à des interprétations non moins variées de la part des numismates (déformation par recopiages successifs, stylisation transfigurative à visée religieuse ou magique, etc.).
Avec la chute de l'hégémonie arverne, en 121 avant J.-C., la frappe du statère d'or se trouve concurrencée par une monnaie d'argent, inspirée du denier romain et frappée notamment chez les Éduens. Peut-être cette division de la Gaule en deux étalons monétaires correspond-elle à une division économique, entre peuples demeurés relativement repliés sur eux-mêmes et peuples entrant progressivement dans l'orbite économique de Rome.
3. La Gaule romaine
3.1. La conquête romaine (121-51 avant J.-C.)
Un banc d’essai : la Province romaine
Les Romains interviennent en Gaule pour la première fois, à l'appel de Marseille, leur alliée, en 154 avant J.-C. Ils battent les tribus ligures qui menaçaient les colonies marseillaises. En 125-124 avant J.-C., des événements semblables se déroulent. Le peuple ligure des Salyens est vaincu par les Romains. Ceux-ci commencent à s'intéresser à la Gaule, par laquelle ils peuvent envisager une liaison terrestre vers l'Espagne, désormais conquise. En outre, les ressources en or de la Gaule les tentent : ce devait être une cause de déception par la suite, car elles vont s'épuiser rapidement.
Demeurant sur place, ils fondent un poste fortifié, future colonie d'Aquae Sextiae (→ Aix-en-Provence). Les Éduens rejettent alors l'hégémonie arverne pour s'allier aux Romains. À l'opposé, les Allobroges, qui donnent asile aux Salyens en fuite, sont battus, de même que, bientôt, les Arvernes (121 avant J.-C.). Les Arvernes vaincus, Rome, maîtresse des lieux, se taille une province, avec Narbonne pour capitale. Une route vers l'Espagne est aussitôt tracée, la voie Domitienne.
Les Cimbres et les Teutons
Une dizaine d'années plus tard, les envahisseurs cimbres et teutons déferlent sur le sud de la Gaule (109-101 avant J.-C.). Quatre armées romaines sont battues, avant que Caius Marius (157-89 avant J.-C.) redresse la situation en 102 avant J.-C. (bataille d'Aix) et 101 avant J.-C. (bataille de Verceil en Cisalpine). La Gaule, dévastée, demeure longtemps affaiblie. Ses chars n'ont pas su résister à la cavalerie des envahisseurs : aussi le char de guerre est-il abandonné à cette époque.
Les préliminaires de la guerre des Gaules
Vers 60 avant J.-C., des Germains se trouvèrent un chef en la personne d'Arioviste. Celui-ci se met au service des Séquanes, en conflit avec les Éduens. Mais, une fois en Gaule, il se conduisit en maître, et les Gaulois ne sont pas fâchés, incapables qu'ils étaient alors de s'unir, tout à leurs rivalités entre peuples et à leurs discordes intérieures, de voir César les débarrasser des hordes germaines, comme il les débarrasse aussi des Helvètes en migration à travers la Gaule (58 avant J.-C.). Mais César, non plus, ne s'en va pas. Les visées du Sénat romain ne semblaient pas aller au-delà du pays déjà conquis. Le Gaulois apparaissait au Romain comme le vieil ennemi qui avait menacé la ville, comme un guerrier redoutable : on connaissait la statuaire hellénistique qui avait popularisé le type du Celte, combattant farouche au costume barbare. Mais l'ambition personnelle de Jules César devait être le motif décisif de la conquête.
La guerre des Gaules (58-51 avant J.-C.)
Se posant en sauveur de la Gaule, César en entreprend la conquête généralisée, pour mieux asseoir sa position au Sénat, face à son rival Pompée. Il réprime tour à tour le soulèvement des Belges (57 avant J.-C.), des Vénètes d’Armorique (56 avant J.-C.), tente sans succès de débarquer en Bretagne insulaire, écrase une nouvelle révolte belge, menée par Ambiorix et Catuvolcus (54-53 avant J.-C.), et réunit au printemps 53 une grande assemblée des peuples de la Gaule pour s’assurer de leur ralliement.
Pourtant, dès janvier 52 avant J.-C., la révolte reprend, cette fois en Gaule Celtique, sous la direction d’un jeune chef arverne qui prend le titre de Vercingétorix (« grand roi des guerriers »). Elle prend une tournure générale, mais, malgré un succès sans lendemain à Gergovie, Vercingétorix se laisse enfermer dans l’oppidum d’Alésia et se rend en septembre 52 avant J.-C. L’année suivante, ses derniers lieutenants font leur soumission à Uxellodunum.
Les raisons de la victoire romaine
Après Uxellodunum, la Gaule est intégralement et définitivement conquise. « La défaite d'Alésia est la plus grande catastrophe de notre histoire », estime Ferdinand Lot, renchérissant sur les vues de Camille Jullian, pour qui la civilisation romaine n'a pas été un apport très bénéfique. Ces deux historiens déplorent également la façon dont le propre de la civilisation gauloise aurait été étouffé brusquement.
