Mais les seules volontés françaises ne pourront éviter la crise mondiale et ses répercussions. En fait, la guerre navale avec le Japon, que l'on redoutait déjà il y a dix ans (et que le boom économique avait différée), est désormais entamée. Par malheur, les Européens n'ont pas profité du répit pour coordonner leurs politiques et vont à la bataille en ordre dispersé. À tout prix, par des commandes d'État déguisées, en finançant des stockages de navires, chacun entend utiliser et préserver ses capacités de production, alors que, de toute évidence, d'ici à quelques mois, la moitié seulement des chantiers du monde pourra tourner à plein.

Agriculture

L'année agricole

Plusieurs événements marquent l'année, notamment la sécheresse, la crise viticole et la mise en question de la politique agricole commune.

La sécheresse

Le plus important de ces événements est, sans conteste, la sécheresse. Une sécheresse inhabituelle et catastrophique qui sévit depuis l'hiver dans des régions traditionnellement tempérées (approximativement au nord d'une ligne Bordeaux-Belfort).

Fin juin, sans que l'on connaisse exactement l'étendue des dégâts, certaines évaluations font état de pertes considérables. En Beauce, le rendement moyen en blé ne serait que de 35 q à l'ha (47 en 1975, 62 en 1974). Des dizaines de milliers d'ha de betteraves et de maïs sont perdus. La production de lait régresse et passe au-dessous du niveau atteint à la môme époque en 1975.

Les éleveurs se débarrassent de leurs animaux, ne pouvant plus les nourrir et, quelquefois, les abreuver. Des vaches sont abattues, ce qui représente une décapitalisation du cheptel dont les conséquences se feront longtemps sentir. L'afflux de ces botes sur les marchés provoque une baisse des cours.

Le gouvernement prend progressivement conscience du drame national, qui risque de relancer l'inflation. Certains évaluent à quelque 4 milliards de F la perte probable à l'exportation. La facture de cette calamité sera vraisemblablement multipliée par quatre ou cinq.

Jacques Chirac réunit un « conseil de guerre » pour faire le bilan de la situation avec les ministres, hauts fonctionnaires et préfets concernés. Ce sont ces derniers qui agiront en fonction des circonstances.

La crise viticole

La crise viticole, commencée en 1974, se poursuit en 1975, provoquant la colère des viticulteurs méridionaux.

Malgré les mesures mises en œuvre, le problème de fond demeure et, fin juin 1976, rien n'étant encore réglé, la situation reste explosive dans le Midi viticole. Plutôt que d'acheter les vins méridionaux, le négoce préfère importer des vins italiens, dont les prix sont imbattables du fait de prix de revient moindres et surtout de la dévaluation de la lire.

En septembre 1975, devant l'impossibilité de parvenir à un accord communautaire, le gouvernement français décide, unilatéralement, de frapper les vins italiens importés d'une taxe égale à 12 % du prix d'orientation fixé à Bruxelles (9,40 F le degré-hecto). Ce qui provoque un tollé en Italie et dans les milieux communautaires, qui déposent plainte contre la France devant la Cour de justice de la CEE.

Cette taxe, insuffisamment élevée, n'enraye guère les importations de vins italiens. Et pour cause, le vin courant de la péninsule vaut, en janvier 1976, le prix de 1974, soit 1 200 lires le degré-hecto. Mais, du fait de la dévaluation de la lire, sa conversion est passée de 11 à 8 F. L'agitation reprend de plus belle dans le Midi et s'étend dans la région du cognac, où la production dépasse les besoins du marché.

Le Premier ministre, qui s'est saisi du dossier, annonce, le 14 janvier, six mesures en faveur de la viticulture. La plus importante est la création (JO du 8 avril 1976) d'un Office interprofessionnel des vins de table. Toutefois, les viticulteurs, qui voulaient que cet organisme leur assure un revenu minimal et contrôle les importations d'Italie, n'ont pas satisfaction. Reports fiscaux, promotion des vins de pays, demande de fixation de montants compensatoires à la frontière italienne afin de gommer la décote de la lire font partie de ce train. S'ajoutent le futur dépôt d'un projet de loi devant créer un agrément pour les négociants en vins et l'annonce d'un contrôle de la qualité des vins importés.