signification
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin significare, « indiquer », « faire connaître », « faire comprendre », composé de signum, « signe » (du grec séma), et de facere, « faire ». En allemand : Bedeutung, de deuten, « interpréter », et be-, particule qui rend les verbes transitifs. Bedeutung a deux sens : « signification » et « importance, valeur ». La traduction par « significativité » est utilisée en psychanalyse.
Linguistique
Ce qui est communiqué dans un énoncé linguistique, et qui fait l'objet de son interprétation.
Il convient de distinguer deux sens que peut prendre la notion de théorie de la signification. En un premier sens, une théorie de la signification désigne une théorie sémantique, c'est-à-dire une théorie qui permet de spécifier les significations de toutes les phrases P d'une langue L de la façon suivante : P dans L signifie que s, où s décrit la signification de P. En un second sens, « théorie de la signification » désigne une théorie dont le but est l'analyse du concept de signification. Il n'est pas question, pour une telle théorie, de présupposer comprise la nature de ce concept, ni de présupposer données, comme dans les sémantiques développées par les linguistes, les significations des mots d'une langue. Son ambition est philosophique : il s'agit d'élucider le concept de signification en précisant ses relations avec d'autres concepts plus familiers ou mieux compris.
Le concept de théorie de la signification selon Davidson
Reconnaître la distinction entre ces deux sens du concept de théorie de la signification, et donc distinguer entre le projet d'une théorie sémantique et celui d'une élucidation philosophique de la notion de signification, n'implique cependant pas que ces deux projets soient indépendants l'un de l'autre. De fait, D. Davidson soutient que seule une réalisation satisfaisante du premier projet peut conduire à des avancées significatives dans le second(1), (2). Autrement dit, seul le développement d'une théorie sémantique peut permettre l'élucidation philosophique du concept de signification. La motivation de Davidson est la suivante. Les locuteurs d'une langue manifestent une compétence complexe lorsqu'ils interprètent des énoncés. Une théorie philosophique de la signification doit être une théorie de ce sur quoi cette compétence s'exerce. Elle doit donc partir de l'existence d'une capacité humaine à interpréter les énoncés, et expliquer sa possibilité. Pour ce faire, elle s'interroge sur le type de connaissance sur lequel repose une telle capacité. Davidson n'entend pas réduire l'analyse philosophique de la signification à l'étude psychologique d'une capacité humaine. L'approche qu'il privilégie est normative plutôt que descriptive : selon lui, il convient non pas de décrire les performances réelles des sujets humains, mais d'expliquer ce qu'il suffit de connaître pour pouvoir interpréter un énoncé. Or une théorie de la signification au premier sens du terme peut procurer une telle explication : quelqu'un qui connaît les théorèmes d'une théorie sémantique pour un langage L se trouve précisément en position d'associer une signification à chacune des phrases de L, et donc d'interpréter chacune des énonciations de ces phrases.
Pour pouvoir jouer un rôle d'élucidation philosophique, une telle théorie doit cependant satisfaire certaines contraintes. D'abord, elle doit être compositionnelle, c'est-à-dire expliquer rigoureusement comment les significations des signes complexes peuvent être composées à partir des significations des signes simples et de la structure syntaxique des signes complexes. Davidson a souligné l'importance de cette contrainte : si la sémantique d'une langue n'était pas compositionnelle, on ne voit pas comment les locuteurs de cette langue pourraient parvenir à l'apprendre. D'autre part, une théorie adéquate de la signification ne doit pas présupposer le concept de signification qu'elle a pour tâche d'élucider. Pour satisfaire cette seconde contrainte, elle doit s'appuyer sur le concept de vérité. Davidson reprend ici, en la systématisant, la thèse énoncée par Wittgenstein selon laquelle il faut, pour connaître la signification d'une phrase, connaître au moins ses conditions de vérité(3). Les connaissances fondamentales que permet la maîtrise d'une théorie de la signification sont celles des conditions de vérité des phrases. La connaissance du sens d'un mot est abstraite à partir de celle des conditions de vérité de toutes les phrases dans lesquelles il figure, et du rôle grammatical que joue le mot dans ces phrases.
L'approche davidsonnienne a eu une grande influence tant en linguistique qu'en philosophie du langage. Elle suscite la question suivante à propos des relations entre théorie de la vérité et théorie de la signification : suffit-il ou non qu'une théorie sémantique engendre les conditions de vérité de toutes les phrases d'un langage pour que cette théorie reflète correctement les connaissances que les locuteurs possèdent sur le sens des expressions du langage(4) ?
Pascal Ludwig
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Davidson, D., Inquiries into Truth and Interpretation, Oxford University Press, 1984, trad. P. Engel, Enquêtes sur la vérité et l'interprétation, Nîmes, J. Chambon, 1993.
- 2 ↑ Engel, P., Davidson et la philosophie du langage, PUF, Paris, 1994.
- 3 ↑ Wittgenstein, L., Tractatus logico-philosophicus, Routledge and Kegan Paul, trad. G.-G. Granger, Gallimard, Paris, 1993.
- 4 ↑ Horwich, P., Meaning, Oxford University Press, 1998.
→ compétence / performance, compositionnalité, référence, sémantique
Psychanalyse
Reconnaissant les symptômes névrotiques, rêves, lapsus, etc., pour des formations psychiques signifiantes, Freud modifie le domaine de la signification en l'élargissant, sans créer une théorie de la signification(1).
La pratique psychothérapique freudienne a d'abord rencontré l'interprétation, Deutung, des formations psychiques. Leur objectivation en tant que signification et l'évaluation de leur importance – leur Bedeutung – se confondirent alors avec l'énoncé de l'interprétation par l'analyste. L'échec de cette pratique modifia la cure et la notion de signification. L'interprétation ultérieure, dans le transfert, des situations qui y sont répétées montra une dynamique compliquée de la signification, puisque ces situations cessent d'être pathogènes, une fois élaborées : elles changent de signification. Ainsi, la psychanalyse démontre une dynamique de la signification, qui comporte des référentiels variables (analysant et analyste, entre autres) parmi lesquels elle se déploie tout en les modifiant.
Interprétant l'œuvre freudienne à partir de la linguistique structurale, Lacan a proposé la notion de « chaîne signifiante », combinatoire régie par les « lois du signifiant ». La signification dépend alors des interruptions ou ponctuations de la chaîne à laquelle le sujet est soumis.
Selon Saussure, la signification est la relation qu'entretiennent signifiant et signifié ; Lacan élargit cette relation à la chaîne où le signifié glisse sous le signifiant seul le phallus, signifiant du désir, admet une signification(2), pour ce qu'il n'a pas de signifié. Bien que cette tentative s'approche d'une dynamique, elle confine la signification au langage articulé et l'objective à nouveau de façon simple, tout en la stabilisant. La plupart des éthologues la récusent(3). Néanmoins, la construction d'une dynamique de la signification généralisée et intelligible – « sémiophysique » – est encore à l'état d'esquisse(4).
Michèle Porte
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Uexküll, J. (von), Bedeutungslehre (1940), « Théorie de la signification », Gonthier, Paris, 1956.
- 2 ↑ Lacan, J., « La signification du phallus » (1958), in Écrits, Seuil, Paris, 1966, pp. 685-695.
- 3 ↑ Ibid.
- 4 ↑ Thom, R., Esquisse d'une sémiophysique. Physique aristotélicienne et Théorie des catastrophes, InterÉditions, Paris, 1988.
→ élaboration, interprétation, pulsion, structure, substitut, sujet, transfert