Zimbabwe
anciennement Rhodésie du Sud puis Rhodésie
Nom officiel : République du Zimbabwe
État d'Afrique australe, le Zimbabwe est entouré au nord-ouest et au nord par la Zambie, au nord-est et à l'est par le Mozambique, au sud par l'Afrique du Sud, à l'ouest par le Botswana et la Namibie. Le lac Kariba s'étire entre le Zimbabwe et la Zambie, formant une frontière naturelle.
- Superficie : 390 000 km2
- Nombre d'habitants : 16 320 537 (2022)
- Nom des habitants : Zimbabwéens
- Capitale : Harare
- Langue : anglais
- Monnaie : dollar du Zimbabwe
- Chef de l'État : Emmerson Mnangagwa
- Chef du gouvernement : Emmerson Mnangagwa
- Nature de l'État : république à régime semi présidentiel
- Constitution :
- Entrée en vigueur : 22 mai 2013
STATISTIQUES : DÉMOGRAPHIE
- Population : 16 320 537 hab. (2022)
- Densité : 33 hab./km2
- Part de la population urbaine (2023) : 33 %
- Structure de la population par âge (2023) :
● moins de 15 ans : 38 %
● 15-65 ans : 57 %
● plus de 65 ans : 5 % - Taux de natalité (2023) : 29 ‰
- Taux de mortalité (2023) : 8 ‰
- Taux de mortalité infantile (2023) : 24 ‰
- Espérance de vie (2023) :
● hommes : 61 ans
● femmes : 68 ans
Les habitants se répartissent en deux groupes principaux : les Shona (les trois quarts de la population) et les Ndébélés (20 % du total). L'animisme est répandu, aux côtés du christianisme. La densité reste assez faible, sauf dans le plateau central, autour d'Harare et de Bulawayo. La population se caractérise par sa jeunesse (41 % des habitants ont moins de 15 ans), un indice de fécondité (3,5 enfants par femme) et un taux de mortalité infantile élevés, alors que l'espérance de vie à la naissance est une des plus faibles du monde, la prévalence du sida étant importante (13 %).
STATISTIQUES : ÉCONOMIE
- GÉNÉRALITÉS
- PNB (2022) : 26 milliards de dollars
- PNB/hab. (2022) : 1 710 dollars
- PNB/hab. PPA (2022) : 2 550 dollars internationaux
- IDH (2021) : 0,593
- Taux de croissance annuelle du PIB (2022) : 6,5 %
- Taux annuel d'inflation (2022) : 104,7 %
- Structure de la population active (2021) :
● agriculture : 61,6 %
● mines et industries : 11,6 %
● services : 26,7 % - Structure du PIB (2022) :
● agriculture : 7,2 %
● mines et industries : 40,4 %
● services : 52,4 % - Taux de chômage (2022) : 7,9 %
- Tourisme
- Recettes touristiques (2020) : 66 millions de dollars
- Commerce extérieur
- Exportations de biens (2020) : 4 932 millions de dollars
- Importations de biens (2020) : 4 720 millions de dollars
- Défense
- Forces armées (2020) : 51 000 individus
- Dépenses militaires (2022) : 0,4 % du PIB
- Niveau de vie
- Incidence de la tuberculose pour 100 000 personnes (2022) : 204
- Part en % des richesses détenues par les 10 % les plus élevés (2021) : 70,2 %
- Part en % des richesses détenues par les 50 % les moins élevés (2021) : 0,5 %
- Dépenses publiques d'éducation : n.d.
Après dix ans de marasme économique, la situation du Zimbabwe s'était améliorée en 2010 grâce, notamment, à la réforme monétaire . Alors que le secteur minier a été partiellement nationalisé, la reprise de la vente des diamants a facilité la reprise , tandis que l'insécurité alimentaire a diminué. Depuis 2017, le Zimbabwe veut surmonter les effets de la politique d'indigénisation et sortir de son isolement mais connaît en 2019 une récession brutale à la suite d'une sécheresse et du passage d'un cyclone destructeur, récession qui s'est prolongée en 2020 avec la crise due à la pandémie. La dépréciation du nouveau dollar zimbabwéen (créé en 2019) porte l' hyperinflation à plus de 300 % alors que la croissance est estimée à 4 % en 2023.
GÉOGRAPHIE
C'est une région de plateaux, domaine de la forêt claire et de la savane. Héritage de la colonisation, le pays, demeuré en majeure partie rural, juxtapose cultures vivrières (maïs) et commerciales (coton, tabac) à côté de l'élevage (bovins surtout). Le sous-sol fournit du chrome, du nickel, du platine et du charbon. L'indépendance puis des réformes brutales ont provoqué le départ d'une grande partie de la minorité blanche et désorganisé l'économie, aujourd'hui ruinée et minée par une inflation galopante (avec un léger mieux récent).
