Pour donner plus de force à ces dispositions, le Premier ministre, Pierre Mauroy, rappelle avec éclat au mois de juillet devant les recteurs d'académies que ces mesures devront être « appliquées avec la plus grande fermeté ».

Entreprise difficile lorsqu'il s'agit de gérer plus d'un million de personnes et parmi elles quelque 625 000 enseignants. Entreprise possible, puisque, le jour de la rentrée, les bavures se révèlent peu importantes. Syndicats d'enseignants, organisations de parents d'élèves et gouvernement, sans trop de triomphalisme, reconnaissent que « la rentrée s'est bien passée ».

Renversement de tendance

Et, pourtant, cette rentrée placée sous le signe de la rigueur budgétaire (il y a quand même eu 5 000 créations d'emplois) est marquée par une augmentation des effectifs d'élèves, dans le secteur public comme dans le privé. Dans l'enseignement préélémentaire (maternelles) la tendance est à la hausse. L'augmentation du nombre des naissances en 1979 et 1980 explique un accroissement des effectifs de plus de 50 000 enfants. Si les bambins de 3 ans sont scolarisés à plus de 90 %, il n'en est pas de même pour les enfants de 2 ans. Dans les zones à forte concentration de population jeune, des problèmes existent et les listes d'attente sont longues dans les écoles.

Dans l'enseignement élémentaire — du cours préparatoire (CP) au cours moyen (CM) — en revanche, le nombre d'élèves diminue. Conséquence de l'arrivée des classes creuses, les générations nées après 1974, la tendance à la baisse des effectifs se poursuit. Entre la rentrée de 1980 et celle de 1983, la diminution du nombre des élèves dépasse les 450 000.

Le nombre d'élèves dans les collèges (de la sixième à la troisième) augmente sensiblement. Ce phénomène, déjà perceptible l'an dernier, se précise. Il s'agit d'un renversement de tendance important si on le compare aux statistiques de 1980.

Ce phénomène est la conséquence des actions menées par le gouvernement depuis son arrivée au pouvoir. La politique suivie par le ministre de l'Éducation nationale, Alain Savary, a pour objectif de favoriser le maintien des jeunes dans le système scolaire, pour qu'ils obtiennent une formation et un diplôme. La lutte contre l'échec scolaire et le départ prématuré de jeunes insatisfaits de l'institution est menée activement depuis deux ans. Cette politique, ainsi que la faiblesse des offres d'emploi, incite les élèves et leurs parents à poursuivre la fréquentation du lycée ou du collège même après l'âge de 16 ans, qui marque la fin de la scolarité obligatoire.

La volonté du ministre et du gouvernement de « mieux foi mer plus de jeunes » explique aussi la présence d'un nombre d'élèves plus important dans les lycées d'enseignement professionnel (LEP, ou second cycle court). Favoriser les redoublements et encourager la scolarisation implique une contrainte : l'augmentation des effectifs, donc du nombre d'élèves par classe. Nombre de parents et d'enseignants reprocheront sans doute à Alain Savary une dégradation des conditions d'enseignement et de travail. « C'est l'effet pervers de mesures utiles pour le pays tout entier », se bornent à constater les conseillers du ministre.

Dans les lycées, les consignes invitant les enseignants à autoriser les redoublements d'élèves en classes de terminale entraînent une augmentation des effectifs. Classes d'âge plus nombreuses et légère diminution du nombre de reçus au baccalauréat, à la session de 1983, provoquent un accroissement des effectifs de près de 10 000 élèves. Dans beaucoup d'établissements du second cycle, les classes de 40 élèves apparaissent, celles de 37 ou 38 deviennent plus fréquentes. Les enseignants se plaignent d'avoir moins de temps à consacrer à chaque élève. Cette surcharge des classes, surtout en terminale, se produit au moment où les élèves qui ont inauguré la réforme Haby en classe de sixième à la rentrée 1977 arrivent dans les classes de baccalauréat.

Pour accueillir les élèves du collège unique créé par René Haby, il était nécessaire d'aménager la scolarité au lycée. Cette rénovation a été entreprise pour la première promotion concernée, c'est-à-dire à la rentrée 1981. Le changement de gouvernement n'a pas entraîné de renoncement. Les services d'Alain Savary ont mis en place une nouvelle organisation des classes de seconde préparées par son prédécesseur. La seconde indifférenciée doit mettre fin à la spécialisation jugée trop précoce dans cette classe et offrir à tous un tronc commun d'enseignement, complété par des options.