Nana Mouskouri, au Théâtre des Champs-Élysées (décembre 1973), a remporté un succès plus certain avec un disque consacré à des chansons traditionnelles françaises.

Après trois ans de silence, les Compagnons de la chanson, éternels boys-scouts, reviennent à Bobino (décembre 1973), avec un nouveau tour de chant.

Léo Ferré, contestataire vieillissant, avait choisi l'Opéra-Comique pour théâtre de ses exploits. Polnareff est parti pour les États-Unis...

L'opérette n'a plus, en France, une audience considérable. Seuls les fanatiques du couple Merval-Merkès ou de Lopez remplissent Mogador ou le Châtelet. Malgré le succès mitigé d'une Révolution française traitée en comédie musicale, beaucoup de jeunes chanteurs regardent vers cette forme de spectacle.

Opérette

Thierry le Luron intercale des airs d'opérettes classiques dans son One imitation show, au théâtre des Variétés (novembre-décembre 1973), et rêve d'adapter Feydau en y mêlant du chant et de la danse.

La musique d'une chanson de Barbara, au théâtre des Variétés (février 1974), s'inspire nettement de l'air célèbre de la grande-duchesse de Gérolstein d'Offenbach : Dites-moi qu'on l'a remarqué.

Sardou veut faire du cid une comédie musicale. Mais plus significatif semble être le virage pris par Sylvie Vartan. Au cours d'une émission de télévision, on a découvert une nouvelle Sylvie, souriante, décontractée, chantant dans le plus pur style du jazz des années 20 : Je chante pour Swanie ; cette chanson pourrait bien devenir le titre d'une opérette.

Depuis La montagne (Jean Ferrat, 1966), la pollution et la société de consommation semblent avoir été parmi les sujets les plus évoqués par les auteurs de chansons. Un écho subsiste avec Les petits trains (Macias), Dans les villes de grandes solitudes (Sardou). Mais la famille a pris le relais.

L'échec du couple est chanté par Michel Delpech (Les divorcés), tandis que Macias (Un de plus) et Sardou (Les vieux mariés) nous montrent l'image de la famille unie et heureuse. Daniel Guichard, dont les débuts avaient été gâchés par une publicité de mauvais aloi, chante avec talent Mon vieux, et Sacha Distel sait admirablement exprimer le sentiment filial dans La vieille dame. Suivant la mode vestimentaire, la chanson, par la voix de Nicoletta (un curieux composé de Line Renaud et de Sheila), relance le style retro des années 1925-30.

En raison du décès du président Pompidou, la France n'a pas participé au concours de l'Eurovision, qui a eu lieu à Londres le 6 avril 1974. Faut-il le déplorer ? La chanson choisie par le jury français, rebaptisée pudiquement La vie à 25 ans, avait pour titre initial : Y'a pas d'mal à s'faire du bien.

Le prix de l'Eurovision a été décerné à quatre Suédois : Agnetta, Bjorn, Benny, Annifrid – les ABBA –, qui, avec Waterloo, ont remporté la palme d'un concours de plus en plus déserté par la bonne chanson. Les concours de chansons semblent d'ailleurs s'essouffler.

Jazz et pop

À la découverte de nouveaux espaces

Le rock n'est pas mort. Ceux qui se sentent déconnectés ou dépassés affirment le contraire, malgré tous les signes d'une évidente bonne santé. Pourtant, les pénuries qui s'annoncent pèseront aussi sur elle évidemment, mais dès à présent il faut regretter la suppression arbitraire des émissions de la télévision française consacrées à la musique des jeunes, Pop 2 et Rockenstock.

Vitalité

Malgré tous ces écueils, le rock fait preuve d'une étonnante vitalité. Jamais les concerts n'auront été si nombreux, tant dans la capitale qu'en province ; tous les grands noms du moment y ont tenu l'affiche.

L'atmosphère de ces manifestations a profondément évolué par rapport aux années précédentes. Le public français, jadis braillard et passablement inculte, accorde une bien plus grande attention à la musique.

Son oreille s'est affinée, son sens critique est devenu plus aigu. Cette maturité permet aujourd'hui à des expériences plus difficiles de se réaliser.

Qui aurait songé présenter, il y a seulement trois ans, des musiques aussi complexes, aussi élaborées que celles des différents groupes allemands : Can (novembre), Tangerine Dream (novembre) ou Kraftwerk ? Musiques qui tirent une bonne part de leur inspiration des recherches de Terry Riley, La Monte Young, Philip Glass (à Paris en octobre).