En mai, Valéry Giscard d'Estaing, qui a reçu en vain le mois précédent le ministre soviétique des Affaires étrangères, rencontre impromptu Leonid Brejnev à Varsovie. Les points de vue demeurent toujours aussi éloignés, mais les Américains maugréent contre la dispersion des Occidentaux et l'égoïsme sacré de la France. Le voyage présidentiel d'Helsinki, en juin (prévu de longue date), est parfois présenté comme le symbole de ces équivoques.
Il faut le deuxième sommet de Venise, celui des pays industriels, fin juin, pour que le climat s'assainisse entre la France et les États-Unis. Il faut la conférence de presse de Valéry Giscard d'Estaing, le 26 du même mois, pour que la position française paraisse plus claire aux yeux de tous.
Au bout du compte, la politique étrangère de la France, au beau milieu de la crise mondiale, est devenue un fait de politique intérieure primordial.
Car le parti communiste apparaît partiellement neutralisé par le contact maintenu, malgré les tensions diplomatiques, entre Paris et Moscou. Le parti socialiste et le RPR blâment l'absence de clarté et de vigueur, mais ne proposent pas d'option franchement différente. La politique extérieure de la France provoque ainsi davantage de dissentiments que d'alternatives. Elle crée par gros temps un réflexe de consensus autour de l'exécutif. Elle sert le président-candidat, en l'aidant notamment à faire passer au second plan le mécontentement provoqué par la situation économique et sociale.
En revanche, les Français, eux, ne savent plus très bien à quel saint se vouer. Ils voient la situation se compliquer et les partis se déchirer. Ils ne suivent apparemment guère les petits courants. Gauchistes, trotskystes, jobertistes, extrême droite n'ont pas retenu leur attention. Seuls, les écologistes ont parfois, comme à Plogoff, su mobiliser une foule. Le régionalisme, sévèrement réprimé, n'a pas visiblement progressé. Les électeurs français regardent d'un œil critique des grands partis qui ne les satisfont plus guère, sans s'intéresser davantage aux formations plus marginales. Ce n'est pas de très bon augure pour leur participation à venir. L'ombre d'un doute engendre sinon de l'indifférence, au moins de la passivité. Et ceci ne vaut pas beaucoup mieux que cela.