girafe
Son long cou et ses pattes démesurées donnent à la girafe une allure et une élégance extraordinaires qui la singularisent. Malgré sa silhouette longiligne, elle est pourtant, comme le rhinocéros noir, l'un des mammifères les plus lourds du monde.
Introduction
La famille des giraffidés s'est différenciée des autres ruminants il y a seulement quelque 25 millions d'années, au miocène. Ses représentants, nombreux et variés, peuplèrent l'Ancien Monde jusqu'à la fin de l'ère tertiaire. Il y a environ 20 millions d'années vivait une girafe primitive, Paleotragus. À peu près de la taille d'une antilope, trapue, au cou assez court et aux cornes recouvertes de peau, elle faisait plutôt penser à l'okapi actuel. Contemporain de Paleotragus, Giraffokeryx lui ressemblait, mais possédait deux paires de cornes.
Puis, au miocène supérieur, il y a environ 10 millions d'années, plusieurs sous-familles, toutes issues des girafes primitives, se seraient différenciées, dont les sivathérinés, qui pénètrent en Afrique au cours de leur évolution avant de disparaître au pléistocène, il y a 2 millions d'années. Un des représentants des sivathérinés vivait dans le sud de l'Asie à l'époque glaciaire. C'était une girafe gigantesque ressemblant à un énorme bœuf qui aurait possédé sur sa tête massive des cornes larges et aplaties, sans doute ornées de peau. Mais son cou était peu développé.
Les giraffinés, ou véritables girafes des steppes, et les okapiinés apparaissent environ à la même époque que les sivathérinés. De cette vaste famille des temps anciens, seuls les girafes et les okapis sont les survivants.
Les girafes sont des mammifères herbivores ruminants qui se distinguent par l'allongement impressionnant de leurs membres et de leur cou. Ce sont aussi les plus hauts et les plus courts, proportionnellement, de tous les mammifères : du sol jusqu'au bout des cornes leur hauteur totale peut atteindre 5,80 m, alors que leur hauteur au garrot ne dépasse pas 3,30 m, pour un poids de 450 à 1 200 kg pour une femelle et de 1 800 à 2 000 kg pour un mâle.
Plus petit, l'okapi a, comme la girafe, un corps massif, un dos incliné et un cou long orné d'une crinière courte et dressée.
Autrefois et jusqu'au xixe siècle, lorsque les girafes étaient chassées uniquement par les populations indigènes, elles formaient en Afrique de grands troupeaux. En 1868, une centaine d'animaux ont été vus ensemble. Puis sont arrivés les Blancs qui les ont chassées pour les trophées et ont décimé les troupeaux. Aujourd'hui, les petites populations de girafes sont protégées dans presque tous les pays où elles vivent encore. Mais des braconniers les tuent toujours pour la touffe de poils très prisée de leur queue.
La vie de la girafe
Des feuilles tendres cueillies au sommet des arbres
La girafe passe plus de douze heures par jour à brouter, de préférence à la tombée ou au lever du jour, lorsque la chaleur est moins forte et que les feuilles des arbustes, repliées sur elles-mêmes, sont plus faciles à saisir.
Son long cou ne lui permet pas de brouter aisément l'herbe, aussi son menu d'herbivore est-il constitué de jeunes pousses, feuilles tendres, ramilles ou épines fraîchement écloses, écorces, fruits d'arbres et plantes grimpantes ou rampantes. La girafe consomme plus de 100 espèces de plantes mais marque une préférence toute particulière pour les acacias et, plus généralement, pour les mimosacées.
Elle exploite la bande de végétation la plus productive de la savane, entre 2 m et 6 m de haut. En saison sèche, lorsque les pâturages sont calcinés par le soleil, le feuillage des acacias reste tendre, et les branchages les plus élevés sont plus riches en protéines que les graminées qui poussent sur le sol.
La girafe possède un appareil buccal unique dans le monde animal. Elle repère sa nourriture à la vue et à l'odeur, mais aussi grâce aux longs poils garnissant ses lèvres. Ces poils protègent ses muqueuses des épines et transmettent à son cerveau, par voie nerveuse, les informations sur le degré de maturation du feuillage.
Sa langue, noire et gluante, longue de 50 cm, se glisse entre les épines acérées des acacias pour atteindre les pousses les plus nourrissantes. Très mobile, elle se creuse en gouttière, puis s'enroule autour des rameaux, les ramenant au niveau de la lèvre supérieure. Le bord interne de ses lèvres est tapissé de papilles qui lui permettent de retenir dans sa bouche les plantes intéressantes. Celles-ci sont aussitôt coupées par les incisives et les canines de la mâchoire inférieure.
Lorsque la branche est garnie de feuilles larges et sans épines, la girafe ramène celle-ci à sa bouche, puis la peigne avec ses dents, en arrachant les feuilles et les brindilles. Sa bouche, couverte d'une muqueuse résistante, est adaptée à son régime ; son palais possède des rainures transverses qui favorisent la mastication.
En dépit de sa taille, la girafe est un ruminant qui mange peu. Les mâles adultes absorbent chaque jour environ 66 kg de matière végétale fraîche et les femelles 58 kg. Le bol alimentaire est mâché puis prédigéré dans le rumen, avant de revenir dans la bouche pour être de nouveau mastiqué et imprégné de salive. La digestion des aliments se poursuit dans les très longs intestins (77 m) et l'assimilation de l'eau a lieu dans le gros intestin.
Le réseau admirable
Le réseau admirable
Le système sanguin de la girafe est conçu pour que le cerveau soit toujours oxygéné. À la hauteur du crâne, le réseau admirable, composé de nombreux petits vaisseaux aux parois élastiques, retient le sang venant du cœur par l'artère carotide. Quand la girafe baisse la tête, son cerveau est soudain à 2 mètres au-dessous du cœur. Il serait inondé par le brusque afflux de sang si ces vaisseaux n'en dérivaient une partie et si les valvules des parois de la veine jugulaire n'empêchaient le sang qui retourne au cœur de refluer au cerveau.
