cursus honorum
Expression latine signifiant suite des honneurs ou carrière des honneurs et désignant, à Rome, l'ordre dans lequel devait s'effectuer la carrière publique et les conditions exigées pour en recevoir les magistratures.
1. Des origines au début du iie siècle avant J.-C.
Il s'établit très tôt et spontanément une hiérarchie des valeurs et des dignités parmi les magistratures, les plus anciennes et les plus influentes l'emportant sur les autres ; l'usage se forma de commencer une carrière par les plus humbles pour l'achever par les plus brillantes. Toutefois, jusqu'à la fin du iiie siècle avant J.-C., il demeure possible de briguer la magistrature de son choix : Scipion l'Africain est ainsi élu consul à 24 ans.
Ne sont interdits jusqu'alors, et depuis 342 avant J.-C., que le cumul des magistratures et leur iteratio (renouvellement) avant 10 ans.
2. La lex Villia annalis (180 avant J.-C.-fin du iie siècle avant J.-C.)
Diverses mesures interviennent sans doute au début du iie siècle avant J.-C. pour mettre de l'ordre dans la carrière des honneurs. Elles aboutissent à la lex Villia annalis de 180 avant J.-C., qui codifie pour un siècle le cursus honorum :
– âge minimal pour entrer dans la carrière, 27 ans, c'est-à-dire après 10 années de service militaire à partir de 17 ans accomplis ;
– hiérarchie et succession des magistratures curules : questure, préture et consulat.
L'édilité curule, qui ne peut être obligatoire – le nombre des édiles étant inférieur à celui des préteurs –, se situe entre la questure et la préture.
La censure, en dehors du cursus, ne s'applique qu'aux anciens consuls ; de même pour la dictature, magistrature extraordinaire ;
– un intervalle légal de 2 ans (le biennium), doit séparer deux magistratures successives. On peut donc être questeur à 28 ans, édile à 31, préteur à 34 et consul à 37.
Les prorogations (propréture, proconsulat) n'entrent pas en ligne de compte dans le cursus honorum. La lex Villia ne concernait sans doute que les magistratures curules. Mais l'édilité plébéienne est mise sur le même pied que l'édilité curule ; la place du tribunat est incertaine, tantôt à égalité avec ces deux dernières, tantôt intermédiaire entre la questure et l'édilité.
L'ensemble de ces dispositions permet au sénat de contrôler étroitement les carrières et d'empêcher l'arrivée directe aux plus hautes charges des favoris de la foule. Mais il reste loisible aux comices de prononcer des dérogations en cas de nécessité. Ainsi Scipion Émilien est consul en 147 avant J.-C. sans avoir été préteur ni édile, et l'est à nouveau en 134 malgré la loi de 151 qui a interdit toute iteratio.
3. De Marius à Sylla
Ce n'est toutefois qu'à la fin du iie siècle avant J.-C., avec Marius, et au ier siècle avant J.-C., que les règles du cursus commencent à être transgressées systématiquement.
Sylla tente de rendre plus sévère la lex Villia par sa lex Cornelia de magistratibus, qui repousse l'éligibilité à la questure à 29 ans révolus et impose une décennie d'attente entre cet âge et l'éligibilité à la préture : celle-ci ne peut donc plus être revêtue avant 40 ans, ni le consulat avant 43 ans (en compensation, l'iteratio de celui-ci redevient légale après un intervalle de 10 ans).
4. Le réaménagement d'Auguste
Après la période troublée qui s'étend de l'abdication de Sylla au triomphe d'Auguste, ce dernier doit tout réorganiser, dans l'optique du système nouveau qu'il établit sous l'apparence d'une restauration des antiques traditions. Le cursus honorum est donc réaménagé :
– le premier échelon en est le vigintivirat (collège de 20 citoyens) civil à 17 ans, ou le tribunat militaire à 18 ans ;
– la questure à 25 ans ;
– l'édilité ou le tribunat à 27 ans ;
– la préture à 30 ans ;
– le consulat à 33 ans.
Chaque magistrature accomplie ouvre la possibilité d'être inscrit sur l'album sénatorial et de remplir des fonctions de responsabilités (curatelles, préfecture de la ville). L'empereur peut introduire dans la carrière, comme anciens tribuns ou anciens préteurs, des hommes n'ayant pas accompli les magistratures précédentes (allectio). Pendant le Bas-Empire (235-476), ces distinctions s'effaceront, et le cursus honorum ne sera plus respecté.
Pour en savoir plus, voir les articles consulat, plèbe, Rome antique : des origines à 264 avant J.-C., tribun de la plèbe.