Ces querelles internes au gouvernement ont pour fond les profondes divergences de vues entre le chef de l'État, Vaclav Havel, partisan fervent de la « société ouverte », et le Premier ministre Vaclav Klaus, partisan d'un pouvoir central fort.
Tourisme
Avec plus de 50 millions de visiteurs par an, Prague est devenue l'une des premières destinations touristiques du monde et le tourisme, une des principales ressources d'importation du pays. Dépassées par un tel afflux, les autorités consacrent près de 300 millions de francs à l'entretien du patrimoine, ce qui est notoirement insuffisant. Pour remédier à une telle situation, on a restitué 200 châteaux et 50 monastères à leurs anciens propriétaires.
Slovaquie
Après avoir durement subi les effets de la partition (baisse du PIB de 3 % en 1993, 23 % d'inflation et 14,4 % de chômage), le nouvel État slovaque fait, lui, cette année, l'expérience de la transformation des élites communistes. Celles-ci ont opté pour un nationalisme à la fois traditionnel et « nouveau », plutôt que pour un socialisme démocratique de transition, tourné vers l'intégration européenne. Le gouvernement de Vladimir Meciar (ex-communiste et nationaliste), formé en octobre 1993, est renversé de justesse par le Parlement de Bratislava, en mars. À peine établi, le gouvernement de Josef Moravcik, ancien ministre des Affaires étrangères tchécoslovaque puis slovaque, connu pour sa modération, doit de nouveau affronter les partisans de M. Meciar, qui s'opposent à son projet de loi d'ouverture envers la minorité hongroise. À l'automne, ils finiront par avoir raison de lui aux élections législatives anticipées. Après une campagne musclée et démagogique, M. Meciar et son parti (Mouvement pour une Slovaquie démocrate, HZDZ) ont ainsi pris leur revanche : ces premières élections libres dans l'histoire de la Slovaquie donnent près de 35 % des voix au HZDZ, tandis que le Parti de la gauche démocratique (SDL, social-démocrate, ex-communiste) en réunit à peine 10,4 %. Le nouveau parti de gauche des Travailleurs slovaques plafonne à 7,5 % et les partis de la minorité hongroise, à plus de 10 %. Aussitôt, Vladimir Meciar en appelle à la démission du président Michal Kovak, afin de restaurer la « stabilité politique ». Il indispose ainsi une grande partie de la classe politique slovaque et peine à former son gouvernement. Le 22 octobre, il subit un nouveau revers en n'obtenant qu'une participation réduite (moins de 20 %) au référendum qu'il avait lancé pour invalider les privatisations, sous le prétexte que la transparence financière de ces opérations n'avait pas été suffisante. Le 3 novembre seulement, M. Meciar présente la coalition de gouvernement qu'il a constituée avec le Parti national slovaque, ultra et xénophobe, et le « soutien sans participation au nouveau gouvernement » de l'Association des ouvriers, parti qualifié de « très démagogique ». On s'interroge sur l'avenir de cette coalition « nationale-populiste », dont les partisans ont aussitôt déposé sur le bureau de l'Assemblée un projet de loi visant à annuler toutes les privatisations.
Roumanie
Après quatre années difficiles, la Roumanie redresse son économie, en partie grâce à une politique monétaire et budgétaire rigoureuse. Si le chômage a dépassé les 11 %, la création d'un marché interbancaire de devises a stabilisé le leu face aux devises étrangères (de 1989 à 1994, la monnaie nationale s'était dévaluée de plus de 4 000 % face au dollar). Cela a encouragé le FMI à accorder, en mai, une aide financière (1,5 milliard de dollars à venir dans le courant de 1995). En outre, le pays a bénéficié d'une conjoncture interne et externe favorable : les exportations ont augmenté de 40 %, et l'industrie (+ 1,3 %) et l'agriculture (+ 12,4 %) ont redémarré. Sur le plan politique, l'année a été marquée par l'échec de la tentative de destitution du président Ion lliescu, en juillet, et par l'entrée controversée des ultra-nationalistes au gouvernement (août). Les ministères de l'Agriculture et des Communications ont ainsi été donnés à des représentants du PUNR (Parti de l'union nationale de Roumanie). Pour le gouvernement, sans franche majorité au Parlement, cette alliance était nécessaire afin de resserrer les rangs. Enfin, les questions du programme industriel et de la privatisation de près de 3 000 sociétés publiques en cours de règlement doivent montrer la volonté du pouvoir de rattraper le retard économique qui sépare encore la Roumanie des autres pays de l'Est.
Bulgarie
À la traîne derrière ses voisins, la Bulgarie met du temps à accélérer le processus de transition enclenché en 1991. Sa situation économique pâtit en premier lieu d'une dette extérieure estimée à 13 milliards de dollars. La réduction de sa dette privée (50 %) accordée en novembre 1993 et un troisième accord de rééchelonnement de la part de ses créanciers publics devraient cependant alléger son budget. De plus, l'essor du secteur privé a permis de réduire le taux de chômage à 16 %. Le contexte politique encore fragile contribue également à la lenteur de la réalisation des réformes (privatisations, restructuration du système bancaire) nécessaires pour réussir l'avenir postcommuniste du pays. Le gouvernement centriste de Luben Berov, au pouvoir depuis 1992, n'a fait que décevoir : la hausse des prix (chauffage, électricité) liée à l'introduction d'une TVA, la lenteur du processus des privatisations, l'inefficacité de sa lutte contre la corruption et de son action contre la crise dans l'armée, notamment, ont contribué à provoquer sa démission, en septembre. D'importantes grèves et manifestations, en mai, avaient déjà ébranlé le fragile consensus gouvernemental. En octobre, le président Jeliou Jelev (UFD, anticommuniste) dissout le Parlement et organise des élections anticipées le 18 décembre.
Chrono. : 11/01, 11/03, 8/05, 27/05, 29/05, 24/06, 1/08, 11/08, 2/10, 17/10, 18/12.
Alexandra Viatteau
Chargée de cours à l'Institut français de presse à l'université Paris II, commentatrice à la Croix