Les expériences de Tonegawa ont mis en évidence que, contrairement aux autres cellules de l'organisme dont les gènes sont stables, les cellules du système immunitaire subissent un remaniement incessant de leurs gènes aboutissant à la création de nouvelles séquences géniques. C'est ce réarrangement génique qui permet de coder pour tel ou tel anticorps spécifique. S. Tonegawa a pu dresser une cartographie des mécanismes de transfert et de recombinaison géniques expliquant ainsi l'infinie diversité des anticorps.
L'onchocercose
Le prix Nobel 1987 a récompensé une fois encore un travail de recherche fondamentale dont les rapports avec la médecine de tous les jours sont, pour l'instant, assez distants.
« Dieu vous garde d'être soigné par un prix Nobel » disait un prix Nobel. Il ne sera sans doute pas contredit par les quelques dizaines de millions de personnes qui, grâce à un nouveau médicament, ont maintenant l'espoir d'échapper a la cécité.
L'onchocercose est une parasitose due à un ver rond (Onchocerca volvulus), inoculé à l'homme par un moucheron (Simulium damnosum) que l'on trouve le long des cours d'eau.
On estime à 40 millions le nombre de sujets atteints en Amérique centrale, au Yémen, en Arabie Saoudite, et surtout en Afrique sud-saharienne. C'est la deuxième cause de cécité dans le monde. Cette « cécité des rivières » survient parfois après 10 ou 15 ans d'évolution de la maladie, les microfilaires (embryons) envahissant les milieux de l'œil et créant des lésions irréversibles. Dans certaines régions, 15 p. 100 de la population sont frappés de cécité totale.
Deux médicaments étaient utilisés jusqu'à présent pour lutter contre cette maladie, la suramine et la diéthylcarbamazine, mais ils provoquent des réactions secondaires graves, parfois mortelles, qui en limitent l'usage.
Depuis plusieurs années, une nouvelle molécule était expérimentée sur les animaux puis faisait l'objet d'études en pathologie humaine. Dérivé synthétique d'une lactone macrocyclique produite par un actinomycète (Streptomyces avermitilis) l'ivermectine s'est révélée d'une efficacité largement supérieure aux médicaments précédents et n'a aucune toxicité. Administrée par voie orale à dose unique annuelle ou semestrielle, elle permet d'espérer la fin de la transmission de cette redoutable maladie.
Le 21 octobre 1987, il a été annoncé que l'ivermectine était sortie du stade expérimental et que des millions de personnes pourront être désormais soignées efficacement et sans danger au moyen de ce médicament.
La grippe
La grippe n'a pas en Occident l'importance ni la gravité de l'onchocercose en milieu tropical. Néanmoins, chaque année se pose la question de la vaccination antigrippale. Il n'existe pas, en effet, de traitement curatif spécifique de la grippe, et le seul traitement opposable actuellement est préventif.
Un nouveau médicament, la rimantadine (molécule dérivée d'une substance antivirale efficace, l'amantadine, mais inutilisable dans le traitement préventif de la grippe en raison de ses effets secondaires), agirait à un stade précoce de l'incubation. Pris par voie buccale sous forme de comprimés, il s'opposerait à la multiplication du virus grippal de type A dans l'organisme et aurait ainsi un effet protecteur.
Lorsque la vaccination est contre-indiquée, cette chimioprophylaxie pourrait ainsi la remplacer ou, mieux encore, dans la majorité des cas, la compléter.
Dr Georges de Corganoff
Biologie
La première plantule de cocotier-éprouvette est née à l'ORSTOM (Office de la recherche scientifique et technique outre-mer). Obtenue par multiplication végétative à partir de fragments de feuilles, cette réussite laisse présager la reproduction par clonage de millions de jeunes cocotiers sélectionnés pour leurs performances et leur résistance aux maladies, qui transmettront indéfiniment à leur descendance leurs caractéristiques génétiques.
Pour la première fois au monde, le gouvernement américain autorise officiellement le dépôt de brevets concernant l'obtention d'animaux génétiquement recombinés. Quelques mois plus tard, à l'Institut de physiologie animale d'Édimbourg (Écosse), des biologistes donnent naissance, par manipulations génétiques, à une lignée de souris dont le lait contient en majorité... une protéine de brebis. Avec, au-delà de la prouesse de laboratoire, la perspective de faire produire aux vaches des laits sur mesure de haute valeur biologique, pour les nouveau-nés ou l'industrie.