Les projets, enserrés dans la rigueur classique du plan d'ensemble, témoignaient de l'esprit du temps : loggias, pergolas, fenêtres en demi-cintre et bow-windows.
Naissance d'une rue
À une échelle beaucoup plus modeste, les 209 logements sociaux construits à Paris par Georgia Benamo et Christian de Portzamparc sont la première manifestation éclatante du retour au cadre urbain.
Coincé entre les rues Baudricourt et Tolbiac, dans le 13e arrondissement, à l'ombre de l'université (béton brut et verre fumé) d'Andrault et Parat, le terrain était ingrat. Dénichés par la régie immobilière de la Ville de Paris à l'issue d'un concours du plan-construction, les jeunes architectes ont mis, pendant quatre ans, toute leur énergie à tirer parti de cette occasion. Au lieu de quelques tours tronquées au milieu d'un jardin maigrelet, les architectes ont voulu réparer ce morceau de ville : le tracé d'une rue ancienne, la rue des Hautes-Formes, la bien nommée, a été restitué : une placette, quatre arbres, des lampadaires, des passages, sont là, sans chichis, pour recréer une ambiance citadine.
L'exposition des appartements, la variété des vues, la diversité des plans, le soin apporté aux menuiseries, sanitaires, revêtements de murs et de sols, complètent ce portrait d'une opération sociale hors du commun. À l'extérieur, de grandes baies divisées par une élégante menuiserie métallique alternent avec des ouvertures plus petites, dans un désordre apparent mais soigneusement agencé.
Des architectes jeunes, un immeuble social, une architecture exceptionnellement intéressante, le tout à Paris. Un petit miracle.
Bercy, c'est fini
Un coin de province en plein Paris, une ville en prison derrière ses grilles, un haut lieu du pittoresque urbain. Les entrepôts de Bercy à Paris, entre la Seine et les voies de chemin de fer de la gare de Lyon, se meurent doucement. Le terrain appartient à la ville, qui cesse progressivement de renouveler les baux des marchands de vin qui donnaient à ce lieu sa justification et sa vie. Progressivement, les entrepôts deviennent le refuge des amateurs de mystère urbain, une sorte de friche dans la ville qui manque parfois cruellement d'espaces libres.
Sans respect pour le génie du lieu, le maire de Paris, J. Chirac, s'est saisi de ces terres. Avant qu'un plan d'ensemble soit défini, il annonce qu'on construira à Bercy un vél d'hiv, grand aménagement sportif dont Paris a besoin et qui revivifiera l'est de la capitale. Une mission d'étude est confiée à Maurice Doublet, ancien préfet de la région parisienne.
Pourquoi tant de précipitation ? Comment les platanes centenaires qui se souviennent d'avoir orné le parc du somptueux château de Bercy résisteront-ils à un aménagement aussi massif ? Comment ces rues charmantes, pavées, bardées de maisons provinciales et désuètes, ces cabanes en planche qui rappellent les guinguettes d'autrefois supporteront-elles l'assaut ? Ne peut-on souffler un peu, réfléchir avant de lancer les bulldozers ? À Bercy, Paris respire.
Les Halles, ça continue
Le dernier schéma des Halles, présenté par Jacques Chirac le 16 février 1979, sera-t-il le bon ? Après avoir évincé à l'automne l'architecte Ricardo Bofill, dont l'immeuble de logements avait pourtant obtenu le permis de construire, le maire de Paris a proposé l'aménagement d'un jardin ordonné en diagonale, d'une place en demi-cercle ouvrant sur l'église Saint-Eustache, des immeubles en gradins bas autour du centre commercial semi-souterrain (ouverture prévue en septembre 1979). Une piscine et un gymnase sont prévus en sous-sol, mais certaines surfaces ne sont pas encore affectées.
Le long des rues Rambuteau et Berger, qui longent le jardin, les immeubles auront le gabarit habituel dans le centre de Paris. Leur architecture n'est pas encore définie : elle sera, dit le maire, « simple et de bon goût ».
Si les associations de quartier approuvent dans l'ensemble ce schéma qui rétablit le tracé des rues et qui ne brille ni par l'audace ni par le monumentalisme, les architectes estiment que sa pauvreté d'inspiration est navrante.