Parfois solitaires, les girafes préfèrent vivre en petits groupes
Dans la société des girafes, l'individu constitue l'unité de base. Cependant, ces animaux se rassemblent souvent en petits groupes (de cinq ou six girafes, en moyenne), dont la structure se modifie sans cesse et dont la proportion de mâles et de femelles peut grandement varier ou s'inverser.
Les solitaires vivent dans les parties les plus boisées à la différence des groupes, qui occupent les espaces découverts. Les groupes de deux animaux sont plus fréquents. Ce sont souvent une girafe et son girafon, mais il peut s'agir aussi de deux femelles ou de deux mâles adultes.
Les groupes de trois individus sont constitués parfois de trois femelles ou de deux femelles et d'un mâle ou encore de trois mâles ou de trois femelles. La composition des groupes de quatre individus est plus variée.
La taille des groupes varie aussi avec les saisons. En pleine saison sèche, lorsque la nourriture est peu abondante, les girafes s'éparpillent dans la savane par petits groupes de quatre ou cinq individus tout au plus. En revanche, des rassemblements de dix à quinze girafes sont courants en saison des pluies, quand se nourrir est aisé.
Les individus d'un groupe se déplacent ensemble pendant un temps donné, puis ils se quittent pour de nouveau vivre en solitaire ou pour intégrer un autre groupe. Des études ont montré que la composition des groupes peut changer d'un jour à l'autre ou d'une semaine à l'autre, sans qu'il y ait de règle évidente.
La structure des groupes est également très lâche : en suivant une girafe tous les jours pendant 26 mois, les observateurs ont noté que la structure de son groupe était restée la même pendant vingt-quatre heures à deux reprises seulement.
Le chef du groupe
Il est évident que chez une espèce aux relations aussi distantes que la girafe, le chef du groupe est souvent arbitraire et provisoire. Il ne se passe cependant pas une journée sans que les mâles ne s'affrontent pour fixer leur position hiérarchique. Même si les girafes ne sont pas territoriales et qu'elles cohabitent pacifiquement, elles doivent affirmer leur supériorité.
Lorsque le groupe n'est composé que de femelles, avec ou sans jeunes, c'est la plus grande girafe qui protège les autres. Si le groupe est mixte, ou composé uniquement de mâles, c'est le plus grand mâle qui joue le rôle de protecteur. En règle générale, il est très difficile de savoir quelle girafe est le leader ; bien souvent, l'une ou l'autre mène alternativement le groupe, sans raison évidente.
Lorsque toutes les girafes du groupe sont occupées à brouter, aucune ne semble jouer le rôle particulier de sentinelle. Pourtant, elles se disposent de telle façon que chacune d'entre elles scrute un coin d'horizon différent de celui de sa voisine et peut ainsi détecter un danger. La quête de nourriture et les déplacements en groupes peu serrés leur permettent de mieux surveiller les alentours et de mieux se protéger des prédateurs. Chaque petit groupe reste d'ailleurs en contact visuel permanent avec plusieurs autres, distants de quelques kilomètres.
Il semble, d'après les diverses études qui ont été faites, que la distance maximale existant entre les membres d'un même groupe qui se déplacent ensemble soit de 200 m, et que deux petits groupes séparés par une distance de 200 m environ se déplacent ensemble, comme s'il s'agissait d'un seul et même groupe. Ces déplacements se font généralement sur de faibles distances lorsque l'eau et la nourriture sont suffisantes sur le domaine vital habituel de l'animal. Si les girafes doivent se déplacer à la périphérie de cette zone, elles deviennent plus vigilantes et moins mobiles.
Les girafes ne sont pas muettes
Les girafes ne sont pas muettes
On a longtemps cru que les girafes étaient muettes. Mais elles sont dotées d'organes phonateurs normaux et peuvent émettre toute une gamme de sons différents. En cas de danger, elles poussent des ronflements en faisant sortir l'air de leurs naseaux. Les mâles excités ou combattant un rival émettent une toux rauque ou des grognements. Il arrive aussi qu'une girafe adulte beugle, au paroxysme de l'excitation. Les girafons inquiets lancent des cris aigus et plaintifs, lèvres fermées.
Mais les girafes manifestent surtout leurs états d'âme à l'aide de leurs attitudes et postures. Un mâle dominant qui rencontre un congénère porte la tête très haute et relève le menton pour impressionner l'autre. S'il veut chasser l'importun, il fonce droit sur lui, le cou arqué en avant, tête baissée, et le menace de ses cornes. Chez les femelles, où la hiérarchie est plus subtile, la subordonnée s'efface devant la dominante et lui abandonne, par exemple, le feuillage riche d'un acacia. Lorsqu'une girafe fouette avec nervosité ses flancs à l'aide de sa queue, ou qu'elle avance vite, le cou dressé, c'est le signal d'un danger.
Des combats gracieux, parfois violents
Durant toute l'année, les mâles s'affrontent au cours de combats parfois violents. Les animaux utilisant alors surtout leur cou, le mot anglais pour ces rencontres est necking. Le combat est parfois déclenché par un mâle provocateur qui approche un autre mâle et se tient face à lui, fièrement campé sur ses jambes raides. Si l'autre mâle prend la même posture, la lutte est engagée. En général, la joute débute courtoisement : les deux rivaux se placent, sans hâte, flanc contre flanc, dans le même sens ou en sens inverse : pattes écartées, ils remuent rythmiquement leur tête, incurvent leurs cous et les cognent avec force, heurtant leur adversaire du front et des cornes. Ils se poussent aussi en faisant peser tout le poids de leur corps contre le flanc. Si cela ne suffit pas, ils augmentent la violence des chocs, dont le bruit peut s'entendre à plusieurs centaines de mètres.
Pour frapper, l'attaquant doit balancer sa tête avec force, il ne peut donc plus maîtriser la trajectoire et il est facile à son adversaire d'éviter le choc. La plupart des coups n'atteignent pas leur but, et les tournois n'ont pas de conséquence grave, en général.
Les adversaires n'ont jamais recours aux coups de pied ni aux morsures, armes qu'ils réservent aux prédateurs. La querelle prend fin avec la fuite de l'un des combattants. Le vainqueur ne le poursuit pas ; parfois, pour appuyer sa victoire et sa domination, il simule un accouplement.
