La région alentour attire les adeptes de la spéléologie. Ses versants rocheux abritent un grand nombre de cavités et de rivières souterraines praticables en radeau. Pour y accéder, il faut emprunter des chemins escarpés continuellement parcourus par des colonnes de porteurs se rendant à pied à la ville ou y revenant. Hier lieux de refuge des groupes armés rebelles, les grottes de Tam Ta Tong continuent aujourd'hui d'être fréquentées. Touristes et spéléologues y accourent pour admirer un patrimoine cavernicole unique : d'innombrables fontaines y ont sculpté dans la roche des décors fantastiques, sources de légendes et de mythes.
Les orpailleurs de la montagne
Les tribus thaïes sont prospères. Elles pratiquent une riziculture savante afin d'irriguer leurs champs qui s'étagent à flanc de coteaux. De cette prospérité elles sont fières, aussi l'étalent-elles avec ostentation sur leurs vêtements. Les femmes thaïes noires – elles doivent leur nom à leur jupe faite d'un fourreau de tissu noir qui descend jusqu'aux chevilles – aiment en effet porter des costumes richement brodés, des corsages aux couleurs chatoyantes – rose, lavande ou aigue-marine – fermés par de gros boutons en argent en forme de papillon. Avec coquetterie elles soustraient aux regards des étrangers leurs chignons sous des foulards d'étoffe noire bordés de broderies. Le costume traditionnel des hommes thaïs est plus sobre : ceux-ci se contentent d'un pantalon et d'une ample chemise noire portant des boutons oblongs en bois taillé. Dans la province montagneuse du Nord-Ouest, vers Diên Biên Phu, le long d'innombrables cours d'eau, le voyageur croise souvent des petits groupes d'orpailleurs thaïs. L'or constitue ici une source appréciable de revenus. Ces équipes parviennent en effet à recueillir au fond de leurs tamis chaque jour en moyenne trois grammes du précieux métal, ce qui leur assure un gain journalier de 240 F. Ce n'est pas grand chose, car la somme doit être partagée entre les membres de l'équipe – en général cinq –, mais au Viêt Nam un revenu mensuel de 1 500 F est inespéré.
La quiétude des orpailleurs thaïs est toutefois menacée. Depuis l'ouverture du Viêt Nam au marché, les montagnes du Nord sont en effet très convoitées par les compagnies minières étrangères qui assiègent les bureaux de l'Administration pour obtenir des droits d'exploitation. Il faut savoir qu'il n'y a pas que de l'or dans ces plis et replis montagneux. Leur sous-sol recèle de fabuleuses réserves en pétrole, gaz naturel, cuivre, bauxite, phosphates, charbon et métaux précieux.
Pour exploiter ces richesses, le gouvernement de Hanoi vient de prendre plusieurs mesures visant à désenclaver la province de Hoang Lien Son : rénovation de la voie ferrée qui traverse la gorge du Song Kôi, percement de nouvelles routes à travers les montagnes et construction d'aérodromes à proximité des futurs centres miniers. Une nouvelle ruée vers l'or est en passe de se produire en ce début du xxie siècle.
Au pays des Thaïs
Au nord-ouest du Viêt Nam, dans les montagnes du Nord, des populations vivent depuis des siècles en marge de l'autorité centrale. Elles appartiennent à diverses tribus montagnardes dont les plus renommées sont celles des Thaïs noirs, des Thaïs blancs, des Meos, des Muong et des Hmong.
Pour gagner leurs aires de vie, il faut remonter les vallées du Song Kôi et du Song Ba, où la majorité des maisons sont des fermes couvertes de tuiles rouges, et traverser les champs de canne et de thé de la province de Ha Son Binh. Là, les maisons des paysans sont toutes bâties en planches et recouvertes de toits de chaume. Dans le district de Mai Chau, les habitations traditionnelles des Muong sont construites sur pilotis et groupées en hameaux au milieu des rizières inondées. Vus du ciel, ces villages de bambou ressemblent à des îles.
Au nord de Diên Biên Phu
Longtemps, la vallée de Diên Biên Phu a été le centre d'un réseau prospère de caravaniers reliant la Thaïlande, le sud de la Chine et la vallée du Song Kôi. Le commerce y a été florissant et la vallée fort peuplée. Mais, plus au nord, les montagnes demeurent impénétrables. N'y vivent que des bandits, des déserteurs de l'armée, ainsi que des tribus hmong, d'anciens Meos, riziculteurs attachés à des parcelles de terre accrochées au bas des versants, des Thaïs blancs et des Thaïs noirs. Là, à l'écart des grands axes de communication, les vieilles coutumes se préservent et les préjugés demeurent vivaces. Aucun métissage n'est autorisé par les chamans : jamais un Thaï n'épousera une Hmong !