« Dans cinq ans, nous aurons un câble supraconducteur fonctionnant dans l'azote liquide », annonce le Department of Energy américain, en allouant 40 millions de dollars de crédit à la recherche. « Les applications à l'électronique viendront bien avant, dit-on au MITI (le ministère japonais de l'Industrie), et permettront de réaliser des ordinateurs ultra-rapides. Le premier microprocesseur refroidi à l'azote liquide devrait voir le jour en 1989. » À voir Toshiba et Hitachi investir massivement sur cette technologie, on est tout disposé à les croire.

Même si les plus pessimistes ne prévoient pas le grand chambardement avant une dizaine d'années, il est facile de prédire que la supraconductivité à « haute » température va battre un autre record : celui du délai le plus court entre une découverte scientifique et son application industrielle.

Nicolas Witkowski

Chimie

Le prix Nobel de chimie à un chercheur français... On n'avait pas vu cela depuis plus de cinquante ans. Signe des temps ? Alors que Frédéric et Irène Joliot-Curie avaient été récompensés pour leurs travaux sur la radioactivité artificielle, leur successeur Jean-Marie Lehn l'est pour l'invention des « cryptates », des molécules dont la principale utilisation est actuellement... la décontamination.

L'idée initiale de Jean-Marie Lehn, en 1967, consistait à imiter les antibiotiques naturels, qui véhiculent à travers la membrane cellulaire des ions incapables, seuls, de la franchir. Pour dissimuler ces ions aux barrières naturelles de l'organisme, il fallait les « envelopper » avec les atomes adéquats. Les molécules-cages obtenues, baptisées « cryptates », sont d'une grande complexité, qui limite pour l'instant leur emploi dans l'industrie pharmaceutique.

Après les molécules-cages, les molécules-sandwichs. Depuis une trentaine d'années, on sait qu'avec deux cycles carbonés en guise de pain et un atome de fer en guise de jambon il est possible de fabriquer une molécule baptisée « ferrocène », qui est un excellent catalyseur. Un groupe de chercheurs de l'Université de Sussex, en Grande-Bretagne, vient d'en synthétiser une variante, tout aussi indigeste, où le phosphore remplace le carbone. Contre toute attente, les deux molécules présentent les mêmes propriétés, alors que tous les manuels de chimie insistent sur les différences fondamentales entre carbone et phosphore.

Ce mystérieux sandwich n'est pas le seul à prendre en défaut la théorie de la liaison chimique. Le chimiste australien L. Radon a donné à l'ordinateur de l'Université de Canberra les caractéristiques de quelques éléments chimiques, puis lui a demandé les formules de tous les composés possibles. Tous étaient connus... sauf un ! Une association de carbone et d'hélium, un gaz inerte que l'on croyait jusque-là incapable de participer à une liaison chimique.

Nicolas Witkowski

Astronomie

Certaines étoiles sortent brutalement de l'anonymat en subissant une explosion cataclysmique qui les rend temporairement beaucoup plus lumineuses. L'étude de ces supernovae est extrêmement précieuse pour tester la validité des modèles d'évolution stellaire établis par les théoriciens. Malheureusement, si l'on estime qu'il doit apparaître deux à trois supernovae par siècle dans notre Galaxie, la plupart passent inaperçues, masquées par des nébuleuses de gaz et de poussières. On en observe plus fréquemment dans les galaxies extérieures à la nôtre : plus de 400 supernovae extragalactiques ont été recensées depuis 1885. Mais, du fait de leur distance, elles apparaissent généralement peu brillantes. Aussi la découverte, par l'astronome canadien Ian Shelton, dans la nuit du 23 au 24 février, à l'observatoire de Las Campanas (Chili), d'une supernova dans le Grand Nuage de Magellan, la galaxie la plus voisine de la nôtre, a-t-elle constitué un événement marquant : par suite de sa relative proximité – 170 000 années de lumière –, cette supernova, dénommée 1987 A, est devenue visible à l'œil nu. Depuis 1604, on n'en avait pas observé d'aussi brillantes. Les astronomes ont braqué sur elle non seulement des télescopes optiques, mais également des radiotélescopes et des satellites. Outre la dispersion très rapide (jusqu'à 18 000 km/s) de la matière éjectée dans l'espace, les données recueillies ont mis en évidence plusieurs particularités qui distinguent l'étoile des deux types de supernovae que l'on connaissait. Sa luminosité a lentement augmenté pendant trois mois, mais son maximum (50 millions de fois la luminosité du Soleil), atteint entre le 20 et le 25 mai, est resté inférieur aux prévisions. La principale surprise vient de ce que l'étoile ayant explosé paraît être une super-géante bleue très chaude (cataloguée Sk -69°202), alors qu'on ne pensait pas jusqu'ici que ce type d'étoile puisse engendrer une supernova.