1. Le relief
La plus grande partie du Zimbabwe est occupée par un plateau d'une altitude moyenne de 1 000 m qui s'abaisse en pente douce, au sud-ouest, vers la cuvette du Botswana, et s'élève, au nord-est, vers le Mozambique, jusqu'à 2 595 m d'altitude (monts Inyanga). Traditionnellement, on distingue trois régions définies par leur altitude : le haut Veld (à plus de 1 400 m), qui constitue la dorsale centrale, le moyen Veld, au nord-ouest et au sud-ouest (entre 700 et 1 400 m), et le bas Veld, le long des vallées du Limpopo et du Zambèze. Le socle précambrien (granite et gneiss) affleure sur la plus grande partie du plateau, qui est traversé, suivant un axe nord-sud, par un filon, le Great Dyke, riche en minerais divers (chrome notamment). Le haut Veld jouit d'un climat agréable, qui avait séduit les colons européens. La capitale, Harare (autrefois Salisbury), située à près de 1 500 m d'altitude, reçoit 741 mm de précipitations par an et connaît des gelées blanches en saison sèche. Les frontières – méridionale avec l'Afrique du Sud et septentrionale avec la Zambie – sont en partie délimitées par le Limpopo et par le Zambèze.
2. La population
Les premiers habitants du Zimbabwe, durant le premier millénaire avant notre ère, étaient apparentés aux Bochimans (ou Bushmen) et vivaient de la chasse et de la cueillette. Ils ont été submergés au fil des siècles par des Bantous, venus du nord, qui introduisirent l'usage du fer et l'agriculture. Deux grandes ethnies africaines peuplent aujourd'hui le Zimbabwe : les Shonas (répartis en plusieurs clans : zezuru, karanga, manyika, etc.), arrivés aux ixe et xe s., de loin les plus nombreux (près de 80 % de la population), et les Ndébélés ou Matabélés (environ 20 %) descendants des guerriers de l'empereur zoulou Chaka, qui, partis du Natal, envahirent le pays au début du xixe s. et installèrent leur capitale à Bulawayo. Le Mashonaland s'étend au nord et englobe Harare ; le Matabeleland, depuis les collines de Matopo, recouvre le sud-ouest du pays. Les Européens, pour la plupart de souche britannique – leur nombre atteignait 230 000 avant la décolonisation, en 1980 – n'étaient plus que 80 000 environ en 1997. Ils sont surtout établis dans les grandes agglomérations et le long de l'axe Harare-Bulawayo. En 2009, la densité de la population est de 32 habitants par km2, et le taux d'urbanisation s'élevait à 36 % en 2007. L'espérance de vie à la naissance, 44 ans, est la deuxième la plus faible du monde, après celle des habitants de l'Afghanistan. L'appartenance religieuse est difficile à établir, les cultes animistes étant souvent pratiqués en marge de l'adhésion aux Églises chrétiennes (55 % des habitants – dont la moitié d'anglicans). L'islam est relativement répandu.
3. Un pays enclavé à l'économie diversifiée
Le Zimbabwe est riche de son agriculture et de son élevage, ainsi que de ses ressources minières variées, mais son sous-sol ne recèle ni pétrole ni gaz naturel. C'est un pays enclavé, qui dépend de ses voisins et de leurs ports maritimes (en Afrique du Sud et au Mozambique principalement) pour son commerce extérieur, d'où le développement des voies ferrées vers ces pays. C'est la présence de filons aurifères, dont l'exploitation était assurée, à la fin du xixe s., par la British South Africa Chartered Company (créée par le Premier ministre de la province sud-africaine du Cap, Cecil Rhodes), qui a déclenché le processus de colonisation. Mais c'est l'agriculture qui, à partir des toute premières années du xxe s., a enraciné la plupart des colons européens.
3.1. L'agriculture et les fermes « commerciales » européennes
La question de la propriété de la terre a conditionné le développement de l'agriculture. En 1969, du fait de la ségrégation foncière résultant de la législation en vigueur, les réserves africaines (tribal trust lands) abritaient 60 % de la population noire sur 176 000km2, tandis que 6 000 fermes européennes se partageaient 168 000km2 et fournissaient une part très largement prépondérante des produits agricoles. D'une superficie moyenne de 2 150 hectares, celles-ci employaient 350 000 salariés africains en 1975. Le gouvernement de Robert Mugabe – au pouvoir depuis 1980, d'abord comme Premier ministre, puis comme président de la République – a mis en œuvre une réforme agraire pour redistribuer la terre aux Africains, réforme qui se heurte à la résistance des fermiers européens et à la crainte de voir décliner la production agricole, bien que des études aient confirmé la productivité des parcelles attribuées aux petits exploitants africains. Ces études indiquent, en effet, que la productivité des fermes dites commerciales, quatre fois supérieure à celle des exploitations africaines, est principalement due à leur emplacement sur les terres les plus fertiles. En 1990, 52 000 familles africaines avaient été installées sur des fermes rachetées, avec leur accord, à des fermiers européens, alors que le programme gouvernemental prévoyait l'attribution de parcelles à 162 000 familles à la fin de 1985. En 1997, le gouvernement a annoncé son intention de nationaliser, au profit de paysans africains, les terres de 1 500 fermiers blancs, sur un total de 4 500, mais sans indemnisation, contrairement à ce qui s'était pratiqué jusque-là. Le président Mugabe a estimé que c'était à la Grande-Bretagne d'assurer une éventuelle compensation aux propriétaires européens expropriés. L'enjeu est de taille, puisqu'au début des années 1990, 60 % de la production du pays (en valeur) provenait des 4 500 fermes commerciales européennes, à l'origine, par ailleurs, de 85 % des exportations agricoles.