Ce point de vue n'est pas partagé par tous, loin de là. D'abord, la défaite des Gaulois semblait inéluctable : une nation profondément désunie, une atmosphère politique trouble dans les cités, une population d'agriculteurs bien enracinée dans son terroir et, de ce fait, moins belliqueuse que les générations précédentes, des armées certes valeureuses, mais aussi inaptes à la grande stratégie qu'aux ruses de guerre, trop portées à l'attaque impétueuse et à l'exhibition de la vertu guerrière, peut-être beaucoup moins nombreuses que ne le prétendent les chiffres de César, une pleine conscience de la supériorité militaire de Rome : tout cela condamnait la Gaule.
L’impact de la conquête
En outre, la domination romaine devait préserver la Gaule de l'invasion des Germains, ou du moins retarder celle-ci de plusieurs siècles. Enfin, il allait se produire, entre Rome et la Gaule, des apports réciproques, sur tous les plans, matériel et culturel, dont la Gaule devait être la principale bénéficiaire.
3.2. L’organisation de la conquête
L’établissement des provinces
Après la conquête, la Gaule Chevelue se trouva être province de fait, sans statut déterminé. En 43 avant J.-C., une colonie fut fondée à Lyon, appelée à devenir la capitale des Trois Gaules.
Sous Auguste, l'héritier de César, l'ancienne Province romaine prend son nom de Narbonnaise, et est rendue au Sénat, qui l’administre par le biais d’un proconsul (20 avant J.-C.).
Les Trois Gaules deviennent des provinces distinctes, gouvernées par des légats d'Auguste (16-13 avant J.-C. Leurs limites sont modifiées pour être équilibrées : l’Aquitaine est agrandie du territoire entre Garonne et Loire, la Celtique (qui prend le nom de Lyonnaise au milieu du Ier siècle après J.-C.), réduite entre Loire et Seine, et la Belgique, augmentée au sud-est, est amputée de l’estuaire de la Seine.
Entre la Belgique et le Rhin se trouve une zone militaire, destinée à former plus tard les deux provinces de Germanie. Les régions voisines des Alpes, conquises en dernier, ne sont pas rattachées à la Gaule.
L’organisation civique
Les peuples gaulois, devenus des cités, ont conservé leur territoire, leurs institutions, mais tous n'ont pas le même traitement : certaines cités sont fédérées (alliées), d'autres libres, d'autres stipendiaires (soumises au tribut), en fonction de la plus ou moins grande mansuétude du vainqueur.
La fondation des colonies romaines (Narbonne, Arles, Béziers, Orange, Fréjus) et latines – qui jouissent des mêmes droits que les citoyens romains, sauf les droits politiques – (Carcassonne, Apt, Carpentras, Riez, Aix, Nîmes, Lodève, Castel-Roussillon, Valence, Avignon, Cavaillon, Digne, Toulouse, Die et Vienne) en Narbonnaise, et, avec plus de discrétion, dans la Lyonnaise et la Belgique (Lyon, Augst, Nyon, Avenches, Feurs, Trèves, Besançon, Langres, Thérouanne) et même en Aquitaine (Eauze) fournit un apport de population italienne non négligeable. La Narbonnaise devait être rapidement très urbanisée, très romanisée.
La Gaule dans son ensemble se rattache à Rome, par un lien idéal et sacré, politico-religieux, le culte de Rome et d'Auguste : en 13 avant J.-C. est décidée l'érection d'un autel fédéral, à Lyon, où des délégués des trois Gaules vont se réunir annuellement. Une institution analogue existe à Narbonne. Astreinte à un tribut modéré, aucunement soumise à une propagande ou à une romanisation forcée, la Gaule peut supporter légèrement sa condition.
Les résistances à l’autorité romaine (46 avant J.-C.-68 après J.-C.)
Le ralliement ne fut pourtant pas immédiat. En 46 avant J.-C., il y avait eu une brève révolte des Bellovaques. Sous Octave (futur Auguste), se succèdent celles des Aquitains (39 et 28 avant J.-C.), des Morins (30 avant J.-C.) et des Trévires (29 avant J.-C.) de Belgique. Sous Auguste, des Gaulois émigrent vers la Bretagne ou la Germanie.
Sous Tibère, successeur d'Auguste, en 21 après J.-C., l'Éduen Julius Sacrovir et le Trévire Julius Florus (aux noms pourtant déjà latins, citoyens et officiers romains !) prennent la tête d'une insurrection d'origine fiscale, et qui durera peu. Un discours de l'empereur Claude (41-54), né à Lyon, évoque d'ailleurs la fidélité de l'ensemble de la Gaule et propose l'admission au Sénat de citoyens des Trois Gaules.