L'accouplement
Ces neckings sont plus nombreux au moment de l'année favorable à la reproduction. On a remarqué que les naissances sont plus fréquentes chez les girafes lorsqu'il fait plus frais et que les acacias ont encore assez de feuilles et beaucoup de fleurs, c'est-à-dire lorsque les conditions de survie pour les jeunes sont optimales. Cela correspond, par exemple, à la période de novembre à janvier dans le parc de Wasa (Cameroun).
Mais les girafes se reproduisent toute l'année. La femelle est en chaleur tous les 15 jours, pendant une journée. La période des chaleurs étant très courte, le mâle doit faire une cour assidue et tester sans cesse les femelles en goûtant leur urine. Il suit une femelle dont il lèche la queue ou caresse le flanc de son nez : dès qu'elle urine, il récolte le liquide sur sa langue, dresse la tête, ferme la bouche et retrousse les lèvres en une grimace caractéristique. Cette « moue » permet au mâle de détecter la présence de phéromones sexuelles, lorsque la femelle est réceptive. Parfois, le mâle rejette l'urine de sa bouche en un long jet fin, se lèche les lèvres et recommence à brouter ou à ruminer sans plus s'occuper de la femelle. Si la saveur de l'urine est à son goût, il emboîte au contraire le pas à sa compagne et continue de prélever des échantillons d'urine ; et cela pendant quelques heures.
Si un deuxième mâle est intéressé par la femelle en chaleur et tente de s'en approcher, le premier prétendant le chasse aussitôt. Après avoir suivi la femelle plusieurs heures, le mâle reste immobile quelques instants près de la croupe de la femelle et l'accouplement a lieu. Le mâle se hisse sur ses postérieurs et monte la femelle en faisant glisser ses antérieurs le long des flancs de celle-ci, qui, après quelques pas, s'arrête.
De vastes sinus pour diminuer le poids du crâne
De vastes sinus pour diminuer le poids du crâne
Les sinus du crâne de la girafe sont bien développés et plus vastes que ceux de tous les autres ongulés. Remplis d'air, ils sont reliés et traversés par des parois de tissus fibreux. Leur rôle principal est de diminuer le poids du crâne supporté par le long cou gracile ; le ligament de la nuque, qui s'étend sur une longueur de 2 m, depuis la base de la tête jusqu'aux vertèbres thoraciques, est assez résistant pour soutenir le crâne. La deuxième fonction des sinus serait d'amortir les coups de tête échangés par les mâles au cours du necking.
La naissance, une chute de deux mètres de haut
La girafe femelle met au monde son premier petit à l'âge de 5 ans. Si les conditions sont favorables, elle aura un girafon tous les 18 mois, jusqu'à 20 ans. La durée de gestation est d'environ 15 mois. Le zoologiste Mejia, qui a étudié les girafes dans le parc du Serengeti, a observé que certaines femelles s'isolent pour mettre bas et évitent les contacts avec leurs congénères pendant les premiers jours de vie du nouveau-né. Dans le parc national du Kruger, en Afrique du Sud, des scientifiques ont vu, au contraire, une girafe mettre bas, entourée de neuf autres femelles. Celles-ci semblaient très intéressées par le nouveau-né qu'elles touchaient du bout de leur nez.
Les naissances ont lieu, semble-t-il, plutôt à l'aube : le petit a ainsi plus de force la nuit suivante, quand rôdent les prédateurs. La mise bas dure environ 1 à 2 heures. La femelle restant debout, les pattes postérieures écartées, le girafon fait une chute brutale sur le sol de près de 2 m. Il n'a pas l'air d'en souffrir et se dresse sur ses quatre pattes tremblantes 5 à 15 minutes après la naissance. Il mesure près de 2 m de haut et pèse de 50 à 70 kg. Il est la réplique en miniature de l'adulte avec un cou proportionnellement plus court et plus droit. Ses sabots, mous au moment de la naissance, durcissent rapidement. Comme chez tous les nouveau-nés d'ongulés, ses sens sont bien développés, et, à peine âgé d'une heure, il peut suivre sa mère. En le flairant délicatement, celle-ci l'invite à téter. Le petit cherche les mamelles et commence à boire un lait très riche en matières grasses et en protéines. Dix heures après sa naissance, il court partout et, dès le troisième jour, il est assez vigoureux pour sauter.
Sa robe reste identique en grandissant, bien que les taches s'assombrissent parfois. Son poil est légèrement laineux et plus doux que celui de l'adulte. À l'endroit de ses futures cornes, il porte des touffes de poils noirs. Le cartilage de ses cornes, aplati sous la peau quand il naît, se redresse quelques jours après ; il s'ossifie plus tard et se rattache aux os du crâne.
Une croissance rapide
Le jeune commence à brouter dès l'âge de deux semaines tout en continuant à téter sa mère. Il ne cessera de le faire qu'entre 8 et 12 mois. Pendant le premier mois de vie, il grandit de 23 cm chaque semaine. Mais, selon certains scientifiques, la croissance moyenne serait de 7 à 13 cm durant la première année. Elle serait de 2 cm par mois pendant la deuxième année. Les mâles grandissent plus vite. Dans le parc de Nairobi, les petits ne s'éloignent pas de leur mère pendant les six premières semaines : ils ne restent pas forcément toujours à côté, mais gardent un contact étroit avec elle et ne sont jamais à plus de 150 m d'elle. Au Serengeti, Mejia a remarqué que, pendant la journée, les petits âgés d'une ou deux semaines étaient placés ensemble et seuls, au faîte d'une colline par exemple, à l'abri des prédateurs. Ces crèches de girafons permettent aux mères de brouter tranquillement non loin. Des jeunes plus âgés peuvent aussi se rassembler pour manger. Plus tard, ils se mêlent aux adultes. Les jeunes quittent leur mère à l'âge de 16 mois environ. Toutefois, entre 50 et 75 % des girafons ne survivent pas au-delà de leur première année, victimes des prédateurs. Une girafe peut vivre entre 10 et 15 ans à l'état sauvage et jusqu'à 27 ans en captivité.