Les principales cultures, tant sur les fermes européennes que sur les petites exploitations africaines, sont le maïs – alimentation de base de la population – (950 000 tonnes produites en 2007) et le tabac, destiné à l'exportation (79 000 tonnes produites en 2007). Les autres cultures importantes sont le coton (235 000 tonnes produites en 2007) et la canne à sucre (3,6 millions de tonnes de sucre produites en 2007). L'élevage est relativement important, avec 5,4 millions de bovins et 3 millions de caprins en 2007, le Zimbabwe étant, depuis 1985, l'un des rares pays africains autorisés à exporter de la viande vers l'Union européenne.
3.2. Les richesses minières
Le Zimbabwe est, avec l'ex-U.R.S.S., l'un des premiers producteurs au monde de chrome. Durant la période où la Rhodésie était soumise à des sanctions économiques (depuis la « déclaration unilatérale d'indépendance » du gouvernement blanc de Ian Smith en 1965 jusqu'à la décolonisation de 1980), les États-Unis continuaient d'acheter ce métal stratégique, malgré l'embargo. La production de minerai de chrome a cependant fortement diminué, passant de 639 000 tonnes, en 1989, à 120 000 tonnes, en 1993, essentiellement à cause de la chute du prix du minerai russe, avant de remonter à 250 000 tonnes en 2005. L'or est actuellement la principale richesse minière, avec une production de 11 tonnes en 2006. Viennent ensuite le nickel, le charbon, le cuivre et le fer. Un filon de platine a également été découvert dans le Great Dyke ; il est contrôlé par une société australienne, le secteur minier restant dominé par les grandes sociétés internationales.
3.3. L'industrie
Le Zimbabwe dispose d'un secteur industriel important – le plus important de l'Afrique subsaharienne après celui d'Afrique du Sud ; sa contribution au revenu national dépasse celle des secteurs agricoles et miniers. L'industrie s'est notablement développée à l'époque des sanctions économiques – imposées par l'O.N.U. au régime rebelle blanc de Ian Smith à partir de 1965, jusqu'à la fin des années 1970 : ni l'Afrique du Sud ni le Portugal ne respectant ces sanctions, les sociétés européennes purent approvisionner le pays en carburant et en quelques autres produits indispensables. L'industrie (textile, alimentation, produits métallurgiques, matériel de transport et armement) a fourni 27 % du produit intérieur brut (P.I.B.) en 2006, contre 22 % pour l'agriculture.
À l'époque de la Fédération Rhodésie-Nyassaland (1953-1963), un grand barrage a été construit en aval des chutes Victoria, sur le Zambèze, à Kariba, donnant naissance à l'un des plus grands lacs artificiels du continent. Des centrales hydroélectriques ont été construites sur les deux rives ; la plus ancienne, sur la rive sud (territoire actuel du Zimbabwe), l'autre, sur la rive nord, en Zambie. Jusqu'en 1989, la Zambie exportait son électricité chez son voisin du Sud, mais l'augmentation de la capacité du réseau de centrales thermiques du Zimbabwe ainsi que l'incendie d'une centrale hydroélectrique zambienne ont interrompu ce commerce énergétique. Depuis 1991, les deux pays ont conclu un accord pour coordonner leurs politiques énergétiques : il est prévu d'accroître la capacité de la centrale de Kariba-sud (au Zimbabwe) et d'exploiter en commun un barrage, à construire dans la gorge de Batoka, en Zambie.
3.4. Les transports et le commerce extérieur
Le réseau ferroviaire du Zimbabwe est particulièrement dense. Les deux principales voies ferrées partent de Harare, l'une vers l'Afrique du Sud, et l'autre vers le Mozambique. La première se divise au sud de Gweru en deux embranchements : vers Bulawayo, d'une part, d'où partent deux lignes, l'une qui traverse le Botswana jusqu'à l'Afrique du Sud, et l'autre qui aboutit aux mines de charbon de Hwange ; vers le port mozambicain de Maputo, d'autre part. La seconde relie la capitale au port mozambicain de Beira, via Umtali. Elle est doublée par un pipeline, qui a ravitaillé l'ex-Rhodésie jusqu'en 1974 – date où le Portugal a dû accorder son indépendance au Mozambique.
