À travers les régions

Alsace

Le TGV-Est, qui doit mettre Strasbourg à deux heures de Paris, semblait sur la bonne voie. Depuis dix ans on en parlait. Le « consensus alsacien » avait été obtenu entre le gouvernement Balladur (1993-1995) et les élus régionaux, toutes tendances confondues : Daniel Hoeffel (UDF), président du conseil général du Bas-Rhin, ou encore Catherine Trautmann (PS), maire de Strasbourg. L'enquête publique s'est déroulée à l'automne 1994. La commission d'enquête a rendu son rapport en septembre 1995 et le Conseil d'État a donné un avis favorable en mai 1996. Dans la foulée, la déclaration d'utilité publique plaçait le chantier du TGV-Est dans la catégorie des opérations prioritaires pour l'aménagement du territoire français et européen.

Adrien Zeller (UDF-Force démocrate), nouveau président du conseil régional, qui n'a pu devancer son concurrent Hubert Haenel (RPR) qu'avec l'apport des voix des conseillers écologistes, affirme ne pas croire à un TGV coûtant plus de 30 milliards de francs en ces temps de vaches maigres, et propose d'utiliser les voies existantes avec des trains modernisés selon la technique « pendulaire », projet défendu depuis longtemps par les écologistes. Comme pour apporter de l'eau à leur moulin, la DATAR invite l'État à « réexaminer les avantages et les coûts de projets tels que le TGV-Est ou la mise à grand gabarit du canal Rhin-Rhône par rapport à d'autres investissements » permettant de réduire l'enclavement et les inégalités territoriales. Comme si cela ne suffisait pas, les rapports Rouvillois et Blanc-Brassier invitent le gouvernement à remettre en cause le programme TGV, à le différer d'une dizaine d'années et à privilégier la solution pendulaire. Ces rapports ne sont pas « la Bible » pour Bernard Pons, ministre de l'Équipement et des Transports, qui affirme que la liaison Paris-Strasbourg sera réalisée sous la forme d'une ligne nouvelle et par phases successives.

Le géant américain de fret aérien DHL avait envisagé de faire de l'aéroport d'Entzheim (Bas-Rhin) la plaque tournante de son activité en Europe. L'enjeu ? D'abord du travail : 1 100 emplois créés dans les cinq ans à venir et 1 700 avant dix ans, des emplois non qualifiés en grand nombre. Ensuite l'équilibre financier, à terme. d'Entzheim. Mais aussi une intense circulation aérienne, 24 heures sur 24 et en particulier une trentaine de mouvements en pleine nuit. Le chômage ou les nuisances ? L'emploi ou la quiétude nocturne ? Il faut choisir. Plus de 15 000 Strasbourgeois ont choisi en manifestant le 14 septembre dans les rues de la capitale alsacienne contre DHL, « le voleur de sommeil », DHL indésirable en Alsace, d'autres Régions se portent candidates.

Le taux de chômage en Alsace atteint 7,5 %. Il reste largement inférieur à la moyenne nationale (près de 13 %) en raison des 60 000 frontaliers qui travaillent en Suisse ou en Allemagne. Aujourd'hui, plus de 15 000 Allemands sont domiciliés en Alsace, propriétaires d'une maison dans des villages, le plus près possible du Rhin. Ils peuvent représenter le quart, voire le tiers, de la population de certains villages. Ils se contentent de résider en Alsace et les actifs repassent tous les jours la frontière pour aller à leur travail dans le pays de Bade.

Les travailleurs frontaliers alsaciens s'inquiètent de la constitution de Novartis, deuxième groupe pharmaceutique mondial, résultant de la fusion des sociétés bâloises Sandoz et Ciba. Cette restructuration, qui entraînera la suppression de 10 à 13 000 emplois, n'épargnera pas les 3 400 Alsaciens employés à Bâle ni la Région Alsace elle-même.

Aquitaine

Après quarante années de bons et loyaux services, le site de Lacq (Pyrénées-Atlantiques) s'apprête à disparaître de la liste (peu copieuse au demeurant) des producteurs d'énergie de l'Hexagone. Le gaz jaillit du sous-sol béarnais en 1951, mais l'usine ne démarre qu'en 1957. En 2010, le gisement sera épuisé. Le site de Lacq, qui assure 7 000 emplois, toutes activités confondues, a « tiré » le développement du Béarn et de la Région. Il survivra à l'ère du gaz naturel. Forts d'une compétence acquise depuis plus de trente ans, les Béarnais vont créer une technopole centrée sur le traitement des déchets – tous les déchets – et sur des unités de recherche liées aux technologies vertes. François Bayrou, ministre de l'Éducation et président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques, présente ce pôle comme un « chantier d'avenir ». Celui-ci devrait assurer la pérennité de la chimie fine sur le site de Lacq.