Comment les lions font tomber les girafes
Comment les lions font tomber les girafes
Les lions sont les seuls prédateurs réels des girafes adultes. Ils parviennent à abattre une girafe adulte de plus de une tonne. Pour arriver à leurs fins, ils profitent du moment où elle baisse la tête. Un des félins s'approche d'elle en se dissimulant, puis il bondit et lui mord le museau, en plantant ses griffes dans sa nuque. Une fois la victime déséquilibrée, la famille entière accourt pour l'achever.
Pour tout savoir sur la girafe
Girafe (Giraffa camelopardalis)
La girafe a une marche lente et souple. Elle va l'amble : elle soulève à chaque pas les deux pattes d'un même côté. Plus précisément, l'avant droit quitte le sol immédiatement après que l'arrière droit s'est soulevé. Cette allure particulière lui permet de faire de plus grandes enjambées, facilite le travail musculaire et évite à ses pattes de se cogner. Sur une zone sans obstacle, sa vitesse est de 6 à 7 km/h, mais, au galop, elle peut atteindre 56 km/h. Au cours de toutes ces allures, les mouvements de son cou lui permettent d'équilibrer le poids de son corps : quand ses jambes sont lancées en avant, il va aussi d'arrière en avant, lorsque ses jambes touchent terre, il repart en arrière.
Pendant les chaudes journées, la girafe se repose et somnole à l'ombre des acacias, souvent debout. Elle ne se couche que lorsqu'elle se sent en sécurité. Quand elle dort plus profondément, surtout la nuit, elle replie son cou vers l'arrière et pose son menton sur le sol près de sa cuisse. Mais elle ne reste jamais longtemps dans cette position : son sommeil dure à peine 3 ou 4 minutes. À cause de sa taille, la girafe a plus de difficulté qu'un autre mammifère pour se lever et se coucher : elle effectue une série de mouvements compliqués, aidée par son cou, qui sert de balancier.
La girafe résiste très bien à la chaleur. Si des points d'eau sont disponibles, elle boit chaque jour régulièrement. Mais, en pleine saison sèche, lorsque l'eau se raréfie, elle peut fort bien se passer de boire pendant plusieurs jours. Il lui suffit de limiter la plupart de ses activités aux heures fraîches de la journée. Dans le parc de Waza, au Cameroun, les deux tiers des plantes qu'elle consomme renferment au moins 50 % d'eau et la moitié possèdent des feuilles pendant la saison sèche. Certaines plantes, comme le Crateva religiosa, ont une teneur en eau de 75 %, d'autres, comme l'Acacia seyal, de 50 %. La girafe trouve donc dans les feuilles, les fleurs et les fruits presque toute l'eau nécessaire à son métabolisme, d'autant que ses besoins journaliers ne sont pas énormes, comparés à sa taille : il lui faut 3,35 litres par 100 kg de poids vif.
De plus, elle économise l'eau. Son grand corps, très découpé, permet à la chaleur interne de se dissiper. Au lieu de gaspiller l'eau en transpirant, elle emmagasine la chaleur du soleil et de l'air pendant la journée : sa température corporelle monte alors jusqu'à 39 °C, puis elle retombe dans la nuit à 35 °C. Pendant les périodes très chaudes, son corps peut enregistrer jusqu'à 10 °C de différence entre le jour et la nuit. Ce système lui fait économiser en moyenne une dizaine de litres d'eau chaque jour. En outre, l'air qu'elle rejette au cours de la respiration se condense lorsqu'il passe dans les voies aériennes supérieures : une grande partie de l'eau est ainsi retenue par les muqueuses.
La girafe a une vue excellente. Elle perçoit surtout la position et le mouvement des objets : elle est capable de voir un homme à 2 km. Certains pensent qu'elle distingue les couleurs : le rouge, l'orange, le jaune, le vert et le violet. Lorsqu'elle aperçoit un homme, elle reste immobile derrière la végétation, tout en fouettant de la queue. En revanche, si elle voit un lion, elle sort de sa cachette, tend le cou pour ne pas le perdre de vue : le lion n'attaque pas, car il sait qu'elle l'a à l'œil !
Les sous-espèces
Suivant la région, les robes des girafes présentent des nuances variées et des taches de forme différente ; de même, leurs membres sont plus ou moins tachés. À l'ouest et au centre du continent africain, elles ont des taches généralement plus claires, plus régulières et plus petites que les girafes réticulées. Cette grande variété explique les différentes classifications proposées au cours du xxe siècle : de la reconnaissance de deux espèces (G. reticulata et G. camelopardalis) et de 10 sous-espèces (Lydekker, 1904) à celle d'une seule espèce (G. camelopardalis) avec 9 (Dagg et Foster, 1982), 8 (Kingdon, 1997), 6 (IUCN/SSC Antelope Specialist Group, 1998) ou 5 (P.J. Grubb, 2005) sous-espèces. La classification de Dagg et Foster est la suivante :
Girafe réticulée, Giraffa camelopardalis reticulata, la plus répandue. Pelage acajou brillant découpé en larges polygones réguliers. Elle vit en Éthiopie, en Somalie et au nord du Kenya.
Girafe de Nubie, G. c. camelopardalis, Érythrée, région du Nil Bleu
Girafe du Soudan, G. c. antiquorum, Soudan
Girafe du Tchad, G. c. peralta, Afrique occidentale et centrale
Girafe de l'Ouganda, G. c. rothschildi, Ouganda (Parc national des chutes Murchinson), Kenya (réserves naturelles)
Girafe masaï, G. c. tippelskirchi, Sud du Kenya
Girafe de Rhodésie, G. c. thornicrofti, Vallée du Luangwa (Zambie)
Girafe d'Angola, G. c. angolensis, Sud de l'Angola
Girafe du Cap, G. c. giraffa, Afrique australe
Mais une étude génétique, réalisée à partir de cette classification, montre qu'il existe au moins 6 lignages de girafes africaines généalogiquement séparés (même si les groupes sont géographiquement voisins) ne se reproduisant pas entre eux et correspondant à Giraffa peralta, G. rothschildi, G. reticulata, G. tippelskirchi, G. giraffa, et G. angolensis. De plus, cinq d'entre eux contiennent au moins onze populations génétiquement distinctes. (cf David M. Brown et al, “Extensive population genetic structure in the giraffe” in BMC Biology, 21 décembre 2007). Cette recherche (qui doit être complétée par une étude des autres groupes exclus de l'échantillon) sera soumise à l'examen de l'U.I.C.N. (Union internationale pour la conservation de la nature) afin notamment de protéger certaines populations devenues hautement vulnérables.