Les dernières révoltes (68-70)
En 68, un Aquitain, Caius Julius Vindex, se révolte contre la tyrannie de Néron : c'est là un mouvement proprement romain, qui aboutit à la proclamation de Galba comme empereur (68-69). Suit alors une période de troubles politiques : les légions choisissent leurs empereurs, Othon (?-69) et Vitellius (?-69), un paysan boïen, Mariccus, qui se dit prophète, entraîne quelques partisans dans la campagne éduenne en parlant d'affranchir la Gaule. Un massacre met fin à sa tentative (69).
Peu après, le Batave C. Julius Civilis, officier romain, se constitue une armée composée de Bataves et de Germains, et rêve d'installer en Gaule une domination germaine. Quelques peuples se rallient à lui, sous quelques meneurs, dont le Lingon Julius Sabinus. Des légions sont ralliées et prêtent serment à l'« empire des Gaules ». La discorde ne tarde pas à naître entre Germains et Gaulois. Une assemblée gauloise (concilium Galliarum) réunie à Reims au début de 70 conclut sagement qu'il vaut mieux se rallier à Rome que retomber dans les discordes du passé. Les plus réfractaires s'enfuient en Germanie, refuge de tous les éléments belliqueux. Rome pardonne, sauf à quelques chefs. On devait découvrir neuf ans plus tard Sabinus, caché dans une caverne par sa fidèle épouse Éponine, qui dut partager son supplice.
3.3. La civilisation gallo-romaine
L'apport de la Gaule à la civilisation romaine
Un certain nombre de traits propres à la tradition celtique se conservent ou même se développent, voire se divulguent dans tout le monde antique. Il en est ainsi des techniques du bois. Les Gaulois avaient inventé le principe de la tonnellerie, qu'ils appliquaient aux puits et aux seaux aussi bien qu'à la futaille. Le développement de la consommation du vin multiplie l'activité des tonneliers, et les fûts s'emploient hors de Gaule, concurremment avec les amphores (figures de la colonne Trajane). Le charronnage transmet au latin toute sa terminologie.
D'autres spécialités gauloises sont appréciées. La céramique (de la Graufesenque, surtout) imite à merveille celle d'Italie (Arezzo) et finit par la supplanter sur les marchés les plus éloignés. Les vêtements gaulois, ajustés et rationnels, sont conservés en Gaule (c'est le cas des braies) ou adoptés ailleurs, et notamment aux armées (cucullus, sagum, caracalla, gallicae). Les salaisons, réputées, s'exportent bien. La cervoise, breuvage modeste, s'est consommée jusqu'en Orient. Puis les Gaulois se mettent à vendre leurs vins. Les gens de Bordeaux seront les pionniers de la viticulture, en adoptant un cépage d'origine espagnole. Puis la vigne progressera vers le nord, passant du pays allobroge à la Loire et à la Moselle.
L’apport de Rome à la civilisation gauloise
Mais la Gaule a beaucoup plus reçu que donné. Rome lui a procuré la paix et la sécurité, et, en 70 après J.-C., le concilium de Reims a reconnu clairement son intérêt. Plus d'un village, retiré dans la montagne ou dans la forêt, a pu se transférer dans la plaine. Plus d'un oppidum inaccessible est abandonné au profit d'une agglomération mieux située et plus facile à surveiller (Autun remplaçant ainsi Bibracte).
L'apparence des édifices s'est également transformée. La pierre et la brique remplacent le bois et le torchis. Les gros propriétaires édifient de vastes villae dans la campagne. Les villes s'ornent de grands édifices caractéristiques : théâtre, amphithéâtre, thermes. Un réseau de voies très rectilignes s'étend partout, ponctué de gîtes d'étape. La sculpture sur pierre est partout adoptée, ce qui nous vaut d'avoir conservé une multitude d'œuvres, statuaire religieuse et monuments figurés divers nous faisant découvrir la vie quotidienne des artisans et des commerçants (magasins, outillage, transports de marchandises). Enfin, la pierre est le support des innombrables inscriptions, dans lesquelles le gaulois ne figure pas.
3.4. Les mutations culturelles
Le gaulois supplanté par le latin
Le latin a dû pénétrer dès avant la conquête, véhiculé d'abord par les commerçants, puis par les soldats et les vétérans des colonies. Il a été favorisé par nécessité administrative. S'il n'a pu déloger le grec d'Orient, il a balayé sans difficulté la langue gauloise qui ne s'écrivait presque pas. Tout ce qui reste à faire aux érudits est de tenter de découvrir des survivances du gaulois, qui a continué d'être parlé dans les campagnes, à la manière d'un patois. Il en reste quelques indices. Beaucoup de mots gaulois sont passés dans le latin. Sous Septime Sévère, saint Irénée fait allusion à l'« idiome barbare » qu'on parle dans les campagnes. Il est vrai que, à cette date, on croit observer une recrudescence même de son emploi, puisqu'on l'autorise dans les contrats. Le seul secteur où il se conserve peut-être, c'est celui de la sorcellerie : incantations, recettes, formules héritées du druidisme traditionnel et pratiquées probablement dans une semi-clandestinité.
