Inutile de dire que les États avantagés ne se soucient nullement de partager leurs richesses marines. Le clivage a été suffisamment net pour provoquer une scission du groupe des 77, au sein duquel les nantis sont les plus acharnés à défendre leurs avantages...

Les États-Unis sont satisfaits d'avoir obtenu que la prochaine session de la conférence se réunisse dès l'été 1976. Mais il est évident qu'un aussi court délai entre la quatrième et la cinquième session ne donnera pas un laps de temps suffisant pour que des compromis soient élaborés à l'intérieur des groupes et entre les groupes.

Dès lors, il est irréaliste de penser qu'une convention globale puisse sortir de cette cinquième session, qui risque de n'être qu'une quatrième session bis.

La France, 4e partenaire de l'EPOD, programme international de forage des océans

Yves La Prairie, l'actuel P-DG du Centre national pour l'exploitation des océans (CNEXO), et Thomas O. Jones, directeur des programmes nationaux et internationaux à la National Science Foundation (NSF), ont signé, le 15 janvier 1976, le protocole d'accord marquant officiellement l'adhésion de la France à l'IPOD (International Phase of Ocean Drilling). La France est donc le quatrième participant non américain (après l'URSS, le Royaume-Uni et le Japon) à rejoindre les États-Unis pour la prolongation internationale du programme de forages sous-marins profonds DSPD (Deep Sea Drilling Project).

Bilan

De l'été 1968 à l'été 1975, les États-Unis ont supporté seuls la charge financière du DSPD (67,6 millions de dollars), bien que de nombreux chercheurs non américains aient été invités à participer aux 44 legs (campagnes de 6 à 8 semaines chacune) du DSPD. Pendant sept ans, le Glomar Challenger, navire spécialement construit pour le DSPD, a foré près de 600 trous répartis sur 392 sites sélectionnés dans les fonds de tous les océans du monde. Les analyses et les diverses études faites sur les carottes prélevées dans les forages ont permis de rassembler des données de valeur inestimable. Entre autres choses, le DSDP a apporté la preuve de la justesse de la récente théorie de la tectonique des plaques (Journal de l'année 1970-71) ; il a révélé que des hydrocarbures pouvaient exister dans les bassins sédimentaires des mers profondes ; il a démontré que la calotte glaciaire antarctique s'était formée il y a au moins 20 millions d'années.

L'IPOD a débuté le 29 novembre 1975 avec le départ du Glomar Challenger de San Juan de Porto Rico et ne s'achèvera qu'en août 1979. Les participants ne sont pas les pays eux-mêmes, mais des institutions scientifiques (pour la France, le CNEXO), soit 14 américaines et 4 étrangères. Les représentants des 18 institutions élaborent en commun les programmes.

Pendant le DSDP, les forages ont permis de carotter pour la première fois les grands fonds océaniques. On a ainsi obtenu un échantillonnage géographique du sous-sol de l'Atlantique, du Pacifique, de l'océan Indien, de l'océan Antarctique, du golfe du Mexique et de la Méditerranée. Pour l'IPOD, les sites des forages seront choisis selon des critères répartis en trois thèmes. Chaque sélection de site sera précédée d'études préliminaires très poussées (levés sismiques principalement).

Difficultés

Le premier thème concerne la croûte océanique, basaltique en général. Le basalte est une roche dure, si bien qu'en dépit du procédé de réentrée mis au point pour le DSDP et permettant de réintroduire un trépan neuf dans un forage en cours à travers plusieurs milliers de mètres d'eau, la pénétration dans le basalte n'a pas dépassé 582 m au cours du DSDP. Au cours de l'IPOD, on voudrait forer le basalte plus profondément, si possible jusqu'à 2 000 m, de façon à connaître la nature géochimique et la structure d'une certaine épaisseur de la croûte océanique. Pour cela, un leg entier, et même plus, sera consacré au forage d'un seul trou dans lequel on fera autant de réentrées qu'il sera nécessaire. Le Glomar Challenger a reçu un équipement amélioré de réentrée. Mais il semble que les problèmes ne soient pas encore tous résolus : comme pendant les forages effectués dans le basalte au cours du DSDP, le train de tiges a été coincé dans l'unique trou foré au cours du leg 45 (le premier de l'IPOD), alors qu'après 9 réentrées le trépan était parvenu à la profondeur de 580 m dans le basalte (auxquels il faut ajouter 100 m de sédiments superficiels). Cinquante pour cent du temps de forage de l'IPOD devait être consacré à ce premier thème.

Marges

Le deuxième thème s'intéressera aux marges actives (fossés océaniques, par exemple) et aux marges passives (le rebord des masses continentales européenne, américaine et africaine, entre autres). Les marges actives marquent les bords actuels des plaques ; les marges passives portent les traces des premiers stades de l'ouverture d'un océan. Connaître les unes et les autres est donc essentiel pour mieux comprendre les mécanismes de la tectonique des plaques.