Le Zimbabwe fait partie, comme l'Afrique du Sud, de la Communauté pour le développement de l'Afrique australe (Southern Africa Development Community, SADC). Le Zimbabwe est également membre du Marché commun d'Afrique orientale et australe (Common Market for Eastern and Southern Africa, COMESA). Le COMESA, qui associe la plupart des pays de la SADC, ceux de l'Afrique orientale et ceux de la Corne de l'Afrique, prévoit la disparition des barrières douanières entre ses membres et la mise en place de tarifs commerciaux extérieurs communs en l'an 2000. Cependant, à l'heure actuelle, le principal partenaire commercial du Zimbabwe reste l'Afrique du Sud, suivie, pour les importations, de la Grande-Bretagne, des États-Unis, de l'Allemagne et du Japon. La balance commerciale du Zimbabwe a été longtemps bénéficiaire, mais est devenue déficitaire depuis 1995. Le produit national brut (P.N.B.) par habitant, qui a légèrement diminué pendant la même période, reste élevé pour l'Afrique, essentiellement parce qu'il englobe les revenus des Européens, bien supérieurs à celui des masses rurales africaines. La dette extérieure a, de son côté, augmenté à un rythme rapide.
HISTOIRE
1. Les ruines de Zimbabwe
1.1. Un nom africain
Le Zimbabwe doit son nom aux célèbres ruines d'un imposant ensemble architectural en pierre sèche – unique par ses dimensions en Afrique bantoue – situé au sud du pays. Les mouvements de libération africains choisirent le nom Zimbabwe, lors de la décolonisation en 1980, à la place de celui de Rhodésie, donné en l'honneur de Cecil Rhodes, artisan de la colonisation britannique. Un nom africain évoquant une ancienne civilisation noire remplaçait ainsi un nom célébrant la conquête européenne.
1.2. La thèse phénicienne
L'ensemble architectural de Zimbabwe date sans doute du xive siècle ou du xve siècle et a été construit par les Shonas, qui avaient envahi le pays quelques centaines d'années plus tôt. Il ne fut décrit qu'en 1872, par l'archéologue allemand Karl Mauch, qui ne voulut pas croire qu'il était l'œuvre d'Africains ; il lui attribua donc une origine blanche – en l'occurrence phénicienne – invoquant les périples des navigateurs phéniciens autour du continent. Les archéologues, soucieux de confirmer la supériorité de la civilisation blanche, emboîtèrent le pas à K. Mauch, et identifièrent les mines d'or de la région avec celles du pays d'Ophir de la reine de Saba et du roi Salomon.
Bien que la thèse phénicienne ait été assez rapidement contestée, il fallut attendre la datation au carbone 14 d'un fragment de bois, enserré dans les pierres, pour que soit établi, sans aucun doute possible, que l'ensemble architectural de Zimbabwe datait de l'Empire du Monomotapa. Entre-temps, d'autres constructions en pierre sèche – moins imposantes que celle de Zimbabwe – avaient été repérées en Afrique australe.
2. L'Empire du Monomotapa et l'arrivée des Matabélés
L'Empire du Monomotapa s'est constitué au xve siècle, à une époque où l'exploitation artisanale des mines d'or avait déjà donné naissance à un commerce important avec la côte orientale africaine, alors dominée par les Arabes. Les Portugais s'y intéressèrent à leur tour, et, en 1560, un jésuite portugais parvint jusqu'à la cour du Monomotapa (le mot désignait aussi l'empereur), qu'il réussit à convertir au christianisme, avant d'être assassiné par des conseillers musulmans de la cour impériale.
Le Monomotapa avait alors abandonné, depuis un siècle, le site de Zimbabwe, tombé aux mains d'un empire rival, fondé par un vassal rebelle, Changa, bientôt paré du titre de Changamira. Une brève alliance contre les Portugais se souda entre les deux empires à la fin du xviie siècle ; elle tourna à l'avantage du Changamira, et le Monomotapa en sortit amoindri.
Les deux empires succombèrent, au début du xixe siècle, sous les coups des troupes de deux des lieutenants de l'empereur zoulou Chaka ; celles de Zwangendaba pillèrent Zimbabwe en 1830, avant de s'établir plus à l'est ; puis ce fut au tour de celles de Mzilikazi, qui s'installa durablement avec ses guerriers ndébélés dans le sud du pays et établit sa capitale à Bulawayo, d'où il rançonnait le pays shona.
3. La conquête britannique et l'instauration de l'apartheid
Les Européens entrent en scène en 1888. Charles Rudd, un émissaire de la British South Africa Chartered Company (BSAC), créée par C. Rhodes, obtient du fils de Mzilikazi, le roi Lobengula, la concession exclusive des richesses minières des pays ndébélé (Matabeleland) et shona, en échange de 100 livres sterling, de mille fusils et d'une canonnière, qui ne lui seront jamais livrés.
Le roi Lobengula meurt en 1893, après une tentative de rébellion écrasée par la BSAC, comme le sera trois ans plus tard un soulèvement auquel participeront les Ndébélés et les Shonas. La charte concédée à la BSAC lui permettait d'administrer le territoire pendant vingt-cinq ans.
En 1923, la Rhodésie, dite alors Rhodésie du Sud (l'actuelle Zambie constituant la Rhodésie du Nord), devient colonie britannique, après le rejet par l'électorat blanc d'un rattachement à l'Afrique du Sud. Le Premier ministre sud-rhodésien est désormais nommé par une assemblée élue par tous les sujets britanniques sachant lire et écrire, ce qui exclut l'immense majorité des Africains.
