Vladimir Vladimirovitch Poutine
Homme d'État russe (Leningrad, aujourd'hui Saint-Pétersbourg, 1952).
1. Une ascension fulgurante
Né dans une famille d’ouvriers, il étudie le droit de 1970 à 1975 à l’université de Leningrad. Intégré au KGB (Comité de sécurité de l'État, services spéciaux de l'époque soviétique) en 1975, il y reçoit une formation complémentaire avant d’être affecté dans les services du contre-espionnage à Dresde, en Allemagne de l’Est, de 1985 à 1990, période pendant laquelle il accède au grade de lieutenant-colonel.
De retour à Leningrad en 1990, V. Poutine devient conseiller du recteur de l’université de la ville, Anatoli Sobtchak, son ancien professeur et l’une des grandes figures réformatrices de la Russie de l’époque. Lorsque ce dernier est élu à la tête de la mairie de Leningrad en 1991, il l'invite à devenir son conseiller. Nommé responsable des relations extérieures de la ville, V. Poutine est promu premier adjoint du maire de Saint-Pétersbourg en 1994.
À Moscou en 1996, V. Poutine occupe le poste d’adjoint au responsable des affaires générales puis responsable adjoint de l’Administration présidentielle. Après un bref passage à la tête du FSB (Service fédéral de sécurité, ex-KGB) en 1998, il est nommé Premier ministre de la Fédération de Russie par Boris Ieltsine en août 1999.
En septembre, des attentats dans des immeubles de Moscou, imputés aux terroristes tchétchènes ainsi que l'incursion d'islamistes tchétchènes au Daguestan lui fournissent l'occasion de rouvrir les hostilités avec la Tchétchénie. Peu connu du public, V. Poutine acquiert, sur fonds de guerre avec le voisin rebelle, une stature de présidentiable et devient le nouvel homme fort de la Russie.
Président par intérim de la Fédération, à la suite de la démission de B. Ieltsine en décembre 1999, V. Poutine est élu dès le premier tour de l'élection présidentielle de mars 2000 avec 52,9 % des voix.
2. Président de la Fédération de Russie (2000-2008)
Pour affirmer son autorité sur le pays, V. Poutine remanie en profondeur l'Administration présidentielle au profit de cadres issus, comme lui, des services de sécurité ainsi que de personnalités influentes venant de Saint-Pétersbourg, sa ville natale. La restauration de l'autorité du Kremlin sur les régions et, plus particulièrement, sur les puissants gouverneurs, constitue un des principaux volets d'une volonté d'instauration d'un État fort.
V. Poutine promet également à une population choquée par des privatisations menées dans des conditions le plus souvent frauduleuses et qui ont permis à quelques oligarques de s'emparer de près de 70 % des richesses nationales, l'établissement de la « dictature de la loi ». Sa volonté de contrôler la société civile au moyen d'une mise au pas des médias, des ONG, des partis politiques par le Kremlin, ne l'empêche pas de bénéficier d'une réelle popularité au sein de l'opinion publique russe. En mars 2004, il est réélu à la tête de l'État pour un second mandat avec 71,2 % des suffrages.
Le traumatisme national suscité par le tragique dénouement de la prise d'otages de l'école de Beslan en Ossétie du Nord en septembre 2004 (plus de 300 morts provoqués, pour l'essentiel, lors de la prise d'assaut de l'école par les forces spéciales russes), fournit l'occasion au président d'intensifier sa mise en place de la « verticale du pouvoir » au détriment des régions, notamment en supprimant l'élection des gouverneurs au suffrage universel direct.
Il place en outre les secteurs sensibles de l'économie entre des mains plus sûres, le clan des siloviki (fonctionnaires issus des structures de force, ministères de l’Intérieur, de la Défense, services secrets...), et monopolise l'espace politique grâce à ses formations (« Russie unie », « Russie juste »), au préjudice d'une opposition qui peine à se faire entendre.
3. Chantre du retour de la puissance russe
La volonté affichée de V. Poutine de restaurer la grandeur de la Russie dans le monde se heurte à des échecs cuisants – notamment avec la sortie de la Géorgie et de l'Ukraine de la sphère d'influence russe en 2003 et 2004 –, qui le poussent à adopter une stratégie pragmatique consistant à contrer l'influence américaine, là où elle est en mesure de le faire, que ce soit sur la scène internationale ou dans les pays voisins de la Russie, l'« étranger proche ».
4. Le tandem Poutine-Medvedev
Ne pouvant se présenter pour un troisième mandat consécutif à la présidence de la Fédération, V. Poutine se fait élire à la tête du parti Russie unie sans toutefois y adhérer. L'élection sur mesure du jeune Dmitri Medvedev, son dauphin, à la présidence russe permet au président sortant de rester au pouvoir sans briguer un troisième mandat. En effet, au lendemain de l'investiture du président Medvedev, V. Poutine est élu au poste de Premier ministre (mai 2008). Depuis lors, il a réinterprété la Constitution russe à sa guise en transférant la plupart des prérogatives présidentielles à la présidence du conseil des ministres. De la sorte, il forme avec le jeune président – lequel, à peine élu, s'est empressé de faire voter une loi qui étend le mandat présidentiel à six ans au lieu de quatre – un « tandem » à la tête de l’État russe.
À la faveur d'un jeu de chaises musicales avec le président, V. Poutine annonce, en septembre 2011, qu'il sera à nouveau candidat à la présidence en mars 2012.
5. Un retour contesté au Kremlin
L’élection présidentielle du 4 mars 2012 se déroule dans un climat de mécontentement populaire sans précédent depuis l’arrivée au pouvoir de V. Poutine en 2000. D’importantes manifestations ont vu le jour dans plusieurs grandes villes du pays au lendemain des élections législatives de décembre 2011 qui ont certes été remportées par le parti pro-présidentiel Russie unie, mais qui ont surtout été marquées par de nombreuses fraudes dénoncées par les observateurs électoraux et par les membres de l’opposition.
Malgré une importante chute de popularité révélée par plusieurs enquêtes d’opinion publique et l’ampleur des mouvements de contestation réclamant une « Russie sans Poutine », le Premier ministre est élu à la présidence de l’État dès le premier tour du scrutin avec 63,6 % des suffrages (résultats officiels) face à quatre autres candidats : Guennadi Ziouganov (parti communiste, 17,1 %), Vladimir Jirinovski (parti démocrate-libéral, 7,9 %), Sergueï Mironov (Russie juste, 6,2 %), Mikhaïl Prokhorov (Juste cause, 3,8 %).
V. Poutine revient alors de plus belle sur le devant de la scène, éclipsant presque entièrement D. Medvedev qui retrouve le poste de Premier ministre. L’opposition se remobilise et remporte quelques succès aux élections locales et régionales de septembre 2013. Mais dans un climat surtout marqué par une apathie politique croissante, elle ne menace guère l’hégémonie du parti présidentiel tandis que le chef de l’État, mettant en avant les initiatives internationales de la Russie et multipliant les opérations de communication, parvient à retrouver une popularité plutôt stable. Au plan intérieur, l’un des principaux défis qu’il devra relever reste cependant la relance d’une économie menacée en 2014 par la stagnation.
Pour en savoir plus, voir l'article Russie : vie politique depuis 1991.