GIRAFE | |
Nom (genre, espèce) : | Giraffa camelopardalis |
Famille : | Giraffidés |
Ordre : | Artiodactyles |
Classe : | Mammifères |
Identification : | Silhouette longiligne ; pelage tacheté ; long cou ; pattes longues et fines ; le plus haut mammifère terrestre |
Taille : | Mâle : 5,30 m en moyenne (3,30 m au garrot) ; femelle : 4,30 m en moyenne (2,70 m au garrot) |
Poids : | 450 à 1 200 kg pour une femelle et de 1 800 à 2 000 kg pour un mâle |
Répartition : | Initialement Afrique, au sud du Sahara, sauf les déserts. Éteinte en Mauritanie, Guinée et au Sénégal. |
Habitat : | Savanes et steppes arborées |
Régime alimentaire : | Végétarien |
Structure sociale : | Élément fondamental : famille de type matriarcal, aussi des groupes de mâles, des mâles solitaires, des groupes de mâles et de femelles |
Maturité sexuelle : | Mâle : de 3 à 3,5 ans ; femelle : de 2 à 2,5 ans |
Saison de reproduction : | Pas de saison marquée |
Durée de gestation : | 15 mois |
Nombre de jeunes par portée : | 1 |
Poids à la naissance : | De 50 à 70 kg |
Longévité : | 10-15 ans à l'état sauvage ;20-27 ans en captivité |
Effectifs, tendances : | En baisse |
Statut, protection : | Protégée dans beaucoup de pays Non inscrite à la Cites (Convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction) |
Signes particuliers
Cornes
Les girafes portent une paire de cornes qui peuvent atteindre 25 cm de haut. Certains mâles développent deux autres excroissances osseuses en arrière de ces deux cornes, ainsi qu'une autre proéminence, impaire, sur le chanfrein. On peut donc voir des girafes avec 2, 4 ou 5 cornes. La femelle porte des cornes plus fines et plus inclinées que le mâle.
Squelette et musculature
Le cou démesuré de la girafe ne possède que 7 vertèbres cervicales, si longues qu'elles forment près de la moitié de la longueur de la colonne vertébrale. Celle-ci est très mobile, surtout au niveau du cou. La région cervicale est animée par plusieurs groupes de muscles qui s'attachent à différents endroits : selon le mouvement désiré, ces masses musculaires se contractent ensemble ou les unes après les autres.
Appareil buccal
Les mâchoires longues et fines, sont pourvues de 32 dents. Les incisives et les canines échancrées sont présentes uniquement sur la mâchoire inférieure, et disposées en un demi-cercle.
Sabot
Les girafes sont des ongulés : elles prennent appui au sol par le bord des sabots. La corne du sabot protège un tissu podophylleux et l'ossature réduite à deux doigts. Les sabots sont plus bas à l'arrière du pied.
Okapi (Okapia johnstoni)
L'okapi est le seul autre membre de la famille des giraffidés : il ressemble fort à une petite girafe brune aux joues blanches, dont le cou aurait été raccourci et les pattes peintes de rayures claires. Son corps mesure environ 2 m de long et peut atteindre 1,80 m de haut. Ses épaules et son encolure, ornée d'une crinière de 1,50 m de long, sont très puissantes.
Jusqu'à la fin du xixe siècle, les naturalistes ignoraient l'existence de cet animal bizarre et discret qui habite les grandes forêts congolaises.
Les okapis sont solitaires. Il arrive de les voir en couple : mâle et femelle ou femelle et petit. Le territoire du mâle, qui peut dépasser 10 km2, semble plus vaste que celui de la femelle, qui varie de 3 à 5 km2. Dans la Réserve de faune de l'okapi, la densité moyenne est de 0,3 à 0,6 individu au km2, mais elle peut aller jusqu'à 1,25 individu.
Extrêmement timide et méfiant, l'okapi est d'un abord très difficile. Toujours aux aguets, son ouïe est très fine, et les larges pavillons mobiles de ses oreilles détectent tous les bruissements de feuilles suspects. Au moindre signe d'alerte, il détale promptement : sa prudence et sa rapidité dans la fuite sont les seules armes efficaces dont il dispose pour échapper à ses prédateurs.
C'est au début de la nuit que l'okapi semble le plus actif. Ensuite il se repose jusqu'au lendemain matin, où il part à la recherche de sa nourriture. Végétarien et ruminant, l'okapi possède la même denture que la girafe. Il broute plus de 100 espèces différentes de végétaux. Grâce à sa langue, il saisit les rameaux terminaux les plus nutritifs, les jeunes feuilles et les pousses les plus tendres. Il complète son menu avec des graminées, des fougères ou des fruits.