Le régime rhodésien adopte toute une série de mesures analogues à celles qui régissent l'apartheid en Afrique du Sud : en 1930, partage inégal des terres, attribuées à 50 % aux colons européens, qui sont vingt fois moins nombreux que les Africains ; en 1934, exclusion des Africains des emplois de travailleurs qualifiés. On estime qu'en 1940, le revenu annuel moyen d'un Noir en Rhodésie du Sud est de 31 dollars, contre 1 170 dollars pour un Blanc.
4. La Fédération Rhodésie-Nyassaland (1953-1963)
Après la Seconde Guerre mondiale, le parti blanc modéré, le parti fédéral uni de lord Malvern, qui préconise un partnership avec les Noirs et la création d'une Fédération avec la Rhodésie du Nord et le Nyassaland (le futur Malawi), obtient gain de cause : la Fédération voit le jour en 1953.
L'Assemblée fédérale compte une minorité de députés noirs, ce qui est une nouveauté, à une époque où aucun Africain ne siège encore à l'Assemblée sud-rhodésienne. En 1958, un second collège électoral africain est créé pour accueillir la petite bourgeoisie noire de Rhodésie du Sud. Les partisans de la suprématie blanche créent alors le parti du Dominion, pour défendre leurs intérêts face aux revendications des Noirs, qui, sur le modèle sud-africain, fondent le Congrès national africain (ANC), dirigé par Joshua Nkomo, un syndicaliste ndébélé qui fait cause commune avec les leaders nationalistes noirs de Rhodésie du Nord et du Nyassaland, Kenneth Kaunda et Hastings Banda.
5. Naissance des mouvements nationalistes noirs
Le mouvement de protestation contre le pouvoir fédéral blanc grandissant au sein de la population noire, les trois nationalistes sont arrêtés, mais l'agitation persiste cependant. La Fédération est finalement dissoute en 1963, à l'issue d'une conférence tripartite : un an après, sous le nom respectivement de Zambie et de Malawi, la Rhodésie du Nord et le Nyassaland accèdent à l'indépendance.
Encore sous domination britannique, mais bénéficiant d'une importante autonomie, la Rhodésie du Sud entre alors dans une période de prospérité, laquelle profite principalement à la minorité européenne.
L'opposition noire connaît à cette époque des tensions internes, qui aboutissent, en 1963, à la scission du parti de J. Nkomo, rebaptisé Union du peuple africain du Zimbabwe (ZAPU) : la branche dissidente donne alors naissance à l'Union nationale africaine du Zimbabwe (ZANU), dirigée par le pasteur Ndabaningi Sithole.
6. La Rhodésie de Ian Smith (1965-1980)
Aux élections de 1965, boycottées par les deux partis nationalistes noirs, le Front rhodésien – qui a succédé au parti du Dominion – remporte les 50 sièges du premier collège, réservé aux Européens. Fort de cette victoire, le nouveau Premier ministre, le leader du Front rhodésien Ian Smith, réclame l'indépendance de son pays à la Grande-Bretagne, qui refuse de la lui accorder tant que les Noirs ne seront pas associés plus largement au pouvoir.
Mais I. Smith proclame unilatéralement l'indépendance de la Rhodésie, le 11 novembre 1965. L'ONU impose alors des sanctions économiques : tout commerce avec la Rhodésie est interdit, mais l'Afrique du Sud et le Portugal, ignorant le blocus, permettent malgré tout au pays de connaître une période de développement industriel.
En 1970, après de vaines négociations avec Londres, le gouvernement Smith proclame la république. La création d'un nouvel ANC, en 1971, à l'initiative d'un ecclésiastique, Monseigneur Muzorewa, renouvelle le paysage politique de l'opposition noire. La ZAPU et la ZANU se rallient au nouveau parti. De vaines négociations se poursuivent alors, tant avec Londres qu'entre I. Smith et l'ANC, tandis qu'une aile dissidente de la ZANU commence à s'organiser au Mozambique sous la direction de Robert Mugabe (un Shona).
L'insécurité dans les zones rurales, entretenue par les maquisards des mouvements de libération, devient alors endémique. J. Nkomo, soutenu par l'URSS, et R. Mugabe, appuyé par la Chine, décident de s'allier au sein d'un Front patriotique. Finalement, à Salisbury, sous la pression conjointe de Londres et de Washington, un gouvernement de transition est formé en 1978 ; regroupant en son sein I. Smith et Monseigneur Muzorewa, il est chargé de préparer le transfert du pouvoir à la majorité noire.
Pour finir, en 1979, le gouvernement britannique réunit à Londres une conférence qui finalise le processus d'indépendance. Aux élections multiraciales de février 1980, la ZANU de R. Mugabe l'emporte sur la ZAPU de J. Nkomo. Ce dernier est néanmoins nommé ministre de l'Intérieur dans le gouvernement formé par R. Mugabe. La Rhodésie accède à l'indépendance, sous le nom de Zimbabwe, le 18 avril 1980. La nouvelle Constitution réserve 20 sièges à la minorité blanche dans l'Assemblée nationale.
