Des tests du même type réalisés avec des enfants humains ont montré que jusqu'à l'âge de trois ans leurs capacités sont inférieures à celles des chimpanzés ; elles les rejoignent chez les enfants de quatre ans.

Création

Les chimpanzés, soulignent A. et D. Premack, sont donc capables de manipuler un langage que l'homme leur enseigne. Mais, spontanément, ils n'inventeront aucun des éléments de ce langage. De même, ils ne cherchent pas à représenter leur monde visuel en le dessinant. Mais, si l'on donne au singe des éléments visuels appropriés, saura-t-il s'en servir pour former des tableaux, comme il combine des phrases avec les mots qu'on lui apprend ?

Pour le savoir, les Premack ont construit une planche à dessin sur laquelle se découpent les contours d'une tête de singe. À côté se trouvent des éléments mobiles : deux yeux, un nez et une bouche. Les singes les plus doués savent placer ces éléments au bon endroit pour recomposer un visage ; les autres échouent. Une guenon à qui, la veille de l'expérience, on avait fait essayer des chapeaux, ajoute d'elle-même au tableau une peau de banane évoquant un chapeau. Les enfants à qui ont fait passer les mêmes tests montrent en général une plus grande puissance créative dans l'apport d'éléments originaux. Mais les similitudes demeurent frappantes. « On est loin, écrivent les Premack, d'avoir compris toute l'étendue des capacités des chimpanzés. »

Les Gardner ont commencé en 1975 à élever deux guenons qui, depuis l'âge de deux jours, bénéficient de la présence constante d'un instructeur parlant couramment l'ameslan. Leurs progrès sont rapides. De telles recherches n'ouvrent pas seulement des vues nouvelles sur le psychisme des singes anthropoïdes : elles peuvent aussi éclairer les origines du langage et de la pensée conceptuelle chez l'homme.

Jean Dorst à la tête du Muséum

L'assemblée des 25 professeurs du Muséum national d'histoire naturelle a élu, le 20 novembre 1975, le professeur Jean Dorst, titulaire de la chaire de zoologie (mammifères et oiseaux), au poste de directeur de cette institution. Comme ses prédécesseurs, J. Dorst assurera la direction du Muséum pendant cinq ans. Son élection a pris effet le 1er janvier 1976.

L'arrivée d'un directeur nouveau et jeune (J. Dorst est né le 7 août 1924) peut laisser espérer que sera enfin abordée et réglée l'épineuse question de la situation du Muséum. Depuis plusieurs années, cette vénérable institution, créée par le décret du 10 juin 1793 de la Convention, et qui a pris la succession du Jardin du Roi, doit faire face à de graves problèmes financiers et à un malaise plus ou moins marqué de son personnel.

Budget

Le Muséum national d'histoire naturelle, dont le musée de l'Homme, le Jardin des Plantes et le zoo de Vincennes sont parties intégrantes, se finance pour une bonne part sur ses recettes propres : bien qu'il soit sous la tutelle du secrétariat d'État aux Universités et que l'entretien de ses bâtiments soit à la charge du secrétariat d'État à la Culture, sur les 21 892 millions de F constituant son budget 1976, 6 829 proviendront d'une subvention de l'État et 9 746 devraient être fournis par les droits d'entrée aux expositions temporaires, à la ménagerie du Jardin des Plantes (fermée le 24 décembre 1975 au 15 avril 1976 pour cause d'épizootie) et au parc zoologique de Vincennes.

Les 5 ou 6 millions nécessaires pour boucler le budget devront être trouvés dans des conventions de recherche. Ce budget suffit tout juste à faire tourner le Muséum, sans permettre les investissements qui seraient pourtant nécessaires.

Vétusté

La plupart des bâtiments sont vieux, certains sont même délabrés, telle la galerie de zoologie. Inaugurée en 1889, elle est dans un état tel qu'il a fallu la fermer au public en 1965. Or, cette galerie, longtemps fort prisée des visiteurs, contient des collections inestimables, des spécimens uniques, décolorés, pelés, empoussiérés, moisis et mangés aux mites.

Presque tous les laboratoires du Muséum sont d'ailleurs dépositaires de collections uniques au monde, qu'il faut sans cesse augmenter et préserver à tout prix. Conformément à sa vocation constitutionnelle, le Muséum doit en effet jouer divers rôles : il est un centre d'éducation populaire (100 000 élèves l'ont visité gratuitement en 1974) par ses galeries et ses expositions temporaires ; il est un centre d'enseignement de haut niveau et de recherche par ses collections et ses laboratoires.

Crustacés vieux de 70 millions d'années

Un fossile vivant a été retrouvé à neuf exemplaires au large des Philippines en mars 1976. Il s'agit de Neoglyhea inopinata, un petit crustacé du groupe des Glyphéidés que, jusqu'au printemps 1975, l'on croyait éteint depuis 60 ou 70 millions d'années. En 1975, deux chercheurs du Muséum national d'histoire naturelle de Paris, Jacques Forest et Michèle de Saint-Laurent, avaient retrouvé au Smithsonian Institute de Washington le premier spécimen actuel de Glyphéidé qui baignait dans un bocal d'alcool depuis 1908. Cette petite bête avait été pêchée soixante-sept ans auparavant au large des Philippines par le navire océanographique américain, l'Albatross, et n'était toujours pas identifiée. Le Muséum et l'Office de recherche scientifique et technique outre-mer (ORSTOM) se sont mis d'accord pour organiser avec l'aide du CNRS l'expédition MUSORSTOM destinée à retrouver des spécimens plus frais de Neoglyphea inopinata. Neuf crustacés ont été péchés, à peu près sur les lieux où l'Albatross avait récolté le sien. Sur ces 9 Neoglyphea inopinata, 7 sont des mâles, les deux autres étant des immatures de sexe encore indéterminé. Jacques Forest. Michèle de Saint-Laurent et H. Crosnier (de l'ORSTOM) déplorent de n'avoir pas péché de femelle. La connaissance de l'appareil génital des femelles aurait pu permettre de préciser l'évolution et les filiations de divers groupes de crustacés actuels (langoustes et crabes notamment) dont on pense qu'ils descendent des Glyphéidés. Les fonds où ont été péchés tous les spécimens de Glyphéidés actuels sont manifestement privilégiés : ils ont en effet permis de survivre à des formes animales anciennes tels Linuparus trigonus (une sorte de grosse langouste à antennes très robustes) ou les crinoïdes pédoncules, ou lis de mer (des échinodermes, cousins des étoiles de mer et des oursins, très abondants à l'ère primaire). En tout, plus d'une tonne d'échantillons divers a été pêchée par MUSORSTOM. L'examen de cette moisson va-t-il réserver d'autres surprises ?

L'homme

Archéologie

Origine de l'homme : nouvelles découvertes

La campagne 1975 dans l'Afar a vu se confirmer les espoirs que ces gisements exceptionnels avaient donnés les années précédentes (Journal de l'année 1974-75). Après les restes d'une jeune Australopithèque (baptisée Lucie) et un certain nombre de fragments, l'expédition paléontologique internationale (Éthiopie, Amérique, France, etc.) dirigée par Maurice Taïeb, a découvert cette fois les fossiles de plusieurs individus que l'on s'accorde à classer dans le genre Homo. D'après les datations au potassium-argon des cendres volcaniques, ces hommes primitifs auraient environ 3 millions d'années.