L'IRCAM, fondé par Boulez, commence en septembre ses manifestations artistiques, qui se sont poursuivies toute la saison à partir d'octobre dans la nouvelle salle qui lui est réservée au Centre Georges-Pompidou. Les créations les plus marquantes de cette formation sont dues à Boulez et à Berio. Dès septembre également, une série de concerts, donnés à l'Athénée, sont consacrés à l'un des grands chefs de file de la musique contemporaine, John Cage. La salle Favart aussi, entre les séries de représentations de sa saison lyrique, accueille à plusieurs reprises des manifestations de la nouvelle école : on a pu assister à la reprise des Chants de Maldoror et de Formes de Marius Constant et découvrir un mini-opéra, My Chau Throng Tuy, du compositeur vietnamien Nguyen Thien Dao, œuvre à laquelle la critique reconnaît une incontestable richesse rythmique et sonore. À cette même salle Favart, l'Ensemble intercontemporain vient, à deux reprises : la première fois, avec un spectacle composé de deux œuvres, Mots croisés de Claude Prey et Tryptique d'Alexandre Goehr, qui furent des échecs retentissants ; et la seconde fois, avec trois ouvrages, Aventures et nouvelles aventures de Ligéti, Chants pour un roi fou de Maxwell Davies et Je vous dis que je suis mort de Georges Aperghis, qui n'ont pas été beaucoup mieux reçus.

Au Théâtre des Champs-Élysées, le 29 décembre 1978, un événement exceptionnel a lieu : la création en France d'une œuvre d'Henri Dutilleux, Timbres, espace, mouvements, qui avait été donnée en première audition à Washington. Après ce concert, donné avec l'Orchestre national, dirigé par Rostropovitch, beaucoup considèrent Dutilleux, à côté de Messiaen, comme le premier des musiciens français vivants. C'est certainement vrai, mais il convient de placer, presque sur le même plan, Pierre Henry, son cadet de onze ans.

Cette année, la création de son oratorio Dieu sur un poème inachevé de Victor Hugo est un événement. Autre événement, la journée consacrée par France-Culture à Paul Mefano, un des jeunes chefs de file de la nouvelle école. Parmi les formations importantes de cette nouvelle école, le CAGRM met en lumière des compositeurs comme Smolle, Beyle, Dufour et Maderna ; de même que la SIMC confirme cette année le prestige de musiciens comme Edgard Varèse et André Masson.

L'Espace Cardin accueille des spectacles lyriques comme le Nietzsche d'Adrienne Clostre et Le jeu de sainte Agnès de Marius Constant, et c'est à Bordeaux qu'a lieu, en janvier 1979, la création mondiale du Roi Gordogane, opéra d'un des plus grands compositeurs français vivants, Henry Barraud.

Dernier événement marquant de la saison, le concert donné par l'IRCAM, le 19 juin, au Théâtre de la Ville, où Daniel Barenboïm dirige des œuvres de Berg, Berio et Sciarrino.

La musique contemporaine est finalement bien vivante, mais elle ne vit pas sur des bases bien établies, et les critères dans ce domaine sont très subjectifs. Si quelques grands compositeurs réussissent à s'imposer à l'ombre de Messiaen, combien d'autres se cherchent et s'égarent ! Il y a là un véritable danger pour la musique de l'avenir, et certains s'interrogent : « Va-t-on vers la non-musique ? » Espérons que la prophétie d'Honegger, prédisant il y a vingt-cinq ans la mort rapide de la musique, ne se réalisera pas. Si cela était, il resterait toujours le merveilleux patrimoine de la musique classique et celui de quelques modernes.

Danse

Changements et contestation

Il est désormais admis que la danse occupe une situation de pointe parmi les arts contemporains. « Le ballet, constatait Maurice Béjart en 1973, prend la place occupée au XIXe siècle par l'opéra, aux XVIIe et XVIIIe par le théâtre parlé. » Les faits ne l'ont pas démenti. Les spectacles chorégraphiques pullulent ; tous les festivals d'été font appel à une ou deux compagnies, les stages prolifèrent et les travaux d'université s'intéressent de plus en plus au sujet.

Les champs de la danse sont multiples. Ils vont des grands ouvrages dramatiques aux expériences d'une avant-garde qui pousse ses recherches jusqu'à l'anti-danse. Entre ces deux pôles, toutes les tendances s'expriment, tout devient possible. Dans une époque confuse, préoccupée de retrouver l'unité du corps et de l'esprit — dissociée par des siècles de religion chrétienne et de philosophie cartésienne —, les limites entre les genres s'estompent, les codes se dévalorisent ; le temps et l'espace ont perdu leur valeur immuable.