Des ombres, cependant, à ce tableau : la baisse du pouvoir d'achat et de la consommation intérieure, un nombre trop élevé de chômeurs et le poids de la fiscalité. Les taxes représentent en Belgique 31,9 % du PNB et on peut comprendre qu'à la veille d'une confrontation électorale le gouvernement se soit décidé à promettre — pour l'année 1986 — un allégement des barèmes fiscaux, qui seraient alors liés à l'indice des prix.

Le point le plus délicat reste, enfin, celui du poids de la dette publique et des emprunts extérieurs. Avec un montant nominal de 4 000 milliards de FB, la dette est devenue le point le plus important du budget national (22,7 %), derrière les dépenses sociales. Face à un déficit de 500 milliards (10,3 % du PNB), le gouvernement a adopté un plan triennal d'austérité et il envisage la privatisation, à l'anglaise, de certaines entreprises publiques, dans le secteur des transports et des télécommunications particulièrement. Cela ne suffit pourtant pas, et bien des augures n'hésitent pas aujourd'hui à prophétiser que la situation des finances publiques sera le principal problème belge de demain.

Le débat n'est pas neuf, qui veut accorder la priorité à l'économique, au primum vivere, ou bien céder à la passion linguistique et communautaire. L'année 1984 aura permis d'en percevoir l'acuité, sans pour autant y apporter de réponse définitive.

Guy Daloze

Danemark

L'austérité réussit

Les élections législatives anticipées du 10 janvier 1984 sont historiques pour deux raisons principales. Pour la première fois depuis 1924, un gouvernement de coalition bourgeois au pouvoir résiste à l'opposition social-démocrate et sort renforcé d'une consultation nationale. Deuxième enseignement du scrutin : le parti conservateur, force dominante du gouvernement, réalise son plus beau score depuis plus de trente ans. Il recueille 23,4 % des suffrages (+ 8,9 %) et le nombre de ses députés passe de 26 à 42.

La crise jugulée

De l'avis général, ce succès retentissant est dû en grande partie à la popularité du Premier ministre, Poul Schlüter, un libéral dont la politique de rigueur a donné rapidement des résultats spectaculaires.

L'inflation, encore à deux chiffres en 1982, a été ramenée à moins de 6 % en 1984 et le déficit budgétaire qui se creusait de façon alarmante est passé de 60 à 48 milliards de couronnes en deux ans. Dans le même temps, la baisse radicale des taux d'intérêt a stimulé les investissements et l'activité industrielle. La croissance du revenu national, pour la deuxième année consécutive, se situe aux alentours de 3 % en 1984. Le résultat du scrutin du 10 janvier montre que les Danois sont prêts à consentir des sacrifices, sous forme par exemple d'une désindexation de leurs salaires sur les prix, à condition que ces sacrifices portent leurs fruits.

Gouvernement minoritaire

Le succès des conservateurs ne permet pas toutefois à la coalition, en place depuis l'automne 1982, de devenir majoritaire au Parlement, car il se fait principalement aux dépens de leurs partenaires du Centre démocrate, qui perd 7 sièges (8 au lieu de 15) par rapport à la consultation de 1981. Tout à fait à droite, les poujadistes du Parti du progrès, animé par l'avocat Mogens Glistrup — en prison pour fraude fiscale —, s'effondre. Il n'obtient que 6 sièges au lieu de 16 et 3,6 % des suffrages contre 8,9 % en 1981. Tout indique que le mouvement populiste, qui avait eu une certaine audience ces quinze dernières années, est en voie de disparition, et l'establishment politique se réjouit de la défaite des trouble-fête du parti des mécontents, anti-impôts. Au sein de la coalition quadripartite, les libéraux, qui sont les artisans de la stratégie de redressement économique, gagnent 2 sièges et comptent 22 députés dans la nouvelle assemblée.

À gauche, les sociaux-démocrates, qui avaient provoqué les élections anticipées en refusant de voter le projet de budget, demeurent le plus grand parti danois (31,6 % des voix), mais ils perdent 3 sièges (56 contre 59), tandis que le Parti socialiste populaire (21) et les socialistes de gauche (5) consolident leurs positions.