Transformations de la religion traditionnelle
La religion s'est transformée, et en partie par la volonté de Rome. Le druidisme a été condamné officiellement sous le règne de Claude, et le nom même de druide n'est plus guère employé. Gardiens d'une culture purement orale, d'un savoir ésotérique, défenseurs du celtisme et de la nation gauloise, suspects enfin de sorcellerie, les druides ne pouvaient être acceptés par Rome.
Désormais, on ne trouve plus que des prêtres, d'une religion édulcorée : les Romains semblent avoir voulu ôter leur barbarie aux dieux indigènes en les assimilant au panthéon gréco-romain. Ce faisant, ils suivaient dans une certaine mesure les traces des druides eux-mêmes. Le dieu des guerriers, Teutatès, fut ainsi banni : il risquait de représenter un signe de ralliement national. Les autres dieux allaient se fondre avec ceux du panthéon gréco-romain, suivant un processus classique dans le monde antique. À partir de 69 après J.-C., la triade Capitoline elle-même se confond avec la triade celtique. Une fois acquis un nom romain, ces dieux ont cependant gardé leur caractère original, qui se maintient et s'amplifie parfois aux iie et iiie siècles.
Avec l'usage de la pierre, les sanctuaires ont pris forme à nos yeux. Mais ils ont en Gaule un aspect particulier, un plan centré, carré, rond ou polygonal, qui doit correspondre à une tradition antérieure à la conquête. Les cérémonies cultuelles telles qu'elles sont attestées par les inscriptions sont, elles, conformes aux usages latins.
La culture latine en Gaule latine
Les usages latins entrent en vigueur dans les écoles de rhétorique gauloises. À Autun, les traditionnelles écoles dites « méniennes » sont célèbres. Mais partout on étudie les auteurs classiques. Il paraît vain d'essayer de rattacher la réputation de la rhétorique gauloise à une vieille habitude des palabres ou à une tradition pédagogique remontant aux druides.
Le temps vient vite où les écrivains originaires de Gaule orientent leur élan patriotique vers Rome et ne réservent qu'une attache sentimentale à l'égard de leur pays d'origine. Les grandes œuvres sont tardives. Trogue Pompée, historien méridional de l'époque d'Auguste, est une exception, mais il ne traite pas du passé gaulois. Les rhéteurs (→ Gnaeus Domitius Afer) ou poètes (Varron de l'Aude, vers 82-vers 37 avant J.-C.) de l'époque classique ne sont guère que des noms pour nous. Plus tard seulement apparaissent de grands auteurs dont nous pouvons apprécier encore les écrits : Ausone (vers 310-vers 395), qui fut professeur à Bordeaux et qui a fait une description, devenue classique, de son domaine et de sa villa ; Rutilius Namatianus (ve siècle après J.-C.), dont un poème conservé en partie raconte son voyage d'Italie en Gaule ; Sidoine Apollinaire (431 ou 432-487 ou 489), gendre de l'empereur Avitus, grand propriétaire puis évêque, dont les propos font revivre la vie de la haute société cultivée durant les pauses de la tourmente des invasions. Mais cela nous introduit dans une époque tardive, où le sort du pays a considérablement évolué.
3.5. La Gaule du Bas-Empire (fin iie-début ve siècle)
Invasions et désordres
En effet, dès la fin du iie siècle, les avantages de la paix romaine commencent à se dégrader. Rome a protégé jusqu'alors la Gaule de la pression des peuples d'au-delà du Rhin. Or, sous l'empereur Marc Aurèle (161-180), ils enfoncent les défenses de l'Empire, tant sur les frontières fortifiées que sur les côtes, où les pirates se montrent. À la même époque réapparaissent les mouvements de révolte à l'intérieur (173-174). L'archéologie fait remonter à cette époque également les premières ruines, dans les villes et les villae, tant sur les côtes de la Manche (Lillebonne) qu'au cœur même de la Gaule. De ce temps datent encore les premiers trésors monétaires, magots enfouis que leurs propriétaires ne sont jamais venus reprendre.
Enfin, les conséquences des conflits militaires autour du pouvoir impérial se font sentir : Lyon est dévasté en 197 par les soldats, à la suite de la bataille qui oppose, à proximité, deux prétendants à l'Empire, Albinus et Septime Sévère (193-211). La situation ne s'améliore pas au iiie siècle, où, parmi les Barbares, les Francs apparaissent pour la première fois de façon massive, déferlant sur l'ouest de la Gaule et jusqu'en Espagne, vers 253-260, accompagnés d'une vague de destructions et de ravages irrémédiables (arrêt de la production de céramique, à Lezoux et en Argonne). Les vagues d'invasion cessent de déferler quand, par intermittence, un empereur énergique parvient au pouvoir. Or l'empereur ne peut, par lui-même, défendre à la fois l'Orient et l'Occident, et c'est ce qui amène naturellement au partage de l'Empire.
