Mais il est aussi contesté. En politique étrangère, il entreprend plus qu'il ne réussit. Les Soviétiques le situent mal. Il ne trouve pas le ton avec les Américains. Ses tentatives, justifiées sur le fond, de dialogue Nord-Sud ou de conférence sur l'énergie ne débouchent sur rien de concret.
Il ne mobilise pas l'opinion en faveur de l'Europe, malgré son projet d'élection de l'Assemblée des communautés européennes au suffrage universel direct. Son ministre des Affaires étrangères, Jean Sauvagnargues, choque certains en serrant la main d'Arafat ; son chef d'état-major, le général Méry, en inquiète d'autres par ses propos sur « la bataille de l'avant ».
La gauche
Pourtant, le bilan économique n'est pas si mauvais. Le nombre des chômeurs redescend même, un moment, au-dessous du million. Mais il y a une sorte d'agitation nerveuse dans la fonction publique, chez les appelés, des violences en Corse ou chez les viticulteurs, un climat indécis. Et puis, la situation politique, elle aussi, se dégrade.
Le parti socialiste se porte un peu trop bien. Les élections législatives d'octobre 1974 tournent à son avantage. Il confirme son succès aux législatives partielles de 1975, et surtout triomphe aux élections cantonales de mars 1976, atteignant alors un score record. Michel Rocard, des syndicalistes, des chrétiens de gauche ont rejoint le parti.
L'autorité personnelle de François Mitterrand, qui a écarté le CERES de la direction au congrès de Pau en février 1975, ne cesse de croître. Il voyage en homme d'État. Il fait figure de véritable chef de l'opposition.
Certes, le PC lui conteste tout à fait ce rôle, introduit des thèmes promis à un bel avenir : « l'abandon du programme commun par le PS » ou le « virage à droite ». Mais, alors que le parti socialiste progresse à grandes enjambées, lui, stagne ou recule selon les élections : il est distancé.
Il tente cependant d'améliorer son image en la libéralisant. Il critique l'Union soviétique, abandonne même le dogme de la dictature du prolétariat à son XXIIe congrès (février 1976). Il s'ouvre, il sort le grand jeu de l'eurocommunisme, mais il ne retrouve pas d'élan.
La majorité
Enfin, — et c'est à court terme le plus périlleux — Valéry Giscard d'Estaing éprouve des difficultés avec sa propre majorité. Jacques Chirac, dès 1974, a pris d'assaut l'UCR au nez et à la barbe des barons médusés. Il s'est intronisé secrétaire général, avant d'installer André Bord à sa place. Il installe ses hommes aux postes clés, séduit les militants.
Face à ce dynamisme et aux grincements qui s'entendent à propos de politique extérieure, des institutions ou de tactique électorale, les centristes se regroupent sous la houlette de Jean Lecanuet au sein du CDS et se rapprochent des républicains indépendants, dont Michel Poniatowski, l'ami du président, a saisi les commandes. Ainsi s'esquissent deux pôles au sein de la majorité.
Et puis, le 25 août 1976, coup de théâtre : Jacques Chirac; démissionne de ses fonctions de Premier ministre. Ce n'est pas un départ en douceur. Au contraire, fait sans précédent, le chef du gouvernement proclame : « Je ne dispose pas de moyens que j'estime nécessaires pour assumer efficacement mes fonctions. » C'est bien lui qui s'en va, et en claquant la porte.
Il est remplacé par un quasi-inconnu (sauf pour les cercles dirigeants), aussitôt baptisé par le chef de l'État « meilleur économiste de France » : Raymond Barre. Le nouveau venu, qui professe une vénération pour le général de Gaulle, s'intéresse fort à la tenue du franc et fort peu à la politique politicienne.
Barre
Il a de l'autorité, de la compétence, de la loyauté, de l'assurance, de la morgue et de l'obstination. Il sera près de cinq ans Premier ministre, de plus en plus considéré à l'étranger, de moins en moins populaire en France. Il veut redresser la situation économique par une gestion rigoureuse. Ceci explique cela.
En fait, si Raymond Barre demande, le 22 septembre, en présentant son plan d'action, trois ans pour réussir, chacun sait que l'échéance qui domine, ce sont maintenant les élections législatives de mars 1978. Elles s'annoncent difficiles pour la majorité.