On sait fort peu de choses sur la reproduction des okapis dans la nature. Elle semble avoir lieu toute l'année avec deux périodes principales situées en mai-juin et en novembre-décembre. Le mâle utilise régulièrement les mêmes pistes et marque des endroits précis de l'odeur de ses glandes podales situées entre ses doigts et de son urine. De son côté, la femelle en chaleur attirerait le mâle par des appels sonores. Réceptive pendant plusieurs jours, au début, elle est agressive vis-à-vis de son partenaire, qui parade avec discrétion, hoche la tête, présente sa gorge plus claire et donne des coups de patte. Il s'ensuit une sorte de jeu de fuites et d'arrêts successifs, au cours desquels, tête haute, le mâle renifle bruyamment. Lorsque deux mâles se retrouvent auprès d'une femelle en chaleur, ils s'affrontent en se donnant des coups de tête. Une fois la parade terminée ont lieu un ou plusieurs accouplements. Quatorze mois et demi plus tard naît, dans un endroit abrité de la forêt, un petit okapi, de 72 à 83 cm de hauteur au garrot. Les liens qui l'unissent à sa mère semblent assez forts. En captivité, une femelle accepte d'adopter un jeune non sevré et de l'allaiter. Les marques blanches de l'arrière-train de l'okapi semblent être un important stimulus visuel pour le nouveau-né. Après la mise bas, il reste couché quelques instants, puis sa mère le renifle et le lèche. Ensuite, elle le pousse du bout du nez pour le forcer à se lever. Deux à trois heures après sa naissance, le petit, tout tremblant, saisit une des 4 mamelles sous le ventre de sa mère. Affamé, il boit goulûment pendant deux minutes d'affilée. Puis il se recouche. Quelque temps après, sa mère le bouscule à nouveau pour qu'il prenne un autre repas de lait. Pendant les deux premières semaines de sa vie, il reste caché à l'abri des fourrés. Ensuite il suit sa mère dans ses déplacements. L'allaitement durera de 8 à 10 mois. Dans la nature, la femelle a une portée tous les 15 à 17 mois environ.
Seule la panthère menace réellement les jeunes okapis. Cependant, leur plus grand ennemi reste l'homme. Ce ne sont pas les Pygmées, qui le chassent pour leur alimentation, qui mettent l'espèce en péril, mais, toujours, le braconnage pour le commerce et la destruction du milieu (déforestation, développement des villages et des cultures...).
En République démocratique du Congo ( ex-Zaïre) l'okapi est protégé par la législation depuis 1933. En 1952, un Portugais, M. de Medina, a créé sur la rive droite du fleuve Ituri, un centre de recherche, la station d'Epulu, entourée d'une zone forestière, déclarée « réserve de faune à okapis », qui occupe environ un cinquième de la forêt d'Ituri au nord-est du pays. Elle abrite des espèces menacées de primates et d'oiseaux et environ 5 000 okapis, sur les 30 000 qui existaient encore à l'état sauvage avant la guerre civile qui en aurait décimé la moitié. En 1997, la réserve a ainsi été classée par l'Unesco sur la liste des biens du patrimoine mondial en péril en raison des combats qui sévissaient dans la région. En 2008, 42 parcs zoologiques (16 en Europe, 23 aux États-Unis, 2 au Japon et 1 en Afrique du Sud) avaient déclaré à l'ISIS (International Species Information System) 142 okapis (50 en Europe, 81 aux États-Unis, 9 au Japon, 2 en Afrique du Sud) : ces zoos ont pour objectif de maintenir un troupeau d'animaux captifs qui s'entretiendrait seul, en évitant, au maximum, la capture d'animaux sauvages.
OKAPI | |
Nom (genre, espèce) : | Okapia johnstoni |
Famille : | Giraffidés |
Ordre : | Artiodactyles |
Classe : | Mammifères |
Identification : | Allure d'une petite girafe au cou plus court Robe brun chocolat ; joues claires ; partie supérieure des membres zébrées. Mâle à 2 cornes courtes |
Taille : | De 1,50 m à 1,70 m au garrot ; queue de 30 à 40 cm |
Poids : | De 200 à 280 kg ; les femelles seraient plus lourdes que les mâles |
Répartition : | Endémique, nord-est de la République démocratique du Congo. Partie centrale du bassin du Congo. |
Habitat : | Forêt équatoriale |
Régime alimentaire : | Végétarien strict |
Structure sociale : | Solitaire |
Maturité sexuelle : | Femelle : 3 ans ; mâle : 4 ans |
Saison de reproduction : | Toute l'année, surtout en mai-juin et en novembre-décembre |
Durée de gestation : | De 427 à 457 jours |
Nombre de jeunes par portée : | 1 |
Poids à la naissance : | De 20 à 24 kg |
Longévité : | 30 ans (en captivité) ; 20 ans dans son milieu naturel |
Effectifs, tendance : | 5 000 dans la Réserve de faune de l'okapi ; tendance en baisse |
Statut, protection : | Protégé depuis 1933 en République démocratique du Congo |
Signes particuliers
Langue
Caractéristique, la langue est longue, de couleur noir bleuté, très mobile et protractile sur une grande partie de sa longueur. Grâce à elle, l'okapi peut se lécher les yeux, les oreilles et le corps.
Dents
Comme la girafe, l'okapi n'a ni incisive ni canine à la mâchoire supérieure. Sa formule par demi-mâchoire est : 10/3, C 0/1, P 3/3, M 3/3.
Pelage
Le poil est ras, d'aspect velouté et couleur brun chocolat. Il est couvert d'un sébum brun à odeur persistante. Les rayures transversales des pattes varient selon les individus. En moyenne, l'okapi porte de 5 à 8 rayures sur les membres antérieurs et de 7 à 20 sur les postérieurs, la base des pattes est ornée de guêtre blanches.
Cornes
Le mâle seul possède 2 cornes de 15 cm environ, couvertes de peau. Les frottements usent les poils des extrémités, mais la peau persiste toute la vie. Parfois terminées par 2 étuis cornés rudimentaires, qui tombent régulièrement.
Sabots
Au nombre de 2, comme chez la girafe, ils sont plus délicats. Les glandes spéciales situées entre ses doigts sécrètent une substance qui sert à marquer le territoire.
Milieu naturel et écologie
La girafe peuplait autrefois toute l'Afrique, des bords de la Méditerranée à l'Afrique du Sud. Elle n'est plus aujourd'hui en aussi grand nombre. On la rencontre dans les savanes broussailleuses et boisées au sud du Sahara, où elle vit en petites populations éparses, au Sénégal, en Mauritanie et dans les pays de la boucle du Niger, ainsi qu'au Cameroun. Des populations de girafes plus nombreuses vivent dans des parcs nationaux et dans des réserves en Afrique centrale et orientale, notamment au Soudan, au Kenya, en Tanzanie, au Botswana. En Afrique du Sud, le Transvaal oriental et le Kwazulu-Natal en hébergent aussi. La girafe est protégée dans presque tous les pays où elle vit.