Empire des Gaules et bagaudes
C'est ainsi qu'un chef militaire, Postumus, prend le pouvoir impérial en Gaule, en 258, pour diriger la défense du pays. Il impose un moment son autorité à une grande partie de la Bretagne et de l’Espagne, mais pas à la Narbonnaise, bien plus attachée à Rome. Il est pourtant remarquable que ce fondateur de ce que l'on a coutume d'appeler l'empire des Gaules n'a ni cherché à étendre son autorité au reste de l'Empire, ni entendu être le chef d'un État séparé de Rome, d'un État proprement gaulois : il se disait seulement « restaurateur des Gaules ». L'empereur de Rome n'a du reste pas fait de grands efforts en vue de le renverser, car Postumus le délestait de la défense d’une partie des frontières. Son successeur Victorinus (269-271) doit déjà réprimer dans le sang la révolte d’Autun en 269. Le dernier empereur gaulois, Tetricus (271-273/274), sans passé militaire, en proie à des difficultés avec ses soldats, entame des négociations avec l'empereur de Rome, Aurélien. Mené au combat par ses troupes malgré lui, il préfère les laisser battre et se faire prendre (Châlons-sur-Marne, 273 ou 274). Son adversaire, qu'il craignait moins que ses propres soldats, fait de lui un gouverneur de province.
Ces troupes indisciplinées reçoivent des auteurs anciens le nom de bagaudes. C'est un mélange de paysans ruinés, de déserteurs, de barbares victimes du désordre et eux-mêmes dévastateurs. Signalés dès 180, ils ne seront à peu près mis hors d'état de nuire que lors de deux grandes opérations menées contre eux, en 285, puis en 435-437.
Les mutations économiques et sociales
Dans l'intervalle, de nouvelles vagues d'envahisseurs font de pires ravages. En 275, un grand déferlement dévaste toutes les grandes villes. La vaisselle de bronze gauloise qu'on trouve alors dans les tombes de Germanie paraît démontrer que les Barbares sont repartis avec leur butin. C'est alors (sous Probus, 276-282) que l'on entreprend d'entourer les villes de remparts. Les fondations sont faites de débris de constructions, sommairement entassés, tandis que la partie supérieure des murailles est d'un appareil soigné : tout s'est passé comme si un vent de panique avait soufflé sur le pays. Ces enceintes du Bas-Empire sont d'une étendue restreinte, vingt ou trente hectares, par rapport aux villes du Haut-Empire, soit que la population ait beaucoup diminué, soit qu'on s'y soit entassé. Ceux qui l'ont pu sont partis s'établir dans les campagnes, fuyant les villes privées d'eau par la destruction des aqueducs.
L'aristocratie s'est ainsi réfugiée dans ses vastes villae qui, fortifiées elles aussi, commencent à faire figure de châteaux. Elles sont le centre de domaines étendus où tout peut se produire, et où l'on pratique une économie fermée, autosuffisante : l'abondance de l'effectif tant d'esclaves que de paysans libres venus se réfugier sous la protection d'un puissant personnage, et d'ailleurs guère mieux traités que les esclaves, permet d'avoir des représentants de tous les corps de métier.
L’embellie du ive siècle
La Gaule connaît, au ive siècle, de meilleurs moments. Elle a été réorganisée en dix-sept provinces pour diviser le pouvoir des fonctionnaires et mieux centraliser le pouvoir. L'État prend une part active au ravitaillement des villes et, pour cela comme pour rétribuer ses fonctionnaires, prélève des impôts en nature. Au milieu du siècle, la Gaule trouve un brillant défenseur en la personne du césar Julien (361-363), neveu de Constantin, qui s'établit à Lutèce dans l'intervalle de ses campagnes efficaces contre les Germains et y est acclamé auguste par ses soldats (360). À sa disparition, les invasions reprennent à tel point que Valentinien Ier (364-375) installe sa capitale à Trèves, à proximité du Rhin. Valentinien II (375-392) charge un Franc, Arbogast, de chasser ses congénères du nord de la Gaule, mais celui-ci le renverse au profit d'un autre empereur.
En fait, la défense de la Gaule, assurée épisodiquement, est sur le point de s'effondrer complètement. Le pays continue à se considérer comme romain, bien que la civilisation s'y barbarise insidieusement (au même titre que les Barbares se romanisent). C’est d’ailleurs un Vandale, Stilicon, qui gouverne l’Occident au nom de l’empereur Honorius, quand la frontière du Rhin cède définitivement dans la nuit du 31 décembre 406.
La diffusion du christianisme
Une force est née et a grandi au milieu de ces désordres, l'Église chrétienne. Implanté d'assez bonne heure dans la vallée du Rhône, le christianisme ne pénètre que lentement au cœur des campagnes. Du temps de Marc Aurèle datent les premiers martyrs (Vienne et Lyon, 177). La tradition dit que saint Cyprien aurait envoyé sept apôtres évangéliser les sept plus grandes villes de la Gaule. En réalité, c'est seulement sous l'empire chrétien que le christianisme peut s'épanouir. Sa légalisation en 313 débouche sur l’abolition du paganisme entre 391 et 394.
