Soyons justes : il faut également retenir de cette saison de fort beaux moments télévisuels, comme le premier concert du pianiste argentin Miguel Angel Estrella sur FR3, le 1er mars quelques mois après sa libération des geôles uruguayennes où il a été détenu plusieurs années.
Les téléspectateurs se sont encore passionnés pour un feuilleton signé Georges Coulonges sur le thème d'un CES et de sa jeune assistante sociale, surnommée amicalement Pause-Café par les potaches. Véronique Jeannot est devenue aussi populaire que naguère Janique aimée ou Cecilia, médecin de campagne.
De même, on retiendra la luxuriante adaptation que Maurice Cazeneuve a tiré du roman de Zola, Nana, ainsi que les traits de sa capiteuse interprète, Véronique Genest. Enfin, il faut aussi retenir la magnifique dramatique en trois épisodes que Gérard Herzog a réalisée à partir de son roman La voie Jackson et diffusée sur TF1 trois soirs de suite, les 25, 26 et 27 mars. Épopée de haute montagne, de neige et de rochers, d'amitié et de courage, La voie Jackson a fait découvrir à de nombreux spectateurs la folle grandeur de l'alpinisme à travers le talent d'excellents comédiens : Guy Marchand, Sami Frey et Marie-Josée Neuville.
Un anniversaire à signaler, pour terminer : Les jeux de 20 heures, l'émission quotidienne de FR3, ont soufflé, le 23 mars, leur cinquième bougie. Depuis la création de cette demi-heure passée agréablement autour du dictionnaire de Jacques Capelovici, 1 390 compétitions ont joyeusement opposé les érudits de 250 villes de province à trois personnalités du spectacle. Plus de 40 artistes forment ainsi à tour de rôle ce tiercé vespéral dans une émission qui, certains soirs, talonne l'audience des journaux de TF1 et d'Antenne 2. Ce qui tend à prouver qu'en France, si le droit à l'information est une question grave, le public n'en perd pas pour autant le goût du sourire.
Radio
Vers la décentralisation
L'année 1980-81 aura été marquée, dans le monde de la radio, par l'évidente nécessité d'une décentralisation des ondes.
La situation engendrée par le monopole d'État des programmes radio est de plus en plus perçue comme bloquant les possibilités offertes par les techniques contemporaines, ainsi que les nouveaux appétits de communication du public.
Le monopole ? Une institution qui date de l'après-guerre (ordonnance du 23 mars 1945 révoquant toute autorisation accordée à des postes privés), confirmée par la loi du 3 juillet 1972. La loi d'août 1974 (Journal de l'année 1974-75), qui prévoit l'éclatement de l'Office unique de radio et télévision, l'ORTF, en plusieurs sociétés, confie la production des programmes radio à la société Radio-France, service public pour les programmes nationaux (France-Inter, France-Musique, France-Culture, FIP et Radio-France International) ; à FR 3, service public pour les programmes régionaux ; et à Télé-Diffusion de France, service public pour la diffusion de ces programmes. Le panorama radiophonique se complète avec les programmes des postes périphériques : Europe 1, RTL, Sud-Radio, dont les émetteurs sont plantés hors des frontières, et de RMC qui, avec des émetteurs situés en territoire français, est une dérogation officielle à la législation.
Radios-pirates
Les premiers coups de boutoir de ce que l'on appelle alors des radios-pirates se manifestent en 1973, avec les émissions de Radio-Campus, à l'université de Villeneuve-d'Ascq, près de Lille. Puis, quelques années plus tard, en 1977-78, avec les émissions des antinucléaires lors des manifestations de Malleville et avec Radio-Fil bleu, à Montpellier, qui attaque les imprécisions des textes de loi. Le coup d'envoi de l'indiscipline est donné.
Depuis, les radios-pirates se sont multipliées, facilitées par le moindre coût du matériel, et sont devenues libres, indépendantes, ou locales, régulièrement contrées, brouillées ou saisies par le pouvoir. Toutes investissent des canaux de modulation de fréquence inutilisés.
Les sociétés de service public sont sur la défensive. Et, poussée par l'obligation que fait la conférence administrative mondiale des radiocommunications d'attribuer, dans les années à venir, un certain nombre de canaux MF libérés, Radio-France tente, dès le printemps 1980, des expériences de radios décentralisées. Ce sont : à Lille Fréquence-Nord, à Laval Radio-Mayenne, à Melun Melun FM (Journal de l'année 1980-81). Un an plus tard, ces expériences ne sont pas remises en question. Elles se sont trouvé un public. La plus concluante est Radio-Mayenne, qui, sous la direction de Daniel Hamelin et à l'échelle d'un département, a réussi une belle intégration dans la population locale.