Les élections se déroulent le 25 avril 1976 sur l'ensemble du territoire. 559 candidats (316 dans le Nord et 243 dans le Sud) se disputent 492 sièges (249 dans le Nord et 243 dans le Sud).

Les 492 nouveaux élus se réunissent pour la première fois le 24 juin 1976. Une semaine après le début de leurs travaux, on commence par faire état, dans les milieux diplomatiques, d'une réunification dans les jours suivants. Elle intervient, en effet, le 2 juillet et le nouvel État prend le nom de République socialiste du Viêt-nam (RSV). L'ancien chef de l'État du Nord, Ton Duc Thang en devient le chef d'État et Pham Van Dong dirige le nouveau gouvernement. Dans la réalité, les choses sont plus complexes.

Réorganisation

Les membres du GRP, en effet, ont dû, tout au cours de l'année, faire face à des problèmes que les militants formés dans les maquis et aidés de quelque 10 000 cadres nord-vietnamiens n'étaient pas toujours aptes à résoudre. La réorganisation des différentes provinces, l'encadrement de la population par groupes de maisons et comités de quartiers, la rééducation d'environ 300 000 militaires et fonctionnaires de l'ancien régime, la refonte des programmes scolaires... n'ont pas atteint les objectifs souhaités, notamment à Saigon.

À cet égard, tous les témoignages concordent, la métropole du Sud n'a pas épousé la cause des révolutionnaires et reste le lieu de la corruption et des trafics en tous genres, même s'ils ont diminué. Il est vrai que, le GRP n'ayant pas voulu (contrairement par exemple à ce qui s'est passé à Phnom Penh) procéder à une opération chirurgicale sur la ville, il était inévitable que tous ceux qui, à un titre ou à un autre, ont profité du régime de Thieu et ont été marqués par lui n'aient aucun désir d'entrer dans la logique socialiste.

À ce mécontentement de principe s'ajoutent les réserves ou même les déceptions d'une population qui, la paix revenue, s'attendait à retrouver une vie normale et se trouve plongée dans une crise économique dont les dirigeants vietnamiens eux-mêmes ne cachent pas la gravité : un pays dévasté, plus de 3 millions de chômeurs, un manque dramatique de matières premières, une production et un marché à réorganiser et une insuffisance de cadres compétents.

Bavures

L'échange de la monnaie décidée en automne se déroule, par exemple, dans des conditions telles que l'inflation se trouve relancée et que le Comité militaire de gestion de Saigon exprime publiquement ses regrets à la population. Des foyers d'agitation ou de résistance se manifestent ici et là, mais sans remettre réellement en question la sécurité du pays. Le seul incident grave connu est l'accrochage qui se produit dans la nuit du 12 au 1 3 janvier à l'église de Vinh Son (quartier nord de Saigon), faisant trois morts dont un membre des troupes de sécurité. Le groupe d'opposants se proposait de diffuser des émissions clandestines ; il disposait également d'un atelier de fausse monnaie.

Devant cette situation, les dirigeants vietnamiens réagissent sur deux plans. D'abord la production agricole, où l'objectif est de parvenir à une autosuffisance qui semble possible grâce à l'aide apportée par le Nord et à la remise en valeur des terres ravagées par la guerre (un des gros problèmes est justement de désengorger les villes et de convaincre les réfugiés de retourner à la campagne).

Ensuite la production industrielle considérée comme « un domaine fondamental ». Là aussi, l'activité reprend sous des formes diverses. Alors que, dans le Nord, il n'existe que deux secteurs économiques (le secteur d'État et le secteur collectif), trois autres s'ajoutent dans le Sud : le secteur mixte, le capitalisme privé et l'entreprise individuelle. Pour l'instant, les autorités s'accommodent de cette variété.

Le Nord, sur sa lancée d'un communisme austère, ne connaît pas ces problèmes et il ne semble pas que le Sud l'ait contaminé. Toutefois, plusieurs fois au cours de l'année et en particulier à la veille des élections, les dirigeants et le Premier ministre lui-même, Pham Van Dong, ont dénoncé les « phénomènes bureaucratiques, paperassiers et autoritaires » qui se manifestent à « tous les échelons dans un certain nombre de services de l'État ». Des cadres, des fonctionnaires ont été limogés.

Aides

Ce mélange constant de théorisation et de pragmatisme, cet équilibre entre l'application de la ligne générale et les exigences de la réalité, en bref, cette recherche d'une voie vietnamienne du socialisme, on les retrouve dans la politique étrangère du nouvel État à la fois socialiste et non aligné. Le Duan, premier secrétaire du Parti des travailleurs, est reçu en septembre 1975 à Pékin par Mao, qui lui accorde une aide mais il ne ratifie pas pour autant les thèses chinoises.