Le christianisme eut ses grands hommes au ive siècle : saint Hilaire de Poitiers (vers 315-vers 367), théologien, Cassien (vers 360-après 432), fondateur du monachisme marseillais, et surtout saint Martin de Tours (vers 316-397), évangélisateur des paysans, qu'il sut soustraire à un paganisme très enraciné.
Face aux raids barbares et à la fuite de l’aristocratie, les évêques deviennent les défenseurs de fait des cités romaines, leurs chefs moraux et même les représentants les plus considérés de la romanité d'alors, car les qualités de romain et de chrétien acquièrent une certaine similitude. Ce fait donne une importance décisive au baptême, vers 496, de Clovis, chef franc qui, après avoir absorbé le dernier gouvernement romain, dit « royaume de Syagrius » (au cœur du Bassin parisien), réussit à restaurer l'unité territoriale de la Gaule sous son autorité et à rallier à celle-ci toute la chrétienté gallo-romaine.
Pour en savoir plus, voir l'article Mérovingiens.
ART
1. Introduction
L'art de la Gaule se divise naturellement en deux grandes périodes : avant et après la conquête romaine. Sans doute, il n'y a pas de rupture complète entre les deux époques, et les Gaulois, sous l'occupation romaine, conservent leurs formes de pensée religieuse, qui constribient à inspirer les thèmes de l'art, et leurs anciennes traditions artistiques, dont on trouve des résurgences marquantes, en particulier dans l'art des campagnes. Mais les Romains ont apporté avec eux leurs conceptions « classiques » de la sculpture, et c'est sous leur impulsion que va se développer une véritable architecture dans laquelle les Gaulois vont emprunter les formes et les techniques romaines.
2. La Gaule celtique
On ne peut parler d'un art typiquement celtique en Gaule qu'avec l'avènement de la civilisation dite « de La Tène », au ve siècle avant J.-C. Cependant, malgré ses origines étrangères, l'art des deux siècles précédents, qui se rattache à la civilisation hallstattienne, est en partie implanté en Gaule par les Celtes. Cet art est illustré par le mobilier des tombes, reflet des objets utilisés quotidiennement : longues épées de fer, mors de chevaux, garnitures de chars en bronze, fibules, torques, céramique… Les riches tombes de cavaliers et les tombes à chars, répandues dans le Nord, en Belgique et dans l'Est, en Champagne, en Bourgogne (trésor de Vix, musée de Châtillon-sur-Seine) et dans le Languedoc, mais qu'on rencontre également en Italie du Nord et en Bavière, constituent le lien entre ces cultures provinciales hallstattiennes ; il semble que l'on soit en présence d'une aristocratie guerrière qui a essaimé vers l'occident à partir de la Bavière. Plusieurs de ces objets sont parfaitement caractérisés : longue épée à poignée ornée de rognons, qu'on trouve en Allemagne méridionale et en Languedoc, ou épée à antennes en usage dans tout le monde hallstattien, fibule à fausse corde à bouclette, bracelets à godrons, cistes à cordons d'origine italique.
Cet art est caractérisé par ses tendances à l'abstraction et à la schématisation. Aux motifs géométriques hérités de l'époque précédente se mêlent des thèmes figurés (représentations humaines et animales), nés de l'influence des situles vénéto-illyriennes ; le tout formant un décor obtenu à l'aide de petits poinçons.
Dès le viie siècle avant J.-C., les relations avec le monde grec archaïque sont attestées par la présence, dans la vallée du Rhin, d'objets grecs et étrusques. C'est sous cette influence que va naître, à la fin du vie siècle avant J.-C., la grande sculpture en ronde bosse, dont le plus ancien exemplaire est la statue d'un guerrier découverte dans un tumulus hallstattien, à Hirschlanden, près de Stuttgart : dans ce personnage nu, on retrouve l'influence directe de la statuaire grecque, mais le torse du personnage, les bras collés à la poitrine et à peine esquissés, le visage ébauché restent dans la tradition linéaire et schématique de l'art hallstattien (musée de Stuttgart).
C'est peu après, au ve siècle avant J.-C., qu'apparaît l'art de La Tène, apporté par un grand mouvement des Gaulois, qui occupent toute la Gaule et parviennent en Ibérie et en Italie Transpadane, où ils substituent leur art à celui des Étrusques.
Contrairement à la civilisation hétérogène de Hallstatt, qui s'exprime en faciès provinciaux et qui n'est qu'une culture adoptée par les Celtes, la civilisation de La Tène est homogène et propre aux Gaulois, qui la diffusent à travers tout le territoire auquel ils vont donner leur nom.