Influence sur la végétation
Un pâturage herbacé naturel produit rarement plus de 3 000 kg de matière sèche par hectare et par an, alors qu'une savane à Acacia xanthophloea, en Afrique orientale, produit jusqu'à 4 975 kg de matière sèche (étude de Pellew, dans le Serengeti). Ces acacias ont, toute l'année, même en saison sèche, un feuillage riche en protéines et en sucres. La girafe exploite ce riche pâturage aérien qui, sans elle, resterait inutilisé.
Comme les arbres ne possèdent qu'un nombre limité de jeunes pousses, la girafe broute superficiellement. Elle ne cause ainsi aucun dommage à la végétation et favorise plutôt la pousse. En effet, lorsqu'elle sectionne une pousse terminale, les bourgeons latéraux se développent et donnent, au bout d'un mois, de toutes jeunes pousses très riches.
Les arbres prennent peu à peu une forme de parasol et s'élargissent, en diminuant de hauteur. Ils apportent ainsi plus d'ombre et protègent mieux le sol. À l'abri du vent et de la lumière, la terre reste humide et devient plus fertile.
Le scientifique Pellew a noté que la quantité maximale des feuilles accessibles à la girafe dans le parc du Serengeti (Tanzanie) se situait entre 2 m et 4 m de haut. En saison sèche, elle consomme le feuillage le plus élevé, qui se régénère mieux grâce aux rayons du soleil. Dans le Serengeti, les girafes, relativement épargnées par les lions, sont nombreuses et surexploitent le feuillage des acacias situé près du sol, rendant ainsi les arbres moins résistants à la sécheresse. Toutefois, les spécialistes s'accordent pour dire que une ou deux girafes de 700 kg chacune en moyenne par km2 peuvent exploiter le milieu sans le détruire.
Girafes, chèvres et moutons
D'après les études de la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (O.A.A.)), il faut au moins 2 km2 de savane à acacias à une famille de pasteurs pour subvenir à ses besoins. Sur une telle parcelle, ils font paître un troupeau de 30 à 35 bovins pour le lait et une centaine de chèvres et de moutons pour la viande. Or, ces animaux domestiqués prélèvent toujours les mêmes plantes, qui, trop broutées, dépérissent. Les plantes dédaignées se développent en même temps que les buissons et sont consommées par les girafes. Les pasteurs ont donc tout intérêt à élever des girafes avec leur bétail.
La girafe et l'homme
Protégée mais toujours chassée pour les trophées
Africains et Arabes ont chassé la girafe depuis fort longtemps, sans menacer l'espèce, mais l'arrivée des colonisateurs, au milieu du xixe siècle, engendra une chasse pour les trophées qui décima les populations de girafes. L'animal est protégé aujourd'hui dans la plupart des pays qu'il habite.
Les premières girafes en europe
En l'an 2500 avant J.-C., les Égyptiens firent venir la girafe dans leur pays, depuis les pays plus au sud. En effet, l'animal avait disparu d'Égypte depuis plus de cent ans à cause de la sécheresse. Les traditions d'échange et de commerce de l'Égypte, à toutes les époques, ont fait que c'est de ce pays d'Afrique que sont venues la plupart des premières girafes connues en Europe.
La girafe que Jules César fit venir à Rome en 46 avant J.-C. venait du zoo d'Alexandrie. On l'appelait alors « cameleopard », parce que l'on pensait qu'elle était issue du croisement entre un chameau et un léopard. En 1215, le sultan d'Égypte échangea une girafe contre un ours polaire avec l'empereur romain d'Occident, Frédéric II.
En 1826, le pacha Méhémet-Ali, alors vice-roi d'Égypte, décida d'offrir une girafe au roi de France Charles X. Les savants du Muséum de Paris débordèrent d'enthousiasme à cette nouvelle. Après un volumineux échange de courrier diplomatique, la girafe fut embarquée à Alexandrie sur un navire spécialement aménagé : un trou était percé dans le pont pour laisser passer sa tête.
L'accompagnaient un chef palefrenier, un chef d'escorte, trois domestiques soudanais, trois vaches destinées à lui fournir du lait frais et deux antilopes d'une espèce rare.
La girafe débarqua à Marseille et l'on choisit de l'y faire passer l'hiver, à la grande satisfaction de Madame la préfète, qui organisa des réceptions en son honneur. Puis elle fut acheminée « à pattes » vers Paris, conduite par l'illustre Geoffroy Saint-Hilaire. Une cape imperméable, fermée par des boutons et munie d'un capuchon qui couvrait sa tête et son cou, la protégeait des intempéries. Afin d'éviter l'usure de ses sabots, elle était chaussée de véritables sandales de cuir souple qui se laçaient et qui étaient renouvelées tous les cinquante kilomètres. La girafe eut beaucoup de succès : nombre d'auberges et de boutiques arborèrent une enseigne à son effigie.
À Paris, où elle arriva le 30 juin 1827, elle fut présentée au roi et à la cour, puis installée au Jardin des Plantes où 600 000 Parisiens vinrent l'admirer pendant le dernier semestre de l'année. Nourrie de végétaux, de foin, de feuillages, de graines, de lait et de sel, elle fut bien traitée et vécut 18 ans. Son serviteur noir, Atir, la promenait chaque jour, tenue par une simple cordelette.
L'engouement pour cette invitée extraordinaire se manifesta dans la mode : objets de toutes sortes et vêtements la représentaient ; une coiffure toute en hauteur, en vogue à l'époque, fut même dite « à la girafe ».
Un animal menacé, une cible trop facile
Depuis fort longtemps, la girafe cohabite avec l'homme, qui la considère comme un animal gibier. Grâce aux peintures rupestres des cavernes et aux ossements trouvés lors de fouilles, dans une partie du Sahara, on sait que les Africains chassent la girafe depuis des temps très reculés. Les Arabes l'ont chassée depuis des siècles à dos de chameau ou de cheval. Ces montures s'épuisant très vite, les cavaliers devaient donc se relayer souvent. Cette activité était fort périlleuse, car les girafes, en pleine course, envoyaient des rafales de cailloux sur leurs poursuivants. De temps en temps, l'une d'elles s'arrêtait net, faisait volte-face et frappait chevaux et cavaliers de ses pattes antérieures.
