Panorama

L'économie mondiale s'enfonce-t-elle dans le marasme ou va-t-elle vers la reprise ? Telle est l'interrogation majeure de l'année.

Les pays industrialisés enregistrent un ralentissement sensible de leur activité économique et leur croissance, pratiquement nulle au premier semestre, reste faible tout au long de l'année, dépassant à peine 1 %. Non seulement la récession perdure dans les pays anglo-saxons (États-Unis, Royaume-Uni) et le ralentissement persiste au-delà des prévisions dans les pays européens, mais les deux locomotives que sont l'Allemagne et le Japon s'essoufflent à leur tour. Pire, la reprise attendue depuis la fin de la guerre du Golfe n'est pas au rendez-vous, ou reste bien molle, en dépit de l'assouplissement des politiques monétaires et d'un pétrole au prix devenu à nouveau raisonnable (aux alentours de 18/21 dollars le baril). La dégradation de l'environnement international – et notamment la diminution des échanges commerciaux – aggrave la situation économique et sociale déjà très fragile des pays en voie de développement et accentue l'effondrement économique des pays d'Europe centrale et orientale.

La morosité

Le ralentissement économique puis le choc de la guerre du Golfe ont ébranlé la confiance des acteurs économiques. Confrontées à la dégradation de leurs résultats, les entreprises préfèrent différer leurs investissements et procéder à des opérations de restructuration et de redressement, synonymes de licenciements, au nom de la compétitivité. Certains secteurs, comme l'électronique mondiale, actuellement dans la tourmente, sont particulièrement touchés par la concurrence. Alors que le chômage s'élève à nouveau et que le pouvoir d'achat ralentit sa progression, les ménages réduisent leurs dépenses de consommation. Le fléchissement de la demande privée est accentué par l'accumulation excessive de dettes. Non seulement les agents économiques préfèrent rembourser et ne plus emprunter – d'autant que persistent des taux d'intérêt réels élevés –, mais les banques en crise, échaudées par la multiplication des défauts de paiement dus au surendettement, préfèrent assainir leurs comptes et sont plus réticentes à consentir des crédits à l'économie.

Cette contraction du crédit (credit crunch), qui affecte la plupart des pays industrialisés, frappe plus particulièrement les États-Unis et explique l'Arlésienne de la reprise, celle-ci étant bloquée en dépit de la baisse réitérée des taux d'intérêt, rendue possible par la maîtrise de l'inflation. Et les perspectives économiques sont d'autant plus préoccupantes que la marge de manœuvre des gouvernements est faible, les déficits budgétaires étant déjà très élevées dans ce contexte de moindres rentrées fiscales.

Dans les pays de l'Est, la transition vers l'économie de marché s'est vite révélée non seulement douloureuse, mais surtout difficile, longue et incertaine. Elle s'est accompagnée d'une forte chute de la production, des revenus, du niveau de vie et d'une poussée de l'inflation et du chômage. Les effets négatifs ont été amplifiés par l'effondrement des échanges avec les anciens partenaires du CAEM (Conseil d'assistance économique mutuelle) ou du COMECON dissous en juin, et par le mauvais environnement international. L'assainissement économique bute sur la pénurie d'investissements et l'insuffisance de l'aide. Le sauvetage par les Occidentaux de l'ancienne Union soviétique, qui traverse une très grave crise économique et une profonde crise financière, devient même d'une grande urgence.

Les institutions internationales (FMI, Banque mondiale, BERD, CEE) et les États décident de se mobiliser sous réserve que les pays de l'Est entreprennent les réformes nécessaires au passage à l'économie de marché. De même, l'unification de l'Allemagne se révèle plus coûteuse et plus délicate que prévu à cause de l'écart croissant entre une Allemagne de l'Ouest florissante, en dépit d'un certain ralentissement, et une ex-Allemagne de l'Est en pleine déconfiture, même si certains signes de reprise se manifestent en fin d'année.

Les défis et les incertitudes

Tous ces changements posent de nouveaux défis à la CEE qui voudrait s'affirmer comme le véritable pilier du nouvel espace européen en recomposition. Alors que se multiplient – et se multiplieront – les candidatures, les divergences restent fortes entre les Douze. Les négociations piétinent donc souvent ; mais la volonté d'accélérer l'intégration et la construction de l'Europe a été renforcée par la conclusion des deux traités sur l'Union politique et l'Union économique et monétaire (UEM) lors du Conseil tenu à Maastricht au mois de décembre.