Les types d'objets de La Tène sont à peu près les mêmes qu'à la période précédente ; il s'y ajoute un art nouveau, d'influence grecque, mais d'une conception puissamment originale, celui de la frappe de la monnaie. Les monnaies purement gauloises apparaissent au iiie siècle avant J.-C. et elles disparaissent à la fin du ier siècle avant J.-C., remplacées par les monnaies romaines ou gallo-romaines. En général, l'avers est frappé d'une tête de profil où la chevelure se développe en volutes exubérantes au détriment du visage, qui subit des déformations dans lesquelles la fantaisie gauloise se donne libre cours ; l'œil prend souvent une grande importance, et on arrive ainsi à la création d'un art fantastique qui répond au lyrisme souvent débridé de l'âme gauloise.
Sur le revers, les chars et les chevaux des monnaies grecques se transforment aussi en animaux fantastiques, dont on trouve le pendant dans la sculpture.
En effet, si les objets d'usage courant de cette période sont parfaitement caractérisés, telles les poteries de type marnien, au profil anguleux et au décor géométrique, typiques de la période de La Tène II, c'est cependant dans les arts du sculpteur et surtout du bronzier et de l'orfèvre que la civilisation de La Tène a particulièrement brillé.
Ce n'est qu'au iiie siècle avant J.-C. que se développe en Gaule une sculpture alors caractérisée par un hiératisme et un expressionnisme proprement gaulois : tels sont le Janus (tête à deux faces) et les « accroupis » de Roquepertuse (Marseille, musée Borély). De la fin du iie et du début du ier siècle avant J.-C. date la statuaire d'Entremont, influencée par l'art romain (torses de guerrier, bas-relief représentant un cavalier au galop, avec une tête coupée attachée au cou de sa monture ; musée Granet, Aix-en-Provence) ; au ier siècle avant J.-C. appartiennent la « tarasque de Noves » (Avignon, musée Calvet), chef-d'œuvre de l'art fantastique, qu'on a rapproché, pour son esprit, du célèbre chaudron de Gundestrup (Copenhague, musée national), l'idole (en pierre) d'Euffigneix et l'idole (en bronze) de Bouray-sur-Juine (musée d'Archéologie nationale, Saint-Germain-en-Laye).
C'est dans la toreutique qu'on peut suivre le plus sûrement l'évolution de l'art gaulois. Pendant le ve siècle avant J.-C. (style celtique ancien de Jacobsthal), correspondant à La Tène I a, les Gaulois imitent et transposent les modèles grecs dans un style dit « flamboyant », qui reste pourtant sobre ; quelques-uns des chefs-d'œuvre de ce style sont les torques et colliers d'or de Dürkheim et de Besseringen.
Les transformations qui marquent la période de La Tène I b (400-350 avant J.-C.) sont nées de l'influence nouvelle de l'art scythe, d'où est issu l'art fantastique gaulois ; ce style « baroque » est en particulier représenté par les vases à vin (œnochoés) en bronze de Basse-Yutz (Londres, British Museum), le collier d'or de Rodenbach.
Pendant le siècle qui constitue la période de La Tène I c (350-250 avant J.-C.) se forme le style gaulois classique, plus sobre et dépouillé, auquel on a donné le nom de Waldalgesheim, où ont été trouvés un torque et un bracelet (musée de Bonn) ; les élégants motifs curvilignes de cercles et de doubles S sont dominants.
Au cours de la période suivante, de La Tène II (250-120 avant J.-C.), les Celtes, entrés en contact avec le monde balkanique, subissent un renouveau d'influences orientales qui vont créer le « style plastique », selon l'appellation de Paul Jacobsthal, dans lequel on remarque une utilisation des contrastes d'ombres et de lumières et une recherche pour tirer parti de la troisième dimension.
La période de La Tène III (120-50 avant J.-C.) voit se développer un style expressionniste sous l'influence romaine, et un renouveau de l'archaïsme, comme il apparaît dans le chaudron de Gundestrup.
3. La Gaule romaine
L'occupation romaine de l'ensemble de la Gaule, au milieu du ier siècle avant J.-C., va imposer les conceptions esthétiques romaines. C'est sous le règne d'Auguste que la Gaule sera organisée, et elle se romanisera en profondeur au cours des deux premiers siècles de notre ère.
De nombreuses villes sont bâties sur le plan romain orthogonal, avec forum, temples, théâtres et amphithéâtres. Pour alimenter les cités en eau, on construit aqueducs (pont du Gard, Jouy-aux-Arches, Autun), viaducs (Arcueil), siphons (Vaison-la-Romaine), châteaux d'eau et fontaines (Nîmes). Les temples, Maison carrée à Nîmes, d'époque augustéenne, Vienne, Autun (temple de Janus), sont de type romain. Des « arcs de triomphe » de caractères triomphal et funéraire (Saint-Rémy-de-Provence), triomphal (Orange, Arles, Carpentras), commémoratif (Besançon, Cavaillon, Saintes, Reims, Mayence) couvrent la Gaule. Si l'on ne connaît qu'un seul cirque (Vienne), les théâtres, amphithéâtres et odéons subsistent en nombre : théâtres classiques (Arles, Vaison, Orange), amphithéâtres typiquement romains (Nîmes, Arles), théâtres de sanctuaires (Avenches, Champlieu, Augst, théâtre des mystères de Cybèle à Vienne), amphithéâtres à scène (Grand, Lutèce), odéons (Vienne, Lyon). Des cryptoportiques, galeries souterraines (Arles, Reims, Bavay), sont souvent annexés aux forums ou à des palais (palais du procurateur du iie s. à Trèves) ; on ne sait s'ils servaient de magasins à huile, vin et grains pour la population ou s'ils étaient utilisés pour la promenade publique.