Les Arabes utilisaient plusieurs techniques de chasse : ils lui sectionnaient le tendon du membre postérieur pour la mettre hors d'attaque ou bien ils l'acculaient à un bosquet d'arbres, mettaient pied à terre et la transperçaient de leurs lances. En Éthiopie et au Soudan, ils mettaient le feu à la savane pour rabattre les girafes vers un précipice, au bord duquel ils les achevaient.
La viande des jeunes girafes femelles est très appréciée des Africains. Un grand mâle fournit environ 450 kg de viande fraîche : de quoi nourrir un village entier pendant plusieurs semaines. Pour être conservée, la viande est boucanée : elle est découpée en fines lamelles, puis séchée au soleil et fumée. Les os sont utilisés comme fertilisant, le lait est bu. La peau de la girafe fournit 2 m2 de cuir de très bonne qualité qui sert à faire des outres, des tam-tams, des lanières, des cravaches, des fouets, des sandales et des amulettes destinées à éloigner les lions. Les boucliers en peau de girafe sont particulièrement appréciés des guerriers, car ils sont plus légers que ceux en peau de buffle ou de rhinocéros, tout en étant très résistants au tranchant des épées et des lances. Les tendons des membres de la girafe sont utiles pour confectionner les cordes des guitares et des arcs ainsi que du fil à coudre.
Tant que les Africains étaient les seuls à chasser la girafe, à l'aide de filets, de lances et de flèches empoisonnées, pour s'en nourrir et fabriquer divers objets, son existence n'était pas menacée. C'est à l'arrivée des colonisateurs, armés de fusils, que commença la véritable extermination des grands ongulés, comme celle de beaucoup d'autres animaux sauvages. Les Boers d'Afrique du Sud ont massacré des troupeaux entiers. En Afrique de l'Est, des chasseurs la traquèrent pour son trophée orné de cornes de 25 cm de long ! Aujourd'hui, les braconniers abandonnent tout simplement la viande de la girafe morte aux vautours et coupent seulement sa queue, terminée par une touffe de crins noirs. Cette queue porte-bonheur sert à confectionner des bracelets vendus aux touristes ainsi qu'aux femmes de certaines tribus d'Afrique orientale pour combattre la stérilité. Elle est aussi utilisée comme chasse-mouches ou comme ornement. On en fait également du fil à coudre pour fixer les perles aux vêtements des femmes masai. Au Tchad, la puissance des chefs de village est proportionnelle au nombre de queues de girafe qu'ils possèdent.
Une telle industrie a provoqué l'effondrement des populations sauvages. De 1800 à 1865, les effectifs ont diminué considérablement et, en 1900, peu d'animaux subsistaient encore dans leur milieu naturel. En 1898, par exemple, il restait moins de 30 girafes dans le parc national Kruger, en Afrique du Sud. Le nombre chuta encore davantage lors de l'épidémie de peste bovine. Cette maladie contagieuse terrassa beaucoup d'herbivores au début du siècle. Au Botswana, entre 1942 et 1955, les girafes, avec d'autres animaux, furent systématiquement abattus lors d'une campagne contre la mouche tsé-tsé, dans le nord du pays.
La girafe est aujourd'hui protégée dans la plupart des pays qu'elle habite. La Tanzanie l'a même choisie comme emblème national. Néanmoins, son aire de répartition ne cesse de régresser : la sécheresse qui sévit en Afrique affecte les végétaux dont elle se nourrit, l'homme détruit son milieu naturel (exploitation pour le bois de chauffage, extension des villages et des cultures...) et le braconnage continue. À la fin des années 1990, on estimait à 111 000 le nombre de girafes en Afrique (U.I.C.N., 1998 ) mais au cours de la dernière décennie, le nombre total de girafes aurait décliné d'environ 30 % selon l'International Giraffe Working Group (IGWG), en particulier en Afrique centrale et occidentale, dans le nord du Kenya, en Éthiopie et en Somalie. Le braconnage et les conflits armés ont entraîné, par exemple, une diminution du nombre de girafes réticulées d'environ 27 000 individus dans les années 1990 à moins de 3 000 aujourd'hui, en Somalie, en Éthiopie et au Kenya. Certains groupes identifiés par la recherche citée menée par David M. Brown sont plus particulièrement menacés.
Recherches sur la girafe
Durant les trois dernières décennies, de nombreuses études ont été réalisées sur la girafe. Afin de mieux connaître ses habitudes alimentaires, les scientifiques observent directement les animaux dans la nature. Ils examinent le contenu de leurs matières fécales et l'appareil digestif des animaux morts. La première technique est la moins coûteuse et présente le moins d'inconvénients. Afin de suivre tous les déplacements de la girafe, les chercheurs posent des colliers radioémetteurs sur certains individus. Ainsi, même la nuit, ils peuvent, par radiotélémétrie, connaître les allées et venues des animaux.
Pour ce faire, chaque girafe est anesthésiée au fusil à injections hypodermiques : plusieurs rangers se précipitent pour l'aider à s'affaisser doucement sur le sol. Ce travail est très dangereux : en effet, un animal insuffisamment endormi peut facilement culbuter une douzaine d'hommes. Une fois couchée, les rangers lui lient les pattes et le corps à l'aide d'une longue corde. Ils prennent toutes ses mensurations, examinent ses dents et posent rapidement le collier radioémetteur autour de son cou. Puis ils lui injectent l'antidote de l'anesthésique. Une heure plus tard, la girafe broute comme si rien ne s'était passé.
Cependant, les rangers la surveillent étroitement, car, pendant quelque temps, sa vigilance est émoussée : elle est alors une victime de choix pour les prédateurs qui rôdent dans la savane.
Depuis 2008, la recherche génétique menée par l'équipe scientifique (rassemblant des chercheurs du Département d'écologie et de biologie de l'évolution de l'Université de Californie, du Centre pour la conservation et la recherche du zoo Henry Doorly d'Omaha et du Centre de recherche de Mpala, au Kenya) et coordonnée par David M. Brown, a montré que la girafe présentait une diversité insoupçonnée jusqu'ici.