En août, le président Iliescu se décide à annoncer qu'il est candidat à sa propre succession, mais, quelques jours plus tard, ses alliés fascisants du PUNR rompent avec lui. Désormais, les néocommunistes sont seuls. Aux législatives du 3 novembre, la CDR arrive en tête, suivie du PDSR et de l'USD. Les partis ultranationalistes obtiennent 9 % et la minorité hongroise 7 %. Isolé avec ses 22 %, le PDSR ne peut faire face à l'opposition qui s'unit entre les deux tours de la présidentielle. Le 17 novembre, le chrétien-démocrate Emil Constantinescu, président de la CDR, est élu président de la République avec environ 54 % des voix et nomme deux jours après le maire de Bucarest, Victor Ciorbea, au poste de Premier ministre. La chute de M. Iliescu est la première alternance démocratique qu'ait connue la Roumanie depuis soixante ans.
Chrono. : 16/06, 28/08, 17/11.
Bosnie-Herzégovine
Pour la première fois depuis quatre ans, les armes se sont tues en Bosnie. Les accords de Dayton (novembre 1995) se mettent lentement en place, mais les élections de septembre scellent la division ethnique du pays.
Si la guerre était marquée du signe de la purification ethnique, la trêve de l'automne 1995 coupe le pays en deux entités à peu près égales : au Nord-Est, la République serbe de Bosnie a Pale pour capitale ; au Sud-Ouest, une confédération croato-musulmane déséquilibrée est gouvernée depuis Sarajevo. Belgrade, désireuse de se donner une image d'artisan de paix et de moteur de la stabilisation des Balkans, demande aux Serbes de Bosnie de se faire plus conciliants. Accusé de crimes de guerre, Radovan Karadzic, le dirigeant de la République serbe, doit ainsi s'effacer sur ordre de Belgrade pour être remplacé par Biljana Plavsic, une biologiste tout aussi extrémiste que lui. Zagreb fait tardivement les mêmes recommandations aux Croates d'Herzégovine. De leur côté, les Musulmans bosniaques doivent se contenter du territoire exigu qu'ils contrôlent pour réinstaller leurs réfugiés.
Pour cause de campagne électorale aux États-Unis, les Américains souhaitaient que des élections soient organisées avant la réélection de Bill Clinton. Les élections législatives ont donc lieu dans un climat tendu le 14 septembre. Durant la campagne électorale, les trois partis nationalistes (SDA, Parti d'action démocratique des Musulmans ; SDS, Parti démocratique serbe ; HDZ, Communauté démocratique croate) font tout pour empêcher les « partis citoyens » de faire campagne. Ces derniers, influents dans les grandes villes industrielles, militent pour une Bosnie multiethnique, multiconfessionnelle et multiculturelle. Comme en 1990, à l'époque en prélude à la guerre, les partis nationalistes remportent les élections dans des conditions fort peu démocratiques. Alors que les observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), incapables de quantifier le corps électoral à un demi-million près, considèrent que les élections se sont déroulées normalement, des observateurs indépendants relèvent des taux de participation qui oscillent entre 98 et 103 %...
Après les élections, une présidence collégiale se met en place : elle est composée du Musulman Alija Izetbegovic, du Croate Kresimir Zubak et du Serbe Momcilo Krajisnik, qui, dès le 5 octobre, refuse de se rendre à la cérémonie d'intronisation. Malgré ce début peu prometteur, les Américains considèrent qu'ils peuvent commencer à retirer leurs premiers contingents, conformément aux accords de Dayton : le retrait des troupes débute quatre jours plus tard. Fin décembre, l'IFOR (Implementation Force) est déjà passée de 60 à 30 000 hommes.
Washington, qui veut se retirer rapidement du terrain bosniaque, obtient le renvoi du vice-ministre de la Défense, le Musulman Hasan Cengic, jugé trop proche de l'Iran. Via Belgrade, le général criminel de guerre serbo-bosniaque Ratko Mladic est limogé le 9 novembre, même si, très populaire dans l'armée, il ne quitte la scène que vingt jours plus tard. Les extrémistes trop voyants sont donc éliminés des trois camps, mais il n'en reste pas moins que les adeptes d'une Bosnie ethniquement pure, dans chacune de ses parties, sont toujours au pouvoir, cette fois avec l'aval des Occidentaux.