« Photographies en miettes », organisée à Paris au Centre Pompidou, traduit – au moins déjà dans son titre – la morosité actuelle dont semblent être affligés les photographes qui se posent, face à leur discipline, en tant que créateurs plutôt que témoins privilégiés des événements. Cette exposition regroupait plusieurs générations de photographes – comme Brassaï, William Klein et beaucoup d'autres moins connus, voire anonymes – qui ont travaillé sur des supports non traditionnels tels que des papiers sensibles déchirés, froissés, ou à partir de mélanges et de découpages de négatifs... D'où le titre de cette exposition, qui souligna malgré elle le mariage inconfortable de l'art et de la pellicule.

Dans un tout autre registre, le Vatican nous a offert un regard sur lui-mêmes avec une exposition intitulée... « À l'intérieur du Vatican ». Des portraits d'enfants de chœur jouant au flipper ou rivalisant avec les chats de la cité sainte et des nonnes affairées dans les cuisines du palais, bref une couche de sucre glace sur cette année de rêves empoisonnés.

Sur le tableau des arrivées et des départs, signalons, parmi les nouveaux venus, Bernard Balmot, exassistant de Irina Ionesco, qui tâtonne dans la direction de la photo dite « créative » avec un certain succès, alors que l'année a vu disparaître Edwin Land (81 ans), le « papa » du Polaroid (l'idée de chercher un procédé de développement plus rapide lui était venue grâce à l'impatience de sa petite-fille devant la lenteur du tirage traditionnel), et Aaron Sixkind (87 ans), dont les photos en noir et blanc d'objets usuels pris en gros plan ont donné au monde des images abstraites saisissantes. Son travail était apparenté à celui des peintres de l'école abstraite expressionniste dont certains étaient de ses amis.

Patricia Scott-Dunwoodie

Le patrimoine et son budget

L'opposition a longtemps reproché au ministre de la Culture de préférer les paillettes aux vieilles pierres. Le budget 1992, présenté à l'automne (12,98 milliards de F, 0,98 % du budget de l'État), infirme ce jugement. Le patrimoine se taille, cette année, la part du lion. Dans un contexte plutôt morose, il fait un bond de 119 millions de F. Les crédits d'investissements (restaurations) progressent de 10 % et ceux consacrés à l'entretien des monuments historiques de 5 %. Les autorisations de programmes ouvertes pour restaurer et inventorier le patrimoine monumental, hors archéologie, atteignent 1,55 milliard de F, alors que la stricte application de la loi-programme (votée en 1988 à l'initiative de François Léotard, alors ministre de la Culture) n'exigeait que 1,2 milliard de F. La rénovation des façades du palais du Louvre – en cours – n'entrant pas dans cette enveloppe, Christian Dupavillon, le nouveau directeur du Patrimoine, peut donc se montrer satisfait. D'autant plus qu'une série de réformes élaborées sur son initiative va maintenant entrer en vigueur.

Une plus grande efficacité

Ainsi, la Caisse des monuments historiques, qui assure la gestion et la promotion d'une centaine de monuments appartenant à l'État (du Mont-Saint-Michel à l'arc de triomphe de l'Étoile) lui est désormais rattachée. Ainsi, les services de protection des monuments historiques sont plus étroitement liés à ceux de l'inventaire, qui n'auront désormais plus l'impression de travailler pour le seul bénéfice des rongeurs. La Commission supérieure des monuments historiques est à son tour réorganisée, l'inventaire participant activement au choix des « modèles » à préserver (dans le cas de la sauvegarde du patrimoine industriel, par exemple). Enfin, les bâtiments construits depuis une cinquantaine d'années pourront être plus efficacement protégés (l'Arche de la Défense). Réforme encore dans le domaine de la procédure pour accélérer les travaux et diminuer les navettes stériles entre le ministère et les propriétaires. Ces derniers auront d'ailleurs la possibilité de choisir, hors de leur zone géographique, l'architecte des Monuments historiques de leur choix (ces derniers sont actuellement une soixantaine en France).