Le président Assad modifie sensiblement ses positions concernant le règlement du conflit israélo-arabe. Il soutient qu'il n'a jamais approuvé la diplomatie dite du pas à pas du secrétaire d'État américain Henry Kissinger et qu'il n'accepterait la restitution par Israël du Golan que dans le cadre d'une solution globale, laquelle ne serait acceptable que si l'OLP de Yasser Arafat l'approuvait au préalable (29 septembre).

La Syrie n'assisterait à la Conférence de la paix, ajoute-t-il, que si l'OLP était invitée à y participer en tant que membre à part entière (6 octobre). Malgré tout. Damas renouvelle, le 31 mai, le mandat des casques bleus dans le Golan pour une nouvelle période de six mois, à la grande satisfaction de Washington.

Relations

Le régime baasiste ne s'en prend pas moins aux États-Unis, accusés d'alimenter, voire d'avoir suscité, la guerre civile au Liban pour détourner l'attention du monde arabe du scandaleux accord du Sinaï, pour empêcher la Syrie et la résistance palestinienne de poursuivre la lutte contre Israël. La sérénité des rapports entre Damas et Washington n'est pas pour autant affectée. Au contraire, les relations bilatérales, en particulier dans les domaines économique et social, se développent. L'assistance financière américaine à la Syrie pour l'exercice 1975-1976 s'élève à plus de 80 millions de dollars.

Cependant, le président Assad tente, au cours du deuxième semestre de 1975, de renforcer ses relations avec les pays communistes.

À l'issue d'un séjour à Prague, il signe, le 11 septembre, une série d'accords de coopération avec la Tchécoslovaquie. Du 9 au 19 octobre, il s'entretient à Moscou successivement avec Brejnev, Kossyguine, Gromyko et le maréchal Grouchko et obtient que les Soviétiques intensifient leurs livraisons d'armement.

Les services de renseignements américains révèlent le 11 novembre que Moscou a accepté d'envoyer en Syrie un escadron de Mig 25, type d'appareils que le Kremlin refuse de livrer même à certains membres du pacte de Varsovie. Malgré tout, le président Assad continue d'orienter le commerce extérieur vers l'Occident.

Économie

La valeur des échanges avec les États-Unis est, en 1975, huit fois supérieure à celle de 1972 ; la part des importations des pays de la CEE a fait un bond de 26,6 % en 1970 à plus de 40 % en 1975, tandis que celle des pays socialistes s'est réduite de 24,2 % à 20,6 % pendant la même période.

La libéralisation de l'économie, les facilités accordées au secteur privé et au capital étranger, les mesures anticommunistes, la mise au pas des organisations palestiniennes rassurent les États conservateurs arabes, notamment les richissismes producteurs de pétrole, qui déversent en Syrie plus de 6 milliards de F en deux ans (1974 et 1975).

Pourtant, l'Arabie Saoudite et divers autres pays du golfe Persique s'abstiennent brusquement de verser leurs contributions à la trésorerie de Damas ; l'Irak interrompt, le 10 avril, l'écoulement de son pétrole par l'oléoduc qui traverse le territoire syrien et alimente la raffinerie de Homs. Au total, le déficit suscité est évalué de 6 à 8 milliards de F. Le régime de Damas est contraint d'effectuer des coupes sombres dans les investissements prévus pour le développement.

Pressions

L'Arabie Saoudite, alliée de l'Égypte, tente ainsi d'amener le président Assad à arrêter sa campagne contre l'accord du Sinaï, à prendre davantage ses distances avec l'URSS, à l'empêcher d'imposer sa tutelle exclusive sur le Liban, où les pays conservateurs souhaitent maintenir leur influence traditionnelle. Le chef de l'État syrien est soumis simultanément aux pressions des États progressistes, tel l'Irak, qui cherche à infléchir sa politique au Liban dans un sens favorable à la gauche et à l'OLP.

Après ses déconfitures militaires au Liban, au mois de juin, le président Assad tente de satisfaire les deux camps arabes. Tandis qu'il entretient des relations suivies à Damas avec le Premier ministre libyen Abdal Salam Jalloud pour faire aboutir un règlement au Liban, le président du Conseil syrien négocie à Riyad avec les chefs des gouvernements d'Égypte, d'Arabie Saoudite et du Koweït. Le 24 juin est conclu un accord susceptible de réconcilier Le Caire et Damas, qui avaient pratiquement rompu leurs relations diplomatiques le 5 juin.

Malaise

Le président Assad souhaite la levée des sanctions financières infligées par les pays arabes conservateurs, qui interviennent à un moment où l'économie syrienne subit les contrecoups de la crise libanaise. Le coût de la pacification, les difficultés suscitées par le repli en Syrie de quelque 400 000 réfugiés du Liban, la crise aiguë du logement, la raréfaction de produits importés traditionnellement de Beyrouth, en particulier le kérozène, la hausse des prix, le marasme dans les souks en raison de la baisse du nombre des touristes, qui venaient pour la plupart de Beyrouth, alimentent le malaise social. D'autant plus que la libéralisation économique a engendré une nouvelle classe d'affairistes qui s'enrichissent rapidement grâce à des opérations spéculatives.