7. Le Zimbabwe indépendant
7.1. Opposition entre les deux mouvements nationalistes noirs (1982-1983)
La cohabitation entre R. Mugabe et J. Nkomo s'avère vite délicate.
Après des troubles graves au Matabeleland, ayant provoqué l'intervention de l'armée (1982-1983), J. Nkomo s'exile pendant plusieurs mois. Après son retour, l'alliance entre la ZANU, à majorité shona, et la ZAPU, essentiellement ndébélée, est cependant reconduite, avec la création de la ZANU-PF (Patriotic Front), qui tient son premier congrès en 1984, préconisant le système du parti unique. La ZAPU et la ZANU ne fusionnent pas pour autant, et leurs factions respectives s'affrontent à nouveau au Matabeleland, entraînant l'arrestation de plusieurs dirigeants de la ZAPU.
7.2. Robert Mugabe président de la République
En 1987, les 20 sièges réservés aux Blancs (dont 15 étaient revenus au nouveau parti formé par I. Smith aux élections de 1986) sont supprimés. Un régime présidentiel est instauré, et R. Mugabe devient président de la République. En 1988, la ZAPU et la ZANU finissent par fusionner, et, un peu plus tard, un second poste de vice-président est créé et attribué à J. Nkomo. La même année, un parti d'opposition, le Mouvement de l'unité du Zimbabwe (ZUM), est créé par Edgar Tekere.
La ZANU-PF remporte la quasi-totalité des sièges aux élections de 1990, deux seulement revenant à la ZUM. E. Tekere obtient cependant 16 % des voix à l'élection présidentielle, contre 72 % à R. Mugabe. En 1991, le président renonce publiquement à son intention d'instaurer un régime de parti unique.
En 1992, le régime, qui est périodiquement secoué par des affaires de corruption retentissantes, amorce un programme de redistribution des terres en faveur des paysans noirs, par une loi qui prévoit l'expropriation contre indemnités des Blancs propriétaires de grandes fermes « commerciales » – 4 500 fermes, qui représentent la moitié des surfaces cultivables et produisent une part prépondérante des exportations agricoles.
Les élections législatives d'avril 1995, boycottées par le ZUM et d'autres petits partis d'opposition – la participation électorale se réduit à 54 % –, sont de nouveau remportées par la ZANU-PF. Le président Mugabe, réélu avec 92 % des voix en mars 1996 contre Monseigneur Muzorewa et N. Sithole (qui se retire juste avant le vote), ne doit son succès qu'à une participation électorale encore plus faible qu'aux législatives. La ZANU-PF renonce peu après au marxisme-léninisme, alors que de nouveaux scandales financiers secouent le régime. Celui-ci, soucieux de revaloriser son image auprès de la population, annonce son intention de procéder à l'expropriation sans indemnités de 1 500 fermes « commerciales » européennes.
7.3. Tensions sociales sur fond de crise économique
La situation économique est alors inquiétante, avec une dette extérieure considérable et un fort taux de chômage. La pression fiscale s'accentue, notamment à la suite des mesures d'indemnisation décidées en faveur des anciens guérilleros des mouvements de libération, ce qui a donné lieu à des grèves très suivies. La hausse des prix des produits de base a provoqué des émeutes, et, en janvier 1998, l'armée a dû intervenir pour rétablir l'ordre à Harare et en province.
Le remariage, en 1996, du président Mugabe avec sa secrétaire – de quarante ans sa cadette –, l'inculpation de N. Sithole en 1997 pour complot, la comparution en justice, en 1998, de l'ancien président Canaan Banana pour viol homosexuel, tous ces événements contribuent à entretenir une atmosphère de malaise dans le pays. R. Mugabe subit son premier revers important lors du référendum constitutionnel – visant à consolider ses pouvoirs – qu'il organise en février 2000. Ce projet est repoussé par plus de 54 % des votants, ce qui constitue un sérieux avertissement pour le président à deux mois des élections législatives.
7.4. Le Zimbabwe, acteur régional
En dépit des difficultés rencontrées, le Zimbabwe a su jouer un rôle non négligeable dans la région. Dès son indépendance, il a rejoint les pays « de la ligne de front » (avec l'Angola, le Mozambique, la Tanzanie, la Zambie et le Botswana), ligués contre le régime d'apartheid sud-africain. Malgré les préférences de la ZANU de R. Mugabe pour le Congrès panafricain d'Afrique du Sud, aux dépens de l'ANC, le président du Zimbabwe n'en a pas moins salué en 1990 la libération de Nelson Mandela.
Le Zimbabwe a par ailleurs soutenu le régime mozambicain des présidents Samora Machel et Joaquim Chissano contre les guérilleros du mouvement rebelle de la RENAMO.
Enfin, en août 1998, il décide d'intervenir avec l'Angola et la Namibie en République démocratique du Congo dans le conflit qui oppose le président Laurent-Désiré Kabila à la rébellion congolaise, soutenue par l'Ouganda et le Rwanda. Mais l'effort de guerre pèse lourdement sur une population déjà très pauvre, opposée dans son ensemble à l'intervention armée en RDC et l'armée zimbabwéenne se retire finalement en novembre 2002.
