Plus généralement, les pays africains bénéficient d'une embellie internationale sur le front des prix des matières premières. Les gelées brésiliennes ont favorisé une envolée des cours du café, le cacao et le coton sont à la hausse, comme le caoutchouc et l'huile de palme. Le baril de pétrole gabonais, angolais ou nigérian se négocie autour de 20 $ et la demande américaine soutient les cours du cuivre. Plus que jamais dépendant de l'évolution des marchés mondiaux des matières premières, le continent pourrait profiter de la tendance nouvelle pour s'engager, enfin, dans un mouvement de reprise.
La Banque mondiale aura fourni en 1994 une aide de 1,5 milliard de dollars (près de 9 milliards de francs) pour accompagner la dévaluation du franc CFA. Cette somme s'ajoute aux quelque 10 milliards de francs programmés par le FMI et à l'effacement de 25 milliards de francs de dettes consenti par le gouvernement français.
CFA
Selon un bilan officiel, cinq personnes – quatre membres des forces de l'ordre et un civil – ont été tuées et une dizaine de policiers, gravement blessés, au cours des émeutes du 16 février à Dakar, consécutives à la dévaluation du franc CFA.
Café
En avril, le cours du café n'atteignait pas 860 $ la tonne à Londres ; à la mi-septembre, la tonne de café se négociait à 3 955 $, retrouvant un niveau perdu de vue depuis sept ans.
L'ONU embourbée
Acteur récent sur la scène politique africaine, l'ONU n'a obtenu aucun résultat probant. En Somalie, le mandat de l'ONUSOM II (Opération des Nations unies en Somalie) a été renouvelé en mai alors que les responsabilités de la guerre entre Casques bleus et partisans du général Mohamed Farah Aïdid semblent partagées, selon une commission d'enquête plutôt sévère pour l'action des Nations unies. Les militaires américains ont quitté Mogadiscio en mars, détestés, amers, et les pays occidentaux ont retiré tous leurs soldats, signifiant leur désintérêt pour la question somalienne. Les troupes onusiennes, désormais uniquement composées de militaires asiatiques et africains, sont toujours menacées et la multiplication des affrontements entre factions rivales conduit l'ONU à envisager le retrait de sa force armée, alors qu'aucun accord politique durable entre les clans somaliens n'apparaît possible dans l'immédiat.
En Angola, où le quart de la population, soit plus de 3 millions de personnes, a besoin d'une aide urgente, le conflit n'est pas mieux réglé. Le PAM (Programme alimentaire mondial) des Nations unies a été interrompu en juin en raison de l'attitude hostile des rebelles de l'UNITA (Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola), dont le chef, Jonas Savimbi, a refusé l'offre de partage des responsabilités formulée lors des négociations interangolaises de Lusaka (Zambie). Les combats entre l'armée gouvernementale et l'UNITA ont repris et tourné, en novembre, à l'avantage du pouvoir de Luanda.
Au Soudan, l'ONU n'est pas plus efficace. La guerre civile ravage toujours les provinces méridionales et la situation est devenue complexe. Quatre séries de pourparlers entre le gouvernement de Khartoum et l'APLS (Armée populaire de libération du Soudan) ont échoué, la junte islamiste refusant de discuter de l'autodétermination du Sud et du statut des religions dans le pays. De plus, l'APLS n'a pas réussi à fédérer toutes les populations noires, qui se méfient des Dinka, groupe le plus important, et de violents combats opposent les peuples du Sud entre eux, de sorte que le pouvoir central est aujourd'hui en position de force.
Au Liberia, où les Nations unies supervisent la force ouest-africaine d'interposition (ECOMOG) chargée de désarmer les organisations en guerre civile depuis décembre 1989 (150 000 morts selon l'ONU), un Conseil d'État est entré en fonction en mars, mais les combats ont repris et il a fallu attendre la signature d'un nouvel accord, en septembre, à Akosombo (Ghana), prévoyant des élections générales en octobre 1995, pour que des perspectives de paix soient esquissées. Finalement, le seul succès dont pourrait se prévaloir M. Boutros Boutros-Ghali est le retour de la paix civile au Mozambique depuis la signature de l'accord du 4 octobre 1992 entre le FRELIMO et la RENAMO. Les combattants sont désormais démobilisés et les élections ont eu lieu dans le calme en octobre, les responsables de la RENAMO ayant accepté par avance le verdict des urnes, qui lui a été défavorable.
L'épidémie de choléra qui se propage en Somalie fait craindre le pire, a indiqué l'organisation humanitaire Action internationale contre la faim (AICF) dans un communiqué publié le 29 mars à Paris.
Factions
Au moins dix-sept personnes ont été tuées et de nombreuses autres blessées les 2 et 3 septembre au cours de combats entre factions rivales à Baidoa et Kisimayo (Somalie).
Tueries
Un représentant de l'ONU a affirmé que 25 000 personnes ont été tuées au cours de l'année 1993 à Cuito, au centre de l'Angola. Selon une source officieuse, au moins 15 millions de mines se trouvent cachées dans le pays et il faudra dix ans pour les désamorcer.
Soudan
Les combats dans le Sud entre les factions rivales de l'APLS et les affrontements entre Dinka et Nuer ont fait plus de mille morts depuis le mois de juillet et provoqué le déplacement de milliers de personnes. Menacées par une famine de grande ampleur comparable à celle de 1992 (300 000 morts), les provinces méridionales demeurent isolées.
Liberia
Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a indiqué le 28 septembre que près de 100 000 Libériens ont fui vers la Guinée et la Côte d'Ivoire en raison des combats dans le nord-est du pays.
Anciens et militaires contre la démocratisation
La multiplication des scrutins électoraux pluralistes débouchant sur la constitution de majorités de gouvernement et les transitions sans heurts sont certes des signes encourageants. Au Botswana, en Guinée équatoriale, en Guinée-Bissau, au Malawi, en Namibie, au Togo, en Ouganda, des élections libres ont eu lieu, ou auront lieu fin 1994. Les dirigeants ivoiriens ont réussi à assurer la délicate succession de Félix Houphouët-Boigny, dont le décès a été annoncé le 7 décembre 1993, dans le respect de l'État de droit. Cependant, nombre d'exemples montrent que l'ouverture démocratique demeure fragile.