Commencée en septembre 1998 dans la fébrilité du mouvement national des lycéens exigeant l'amélioration de leurs conditions d'études, l'année scolaire s'achève sur la tranquille routine du baccalauréat, à peine troublée par la question de l'absentéisme des professeurs. Évalué par le ministère de l'Éducation nationale à 35 %, le taux d'absentéisme des examinateurs à certaines des épreuves du 23 juin donnera lieu aux dernières passes d'armes entre Claude Allègre et les enseignants, auxquels il n'aura décidément rien épargné. Mais M. Allègre peut se permettre ce rappel à l'ordre du corps enseignant à la veille des vacances : soumis à un tir croisé de critiques qui résonnaient comme des appels à la démission, il a passé avec succès le contrôle continu imposé par les différents acteurs du milieu scolaire, relayés par le monde politique. Le « plan d'action immédiat pour l'avenir des lycées », présente le 21 octobre 1998 en réponse aux revendications lycéennes, avait produit son effet lénifiant sur des élèves, et leurs parents, devenus des alliés bien utiles dans les luttes à venir contre les enseignants. Le ministre avait rendu sa copie à temps pour désamorcer la crise de la rentrée 1998.
Des enseignants peu mobilisés
Restaient les enseignants, auprès de qui M. Allègre est toujours aussi mal noté ; ralliés tardivement au mouvement lycéen, ils ont suivi le dénouement de la crise avec une certaine amertume, nourris du sentiment que leur ministre avait tiré sur la corde de la démagogie en jouant la carte des élèves et des parents d'élèves contre le corps enseignant, qui se pose en parent pauvre de réformes engagées au détriment de ses acquis sociaux. Pourtant, la mobilisation nationale du 20 mars, qui devait emporter C. Allègre, trahira les faiblesses d'un mouvement syndical en proie au scepticisme croissant de sa base. Au lieu des 100 000 manifestants annoncés par le Syndicat national de l'enseignement secondaire (SNES), ils seront tout au plus 30 000 à défiler à Paris. Mais C. Allègre calmera pourtant le jeu en avril en prenant des mesures pour « rétablir le pouvoir d'achat des enseignants » de telle sorte que la rémunération des heures supplémentaires ne les pénalise pas, non sans décocher au passage quelques flèches à ces enseignants conservateurs, agrippés à leurs acquis et rétifs à des réformes porteuses de démocratie. Faute d'un plan général, M. Allègre est soupçonné de se livrer à un « bricolage » ; en allumant plusieurs foyers, il s'expose à de puissants retours de flamme, que ce soit dans le secondaire ou au CNRS. Surtout, concernant la question essentielle du financement de ses réformes, il lui est fait grief de s'en tenir au principe des vases communicants, dont la mesure sur les heures supplémentaires était l'illustration. M. Allègre doit ainsi annoncer une pause le 1er juillet dans le recrutement des emplois-jeunes lancé il y a deux ans.
G. U.
Des enseignants ouverts aux réformes
N'en déplaise à M. Allègre, les enseignants ne seraient pas « conservateurs », si l'on en croit le sondage réalisé en juin par IPSOS pour le Syndicat des enseignants (SE-FEN), et qui les décrit majoritairement favorables à des réformes du système éducatif, les femmes et les 25-40 ans étant les éléments les plus réformateurs. Le travail en petits groupes et les dispositifs d'aide au travail personnel pour les enfants privés chez eux d'un soutien suffisant remportent ainsi l'adhésion de la plupart des enseignants ; la grande majorité des 1 000 enseignants interrogés approuvent la création des ZEP (zones d'éducation prioritaires) et du bac professionnel, que M. Allègre encourageait le 24 juin avec une charte pour l'enseignement professionnel. Le collège unique, toujours à l'étude, semble plus controversé. Enfin, 40 % des enseignants jugent leurs syndicats peu ouverts au changement. M. Allègre ne les contredira pas !
La deuxième jeunesse de Charles Pasqua
Pari réussi le 13 juin pour Charles Pasqua, qui a osé défier l'appareil du RPR, dont il était encore en janvier le conseiller politique auprès du président. Les européennes désignent la liste Rassemblement pour la France et l'indépendance de l'Europe, qu'il dirige depuis deux mois aux côtés de Philippe de Villiers, comme une force politique nouvelle avec laquelle il faudra désormais compter.