8. Une nation en ruine
8.1. Crise politique et économique
Au lendemain de l'échec du référendum constitutionnel de février 2000, l'adoption par le Parlement d'une loi autorisant les expropriations des fermiers blancs sans indemnisation, plonge le pays dans une crise politique et économique profonde. La violence des expropriations, attisée par le régime, entraîne plusieurs dizaines de morts – des fermiers blancs mais également des militants noirs du principal parti d'opposition, le MDC (Movement for Democratic Change, Mouvement pour le changement démocratique), créé en 1999 par le syndicaliste Morgan Tsvangirai. 4 500 fermiers blancs sont expulsés et leur terres redistribuées, le plus souvent, à des membres de la nomenklatura, dirigeants de la ZANU-PF ou des proches de la famille Mugabe ; en outre, faute de moyens (notamment de semences), la plupart des petits exploitants ne peuvent faire fructifier la terre dont ils viennent d'hériter ; le pays, privé d'agriculture, sombre dans la pénurie alimentaire.
En septembre 2001, à l'issue de négociations menées sous l'égide du Commonwealth et avec la médiation du président nigérian Olusegun Obasanjo, le Zimbabwe s'engage à mettre fin à l'occupation illégale des terres appartenant à des fermiers blancs et aux violences politiques. La Grande-Bretagne, en contrepartie, accepte de financer une réforme agraire. À l'issue des élections de juin 2000 (marquées par un taux de participation de l'ordre de 60 %), la ZANU-PF conserve la majorité absolue au Parlement (61 sièges sur 120), en dépit d'une percée remarquable du MDC qui remporte 58 sièges. Grâce à un amendement constitutionnel accordant au chef de l'État le privilège d'octroyer 30 sièges supplémentaires à sa convenance, la ZANU-PF est assurée de conserver la majorité dans l'unique Chambre parlementaire du pays. En revanche, le MDC est à même d'empêcher toute modification de la Constitution.
8.2. L'usage de la répression contre l'opposition
L'élection présidentielle de mars 2002 fournit au régime le prétexte pour la mise en place d'un vaste arsenal répressif limitant l'accès aux médias et interdisant tout financement en provenance de l'étranger, assimilant toute contestation du régime à un acte « d'insurrection, de banditisme et de terrorisme » ; excluant des urnes des centaines de milliers de résidents à l'extérieur du pays et refusant la présence dans le pays d'observateurs internationaux. Dans ce contexte, la réélection de R. Mugabe est acquise dès le premier tour avec 56,2 % des voix ; son rival, M. Tsvangirai, inculpé dix jours avant le scrutin de « haute trahison » pour complot contre le chef de l'État, obtient 42 % des voix.
Dénigrant les contestations du MDC qui déclare le scrutin « illégitime », le régime renforce sa répression en faisant assassiner plusieurs opposants ; au cours de l'année 2003, le MDC lance un mouvement de grèves et de manifestations suivi par un nombre de plus en plus grand de contestataires touchés par la crise économique (pénurie des produits de première nécessité, inflation, chômage), le sida ou les exactions commises par le régime.
En 2004, le MDC lance une nouvelle campagne d'« actions de masse » contre le pouvoir dans une contexte de désastre économique. Alors que le gouvernement déclare ne plus avoir besoin de l'aide internationale dont il dépend depuis 2001, le MDC l'accuse de vouloir utiliser la nourriture comme arme électorale à l'approche des législatives de mars 2005. À l'issue d'une campagne dénuée d'incidents, celles-ci sont une nouvelle fois remportées par la ZANU-PF, qui obtient la majorité absolue au Parlement ; le MDC dénonce une « mascarade électorale ».
8.3. Sanctions internationales
Le Zimbabwe est soumis à une série de sanctions. Suspendu du Commonwealth en mars 2002, il se retire volontairement de l'organisation en 2003 pour riposter à la prolongation de sa suspension. Depuis 2002, ses hauts responsables sont interdits de séjour sur le sol de l'Union européenne, des États-Unis, de la Suisse et du Japon ; leurs avoirs sont gelés depuis 2003 par les États-Unis qui, en 2005, incluent le Zimbabwe dans la liste des « avant-postes de la tyrannie ».
Jusqu'à présent ménagé par les pays membres de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC), pour lesquels R. Mugabe jouit du statut de champion de la libération et de la lutte contre le néocolonialisme, le Zimbabwe est condamné en décembre 2005 par l'Union africaine, qui dénonce dans l'opération « Murambatsvina » une violation manifeste des droits de l'homme : en mai 2005, le régime avait ordonné la destruction de quartiers entiers de bidonvilles aux alentours de la capitale, Harare, ainsi qu'en province, sous prétexte de vouloir mettre fin à l'insalubrité et aux multiples trafics ; plus 700 000 personnes ont été jetées à la rue.
9. Une alternance démocratique manquée
9.1. Vers un partage du pouvoir
Dans la perspective des élections générales de 2008, le président sud-africain Thabo Mbeki est chargé de faciliter la reprise du dialogue entre le pouvoir et l'opposition. De son côté, le MDC réclame, au préalable, l'élaboration d'une nouvelle Constitution.