Près du forum sont aussi bâties des basiliques, grandes salles à plusieurs travées où se tenaient les tribunaux et les assemblées municipales. Lorsque Trèves devint capitale impériale, Constantin (ive siècle) y éleva une basilique qui servit de salle du trône (aula palatina).
À de rares exceptions près (thermes de la rue des Clercs à Metz, du ier s.), les thermes datent de la fin du iie siècle et des deux siècles suivants. Ces vastes monuments à voûtes et à coupoles, revêtus de marbre, sont élevés dans les villes pour l'agrément du public (Metz, Trèves) ou dans des lieux de pèlerinage ou de cure (Champlieu, Sceaux-du-Gâtinais, où les thermes sont à côté du théâtre).
Dans les campagnes, le fundus, domaine de moyenne importance, et la riche villa se développent au détriment des villages agricoles indigènes. L'un des rares monuments gaulois originaux est le fanum, petit sanctuaire campagnard constitué en général par une cella et un mur de clôture.
Alors que l'architecture reste typiquement romaine, la sculpture révèle des courants plus indépendants, parallèlement à une statuaire de conception romaine. Cette dernière apparaît dès le ier siècle avant J.-C. avec les bas-reliefs du mausolée de Saint-Rémy-de-Provence et les portraits funéraires de Nîmes, contemporains de la « tarasque de Noves » et des dernières sculptures d'Entremont. L'époque archaïque gallo-romaine (règnes d'Auguste et Tibère) est marquée par trois tendances : augustéenne (style de l'Ara Pacis à Rome), dont on trouve l'influence dans les autels d'Apollon et des Cygnes d'Arles ; néo-attique, visible dans les trophées de Saint-Bertrand-de-Comminges ; italique, sensible dans les sculptures du mausolée de Saint-Rémy et de l'arc d'Orange.
Sous le règne de Tibère, on parvient à un classicisme dans le pilier à quatre dieux de Paris (→ pilier des Nautes), le couple d'Ésus et de la déesse mère de Néris-les-Bains, le pilier de Dijon ; cependant, dans des œuvres comme les sculptures du pilier de Mavilly ou les déesses assises de Gissey-sur-Ouche, on retrouve le style hiératique et graphique propre aux Celtes.
Après un courant baroque qui se manifeste dans la sculpture de la seconde moitié du ier siècle, le siècle suivant connaît un renouveau d'influence grecque (tête du temple de Montmartre près d'Avallon ou sculptures de Sens : nymphe, cycle d'Iphigénie). Par contre, dans la seconde moitié du siècle, se dessine un courant réaliste dans la sculpture funéraire (Neumagen, Arlon). Le iiie siècle se partage entre le style baroque sévérien (reliefs des travaux d'Hercule de Martres-Tolosane) et le néoclassicisme des écoles rhénanes. C'est au cours de ce siècle que l'art gaulois retrouve son originalité face à la décadence de l'art romain (groupe de Jupiter cavalier à l'anguipède [musée d'Épinal], stèles et portraits funéraires…).
Au ive siècle, l'art cherche à exprimer la profondeur spirituelle et la majesté impériale ; cet idéalisme, qui annonce l'art byzantin, se trouve en particulier dans les figures de Trèves. Une réaction néoclassique clôt ce siècle, qui voit la décadence et la fin de l'art gallo-romain, en partie à la suite de l'iconoclasme de saint Martin et de ses disciples.
On se doit encore de signaler deux formes d'art dans lesquelles les Gallo-Romains n'ont pas manqué de talent : la verrerie se développe à partir du ier siècle et atteint son apogée à la fin du siècle suivant sous l'impulsion des verriers venus de Syrie ; la céramique sigillée, imitée de la céramique italienne à décor moulé de Pouzzoles et surtout d'Arezzo, connaît un grand essor et des développements originaux à partir du iie siècle grâce aux ateliers de la Gaule centrale (Allier, Lezoux, la Graufesenque) et aux officines de l'Est (Mettelbronn, Blickweiler, Trèves, Luxeuil-les-Bains, l'Argonne). Cette céramique à reliefs disparaît au ive siècle pour être remplacée par une poterie décorée à l'aide d'une roulette selon une technique remontant à l'époque gauloise.