Pour la première fois depuis 1980, la ZANU-PF (97 sièges) perd les élections législatives au profit du MDC (99 sièges), tandis que le MDC-M d'Arthur Mutambara, une autre formation de l'opposition, dissidente du MDC, en totalise 10. Le MDC revendique la victoire de son leader, M. Tsvangirai, au premier tour du scrutin présidentiel. Malgré l'appel au calme de la SADC, l'opposition et le pouvoir se lancent dans une bataille de procédure autour des résultats présidentiels.
L'annonce des résultats officiels – 47,9 % des suffrages pour M. Tsvangirai contre 43,2 % à R. Mugabe – déclenche une campagne de violence et contraint le leader de l'opposition à renoncer à se présenter au second tour pour ne pas mettre en danger la vie de ses partisans. Au terme d'une parodie de scrutin – auquel l'ensemble de la communauté internationale dénie toute légitimité –, R. Mugabe, âgé de 84 ans dont 28 à la tête du pays, est déclaré réélu pour un sixième mandat.
Afin de sortir le pays de la profonde crise politique, économique et sociale dans laquelle il se trouve, le président sortant et son ex-opposant, M. Tsvangirai, signent le 21 juillet sous les auspices de l'Union africaine un accord fixant le cadre de négociations, qui débouchent, grâce à la médiation du président Mbeki, sur un accord de partage du pouvoir (Accord politique global, GPA) le 15 septembre 2008. Selon cet accord, R. Mugabe demeure à la tête de l'État, l'ex-syndicaliste M. Tsvangirai est nommé à la fonction nouvelle de Premier ministre. Après onze mois de crise, un gouvernement d'union nationale, dirigé par M. Tsvangirai, est formé le 13 février 2009.
9.2. Une cohabitation sous tension
La conséquence majeure de l’accord politique de septembre 2008 est l’amélioration de l’environnement économique. Le gouvernement met tout d’abord fin à l’hyperinflation en introduisant un régime à multiples devises ; la croissance reprend, atteignant environ 9 % en 2010-2011, grâce à une conjoncture internationale favorable au secteur minier et à une augmentation de la production agricole ; la sécurité alimentaire s’améliore également ainsi que certains indicateurs sociaux malgré des taux de pauvreté et de chômage très élevés.
En revanche, outre le désaccord quant à la poursuite de la politique d’« indigénisation » des entreprises, décidée par le président en 2011, qui pourrait faire fuir les investissements étrangers, les discussions entre les deux camps pour appliquer les clauses politiques et institutionnelles du GPA piétinent, en particulier en ce qui concerne la réforme constitutionnelle et l’ouverture des médias au pluralisme. La ZANU-PF et les appareils de l’État, toujours contrôlés par les partisans du président Mugabe, résistent à un partage effectif du pouvoir, le MDC, dont les militants continuent d’être intimidés ou physiquement menacés, accusant ses adversaires d’avoir mis en place un véritable gouvernement parallèle.
Si la tentative de Mugabe d’avancer la date du scrutin en 2011 est mise en échec par M. Tsvangirai, fort du soutien de la SADC, les conditions pour des élections libres et transparentes ne sont pas encore réunies alors que le parti présidentiel, se préparant aux prochaines échéances électorales mais en proie aux rivalités entre factions, confirme son soutien à son vieux leader lors de son congrès organisé en décembre.
9.3. La reconduction et la démission de R. Mugabe
En mai 2013, après avoir été approuvée par référendum, une nouvelle Constitution entre finalement en vigueur. Relativement libéral dans sa lettre et limitant notamment l’élection du président à deux mandats successifs, outre la suppression du poste de Premier ministre, le nouveau texte est un préalable à l’organisation des élections générales qui se tiennent en juillet. Celles-ci sont cependant entachées d’irrégularités manifestes parmi lesquelles l’exclusion de nombreux électeurs des listes électorales rendues publiques la veille du scrutin.
Jugées pourtant globalement libres et crédibles par les observateurs de la SADC et de l’UA, elles donnent plus des deux tiers des sièges à la ZANU-PF tandis que R. Mugabe est réélu pour cinq ans avec 61 % des voix contre 34 % à M. Tsvangirai qui, après avoir dénoncé la fraude, doit renoncer à contester les résultats devant la justice. Surmontant les réticences du Botswana, seul État de la région à mettre en cause la sincérité du scrutin, la SADC apporte son soutien et sa caution à R. Mugabe en l’élisant à sa vice-présidence et en appelant à une levée des sanctions internationales.
Les rivalités au sein du parti conduisent pourtant à l’éviction du plus vieux chef d’État en Afrique et au monde (93 ans et 37 ans au pouvoir) : l’armée décide ainsi de l’écarter en novembre 2017 à la suite de la destitution, sous la pression de l’épouse du président, Grace, qui ambitionnait de lui succéder, du vice-président et ancien bras droit de R. Mugabe, Emmerson Mnangagwa. Ce dernier accède à la présidence de la République dans l’attente des élections prévues en 2018.